Le Pakistan aussi veut son chasseur de 5ème génération

Voilà une information qui a de quoi laisser perplexe. Les autorités pakistanaises ont annoncé avoir terminé la première phase du programme AZM, destiné à concevoir simultanément un Drone MALE, une système de défense anti-aérien longue portée, de nouvelles munitions et un avion de combat de 5ème génération. Selon le compte rendu annuel du Ministère de La Défense Pakistanaise, le projet Azm, signifiant « engagement sincère », et qui a débuté en juillet 2017, aurait mené à bien la première des 4 études préalables prévues, destinée à définir le niveau de menaces auquel le nouveau système de systèmes devra faire face dans le futur, et d’en déduire les performances de chacun des éléments pour assurer aux forces aériennes pakistanaises de conserver la supériorité militaire.

Pour y parvenir, les autorités pakistanaises veulent s’appuyer sur le complexe aéronautique du pays qui, s’il n’est pas très connu hors de ses frontières, a accumulé beaucoup d’experience au fil des années, notamment dans la modernisation des appareils en service, ainsi que dans sa collaboration avec le chinois Chengdu dans la conception du JF-17. En particulier, ce complexe s’est fait une spécialité dans le Retrofit et la régénération du potentiel d’appareils anciens, comme les mirage III et V français, ou encore le F-7 chinois, en déconstruisant et reconstruisant à neuf les appareils et en y intégrant de nouveaux équipements avioniques et systèmes d’arme à chaque passage.

JF17 Pakistan Analyses Défense | Aviation de chasse | Construction aéronautique militaire
Le JF-17 Thunder est incontestablement une réussite de la coopération technologique entre le Pakistan et la Chine

Mais ce projet sera tout sauf simple pour l’industrie Pakistanaise, qui ne dispose pas de certains savoir-faire critiques, comme la conception de turbo-réacteurs par exemple. Même si ce n’est pas abordé pour l’heure par les autorités d’Islamabad, le pays aura très certainement besoin de s’appuyer sur un partenaire technologique, comme il le fit pour le programme JF-17. Deux hypothèses semblent aujourd’hui se distinguer. En premier lieu, la Chine, avec qui elle a développé le JF-17, et qui est son principal partenaire et allié politique de poids aujourd’hui. Cette dernière dispose notamment du programme FC-31 Gyrfalcon, un chasseur de 5ème génération plus léger que le J20, mais qui n’a pas pour l’heure sû convaincre en raison de performances décevantes du premier prototype. Un second prototype a vu le jour et pourrait bien relancer l’intérêt pour l’appareil, a priori destiné au marché export par Pékin.

Le second partenaire, et probablement le plus interessant pour Islamabad aujourd’hui, serait la Turquie, et son programme TFX. Comme le Pakistan, la Turquie veut developper son propre programme de chasseur de 5ème génération, de sorte à atteindre un statut d’autonomie stratégique. En outre, les dirigeants des deux pays font cause commune sur de nombreux sujets, le Pakistan ayant été un des très rares pays à avoir ouvertement soutenu l’action militaire turc dans le nord de la Syrie. Enfin, durant ces dernières années, les forces pakistanaises sont devenues les principaux clients de l’industrie de Défense turque, en commandant, notamment, des corvettes de la classe Ada, et des hélicoptères de combat T-129. Mais pour son programme TFX, Ankara a également, comme Islamabad, besoin de partenaires technologiques, notamment sur l’épineux problème des moteurs.

Vue dartiste du programme davion de 5eme generation TFX turc Analyses Défense | Aviation de chasse | Construction aéronautique militaire
La tentation de rejoindre le programme TFX turc est certainement grande à Islamabad

Pour l’heure, le programme est conçu avec l’assistance technique des anglais BAe et Rolls Royce, qui incontestablement ont les compétences pour amener le TFX à son terme. Mais les récentes tensions entourant l’intervention turque en Syrie contre les Kurdes pourraient bien mettre à mal ce partenariat. Dans ce cas, les autorités turques pourraient être tentées de se tourner vers Moscou. Toutefois, si le Pakistan était partenaire du programme, cela risquerait fort de provoquer la colère de New Dehli, qui a déjà menacé d’annuler le contrat d’assistance technologique à la construction de ses pétroliers ravitailleurs aux chantiers turques Anadolu du fait de la construction des corvettes Ada pour les forces pakistanaises. Or, l’Inde reste, de loin, le premier client de l’industrie de Défense russe, et Moscou entend bien préserver ce marché indispensable à son effort de Défense. Dès lors, et en l’absence de solution occidentale, il ne resterait à Ankara que Pekin pour combler les blancs technologiques, ce qui ne serait probablement pas pour déplaire aux Pakistanais.

Ce programme Pakistanais est le 3ème programme de chasseur de nouvelle génération porté par des industrie aéronautiques émergentes, avec la Corée du Sud, et la Turquie. Ils seront confrontés aux productions américaines (F35), russes (Su57), chinoises (FC31), mais en se positionnant sur un segment traditionnel des européens comme Dassault Aviation avec les Mirages, des américains comme General Dynamics avec le F16, et des russes comme Mig avec le Mig29. Or, ces appareils représentent aujourd’hui la plus grande part des flottes de chasse mondiale, que ce soit dans les pays occidentaux comme asiatiques, africains ou américains. En concentrant tous les programmes occidentaux sur le segment des appareils moyen+ polyvalents, à l’image du Typhoon et Rafale aujourd’hui, ou du SCAF et Tempest demain, l’industrie européenne n’abandonne-t-elle pas le marché mondial à ses concurrents émergents, oubliant que c’est lorsque les Etats-Unis firent de même avec la Série Century, que les Mirage de Dassault purent s’imposer dans plus de 13 pays ?

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