Safran peut-il sauver le programme de turboréacteur indien Kaveri ?

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Le Rafale a le vent en poupe en Inde, et l’on assiste même à une certaine Rafale-Mania dans les médias, qui contraste avec les attaques incessantes, et parfois farfelues, sur le programme et l’appareil menées par l’opposition au premier ministre N. Modi l’année dernière, sur fond de campagne législative nationale. Mais depuis, le premier ministre Modi a remporté ces élections, et même obtenu, a avec son parti, la majorité absolue au parlement, le premier Rafale indien a été officiellement cédé à l’IAF par Dassault, et plusieurs indiscrétions laissent entendre qu’une nouvelle commande, cette fois assemblée en Inde, serait en préparation, et pourrait être annoncée lors de la visite du président Macron à New Dehli le 26 janvier 2020 à l’occasion de la fête nationale du pays.

Lors de la signature de la première commande de 36 appareils, les industriels français s’étaient engagés à réinvestir 50% du montant de la commande, soit prés de 4 Md€, dans l’industrie aéronautique et de Défense Indienne. Parmi eux, Safran, le spécialiste français des moteurs d’avions, qui a conçu et fabrique, entre autres, le M88 qui propulse le Rafale, avait annoncé qu’il participerait à la conception et la fabrication du turboréacteur Kaveri, le premier réacteur de facture indienne, qui rencontrait alors de nombreuses difficultés, tant au niveau des performances que de sa fiabilité. Le programme était alors jugé critique par les autorités indiennes, puisque le moteur devait équiper le programme d’avions léger Tejas Mk2, et le programme d’avion de prochaine génération AMCA.

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Le Tejas, ici au second plan, restera propulsé par un moteur F404 américain si l’Inde ne parvient pas à concevoir un moteur Kaveri fiable et performant

Mais là ou Dassault Aviation, Thales et MBDA sont parvenus à déployer un modèle économique efficace pour leurs investissements et leur intégration à l’écosystème indien, SAFRAN s’est, de son coté, retrouvé enfermée dans des négociations très difficiles avec la DRDO, la direction de la recherche de Défense indienne, qui pilote le programme Kaveri, ainsi qu’avec les autorités, et les industriels. Au final, le motoriste français n’est pas parvenu à trouver un terrain de négociation favorable avec ses interlocuteurs, et s’est, peu à peu, retirer du programme, laissant le Kaveri sans solution. Depuis, les autorités indiennes ont annoncé que le Tejas Mk2 serait équipé du F404 américain, comme le Mk1, et que le Kaveri ne serait pas non plus retenu pour équiper le futur programme AMCA.

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Mais les nouvelles négociations en cours au sujet du Rafale pourraient bien changer la donne, comme l’indique la visite du ministre de La Défense indien, Rajnath Singh, dans les locaux de Safran à Villaroche, qui suivait la cérémonie officielle de transfert du premier Rafale indien qui s’était tenue, la veille, à Bordeaux. Bien qu’aucune annonce n’ait été faite durant la visite, sa simple existence montre que le ministre indien, qui a déjà marqué son ministère de son empreinte en simplifiant une partie du dédale administratif indien pour les procédures d’acquisition d’armement venant de l’étranger, ne ferme pas la porte à de nouvelles négociations qui se tiendraient, dès lors, au niveau politique. A l’issue de la visite, le ministre indien a tenu à lancer un message aux industriels français, et particulièrement à Safran, précisant que désormais il existait deux corridors d’entreprises technologiques offrant des conditions attractives pour les investissements technologiques, et surtout en insistant sur les besoins de l’Inde en matière de moteurs d’avions, qu’ils soient militaires ou civiles.

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L’Assemblage d’une nouvelle série de Rafale en Inde pourrait être l’opportunité manquante pour trouver un accord entre Safran et le DRDO au sujet du moteur Kaveri

De nombreuses voix s’élèvent en Inde pour ne pas abandonner le volet du programme aeronautique indien, considéré, à juste titre, comme indispensable pour l’autonomie stratégique et technologique du pays. En effet, et on le voit avec la Chine, la technologie des moteurs d’avion militaire, est particulièrement délicate à maitriser, et aujourd’hui, très peu de pays savent concevoir ce type de propulseur. Les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne et la France ont l’experience et le savoir faire requis, et la Chine, a la suite d’un investissement très important, et de beaucoup de retro-ingenieurie des moteurs russes, parvient à peine à produire des moteurs à peine performants. De fait, le soutien de Safran dans la conception du Kaveri pourrait bien être une chance inespérée pour New Dehli de developper son industrie aéronautique dans sa globalité, sans dépendre d’arbitrages extérieurs, et Rajnath Singh en est, évidemment, parfaitement conscient.

Il reste encore beaucoup d’inconnues dans ce dossier, et le retour de Safran dans le programme Kaveri est encore lointain et incertain. Mais le cadre qui se dessine aujourd’hui est évidemment bien plus favorable qu’il ne l’était il y a un an, et les opportunités qui s’en dégagent, tant du coté indien que français, invitent à l’optimisme. Ceci, avec l’Inde, on n’est jamais sûr de rien …

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