L’annonce récente d’essais avec un bateau sans pilote par l’agence suédoise d’acquisition met en lumière une accélération continentale dans les drones navals. Des véhicules de surface sans pilote (USV) aux aéronefs sans pilote (UAV) embarqués, en passant par les plateformes sous-marines autonomes, la dynamique s’étend désormais à l’ensemble du spectre.
Cette impulsion, qui touche aussi bien les missions de surveillance que la lutte contre les mines (MCM), interroge la manière dont les acteurs alignent leurs stratégies, leurs calendriers d’intégration et leurs infrastructures de commandement et conduite (C2) à bord des bâtiments.
En toile de fond, l’enjeu est double. D’un côté, l’objectif est d’augmenter la masse disponible à la mer tout en limitant l’exposition des équipages et en compensant des difficultés de recrutement. De l’autre, il s’agit d’éviter la fragmentation technique et budgétaire à l’heure où les investissements de recherche et développement (R&D) doivent produire des effets rapides et mesurables. Cette tension traverse les programmes nationaux et les coopérations, et renvoie à une question structurante pour les marines européennes: la convergence réelle des standards et des architectures d’intégration.
Sommaire
L’essai du bateau sans pilote de la FMV catalyse une bascule européenne
Le point de départ est clair. Comme l’indique la FMV (Försvarets materielverk), un bateau sans pilote est en essai, confirmant la volonté d’explorer des capacités de surface autonomes. Cette initiative s’inscrit dans une trajectoire amorcée depuis la fin des années 2010, lorsque plusieurs démonstrations ont validé la pertinence de combiner capteurs, liaisons de données et pilotage déporté. Elle traduit aussi un souci croissant de résilience opérationnelle, par la dispersion des capteurs et des vecteurs, et par l’adaptation des équipages à des architectures plus flexibles et numériques.
Ce signal récent s’articule avec des jalons européens accumulés entre 2018 et 2021, notamment OCEAN2020, collectif réunissant quarante-trois partenaires issus de quinze pays. Les démonstrations conduites en 2019 puis 2021 ont mis en évidence l’intérêt d’agréger des drones de surface, des plateformes sous-marines et des vecteurs aériens, tous intégrés dans des systèmes de commandement de navires. L’idée directrice consistait à montrer qu’un C2 naval peut orchestrer, en temps quasi réel, un ensemble de capteurs et d’effecteurs distribués, aux profils de vol ou de navigation hétérogènes, tout en conservant une boucle décisionnelle maîtrisée.
Au plan financier, le Fonds européen de défense joue un rôle d’amplificateur. Selon la Commission européenne — Fonds européen de défense (EDF), l’enveloppe atteint environ 7,9 milliards d’euros sur 2021–2027, dont 1,2 milliard engagé en 2023 pour des projets collaboratifs. Cet effort oriente les feuilles de route, pousse aux architectures modulaires et favorise l’émergence de briques fonctionnelles réutilisables. Il contribue également à diffuser des standards techniques minimaux afin d’éviter des ruptures d’interfaces pénalisantes entre systèmes, dans la perspective d’opérations conjointes.
Le moteur opérationnel est, lui, bien identifié. L’augmentation de la masse à coût soutenable, la réduction du risque humain dans la MCM et la compensation des tensions sur les ressources humaines se conjuguent. Plusieurs forces navales peinent à boucler leurs effectifs, comme nous l’avions établi en 2024, ce qui milite pour des équipages resserrés et des effecteurs téléopérés. Les essais suédois, en ce sens, ne sont pas isolés. Ils s’inscrivent dans une logique où la valeur n’est plus seulement dans le navire de premier rang, mais dans l’architecture fédérant des drones hétérogènes autour d’un C2 robuste et interopérable.
Panorama des drones navals en Europe, de la rMCM aux UAV embarqués
La coopération belgo-néerlandaise en lutte contre les mines illustre une approche systémique. Comme le rapporte Naval News, le programme de capacité robotisée rMCM comprend douze navires dédiés, assortis d’une boîte à outils de drones, dont l’USV Inspector 125 et un véhicule sous-marin autonome (AUV) A18-M. Cette combinaison associe plateformes, capteurs et logiciels, pour détecter, identifier puis neutraliser la menace, tout en éloignant les équipages des zones dangereuses. La flotte binationale, en standardisant sa chaîne MCM, profite d’économies de maintenance et d’entraînement partagés.
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