Lors d’une visite à la commission industrielle de Défense, le président V.Putin a déclaré qu’il était désormais temps pour la Russie de développer les armes du futur pour son armée. Cette déclaration peut surprendre de la part du pays ayant développé ces dernières années le char de nouvelle génération T-14, le chasseur de 5eme génération Su-57, ou le système anti-aérien de nouvelle génération S-500, sans parler des missiles hypersoniques Kinjal et de la torpille dronisée Poséidon.
Cette déclaration s’inscrit, pourtant, dans la reprise d’une véritable course aux armements entre les grandes nations militaires, Etats-Unis et Chine en tête, et dont la Russie entend bien rester au contact.
En effet, au delà de l’augmentation très sensible de son budget, les armées américaines ont lancé, ces trois dernières années, un nombre record de programmes de Défense de nouvelle génération, allant du blindé au missile hypersonique, en passant par les armes spatiales et les drones. La Chine est loin d’être en reste, avec un effort particulièrement marqué en matière spatial, de drones de combat, d’électromagnétisme et d’intelligence artificielle. La Russie, elle, a concentré ses moyens pour atteindre rapidement un avantage potentiel important vis-à-vis de l’OTAN, en modernisant massivement des équipements existants, comme les chars T-72 et T-90, les avions de combat dérivé du Su-27, et les sous-marins Kilo. Mais cet avantage décroitra au delà de 2030, lorsque les équipements de nouvelles générations américains entreront en service, comme les drones de combat ou les blindés de nouvelle génération.
Il est donc indispensable pour Moscou d’anticiper cette évolution technologique en cours, d’autant que le budget US permettra une production massive et rapide des équipements, dont le but essentiel sera de contrer les évolutions chinoises, qui elles aussi seront nombreuses et massivement produites.
Eu égard à son économie et sa démographie, la fenêtre d’action russe est donc limitée, et seul un effort important dans ce domaine serait de nature à préserver le statuquo indispensable, selon les autorités russes, pour maintenir le pays dans le concert des très grandes nations.
La problématique du Kremlin n’est, à ce titre, pas très éloignée de celle des européens, ou plutôt de la partie des européens qui souhaitent construire une autonomie stratégique pour le continent. Il sera en effet, nécessaire aux capitales européennes entourant le couple franco-allemand de mobiliser volontés et moyens pour entrer dans cette course sino-américaine, au risque de se voir laisser de coté pour devenir quantité négligeable. En cela, les initiatives comme JEDI ou PESCO sont déterminantes, bien que très insuffisamment financées aux vues des enjeux.
Une fois encore, c’est avant tout d’une réelle prise de conscience des changements en cours dans le monde dont ont cruellement besoin l’Europe et les Européens. Une fois cette prise de conscience effectuée, les moyens matériels et humains suivront. Les européens ont toujours été à la pointe de l’innovation lorsqu’ils passaient leurs temps à se faire la guerre, on imagine aisément les résultats potentiels d’une telle collaboration si toutes ces énergies étaient coordonnées et soutenues …