Royal Navy : renaissance du HMS Prince of Wales, restauration de la permanence aéronavale

La Royal Navy admet au service actif le 10 décembre son deuxième porte-aéronefs STOVL (Short Take Off Vertical Landing) lors d’une grande cérémonie rassemblant dans la base navale de Portsmouth les deux ponts plats au service de Sa Majesté. Le HMS Prince of Wales marque la renaissance du cuirassé disparu en 1941 et la restauration de la permanence aéronavale britannique. Le groupe aéronaval britannique est au complet, le HMS Queen Elizabeth pour se concentrer sur la préparation de sa première mission opérationnelle (2021) qui interviendra après celle du porte-avions Charles de Gaulle (2020). La France et le Royaume-Uni offre une permanence aéronavale à l’Europe avec trois ponts plats.

Le 10 décembre 1941 disparaissait dans les flots de la mer de Chine méridionale le cuirassé HMS Prince of Wales de la classe King George V (43 700 tonnes à pleine charge, X x 356 mm) en compagnie du croiseur de bataille HMS Repulse (classe Renown). Ils avaient été envoyés pour contrer un débarquement japonais en Malaisie en s’en prenant aux convois. Sans couverture aérienne. Les avions torpilleurs et bombardiers japonais ne se firent pas prier. C’est la première victoire de formations aériennes employées seules contre des capital ships.

78 ans plus tard, jour pour jour, sur un air de défi, la Royal Navy célèbre l’admission au service actif du HMS Prince of Wales, le deuxième porte-aéronefs STOVL de la classe Queen Elizabeth en présence, justement du sister-ship éponyme : le HMS QueenElizabeth. Il a été offert au bâtiment l’uniforme encadré de Alf Woodhead, survivant du naufrage du célèbre devancier.

Le HMS Prince of Wales aurait pu être baptisé HMS Ark Royal. Il s’agissait d’éviter que le nom soit perdu lors du désarmement du dernier HMS Ark Royal, c’est-à-dire le porte-aéronefs de la classe Invincible qui servit lors de la guerre des Malouines. Ce nom est dans la Royal Navy depuis la flotte triomphante de l’Invincible Armada. Deux porte-avions furent ainsi baptisés. Une pétition était déposé en ce sens en 2011 et le Prince de Galles donna même son accord de principe. Mais le HMS Prince of Wales conserva son nom de baptême.

HMS Prince of Wales 1941 Actualités Défense | Guerre de Haute Intensité | Planification et plans militaires
Le cuirassé HMS Prince of Wales était le deuxième bâtiment de la classe King George V. Admis au service le 19 janvier 1941, il est coulé par les avions japonais le 10 décembre 1941. Avec un déplacement de 42 700 tonnes à pleine charge, il portait dix pièces de 356 mm réparties entre deux tourelles en chasse (une quadruple surmontée d’une double) et une tourelle quadruple en retraite.

Le nouveau porte-aéronefs britannique fut commandé le 20 mai 2008 et mis sur cale le 26 mai 2011 alors que le porte-aéronefs HMS Ark Royal de la classe Invincible était désarmé quelques semaines plus tôt (11 mars 2011). L’assemblage des blocs fabriqués dans six chantiers débutait le 9 septembre 2014 dans le bassin n°1 de Rosyth. L’achèvement franchissait les 80% en avril 2016. Le bâtiment fut baptisé le 8 septembre 2017 par Camilla Parker Bowles, duchesse de Rothesay et épouse du Prince de Galles. La coque rencontra son élément pour la première fois le 21 décembre 2017. L’achèvement à quai se poursuivit tout au long de l’année 2018 et jusqu’en 2019. Les essais à la mer débutèrent le 23 septembre 2019. Le 2 octobre 2019 la Royal Navy proclama que le HMS Prince of Wales avait été en mesure de marcher à sa vitesse maximale officielle : plus de 25 nœuds. Les essais ont permis de dépasser les 27 nœuds pour atteindre 32 nœuds, ce qui est désormais sa vitesse maximale officieuse.

La propulsion, de type propulsion électrique intégrée, est très similaire à celle des destroyers Type 45 de la classe Daring. La puissance produite par les deux turbines à gaz Trent MT30 de Rolls-Royce Marine (2 x 36 MW) et les quatre diesel-générateurs 16V38 de Wärtsilä Marine ( 2 × 8,7 MW + 2 × 11,6 MW) atteindrait les 109 à 112 MW. Les turbines à gaz n’entraînent pas directement les deux lignes d’arbre à hélices à pas variable, c’est le rôle des quatre moteurs électriques de propulsion de GE Power Conversion qui, avec leur puissance unitaire de 20 MW, permettent d’atteindre la vitesse de marche maximale avec une puissance pouvant atteindre 80 MW. Le réseau bord bénéficie dans ce cas du reste de l’énergie produite, soit jusqu’à 32 MW.

Le porte-aéronefs STOVL HMS Prince of Wales mesure 286 mètres contre 284 mètres pour le HMS Queen Elizabeth, lui assurant une finesse de coque de 7,33 (contre 8,3 pour le Charles de Gaulle et 8,21 pour le CVN-78 USS Gerald R. Ford). Le maître-bau serait toujours de 39 mètres à la ligne de flottaison et de 73 mètres au niveau du pont d’envol. Son déplacement lège serait d’environ 45 000 tonnes – soit le déplacement à pleine charge du porte-avions Charles de Gaulle – et son propre déplacement à pleine charge serait de l’ordre des 67 700 tonnes, contre 65 000 tonnes pour son sister-ship.

Les capacités d’auto-défense des Queen Elizabeth se résument à l’intégration de trois systèmes Phalanx CIWS (canon multitube de 30 mm) permettant de couvrir tous les secteurs du bord et d’effectuer des tirs croisés sur les assaillants. Une polémique a existé quant à d’éventuelles insuffisances en la matière car les porte-aéronefs STOVL britanniques ne possèdent pas même une défense terminale à courte portée par missiles anti-aériens, contrairement à la quasi-intégralité des ponts plats dans le monde.

Ses installations aéronautiques reposent sur un pont d’envol de 284 mètres de long et large de 73 mètres, lui assurant une superficie de 16 000 m² (contre 12 000 m² sur le Charles de Gaulle et 18 954 m² pour le CVN-78 USS Gerald R. Ford). Une piste de décollage axiale occupe pratiquement toute la longueur du pont d’envol, soit plus ou moins 265 mètres. Elle sert à l’emploi de la méthode Shipborne Rolling and Vertical Landing (SRVL) assurant la plus longue course à l’appareil pour lui éviter d’utiliser autant que possible son réacteur pour la sustentation et donc permettre de décoller avec une masse supérieure. Cette piste axiale se termine d’un tremplin n’occupant que la moitié de la largeur. Le pont d’envol est desservi par deux ascenseurs pouvant lever jusqu’à 70 tonnes, soit deux F-35B à la fois.

Classe Queen Elizabeth organisation du pont denvol Actualités Défense | Guerre de Haute Intensité | Planification et plans militaires
L’organisation du pont d’envol de la classe Queen Elizabeth se construit autour de zones recevant chacune un nom de baptême. La piste de décollage axiale et les espaces de parking et de circulation associés soulignent les limites de la méthode en termes de cadences de lancement et de la capacité à faire apponter des aéronefs pendant la phase de lancement d’une pontée.

La configuration typique du groupe aérien embarqué aurait dû être de 36 F-35B soutenus par 4 hélicoptères. La configuration maximale (« surge« ) atteint les 60 F-35B, en concédant une efficacité moindre quant aux rotations des appareils entre le pont d’envol et le hangar et donc un nombre réduit de sorties journalières. À l’heure actuelle, la Royal Air Force possède 18 F-35B. En 2023, 42 machines lui auront été livrés dont 24 destinés au service opérationnel et 18 réservées aux missions d’entraînement.

L’admission au service actif du HMS Prince of Wales entraine le retour de la permanence aéronavale pour le Royaume-Uni, qui était perdue depuis 2014. Chaque porte-aéronefs STOVL de la classe Queen Elizabeth est armé par son propre équipage, permettant de fait une présence continue à la mer des deux bâtiments, voire des engagements simultanés.

Le Carrier Strike Group (CSG), comme il est officiellement baptisé, sera déployé en 2021 pour une grande croisière en Méditerranée, dans le golfe Persique et un passage dans l’océan Pacifique en point d’orgue. Le groupe du HMS Queen Elizabeth comprendra, outre une frégate Type 23, un destroyer Type 45 et un sous-marin nucléaire d’attaque de classe Astute, un destroyer type Arleigh Burke de l’US Navy et une frégate hollandaise de la classe De Zeven Provinciën. En plus des 24 F-35B de la Royal Air Force, le groupe aérien embarqué sera appuyé par un nombre encore indéterminé de F-35B de l’US Marines Corps.

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