Depuis 2020, suite à la livraison de systèmes S-400 auprès de la Russie, le Congrès américain intégrait systématiquement aux lois encadrant les dépenses annuelles de défense américaines, l’interdiction faite à l’exécutif de lever les sanctions technologiques imposées à Ankara. Il s’agissait, alors, de limiter les capacités de contournement du véto posé par le Congrès par l’administration Trump, assez rétive dans ce domaine, et plutôt encline à plus de souplesse vis-à-vis de la Turquie et de son président R.T Erdogan. La même disposition fut intégrée à la National Defense Authorization Act 2022, alors que la nouvelle administration de Joe Biden, elle aussi, souhaitait la levée partielle des sanctions contre Ankara, en particulier pour ce qui concernait l’acquisition de 40 nouveaux F-16 V et de 80 kits pour convertir une partie des F-16 Block 52 des forces aériennes turques vers ce standard, au plus grand déplaisir de R.T Erdogan qui menaça à plusieurs reprises de se tourner vers d’autres partenaires, la Russie étant régulièrement citée à ce sujet.
L’offensive russe contre l’Ukraine à partir du mois de février 2022, a cependant considérablement changé la donne dans ce domaine. Non pas, d’ailleurs, qu’Ankara ait modifié sa posture très ambiguë vis-à-vis de Moscou, soutenant militairement l’Ukraine d’une part en livrant des drones et des blindés, mais servant également de moyen de contournement des sanctions occidentales pour Moscou, que ce soit pour l’exportation des hydrocarbures que pour l’approvisionnement de certaines technologies critiques, notamment en matière de de semi-conducteurs. Ni que le président Erdogan ait assoupli ses ambitions, dans le Caucase, en Syrie et en Irak face aux Kurdes, ou encore en Mer Egée, face à la Grèce et Chypre. Mais de toute évidence, certains arguments ont porté au Capitole, puisque comme s’en félicite la presse turque aujourd’hui, les clauses faisant référence aux sanctions technologiques américaines ont disparu du nouvel NDAA qui fait l’objet d’un accord bipartisan, et qui doit rapidement être voté par le congrès américain.
Si la disparition de ces restrictions permettra à l’exécutif américain d’entamer des négociations avec Ankara pour répondre aux demandes des armées et industriels turcs, en particulier pour ce qui concerne la modernisation de la flotte de chasse, cela ne constitue en revanche en aucune manière une levée stricte des sanctions. En effet, les autorisations d’exportation d’armement et de technologies de défense américaines demeurent la prérogative stricte du Congrès, et rien ne dit que celui ici validera les demandes d’Ankara, en particulier à court terme. Il s’agit, en revanche, d’une plus grande souplesse offerte aux négociateurs américains, pour entamer les discussions avec leurs homologues à ce sujet, notamment pour obtenir certaines concessions strictes de la part d’Ankara, par exemple quant à l’adhésion de la Suède et de la Finlande à l’OTAN, ou concernant la mise en oeuvre de la batterie S-400 acquise par Ankara et livrée en 2020 par la Russie.
Il reste 75 % de cet article à lire, Abonnez-vous pour y accéder !
Les abonnements Classiques donnent accès aux
articles dans leur version intégrale, et sans publicité,
à partir de 1,99 €. Les abonnements Premium permettent d’accéder également aux archives (articles de plus de deux ans)
[…] […]