En Septembre 2020, trois officiers américains de l’US Navy et du Corps des Marines publièrent un article flamboyant sur le site du très sérieux US Naval Institute. Le capitaine des Marines Walker D. Mills, le lieutenant-commander Phillips-Levine et le capitaine de l’US Navy Joshua Taylor y présentaient, en effet, une remarquable analyse sur l’opportunité pour les armées américaines de developper et déployer une flotte d’Ekanoplan, également Wing in Ground effect ou WIG outre Atlantique, pour évoluer et renforcer les capacités de transport stratégique des forces US face aux enjeux posés par la géographie spécifique et le déni d’accès chinois dans le Pacifique. De toute évidence, l’article a suscité un réel intérêt au Pentagone, puisque la DARPA, l’Agence en charge des projets les plus innovants du Departement de la Défense américain, vient de publier une demande d’information pour concevoir ce type d’appareil.
Un Ekranoplan est un véhicule hybride entre un navire et un hydravion (d’où l’affreux terme « navion » parfois employé en France), utilisant l’effet de sol pour accroitre sa portance, et offrant des capacités de transport de charge comparables à celle d’un navire, à des vitesses comparables à celles d’un avion. Concrètement, le WIG évolue à quelques dizaines de mètres au dessus de la surface de l’océan, en étant capable d’emporter des charges très lourdes de plusieurs milliers de tonnes pour les plus imposants, à des vitesses de 150 à 300 noeuds. Ce concept a initialement été développé en Union Soviétique par le Soviet Central Hydrofoil Design Bureau, qui expérimenta plusieurs modèles en Mer Caspienne dès les années 60, à la grande stupeur des analystes photos américains qui ne parvenaient pas à identifier ce qu’ils voyaient. Les Etats-Unis ont également développé plusieurs études dans ce domaine jusqu’à la fin de la Guerre Froide, comme le projet Pelican ULTRA (Ultra Large Transport Aircraft) de Boeing qui devait être en mesure de transporter 15.000 tonnes de fret à 500 km/h, soit dix fois plus de fret que le plus imposant des avions, dix fois plus vite que le plus rapide des navires de transport. Malheureusement, le programme fut abandonné au début des années 2000 pour donner la priorité budgétaire à l’intervention US en Afghanistan et en Irak.
La montée en puissance de la menace chinoise dans le Pacifique, et la remontée en force de la Marine Russe, ont de toute évidence redonner de l’intérêt à ce concept, et ce d’autant que les capacités de transport stratégique américaines sont aujourd’hui au plus bas, notamment dans le domaine naval. Dans le Pacifique, le WIG constituerait une solution de choix non seulement pour répondre aux besoins de déploiement rapides des forces US sur un théâtre qui se caractérise par de très nombreuses iles sur une surface océanique immense, mais également pour résister aux capacités de premières frappes et de déni d’accès de l’APL. En effet, contrairement aux navires nécessitant des infrastructures portuaires, et aux avions de transport stratégique nécessitant des pistes aériennes, les WIG se satisfont d’infrastructures de chargement/débarquement limitées à l’instar des navires d’assaut, notamment du fait de leur très faible tirant d’eau une fois à flot. Or, ports et aéroports seront très probablement les premières cibles des missiles de croisière et balistiques chinois en cas de conflit avec les Etats-Unis et leurs alliés. Qui plus est, le déni d’accès chinois est avant tout conçu pour contrer des navires et des aéronefs. Or, l’Ekranoplan évolue beaucoup plus bas que les avions, notamment de transport, le rendant particulièrement discret aux radars adverses, mais également beaucoup plus vite que les navires, rendant la reconnaissance satellite inopérante dans les phases de transit.
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[…] ces infrastructures d’accueil indispensables aux navires et avions cargo. Rappelons qu’un Ekranoplan est un hybride entre en avion et un navire, employant l’effet de sol, c’est à dire la surpression qui apparait entre les ailes et […]