Alors que Washington n’a toujours pas dévoilé la liste des sanctions qui seront appliquées à la Turquie suite à la livraison des S400 d’origine russe, c’est au tours des européens de hausser le ton contre Ankara, cette fois au sujet de Chypre. En effet, les autorités turques ont décrété être en droit d’exploiter les réserves de gaz découvertes autour de l’Ile, et ce en contradiction avec les règles internationales, qui donne à l’état independant Chypriote ce droit. La France, par l’intermédiaire du président Macron, avait déjà, il y a quelques mois, déclaré que la France se tiendrait au coté de Chypre et de la Grèce dans ce dossier le cas échéant. Mais finalement, ce sont les 27 pays européens qui font bloc derrière Nicosie, et qui menacent désormais Ankara de sanctions économiques sévères si cette dernière persistait à vouloir forer dans des eaux ne lui appartenant pas.
La réaction unanime des européens est remarquable et courageuse, car nul dans les capitales européennes n’ignore que le président Erdogan pourrait à nouveau agiter la menace d’un flot de réfugiés déferlant sur les côtes grecques si les autorités turques cessaient de contrôler cette vague migratoire (contre rétribution généreuse de Bruxelles). En dépit des mises en garde européennes, la Turquie a déjà envoyé 3 navires de forage en zone chypriote, et un quatrième navire serait en route, selon le ministre des affaires étrangères turc, Mevlut Cavusoglu. Il a également précisé que la Turquie était déterminé à « faire prévaloir les droits des chypriotes turcs, même si cela signifiait devoir utiliser la force armée », une menace explicite contre une intervention européenne dans cette affaire.
La Turquie qui, semble-t-il, est engagée sur tous les fronts, puisque le ministère de La Défense du pays a annoncé, il y a deux jours, la mise en alerte des forces stationnant à proximité de la frontière syrienne, laissant entendre qu’une opération pourrait être menée dans le nord de la Syrie, contre les Forces Démocratiques Syriennes, là ou se trouvent, précisément, les forces spéciales américaines, françaises et britanniques.
De fait, chaque jour qui passe semble éloigner encore davantage la Turquie du camps occidentale, le pays n’étant aujourd’hui plus guère soutenu sur la scène internationale que par Moscou et Pékin. Toutefois, il faut s’attendre à ce que le probable divorce d’avec l’OTAN et l’Union européenne, se fasse dans la douleur, et ce pour les deux camps. Dans ce contexte, les batteries de S400 russes réceptionnées ces deniers jours, 3 ans jours pour jours après la tentative de coup d’Etat avortée contre le président Erdogan, ce dernier accusant les Etats-Unis et l’OTAN d’avoir, si pas fomenté la révolte, en tout cas laissé faire; apparaissent comme un atout remarquable dans les mains du président turc pour tenir en respect les forces aériennes occidentales dans le rapport de force qui se profile en Syrie, en Mer Égée et en Méditerranée Orientale.