La progression de la flotte militaire chinoise, ces dix dernières années, est parfois comparée, à juste titre, à l’effort industriel naval américain durant la seconde guerre mondial. En effet, les chantiers navals chinois produisent, chaque année, un ou deux grands navires aéro-amphibies, porte-avions ou porte-hélicoptères, une dizaine de croiseurs, destroyers et frégates, trois à quatre sous-marins, dont au moins un à propulsion nucléaire, et une vingtaine de navires secondaires ou de soutien.
Il s’agit, pour Pékin, de se doter rapidement d’une flotte capable de contenir la surpuissante US Navy, potentiellement épaulée de certains de ses alliés, en particulier en mer de Chine. Surtout, Pékin veut, sans le moindre doute, disposer d’une flotte susceptible de mener, à la demande des autorités, un blocus naval de l’ile de Pékin, dès 2027, et produit les unités navales nécessaires à cela.
Ces deux dernières années, toutefois, un effort particulier a été observé dans la production chinoise, marquant une inflexion sensible dans ce domaine. En effet, là ou les chantiers navals ne produisait un grand navire aéroamphibie tous les ans, ou tous les deux ans, ceux-ci ont, aujourd’hui, trois grands navires de ce type en finition ou à l’essai : le nouveau porte-avions de 80.000 tonnes CV18 Fujian, un quatrième LHD lourd de 40.000 tonnes Type 075, le Jiangxi, et le nouveau porte-drones d’assaut Type 076 de 48.000 tonnes, dont le nom demeure inconnu.
À cette accélération sensible de l’effort chinois dans le domaine de la projection de forces, vient s’ajouter l’observation faite récemment, concernant la construction d’un nouveau navire de type porte-hélicoptères d’assaut, plus compact que les Type 075. Plus surprenant encore, celui-ci a été construit, de manière très rapide, par les chantiers navals Guangzhou, jusqu’ici spécialisés dans la production de navires commerciaux et de soutien à la Marine chinoise.
Or, par ses caractéristiques observables, et ses choix industriels, ce nouveau porte-hélicoptères pourrait bien devenir, dans les années à venir, le fer de lance de la flotte aéroamphibie chinoise, pour mener une opération d’assaut contre les ports taïwanais.
Sommaire
Pékin veut pouvoir mettre en place un blocus naval de Taïwan dès 2027 si nécessaire
Ces trois dernières années, un consensus semble avoir émergé, parmi les spécialistes de la puissance navale chinoise : Pékin, et la Marine chinoise, se préparent activement, depuis une dizaine d’années, à une opération militaire contre Taïwan, et celle-ci pourrait intervenir dès 2027, sous la forme d’un blocus naval de l’ile et de ses ports.
Initialement posée par l’Amiral Phil Davidson en 2021, lorsqu’il commandait le commandement Pacifique des forces américaines, cette échéance est désormais nommée « fenêtre Davidson« , et est devenue, depuis deux ans, l’obsession des planificateurs militaires américains, au point que les Armées US privilégient, depuis cette date, les investissements visant à durcir leurs capacités de réponse à court termes aux programmes plus distants.
Il faut dire que cette prédiction n’est pas apparue dans le marc de café, ou dans l’observation de Saturne dans la maison du Bélier, mais dans l’analyse comparée des moyens à la disposition des forces navales et aériennes chinoises et américaines, sur ce théâtre, à partir de cette échéance.
En ayant fait porter l’essentiel de son effort industriel sur la production de navires de combat de surface, croiseurs, destroyers et frégates, sur des sous-marins non océaniques AIP Type 039A, et sur des avions de combat lourds à long rayon d’action, J-20 et J-16, Pékin a, en effet, intégré une trajectoire militaire dans laquelle ses moyens disponibles, pour mener un blocus naval de l’ile autonome, à partir de 2027, serait non seulement possible, mais probablement couronné de succès, s’agissant de repousser une intervention militaire US, le cas échéant.
Par ailleurs, l’hypothèse du blocus naval s’est trouvée considérablement renforcée, par les manœuvres militaires et navales chinoises devenues récurrentes autour de Taïwan, notamment au travers des exercices Joint Sword, lancés à chaque fois que Pékin estime que Taipei ou Washington empiètent sur ses prérogatives sur l’ile, considérée comme une province chinoise sécessionniste par les autorités chinoises.
La Marine chinoise n’aura pas les moyens suffisants pour un assaut aéroamphibie contre Taïwan à cette échéance
En revanche, l’hypothèse d’un assaut aéroamphibie, contre Taïwan, un temps présenté comme imminent, est désormais reléguée aux hypothèses plus distantes, et peu probables à court terme, y compris par le Pentagone.
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Je pensais à ça: https://jamestown.org/program/ramping-the-strait-quick-and-dirty-solutions-to-boost-amphibious-lift/
via https://warontherocks.com/2022/10/mind-the-gap-part-2-the-cross-strait-potential-of-chinas-civilian-shipping-has-grown/ et https://warontherocks.com/2021/08/mind-the-gap-how-chinas-civilian-shipping-could-enable-a-taiwan-invasion/ (autres lectures intéressantes sur l’usage dual des ferries)
L’utilisation de ferry et de roro pour mener des opérations amphibies est extrêmement théorique, et surtout extrêmement contraint. Certes, les navires peuvent larguer, par mer d’huile, des blindés amphibies. Pour mener une offensive à l’aide d’un blindé amphibie, vous devez les lâcher à proximité des côtes, quelques km au mieux. Ca marchait en 1952; Beaucoup moins aujourd’hui, dans un monde saturé de missiles guidés et de drones. Surtout, on peut être certain que les abords des espaces plageables, seront tous minés par les Taïwanais, comme ont fait les Ukrainiens.
Si vous pouvez vous approcher assez pour que votre roro largue des VBA, c’est que des LST peuvent plager. Et justement, le constat de l’article, c’est que les LST ne peuvent plus plager, et qu’il est nécessaire de faire autrement.
Imaginez un peu le temps nécessaire pour qu’un roro puisse larguer une vingtaine de blindés, soit une compagnie ? Il faut au moins 40 minutes, en étant immobile. Impossible qu’il survive aussi longtemps. Déjà aux Malouines, les LST britanniques, qui pourtant n’avaient pas plagés, ont mangé chaud. Aujourd’hui, c’est tout simplement irréaliste.
Enfin, il ne suffit de lancer des véhicules blindés à la mer pour mener une opération amphibie. Il faut assurer le soutien logistique des troupes débarquées, évacuer les blessés, apporter munitions et vivres, ainsi que des renforts. Aucune de ces actions ne sont réalisables par un roro à la mer.
La solution la plus évidente, pour l’APL, est de prendre deux ou trois ports, pour créer autant d’axes de progression, avec un vrai soutien logistique qui suit derrière, pour conserver l’initiative et ne pas laisser le temps à l’adversaire de se réorganiser, de s’enterrer, et de figer le conflit. parce que si le conflit s’enlise, il est certain que l’APL aura de grosses grosses difficultés.
Vous avez un peu oublié dans l’analyse l’utilisation possible par l’APL des grands ferry Ro-Ro civils, dont certains font 45.000t, qui sont construits avec des normes incendie élevées et qui sont conçus pour être utilisés en seconde vague, voire en « 1+ ». Ils pourraient anticiper la fenêtre !
Pas du tout. Pour utiliser ces ferry, il faut prendre les ports. et toute l’analyse repose sur la prise des 4 grands ports de la cote occidentale de taiwan.