Malgré un budget en hausse de 11 Md€/an depuis 2017, pourquoi les armées françaises sont-elles toujours exsangues ?

L'exécution de la Loi de Programmation Militaire française 2019-2025 à ce jour a été, de l'avis de tous les observateurs, exemplaire. En effet, celle-ci a respecté scrupuleusement les hausses budgétaires prévues, constituant une première depuis que l'exercice a été mis en place. Ainsi, le budget des armées en 2017 n'était que de 32,7 Md€, après une quinzaine d'années de sous-investissements critiques, ayant amené les armées françaises au bord de l'implosion. De fait, les crédits supplémentaires alloués ont permit d'amener le budget des armées à 43,9 Md€ en 2023, soit une hausse de 11,2 Md€ ou 34% vis-à-vis du budget 2017. Et si la prochaine LPM 2024-2030 respecte les lignes annoncées, le budget 2024 atteindra alors 46,9 Md€, soit 43% de plus qu'il ne l'était lors de l'arrivée du président Macron à l'Elysée. Pour autant, si le moral des militaires s'est semble-t-il amélioré sur cette période caractérisée par un effort important pour la condition militaire, le format des armées, lui, semble stagner, et même le remplacement de certains matériels ayant déjà largement joué les prolongations, comme les Patrouilleurs hauturiers A69 de la Marine Nationale, les KC-135 de l'Armée de l'Air et de l'espace, ou encore les canons automoteurs AUF1 et hélicoptères gazelles de l'Armée de terre, semblent encore être amenés à rencontrer certaines difficultés lors de la prochaine LPM.

Pourquoi, avec une telle hausse budgétaire, les armées peinent-elles encore à engager les programmes permettant de renouveler les équipements obsolètes, et refusent-elles toute notion d'augmentation sensible de format sur la prochaine LPM, qui pourtant devrait permettre, en appliquant une croissance linéaire du budget comme précédemment, d'arriver à un budget annuel de 68 à 69 Md€ en 2030, soit une hausse de presque 108% en 13 ans ? Comme souvent, il n'y a pas qu'une cause à cet état de fait, celui-ci reposant principalement sur deux facteurs détériorant sensiblement l'efficacité de l'effort fourni pour redonner aux armées les crédits et les moyens nécessaires à leurs missions. Le premier n'est autre que la conséquence directe de 20 années de sous-investissements dans le renouvellement des équipements, en parti compensés, mais en parti seulement, par une sévère révision à la baisse du format des armées. Le second résulte directement de la façon dont la LPM est conçue, à savoir une programmation pluri-annuelle exprimée en Euro courants, et donc incapable d'absorber des variations économiques sévères, comme le retour de l'inflation observé en 2022 et 2023, celle-ci ayant, pour ainsi dire, neutraliser l'effort budgétaire consenti depuis 2017.

Il reste aujourd'hui 6 Patrouilleurs A69 en service au sein de la Marine Nationale, Ces navires sont entrés en service entre 1981 et 1984.

Les conséquences du sous-investissement chronique dans les Armées

En moyenne, un équipement militaire d'importance, comme ceux acquis dans le cadre des Programmes à Effets Majeurs, a une durée de vie au sein des armées de 30 à 35 ans. C'est ainsi que tous les navires de la Marine nationale, mais également les aéronefs des 3 armées, ou les blindés de l'Armée de terre, restent en service sur une période dépassant 30 années. Or, sur la base du format des armées défini par le Livre Blanc de 2013, la valeur totale des équipements en service au sein des 3 armées, en dépit d'un nouveau coup de rabot dans les effectifs, les unités, et par voie de conséquence, dans les équipements requis pour répondre au contrat opérationnel, avoisine les 240 Md€ exprimés en € 2023. Avec une durée de vie de 30 ans, il s'avère donc nécessaire d'investir chaque année 8 Md€, en moyenne, dans les programmes à effets majeurs et efforts de développement, pour assurer un renouvellement fluide du parc matériel des armées. C'est désormais le cas, mais sur les vingt années ayant précédé, cet effort n'était que de 4 Md€ par an en moyenne, soit un déficit de 40% et 4 Md€ par an, ce pendant une vingtaine d'année de 2000 à 2020, sur l'autel des bénéfices de la paix.


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