L’offensive turque contre les Kurdes crée de multiples tensions internationales

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En quelques jours, avec le déclenchement de l’opération militaire contre les Kurdes du nord de la Syrie, le président Turc est parvenu à fédérer l’immense majorité des opinions publiques occidentales, comme des chancelleries, contre lui. L’attaque des alliés occidentaux kurdes, suite aux déclarations du président Trump, avait déjà déclenché de vives réactions en Europe et aux Etats-Unis, mais le bombardement à proximité d’une position des forces spéciales américaines et les menaces ouvertes contre l’Europe en agitant le risque migratoire, auront fini de convaincre les plus réservés.

Ce vendredi, les forces turques ont mené un bombardement d’artillerie à quelques centaines de mètres d’une position tenue par les forces spéciales américaines, à proximité de la ville de Kobane. Aucune victime n’est à déplorer, mais l’information fait grand bruit aux Etats-Unis, ou le congrès avait déjà exprimé son opposition avec les positions du président américain. De fait, le discours des autorités américaines évolue aujourd’hui vers une position plus dure contre l’intervention turque, et il risque fort de se radicaliser davantage avec le retours des sénateurs de la retraite annuelle du Congrès, qui interviendra la semaine prochaine, et ce, malgré les explications fournies par les autorités turques au sujet de cet incident.

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La cheffe de la diplomatie européenne a condamné l’intervention turque face au parlement européen

Mais c’est en Europe qu’il faut trouver les critiques les plus acerbes de l’offensive turque. Toutes les grandes capitales européennes ont unanimement condamné cette intervention, et appelé à y mettre fin. l’Union européenne a fait de même, par la voix de Federica Mogherini, la Cheffe de la diplomatie européenne

L’opération turque dans le nord-est de la Syrie peut ouvrir un nouveau chapitre dramatique dans l’histoire déjà très sombre de la guerre en Syrie. Les conséquences potentielles d’une telle action militaire sont claires pour tout le monde et pour nous. Les répercussions peuvent être extrêmement graves sur les plans humanitaire, politique et stratégique. Pour toutes ces raisons, nous appelons la Turquie à mettre fin à son action militaire unilatérale.

Federica Mogherini, au Parlement Européen le 12 octobre 2019
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Le président turc, R.T Erdogan a immédiatement, comme nous l’avions anticipé, menacé l’Europe de cesser de maintenir les quelques 4 millions de réfugiés qui sont, aujourd’hui, sur son sol, ce qui pourrait créer une nouvelle crise des migrants en Europe, et notamment dans les pays les plus exposés, comme la Grèce, et ses pays frontaliers.

Si vous (les européens) continuez de qualifier cette opération d’invasion, c’est très simple, nous allons ouvrir les portes, et laisser 3,6 millions de réfugiés sur vos routes

R.T Erdogan, au parlement turc, le 12 octobre 2019

Si la menace a, incontestablement, du poids, il semble qu’elle n’ait fait que raffermir les positions des chancelleries européennes, déterminées à ne plus subir les dictats du dirigeant turc. Déjà, le 11 octobre, 5 pays européens européens, la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la Pologne et la Belgique, avaient demandé une réunion d’urgence du conseil de sécurité des Nations Unis au sujet de cette offensive, réunion qui se soldat par le refus des représentants américains et russes de condamner cette initiative. Mais la riposte européenne se profile déjà. Ainsi, les autorités néerlandaises et norvégiennes ont annoncé qu’elles cessaient de vendre des équipements de Défense ou technologies associées à Ankara.

60000 deplaces syrie Actualités Défense | Communication institutionnelle défense | Conflit Syrien
l’Offensive turque a déjà envoyé plus de 60.000 civils sur les routes dans le nord de la Syrie

Car si la menace des migrants peut effectivement s’avérer un important problème pour les Européens, des sanctions européennes contre l’économie et l’industrie de Défense turque pourraient, elles, finir d’achever politiquement le président Erdogan, déjà en perte de popularité depuis quelques mois dans son pays. En effet, sur la scène internationale, la Turquie d’Erdogan a, incontestablement, pris de l’ampleur, mais cela s’est fait au détriment de l’économie du pays. Ainsi, la Livre turque a perdu, en 5 ans, plus de la moitié de sa valeur face à l’Euro ou au dollar, soit une trajectoire similaire à celle du rouble russe, sans les sanctions économiques. Le chômage est passé de 8,5% en 2011 à plus de 14% à l’été 2019, se concentrant, comme souvent, sur les jeunes. Après une période de forte croissance entre 1990 et 2013, le PIB du pays est passé de 950 Md$ (2013) à 850 Md$ (2015) et ne parvient à retrouver une faible croissance qu’à compter de 2018, alors que les investissements étrangers ont été divisés par 2 vis-à-vis des années 2000, et ne semblent pas donner de signes de reprise significative.

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De fait, si l’offensive turque venait à patiner face aux défenses kurdes, ou si les Européens et le Congrès Américains venaient à mettre en oeuvre des sanctions sévères contre l’économie du Pays, le président turc pourrait rapidement se trouver très affaiblit politiquement. On peut se demander, également, quelle serait la portée de mesures à forte valeur symbolique, comme l’arrêt définitif des négociations concernant l’adhésion du pays à l’UE, ou une procédure d’exclusion de l’OTAN, sur la pérennité du président turc à son poste. Une chose est certaine, les Européens ne peuvent plus, désormais, se contenter de déclaration de forme vis-à-vis du président Erdogan, qui ne se comporte ni comme un ami, ni comme un allié.

PS : Par la voix de la ministre des Armées, Florence Parly, la France rejoint les pays ayant déjà mis la Turquie sous embargo des systèmes de Défense. Les échanges franco-turques de Défense sont peu nombreux, mais cette annonce peut potentiellement mettre fin au programme de missile sol-air à moyenne portée turc auquel devait participer MBDA. L’Allemagne, par la voix de son ministre des affaires étrangères Heiko Maas, à fait de même il y a quelques heures, rejoignant ainsi la Norvège, la Suède, la Finlande, les Pays Bas, et la France. En revanche, les deux principaux fournisseurs européens de technologies de Défense, le Royaume-Unis qui participe au programme TFX, et l’Italie avec, notamment, l’hélicoptère T-129 Attak, n’ont pas annoncé de sanctions à cette heure.

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