jeudi, mars 28, 2024

La Suède veut taxer les banques pour financer son effort de Défense

Décidement, les personnalités politiques de tous les pays européens n’ont guère d’imagination. Alors que la Suède, au première loges du renforcement militaire russe, a entamé la modernisation de ses forces armées et le renforcement de son effort de Défense, avec un budget qui va passer de 5 à presque 8 Md€ d’ici 2025, le ministre de La Défense suédois, Peter Hultqvist, et son homologue des finances, Magdalena Andersson, n’ont rien trouvé d’autre que d’imaginer une nouvelle taxe, qui s’appliquera au secteur bancaire. Selon eux, il est normal de faire participer les banques qui dégagent d’immenses profits, les quatre plus importantes banques suédoises ayant enregistré un bénéfice record de 112 Md de couronnes en 2018, à l’effort de Défense.

On retrouve dans la démarche du gouvernement suédois les mêmes postulats que ceux qui firent le malheurs des forces armées françaises pendant plus de 10 ans. En effet, l’objectif est de créer, en procédant ainsi, un effort sous recettes variables, en liant artificiellement une recette budgétaire de l’Etat, à une dépense régalienne. Ce qui reviendrait, pousser à l’extreme, à payer les salaires des douaniers sur les recettes de TVA du secteur du luxe, par exemple, ou le salaire des professeurs sur les taxes pétrolières … C’est ainsi que, pendant longtemps, les budgets du ministère de La Défense français était « bouclé » en y intégrant des recettes variables liées, comme celles provenant de la vente du patrimoine immobilier, ou de l’attribution des licences hertziennes aux opérateurs mobiles, et qui engendra de sévères manque à gagner dans le budget des armées, entrainant des arbitrages très défavorables concernant les programmes d’équipements.

Service militaire suede Analyses Défense | Budgets des armées et effort de Défense | Politique de Défense
La Suède a rétabli un service militaire obligatoire limité pour faire face à ses besoins en matière de personnel militaire

En outre, il est évident que si une taxe venait à apparaitre sur le secteur bancaire, les stratèges financiers parviendraient, en très peu de temps, à optimiser leur haut de bilan pour minimiser l’impact de cette taxe, et pour la faire compenser par des recettes supplémentaires, qui viseront évidemment les particuliers eux mêmes. De fait, l’objectif de ne pas augmenter la pression fiscale directe, puisque c’est évidemment l’objectif des ministres suédois, ne sera que de façade, puisque les contribuables suédois paieront, au final, les couts liés à cette nouvelle taxe…

En refusant d’intégrer le cout intégral de La Défense dans le budget de l’Etat, en tant que poste crucial des responsabilités et prérogatives régaliennes de celui-ci, cette approche proposée par Stockholm n’affronte pas la réalité à venir d’un accroissement sensible des tensions internationales et des risques de conflits, et de l’effort de défense impératif auquel doivent consentir les états, et par voie de conséquence, les citoyens, ultimes bénéficiaires de la sécurité garantie par les armées.

Toutefois, à l’échelle d’un pays comme la France, ou d’une union comme l’Europe, il serait possible de largement minimiser l’impact budgétaire de l’effort budgétaire, fut-il porté à des niveaux qui paraissent aujourd’hui inimaginables. Ainsi, en mettant en place, à l’échelle de l’Union européenne, des mécanismes d’équilibrage des recettes budgétaires générées par les commandes d’équipements de Défense, entre les états producteurs, et les états acheteurs, il serait possible de grandement réduire l’impact sur le budget de l’Etat des programmes d’acquisition d’équipements de Défense, comme ceux de maintenance.

gotland submarine Analyses Défense | Budgets des armées et effort de Défense | Politique de Défense
La Suède dispose d’une importante BITD, allant de la construction de blindés à celles des avions de combat, en passant par les sous-marins. Ici un sous-marin AIP de la classe Gotland

De même, dès lors que ces mécanismes d’équilibrages auront été mis en oeuvre, ils permettront une meilleure répartition des investissements, mais également des infrastructures industrielles, dans les différents pays de l’union, augmentant de fait les recettes fiscales et sociales de pays ne disposant d’une BITD importante, sans augmenter artificiellement les BITD recourantes, qui nécessitent toutes des marchés d’exportation pour subsister. Cette approche, bien plus efficace, tant du point de vu opérationnel qu’économique et social, réduirait en outre rapidement la dépendance technologique des pays européens envers certains de leurs alliés, tout en renforçant tout aussi rapidement l’autonomie stratégique de l’union comme de ses membres.

Les décennies à venir qui se dessinent aujourd’hui sont porteuses de tensions nouvelles, et les pays européens ne parviendront pas à préserver leurs prérogatives, ni leur indépendance, et probablement pas leur sécurité, sans faire preuve de la même volonté d’innover dans la conception même du modèle politico-économique de l’effort de Défense, qu’ils n’en font preuve pour ce qui est de soutenir les innovations technologiques.

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