jeudi, mars 28, 2024

Faut-il reconsidérer le potentiel de l’artillerie navale pour les navires de surface combattants ?

Au début des années 2000, l’US Navy entreprit de concevoir une nouvelle classe de destroyers lourds, le programme DD-21, désigné comme « Destroyers d’attaque vers la terre » sur la base d’un nouveau système d’artillerie navale. Le programme donnera naissance à la classe Zumwalt, un navire de 190 mètres de long pour un déplacement en charge de presque 16.000 tonnes, disposant d’une grande furtivité et d’une ligne particulièrement basse sur l’eau pour en réduire la vulnérabilité aux missiles anti-navires.

Outre les 20 systèmes de lancement vertical Mk47 de 4 silos accueillant chacun 4 missiles anti-aériens à courte et moyenne portée ESSM ou un missile de croisière Tomahawk, l’armement principal du navire reposait sur 2 nouveaux canons de 155 mm désignés Advanced Gun System, un système d’artillerie censé tirer une dizaine d’obus par minute, et d’une portée de près de 150 km avec le nouvel obus guidé Long Range Land Attack Projectile, ou LRAP.

Cependant, et comme ce fut souvent le cas pour de nombreux programmes majeurs américains post guerre froide, la classe Zumwalt et le système AGS tournèrent court, le premier alors que ses couts de développement explosaient au point que la flotte de 32 destroyers fut ramenée à 3 navires pour un cout de 21 Md$, soit le prix de deux porte-avions de la classe Nimitz, ainsi que par l’abandon du second, pourtant déjà monté sur les Zumwalt, alors que le prix de chaque obus LRAP dépassait le demi-million de $, très loin des objectifs initialement visés par l’US Navy.

1950 : les missiles commencent à remplacer l’artillerie navale

En dehors de cette initiative manquée, l’artillerie navale a perdu, dès la fin des années 50, son rôle central en matière d’armement des unités de surface combattantes, frégates, destroyers et croiseurs.

Ainsi, là où le croiseur Colbert, armé en 1957 et dernier navire de ce type conçu en Europe, emportait à son lancement 8 tourelles doubles de 127 mm et 10 canons anti-aériens bitubes de 57 mm, les destroyers lui ayant succédé, en France comme partout dans le monde, privilégiaient la mise en œuvre de missiles, qu’ils soient anti-aériens, anti-navires ou anti-sous-marins, au détriment de l’artillerie navale qui était ramenée le plus souvent à un ou deux affuts de 127 mm.

Le phénomène s’amplifia au fil des décennies, et aujourd’hui, la puissance de feu d’un navire est le plus souvent ramenée à sa seule capacité d’emport de missiles, en particulier depuis l’arrivée des systèmes de lancement vertical et de nouveaux missiles étendant les capacités de ces navires, tant dans les domaines traditionnels comme la lutte anti-aérienne, anti-navire et anti-sous-marine, que dans de nouveaux comme l’interception anti-balistique et la frappe vers la terre à l’aide de missiles de croisière ou balistiques dans les années à venir.

l'artillerie navale était au coeur de la conception des destroyers de la classe Zumwalt
Les destroyers de la classe Zumwalt devaient mettre en oeuvre deux canons de 155mm du système AGS d’une portée de 150 km

De fait, aujourd’hui, même les navires les plus imposants et puissamment armés, comme les Type 055 chinois, les Sejong le grand sud-coréens ou les Arleigh Burke Flight III américains, ne mettent en œuvre qu’un unique canon de 127 ou 130 mm, ainsi que quelques pièces de petit calibre destinées à l’autoprotection à courte portée.

Et à l’exception de certains pays comme l’Italie, particulièrement dynamique dans le domaine des obus à portée additionnée guidés comme le Leonardo Vulcano, l’artillerie navale est devenue un armement secondaire employé essentiellement pour la gradation de force et éventuellement le soutien tactique en situation de faible ou moyenne intensité.

Les progrès récents de l’artillerie terrestre

Paradoxalement, dans le même temps, d’importantes avancées ont été réalisées dans le domaine de l’artillerie terrestre, avec de nouveaux canons et de nouveaux obus capables non seulement d’atteindre des cibles 2 fois plus loin qu’ils ne le pouvaient, à calibre égal, au début des années 50, mais également avec une précision proche de celle atteinte par des missiles, ce pour des couts considérablement inférieurs.


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