Le Haushaltsausschuss du Bundestag a réservé, dans le cadre de l’examen du Bundeshaushalt 2026, une enveloppe d’environ 7,8 milliards d’euros afin d’ouvrir la voie à l’acquisition d’une plateforme alternative à la frégate F126. Présentée comme un moyen de « laisser toutes les options ouvertes » au ministère de la Défense, cette dotation intervient alors que le programme F126 peine à respecter son calendrier et son intégration logicielle, et que la compétition européenne dans le naval, relancée par la sélection du Blacksword Barracuda aux Pays-Bas, rebattait déjà les cartes industrielles sur le segment sous-marin.
Au‑delà de l’apparente prudence budgétaire, la décision allemande agit comme un catalyseur. Elle touche à la fois la disponibilité future de la Deutsche Marine, les équilibres au sein de l’industrie navale européenne (Damen, TKMS, Naval Group, Fincantieri, chantiers allemands), et la mécanique des alliances sur le continent. C’est moins une simple reprogrammation qu’un signal: Berlin veut pouvoir pivoter rapidement si les risques techniques persistent, et se doter d’un levier d’ajustement industriel, dans un contexte où les capacités et les calendriers européens sont déjà sous tension.
Sommaire
Le Bundestag ouvre 7,8 Md€ pour une alternative sans annuler la F126
Le signal politique est explicite: la commission budgétaire du Bundestag a validé des titres permettant d’engager, « le cas échéant », une autre plateforme que la F126 pour un montant d’environ 7,8 Md€. Comme le rapporte hartpunkt.de, cette inscription n’emporte pas annulation automatique, mais confère au ministère une option financière et contractuelle pour s’affranchir d’une trajectoire devenue incertaine. Le cadrage insiste sur la modernisation urgente de la flotte et la nécessité de sécuriser l’aptitude opérationnelle future, alors que la F126 devait constituer l’épine dorsale du renouvellement des escorteurs allemands à l’horizon 2030.
Sur le plan technico-opérationnel, la F126 s’inscrit parmi les frégates lourdes les plus imposantes jamais construites en Allemagne: environ 10 000 tonnes à pleine charge, 166 mètres de long et 21 mètres de large, vitesse de 26 nœuds, autonomie de 5 000 nautiques, et un concept de modularité par missions, avec deux hélicoptères NH-90 et un drone aérien. D’après Opex360, l’armement doit combiner 8 missiles NSM, 64 ESSM, une tourelle de 127 mm, des canons de 27 mm et deux systèmes RAM, illustrant une polyvalence revendiquée surface-air-sous-marine.
La trajectoire industrielle initiale, pourtant, s’est complexifiée. Le contrat de 2020 attribué au néerlandais Damen s’élevait à environ 5 Md€ pour 4 unités, avec une chaîne de production ancrée en Allemagne (Peene Werft pour la poupe, German Naval Yard pour la proue, Blohm+Voss pour l’assemblage). Deux frégates supplémentaires ont été commandées en 2024 pour 3,1 Md€. Selon l’article de Opex360, des problèmes d’interfaces informatiques dans l’outil de conception et de fabrication de l’industriel ont engendré au moins deux ans de retard, poussant Berlin à suspendre certains paiements et plaçant Damen sous tension financière.
En d’autres termes, la dotation de 7,8 Md€ ne sanctuarise pas une rupture, elle prépare un pivot possible. Elle dote le ministère d’un instrument assurantiel: maintenir le cap si l’exécution se redresse, ou basculer vers une solution alternative si les risques de délais et de surcoûts devenaient incompatibles avec la montée en puissance de la Marine. Politiquement, le Bundestag se donne ainsi la capacité d’infléchir la solution capacitaire par le budget, dans un contexte d’exigence accrue sur les résultats et les échéances.
Zeitenwende, Zielbild Marine 2035+ et accélération des commandes redéfinissent la trajectoire navale allemande
La décision s’inscrit dans une dynamique structurelle plus vaste. Après vingt-cinq années de sous-investissements et de spécifications parfois décalées, la Deutsche Marine a présenté le plan Zielbild Marine 2035+, qui vise à la ramener au premier plan européen. Comme nous l’avons analysé, ce plan anticipe une flotte d’escorteurs portée à 16 frégates à l’horizon 2035, 6 destroyers antiaériens F127 et un effort massif sur les systèmes robotisés et la guerre des mines, rappelle notre analyse consacrée au plan 2035+.
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