Alors que des preuves de l’utilisation d’armes chimiques à Douma le 7 avril s’accumulent, et que la France et les Etats-Unis ont demandé une réunion d’urgence du conseil de sécurité de l’ONU, une attaque par missiles sur la base aérienne syrienne de Tiyas, également appelée T4, a été menée dans la nuit du 8 au 9 avril, faisant plus d’une dizaine de morts parmi les militaires syriens et iraniens présents sur place. Après avoir initialement accusé les Etats-Unis et la France, la Russie, et la Syrie, pointent désormais du doigt Israël, dont deux F-15 auraient tirés 8 missiles de croisières contre cette base, afin d’empêcher « la création d’une base iranienne » à proximité de l’Etat Hébreux.
Les tensions entre la Russie et l’occident, et notamment les Etats-Unis, n’ont cessé de se dégrader depuis l’intervention en Crimée et dans le Donbass des forces russes. Ces dernières semaines, elles sont encore montées d’un cran, cette fois au sujet du régime Syrien coupable, selon les capitales occidentales, d’utiliser des armes chimiques contre les populations civiles en rébellion. Mais d’autres facteurs connexes sont intervenus pour accentuer ces tensions, comme l’affaire Skipal au Royaume-Unis, ayant entrainé l’expulsion de plus de 100 diplomates des représentations plénipotentiaires russes en occident, et l’expulsion en représailles d’autant de diplomates occidentaux de Russie. Vendredi 6 avril, le département d’Etat américain a également annoncé de nouvelles sanctions contre des personnes et entreprises proches du pouvoir russe, lié à l’ingérence russe dans les élections présidentielles US de 2016.
Ainsi, plusieurs rapports, relayés sur Twitter, ont signalé le week-end du 7 et 8 avril, la mise en alerte des forces russes en Syrie, et notamment des batteries S-400 et S-300. L’aviation de chasse russe présente sur place aurait entrepris de mettre en place des patrouilles de combat, avec 4 des 12 Su-30 présents sur place, en permanence en l’air, et équipés pour le combat Air-Air. Des patrouilles de Su-24M auraient sillonné la méditerranée Orientale pour détecter des déploiements de forces navales occidentales, susceptibles d’annoncer une frappe prochaine, alors que deux avions de patrouille maritime et de lutte anti-sous-marine se seraient relayés pour détecter et/ou éloigner les sous-marins occidentaux des abords syriens.
D’autres rapports, toujours sur Twitter, ont fait état de la mise en alerte de plusieurs unités russes en Russie, notamment des troupes aéroportées, et certaines unités proche du Donbass, dans l’Oblast de Rostov-sur-le-don, générant un début de mouvement de panique en Ukraine orientale. Que ces rapports soient avérés ou non, on comprend, du simple fait de leur existence, de l’extrême fébrilité russe face à la réaction occidentale, que ce soit en Syrie comme en Ukraine.
Dans ce contexte, l’attaque Israélienne, s’il est avéré que ce soit bien eux qui sont à l’origine de cette frappe, aurait pu déclencher une série d’évènements aux conséquences graves. Mais avant cela, on peut se demander pourquoi les autorités Syriennes ont décidé d’utiliser une nouvelle fois des armes chimiques, sachant qu’il s’agissait là d’une provocation inutile contre l’occident ?
En s’interrogeant sur le sujet, on se doit de remarquer la réaction de la Turquie, qui après avoir ignoré les mises en garde syriennes et russes contre la poursuite de l’opération « Rameau d’Olivier » en Kurdistan Syrien, a activement joué l’apaisement ce week-end, allant jusqu’à, officieusement, demander aux occidentaux de ne pas intervenir, car la Russie était prête à répliquer. On peut donc se demander si cette attaque au gaz n’avait pas pour but, non pas de provoquer inutilement l’Occident, mais d’envoyer un message aux Turcs et de forcer la Russie à stopper son nouvel allié en Syrie.
Quoiqu’il en soit, que ce soit l’usage de gaz par le régime syrien, l’entêtement turc contre les kurdes, ou la frappe israélienne, nous avons assisté ce week-end à un enchainement d’évènements, dont les conséquences auraient pu, et peuvent encore être, d’une gravité sévère. Les fortes baisses du rouble et de l’indice boursier moscovite MOEX à l’ouverture, ce matin, sont des conséquences directes de ces craintes croissantes d’un affrontement direct entre la Russie et les Etats-Unis.