Bien qu’ayant à elle seule un budget égalant celui de l’Allemagne, de la France et du Royaume Uni, l’US Navy fait aujourd’hui face à une situation des plus complexes en matière de planification. En effet, après 30 années d’errements budgétaires et de programmes trop ambitieux et éminemment couteux pour des applications opérationnelles réduites, comme les corvettes LCS, les destroyers Zumwalt ou les sous-marins nucléaires d’attaque Seawolf, la Marine Américaine se retrouve à devoir faire face à de nombreux programmes impérieux à financer pour renouveler et moderniser ses équipements, et un budget fédéral déjà en limite haute, n’offrant que de faibles marges de croissance à l’avenir. C’est dans ce contexte que le secretaire à la Marine par intérim, Thomas Harker, a rédigé le 4 juin un mémo indiquant qu’en l’état actuel des prévisions budgétaires concernant le budget 2023, l’US Navy ne pourrait financer simultanément les trois grands programmes de R&D en cours, à savoir le programme DD(x) destiné à remplacer les destroyers Arleigh Burke de première génération et les croiseurs Ticonderoga, le programme SSN(x) destiné à renforcer la flotte sous-marine offensive américaine, et le programme Next Generation Air Dominance ou NGAD, qui porte le même nom que le programme de l’US Air Force sans y être attaché, et qui doit concevoir le remplaçant du Super Hornet à bord des porte-avions de l’US Navy.
En réalité, le choix auquel devront faire face les stratèges du Pentagone, l’administration Biden et le Congrès, a déjà été en partie épuré, puisque le programme de sous-marins nucléaires lanceurs d’engins SSBN(x) Columbia est quant à lui sanctuarisé, tant il est désormais nécessaire de remplacer les sous-marins de la classe Ohio datant des années 80 pour maintenir une posture de dissuasion efficace. En outre, l’US Navy va poursuivre la montée en puissance du programme FFG(x) des frégates de la classe Constellation, qui renforceront le corps de bataille de surface américain, alors que les porte-avions nucléaires de la classe Ford, les porte-hélicoptères de la classe America, les sous-marins nucléaires d’attaque de la classe Virginia et les destroyers Arleigh Burke Flight III continueront d’être produits, et que les chasseurs furtifs F35C, les avions de détection E-2D Hawkeye, les avions de patrouille maritime P-8 Poseidon et les drones de ravitaillement en vol MQ-25 Stingray continueront d’être acquis. L’US navy sera donc loin d’être démunie, puisque à de nombreux points de vue, chacun de ces équipements représente le summum de la technologie du moment, et sont parmi les meilleurs équipements militaires existants.
Toutefois, comme l’US Army et son programme BIG 6, et l’US Air Force avec le NGAD, l’US Navy est désormais aiguillonnée par les progrès fulgurants réalisés par les industries de défense chinoises et russes, toutes deux ayant comblé dans de nombreux domaines leur retard technologique vis-à-vis de l’occident en seulement quelques années, et s’étant structurées pour offrir une importante productivité. De fait, si les Arleigh Burke Flight III, Virginia et autres Super Hornet et F35C pourront encore tenir la dragée haute face aux forces chinoises et/ou russes dans les années à venir, il apparait très probable qu’à l’horizon 2030 ou 2035, ceux-ci seront surpassés par les équipements de nouvelle génération qui entreront en service à Pékin ou Moscou. C’est précisément là que se situe le noeud gordien pour la marine Américaine, qui a effectivement besoin de ces 3 programmes à horizon 2035, et qui ne dispose pas d’alternatives pleinement satisfaisantes à ce jour.
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