[FLASH] Avec le C390, les forces aériennes suédoises font le choix de la rationalité face à l’A400M

La Flygvapnet (forces aériennes suédoises) aborde un cycle de modernisation où la capacité de transport tactique conditionne la réactivité nationale. L’étendue du territoire, les besoins de soutien interarmées et l’obligation d’opérer par tous temps imposent une flotte robuste, sobre à l’usage et suffisamment polyvalente pour alterner missions logistiques, évacuations sanitaires et soutien aux forces. Dans ce contexte, l’arbitrage ne se joue pas seulement sur la performance en vol, mais aussi sur la disponibilité en ligne et le coût de possession sur la durée. Or, la réflexion nationale converge vers un format capable de couvrir le quotidien opérationnel sans excès capacitaire, tout en restant interopérable avec les partenaires européens et atlantiques.

D’après la Suède – FMV (Försvarets materielverk), Stockholm a rejoint un programme d’acquisition conjoint pour de nouveaux appareils, avec la sélection du C390 comme solution de référence. Le choix traduit un arbitrage assumé entre polyvalence, maîtrise des coûts et accès rapide à une capacité mature, dans une approche mutualisée qui sécurise l’approvisionnement et le soutien. La Suède privilégie ainsi une trajectoire de renouvellement méthodique, alignée sur ses impératifs d’entraînement, de disponibilité et de coordination avec ses voisins. Cette décision emporte des effets sur le long terme, puisqu’elle conditionne la standardisation des procédures, la logistique et la formation, tout en ancrant l’aviation de transport dans un cadre coopératif pensé pour durer.

Selon l’Agence européenne de défense (AED), l’acquisition conjointe vise à renforcer la coopération capacitaire, rationaliser les chaînes de soutien et consolider des standards communs. Ce cadre offre un calendrier coordonné entre participants, avec des jalons de contractualisation et de livraisons pensés pour limiter les ruptures de capacité. Il favorise également une approche budgétaire plus lisible, en agrégeant des besoins nationaux et en pesant collectivement sur les conditions industrielles. Au-delà des modalités, l’objectif stratégique est clair : stabiliser une capacité de transport tactique européenne crédible, courante dans l’entraînement et immédiatement interopérable, afin de répondre aux sollicitations nationales comme aux engagements pris au sein de l’Alliance tout en garantissant l’endurance du modèle sur la durée.

C390 forces aériennes hongroises
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Pour la Flygvapnet, l’attrait principal tient à l’adéquation entre missions et format. Le C390 répond à un profil de tâches exigeant sans basculer dans une catégorie dimensionnée pour la projection intercontinentale. Face au C-130, référence familière aux forces occidentales, l’avion brésilien se place dans une enveloppe opérationnelle proche, avec une architecture et un niveau de performances qui s’alignent sur la plupart des besoins tactiques européens. À l’opposée, l’A400M occupe un segment plus lourd, utile pour certains flux volumineux mais moins adapté au quotidien national lorsque la densité logistique, la fréquence des rotations et la sobriété des coûts priment. La Suède recherche ici l’équilibre entre charge utile, allonge et soutenabilité.

L’équation économique, en outre, a pesé. Comme l’analyse Jane’s Defence, « le C390 se positionne comme une solution économique et performante pour les forces aériennes européennes. » Ce constat éclaire la logique d’un programme d’acquisition étroitement piloté par les besoins réels, où la dépense se justifie par le service opérationnel rendu et la capacité d’absorber un tempo de missions soutenu. Par ailleurs, une flotte construite autour d’un modèle moderne et bien diffusé ouvre la voie à des gains d’échelle en maintenance, à une montée en compétences plus rapide des équipages et à une gestion plus fine de la disponibilité, autant de paramètres structurants pour une aviation de transport au contact du terrain.

Le succès commercial de l’appareil renforce cette dynamique. Dans l’espace européen et au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN), plusieurs États ont retenu ce gabarit pour remplacer des cellules vieillissantes et converger vers un standard commun. Cette diffusion progressive crée un cercle vertueux d’interopérabilité, de mutualisation des retours d’expérience et de consolidation de la chaîne de soutien. En miroir, elle conforte la Suède dans une trajectoire qui maximise les synergies en exercices combinés, réduit les risques logistiques et sécurise l’approvisionnement en pièces et en expertise. Un modèle partagé simplifie les coopérations aériennes, depuis la planification jusqu’aux procédures de mission.

À l’opposée, l’A400M demeure un outil remarquable lorsqu’il s’agit d’acheminer des charges volumineuses ou de franchir des distances plus longues avec des équipements lourds. Cependant, la majorité des besoins quotidiens ne requiert pas systématiquement un tel gabarit. Ce décalage de segment illustre le caractère incomplet d’une offre uniquement centrée sur un appareil de grande capacité, sans déclinaison industrielle vers des plateformes plus légères et moins coûteuses. Une gamme plus étagée aurait mieux couvert l’éventail des missions courantes, celles où la fréquence des vols, la flexibilité d’emploi et la soutenabilité financière pèsent davantage que le volume exceptionnel. C’est précisément là que l’avion brésilien a trouvé sa pertinence.

C-130 forces aériennes suédoises
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Au plan doctrinal, cette orientation conforte une capacité de transport conçue pour servir d’abord les priorités nationales et régionales, puis, si nécessaire, s’intégrer rapidement dans des schémas multinationaux. La Suède y gagne une cohérence d’ensemble, de la planification des opérations à la maintenance, en passant par la formation. Elle sécurise aussi sa montée en puissance dans un environnement stratégique exigeant, sans immobiliser des ressources au-delà du besoin. La philosophie d’emploi qui en résulte privilégie la disponibilité, la réactivité et le réalisme budgétaire, tout en préservant l’ouverture vers des coopérations élargies, qu’il s’agisse d’exercices, de soutien mutuel ou de déploiements sous mandat collectif. 

Conclusion

En ciblant le segment historiquement occupé par le C-130, le C390 s’est installé comme une solution attractive pour de nombreuses forces. Dans cet espace, la Suède consolide une capacité de transport équilibrée, alignée sur ses besoins et ceux de ses partenaires européens et atlantiques. Par contraste, le pari d’un appareil unique à mi-chemin entre transport tactique et stratégique n’a pas pleinement convaincu en Europe, malgré les qualités indéniables de l’A400M. Le choix suédois illustre donc une préférence pour la pertinence d’emploi, la soutenabilité et l’interopérabilité, au cœur d’un programme d’acquisition coopératif qui organise les livraisons, structure le soutien et sécurise l’usage opérationnel sur la durée.


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3 Commentaires

  1. L’A400M se voulait un appareil de transport stratégique aux capacités tactiques (capacités sur pistes non préparées)
    Son échec commercial (jusqu’ici) démontre qu’il est trop gros pour du transport tactique et trop petit pour du transport stratégique (un client potentiel aurait demandé la réouverture de la ligne de production du C17).

    • en fait, l’A400M est un avion « idéal » pour la france : on n’allait pas acheter de C17, et il fallait plus que le C130 pour l’Afrique, le M/O et l’outre-mer. Mais pour la plupart des forces aériennes européennes et meme mondiales, qui n’ont pas de problématiques de projection de puissance autonome, le C130 suffit largement, et le C390 a donc parfaitement trouvé son créneau. C’est juste dommage qu’on n’ai pas fait un A300M de 80 t (classe C130) voire un A200M de 55t (Transall). Ca, ca aurait eu du sens surtout si on parvenait à mutualiser des moyens entre les flottes.

  2. Vu le contexte actuel, on aurait peut-être intérêt à s’équiper de C-390 plutôt que de lancer un programme européen d’avion de transport tactique médian, quitte à utiliser cet achat pour sécuriser des ventes au Brésil (je pense aux sous-marins, mais il y a certainement davantage à faire).

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