jeudi, novembre 7, 2024

L’Inde accroît sa coopération maritime avec la Birmanie

Le 29 juillet dernier, l’Inde et la Birmanie (Myanmar) ont signé un accord de coopération militaire, dans le but d’accroitre leur défense commune. Le général Min Aung Hlaing, chef de la Défense birmane, a notamment rencontré l’amiral Karambir Singh, qui dirige les forces navales indiennes.

En effet, la coopération maritime entre les deux pays a été l’un des principaux axes de développement de l’accord. New Dehli et Naypyidaw (la capitale de la Birmanie) ont ainsi exprimé leur volonté de développer une surveillance maritime commune de la région du Golfe du Bengale, de travailler de concert à la création d’infrastructures maritimes, ou encore de renforcer leur coopération de Défense.

Au cours de ces rencontres, il a de même été conclu que l’Inde fournira à la Birmanie son premier sous-marin : un submersible de classe Kilo, fabriqué par l’URSS et acheté par l’Inde dans les années 1980. Une fois rénové, le sous-marin sera livré à la Birmanie au cours de l’année 2019 et servira de bâtiment-école afin de former de futurs sous-mariniers, avec l’objectif de se procurer par la suite des bâtiments plus modernes afin de constituer une flotte. Le paiement du navire sera effectué par Naypyidaw à l’aide d’un crédit spécial proposé par l’Inde afin de permettre à la Birmanie de moderniser son armée. En effet, l’Inde cherche à se rapprocher de la Birmanie, afin d’y contrebalancer la présence de la Chine (New Dehli est l’un de ses principaux fournisseurs d’armes, avec la Chine, la Russie et Israël).

Myanmar JF 17 Actualités Défense | Contrats et Appels d'offre Défense | Equipements de Défense d'occasion
Les forces aériennes du Myanmar ont déjà perçu 6 des 16 JF-17 sino-pakistanais commandés

Faisant la jonction entre l’Asie du sud et l’Asie du sud-est, la Birmanie se trouve au cœur d’une lutte d’influence entre l’Inde et la Chine ; plus spécifiquement l’Arakan (ou État de Rakhine), situé sur la côte birmane. Pour la Chine, l’Arakan est stratégique au plus haut point : elle y fait transiter, via les pipelines du port de Kyaukphyu, le pétrole du Golfe Persique directement vers la région chinoise du Yunnan, sans avoir ainsi à le faire passer par le détroit de Malacca. Logiquement, la région de l’Arakan fait donc partie intégrante du futur « collier de perle » chinois.

L’Inde appréhende, elle aussi, la région comme un centre névralgique de la géopolitique locale. La côte arakanaise constitue l’une des principales interfaces du Golfe du Bengale ; aussi, y développer son influence est vital pour l’Inde afin d’éviter une trop forte présence de la Chine. L’intégration de la côte birmane et du Bangladesh dans un espace économique fort est ainsi primordial pour New Delhi. C’est pourquoi l’Inde mise beaucoup sur le projet Kaladan, qui a pour ambition de relier Sittwe, la capitale de l’Arakan, à l’Etat du Mizoram (situé dans les territoires excentrés du nord-est de l’Inde), mais aussi à Calcutta et Chennai, les principaux ports de sa côte orientale.

pipelines du port de Kyaukphyu Actualités Défense | Contrats et Appels d'offre Défense | Equipements de Défense d'occasion
Le port de Kyaukphyu accueille les pipelines alimentant la région du Yunnan en Chine Populaire

L’enjeu est donc triple pour New Delhi : contrer l’influence croissante de la Chine dans la région, disposer d’un espace intégré constituant une porte d’entrée (et de surveillance) vers le détroit de Malacca et, enfin, désenclaver ses Etats du nord-est (constitués de l’Arunachal Pradesh, de l’Assam, du Manipur, du Meghalaya, du Mizoram, du Nagaland et du Tripura). Traversés par des vagues de violence dans les années 70-80, les territoires du nord-est restent historiquement et culturellement rétifs à une intégration à l’Inde, dont le rattachement a été imposé par le colon britannique, puis par le nouveau pouvoir central indien. Les tensions restent vivaces puisque, en 2015, des indépendantistes nagas (l’ethnie principale du Nagaland, répartie aussi dans les autres Etats du nord-est et en Birmanie) avait lancé une série d’attaques contre des forces de sécurité indiennes.

Un nord-est enclavé et en stagnation économique pourrait ainsi constituer un potentiel levier d’influence pour une Chine déjà présente en Birmanie et au Bangladesh. D’où l’urgence pour New Delhi d’accélérer l’intégration économique, sécuritaire et maritime du Golfe du Bengale.

Robin Terrasse – Analyste Route de la Soie

Publicité

Droits d'auteur : La reproduction, même partielle, de cet article, est interdite, en dehors du titre et des parties de l'article rédigées en italique, sauf dans le cadre des accords de protection des droits d'auteur confiés au CFC, et sauf accord explicite donné par Meta-defense.fr. Meta-defense.fr se réserve la possibilité de recourir à toutes les options à sa disposition pour faire valoir ses droits. 

Pour Aller plus loin

RESEAUX SOCIAUX

Derniers Articles