Depuis de nombreuses années, la planification de l’US Navy en matière de construction navale est pour le moins chaotique, avec des plans et des objectifs successifs divergents, parfois même contradictoires. Le sujet est d’ailleurs l’objet d’une opposition féroce entre les sénateurs et représentants républicains, partisans d’une flotte massive, et leurs homologues démocrates qui souhaitent maintenir le budget de la Défense sous controle. Au delà des ambitions parfois fantaisistes présentées ces dernières années, et des nombreux bras de fer ayant opposé le Pentagone aux parlementaires américains notamment au sujet du retrait de certains bâtiments, il était donc nécessaire pour l’US Navy de presenter une stratégie cohérente et raisonnable de planification navale, de sorte à anticiper et garder sous controle la montée en puissance des forces navales de certains pays, en particulier de la Chine et de la Russie. Et le plan présenté cette semaine par l’Etat-Major de l’US Navy répond à cette nécessité, tout en s’inscrivant dans le contexte particulier des rapports de forces politiques aux Etats-Unis.
De fait, le plan présenté ne repose pas sur une, mais sur 3 hypothèses, offrant aux législateurs américains la possibilité d’arbitrer effectivement dans un cadre donné les orientations de cette stratégie navale, ainsi que des ambitions américaines dans ce domaine, et les mettre ainsi, d’une certaine manière, face à leurs propres responsabilités, au delà des postures partisanes et stériles qui handicapent depuis des années ces efforts. Les deux premières hypothèses reposent sur un effort budgétaire constant sans augmentation significative des investissements fédéraux dans la construction navale au delà de la compensation de l’inflation, il est vrai un paramètre important ces dernières années outre-atlantique. La troisième hypothèse repose elle sur un effort accru dans ce domaine, avec une hausse budgétaire totale de 75 Md$ entre 2025 et 2045. Ces plans ne concernent que les navires disposant d’un équipage, la stratégie visant à équiper l’US Navy de 89 à 149 navires autonomes d’ici 2045 étant indépendante de cet effort.

Les deux premières hypothèses proposent un arbitrage relativement simple, puisque la première s’appuie sur un plus grand nombre de grands navires de combat au détriment du format global de l’US Navy, alors que la seconde propose une réduction du nombre de ces grands navires afin de financer davantage de navires de taille intermédiaire et de sous-marins d’attaque. Ainsi, la première hypothèse propose, pour 2045, une flotte composée de 10 porte-avions nucléaires, de 75 destroyers, 44 frégates et LCS, de 55 sous-marins nucléaires d’attaque, de 47 navires amphibies, 46 navires logistiques et de 29 navires de soutiens. Dans la seconde hypothèse, la flotte est remaniée avec 10 porte-avions (-), 70 destroyers (-5), 49 frégates et LCS (+5), de 60 sous-marins nucléaires d’attaque (+5), 40 navires amphibies (-7), 51 navires logistiques (+5) et de 29 navires de soutien, ainsi qu’un premier nouveau sous-marin nucléaire lance-missiles de croisière, pour un total de 322 navires contre 318 dans l’hypothèse 1. De fait, la première hypothèse privilégie la puissance de feu, un destroyer emportant 2 fois plus de missiles qu’une frégate et un sous-marin nucléaire d’attaque réunis, mais un potentiel de distribution des forces inférieur, alors que la seconde propose une capacité de distribution plus importante, mais une puissance de feu plus réduite.
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