Les porte-hélicoptères d’assaut modernes : la menace aéro-amphibie sous l’horizon (2ème partie)

Comme nous l’avons vu dans la première partie de cet article, les porte-hélicoptères d’assaut, un navire hybride associant une puissante capacité aéronavale au travers d’un pont d’envol droit et d’un grand hangar permettant de mettre en oeuvre une flotte d’hélicoptères de manoeuvre et de combat, ainsi qu’une capacité amphibie au travers d’un radier pouvant accueillir des barges de débarquement ou des aéroglisseurs d’assaut, sont apparus pour répondre à la multiplication des batteries côtières équipées de missiles anti-navires capables de viser n’importe quel navire au dessus de l’horizon. Toutefois, si l’horizon électromagnétique constitue bien une protection efficace contre ce type de menace, il impose une contrainte des plus significatives, ayant amené à concevoir ce type de navires. Celui-ci doit en effet mener son opération d’assaut tout en restant à plus de 40 km du site de débarquement.

Or, si une telle distance n’influence que peu le déroulé de la première vague d’assaut, elle constitue une contrainte considérable pour la suite de l’opération, alors qu’une barge évoluant à 15 noeuds mettra prés de 5 heures à faire une rotation pour aller charger et ramener sur le site de débarquement les renforts et munitions nécessaires pour soutenir l’assaut amphibie. C’est précisément pour faire face à cette contrainte que les navires d’assaut de type LHD sont apparus. A l’instar des LPD, ils mettent en effet en oeuvre des barges de débarquement, ou mieux, des aéroglisseurs capables d’effectuer les rotations en à peine plus de 2 heures. Surtout, le soutien et le renforcement des unités de têtes de pont, sont effectués non pas à l’aide de barges, mais de la flotte d’hélicoptères capables d’amener hommes et munitions vers la plage, mais également d’évacuer les blessés vers le navire, avec des rotations de moins de 30 minutes. Quant aux barges ou aéroglisseurs, leur fonction principale est d’amener les véhicules et le fret trop lourd pour être transportés par un hélicoptère. Toute l’architecture des porte-hélicoptères d’assaut découle de ce contexte, de sorte à conférer aux forces d’assaut une intensité opérationnelle élevée tout en demeurant sous la protection de l’horizon.

Malgré une vitesse de 20 noeuds, un EDAR met en moyenne plus de 4 heures pour faire une rotation avec un Mistral positionné sous l’horizon

Dans la première partie de cet article, nous avons présenté les porte-hélicoptères d’assaut de la classe America de l’US Navy, le Type 075 chinois, le Mistral français ainsi que le Trieste italien. Dans cette seconde partie, nous aborderons les LHD sud-coréens de la classe Dokdo, le très prolifique concept du porte-aéronefs d’assaut Juan Carlos I espagnol, le nouveau porte-drones d’assaut Andalou turc ainsi que les futurs porte-hélicoptères d’assaut russes classe Ivan Rogov du projet 23900.

Coréen du sud : LHD classe Dokdo

Navire offensif par excellence, le porte-hélicoptère d’assaut équipe de fait avant tout les marines ayant des ambitions de projection de puissance. Mais tel n’est pas le cas des deux LHD de la classe Dokdo. En effet, ces navires ont été conçus non pour conférer à la marine sud-coréenne une capacité d’intervention à longue distance, mais pour offrir aux forces armées du pays de nouvelles options défensives face à son tumultueux voisin du nord. Il faut dire que, dans ce domaine, Séoul a, pour ainsi dire, été à bonne école. En effet, alors que les forces des Nations Unis étaient acculées dans la poche de Busan par l’offensive nord-coréenne à la fin de l’été 1950, le général Mac Arthur mis sur pied un très audacieux débarquement amphibie à Inchon, prés de Séoul, pour prendre à revers les armées nord-coréennes, l’opération Chromite. Lancée le 15 septembre 1950, l’opération mobilisa 230 navires dont plusieurs porte-avions, et permit de mettre à terre plus de 40.000 hommes du Xème corps américain à quelques kilomètres de la capitale, coupant les lignes d’approvisionnement de l’adversaire, et inversant le cours de la guerre, tout du moins jusqu’à l’entrée en guerre de la Chine.

Le développement de la classe Dokdo fut faite concomitamment à celle des aéroglisseurs de la classe Solgae

L’exemple du débarquement d’Inchon a influencé les stratèges sud-coréens, qui décidèrent à la fin des années 90, de doter leur Marine en pleine modernisation de 2 grands navires d’assaut capables d’opérer sous le couvert de l’horizon, pour se préserver de la menace des très nombreuses batteries côtières mises en oeuvre par Pyongyang. Outre les deux LHD prévus, les ingénieurs sud-coréens développèrent simultanément un modèle d’aéroglisseur d’assaut, la classe Solgae, spécialement conçue pour armer les Dokdo et leur conférer une importante capacité de rotation. Le premier navire de la classe, le Dokdo, entra en service en 2007, tout comme les premiers aéroglisseurs de la classe Solgae, mais il faudra attendre 2021 pour que la seconde unité, le Marado, rejoigne lui aussi la marine sud-coréenne. Long de 199 mètres, les Dokdo n’ont qu’un déplacement en charge de 19.000 tonnes. Ils sont également économiques, avec un prix unitaire inférieur à 300 m$. Pour autant, il peuvent transporter une force d’assaut de 720 Marines et 30 véhicules dont 10 chars, et mettre en oeuvre simultanément 2 aéroglisseurs classe Solgae ainsi qu’une quinzaine d’hélicoptères UH-60, UH-1 ou super Lynx. La capacité de transport de véhicules peut être très largement accrue si aucun hélicoptère n’est présent dans le hangar aviation. Si le pont des Dokdo permet d’accueillir des appareils lourds comme le MV-22 Osprey, il ne peut, en revanche, mettre en oeuvre d’appareils à décollage vertical comme le F-35B.

L’infanterie de marine sud-coréenne dispose de véhicules d’assaut amphibie LVPT-7 pouvant être déployés directement à partir du radier du navire

Pour obtenir de telles capacités sur une coque aussi réduite, les ingénieurs sud-coréens ont du sensiblement rogner sur les performances nautiques du navire, et notamment sur son endurance à la mer. Pour autant, eu égard à son l’utilisation planifiée de ces navires, dont la doctrine veut qu’ils soient mis en oeuvre au sein d’une force navale composée d’un Dokdo, de 2 destroyers lourds de la classe Sejong le grand, de plusieurs destroyers d’escortes et frégates, ainsi que de sous-marins et de plusieurs navires de débarquement classe Gwanggaeto le grand, le navire semble bien dimensionné et conçu. La marine sud-coréenne étant très faiblement dotée en matière de navires logistiques, et notamment de pétroliers ravitailleurs de grande capacités, il est évident que ces flottes n’ont qu’un périmètre opérationnel régional. En outre, contrairement au japon qui a pris le parti de moderniser ses deux porte-hélicoptères de la classe izumo pour accueillir des F-35B, la Coréen du Sud s’est tournée vers la conception d’un porte-aéronefs dédié à cette fonction.

Espagne : Porte-aéronefs d’assaut classe Juan Carlos I


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