lundi, décembre 9, 2024

Le Racer, le coup de génie d’Airbus Hélicopters

La prochaine génération d’hélicoptères militaires sera, à n’en point douter, en rupture avec les générations précédentes. A cela deux raisons majeures : le renforcement très notable des moyens de détection et d’engagements contre des cibles terrestres et navales, obligeant les hélicoptères qui opèrent à partir de ces spots à parcourir de plus longue distance pour effectuer leurs missions, et les performances croissantes des systèmes anti-aériens, obligeant les hélicoptères à réduire au maximum leur temps de présence au dessus des zones d’engagements, et, le cas échéant, à s’en extraire le plus rapidement possible. En d’autres termes, la vitesse et le rayon d’action deviennent les facteurs clés de la survivabilité et des performances d’un hélicoptère militaire de demain. 

Pour répondre à ces enjeux, l’US Army a lancé le Futur Vertical Lift programm, destiné à remplacer l’ensemble de son parc d’hélicoptères, du OH-58 Kiowa de reconnaissance au Chinook de transport lourd. Le FVL s’est initialement consacré au remplacement des UH-60 black hawk, l’hélicoptere de manœuvre en dotation dans l’US Army, et deux projets ont été retenus pour y répondre : le V-280 de Bell, et le S-97 Raider de Sikorsky. Le V280 utilise la technologie des rotors basculants, à l’instar de l’Osprey du Marines Corps. La solution a montré ses avantages, notamment en terme de vitesse, mais également ses risques, avec un nombre important d’accident lors des phases de transition. Le S97 de Sykorsy a choisi, pour sa part, une solution avec rotors contrarotatifs et hélice propulsive, dans un mix entre les productions russes de Kamov et l’AH-56 cheyenne mort né au début des années 70. Contrairement à ce dernier, l’anti-couple, c’est à dire la force qui permet à l’appareil de ne pas tourner sur lui-même du fait de la rotation du rotor principal, est fourni par les 2 rotors principaux tournant en sens inverse. La solution apporte à coup sur un haut degré de performances, mais également un très haut degré de technicité, donc de maintenance, donc de couts.

S97 Raider de Sikorsky 2 Actualités Défense | Allemagne | Construction d'Hélicoptères Militaires
Le S97 Raider de Sikorsky emploie une configuration avec rotors contrarotatifs et hélice propulsive

Bien que ne prenant pas part à la compétition FVL car sa candidature fut rejeté par les autorités US, l’hélicoptériste franco-allemand Airbus Helicopters a lui aussi étudié les problématiques de grandes vitesses, avec le démonstrateur X3 doté d’une propulsion hybride utilisant 2 hélices en traction réparties de chaque coté du fuselage, dont l’énergie est captée sur la ligne principale, et fournissant à la fois l’anti-couple par son différentiel appliqué, et une poussée accrue pour atteindre les hautes vitesses. Le démonstrateur a ainsi atteint la vitesse de 472 km/h à 10.000 pieds d’altitude, soit plus de 150 km/h de plus que le Dauphin dont il était issu.

Cette approche est particulièrement brillante, puisqu’elle repose sur une technologie relativement simple ne multipliant pas plus que nécessaire les pièces mobiles d’un hélicoptère, tout en conférant un haut niveau de performance, simplifiant la maintenance, et diminuant les couts de l’appareil. Airbus Helicopters a entrepris, en 2017, de développer un nouveau démonstrateur basé sur cette technologie, le Racer pour Rapid Cost-effective Rotorcraft, utilisant cette fois deux nacelles propulsives permettant, selon Airbus, d’économiser jusqu’à 10% de carburant, tout en garantissant une vitesse de croisière de plus de 200 kts, ou 400 km/h.

X3 Airbus Actualités Défense | Allemagne | Construction d'Hélicoptères Militaires
Contrairement au Racer, le démonstrateur X3 utilisait des hélices tractives et non propulsives.

Etonnement, le démonstrateur européen vise d’abord et avant tout le marché de l’off-shore, un débouché traditionnel pour Airbus Helicopters, et les applications militaires de la technologies ne sont, pour l’heure, pas développées. Cette décision résulte du mode de financement européen choisi par l’avionneur, qui ne porte que sur des équipements civils. Pourtant, la logique qui pousse les Armées US à rechercher une vitesse et un rayon d’action plus importants pour leurs voilures tournantes s’applique également aux Européens, plus particulièrement à la France qui met en œuvre 3 bâtiments de projection et d’assaut amphibie utilisant, en partie, des hélicoptères pour déployer les forces à terre. 

Reste à voir donc si les armées françaises et européennes apporteront leur soutien à cette technologie remarquable, tant du point de vue opérationnel que commercial. Bien souvent en France, et plus globalement en Europe, le temps passé entre l’idée et l’application de l’idée, fait perdre une grande partie de la pertinence et des avantages exclusifs de celle-ci.  

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