dimanche, décembre 7, 2025
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La DARPA teste ses Intelligences Artificielles sur le jeu Starcraft

Dans un précédent article, nous avons les changements doctrinaux en cours au sein du Pentagone pour s’adapter aux enjeux posés aux forces armées américaines par les conflits de haute intensité à venir, notamment contre la Russie ou la Chine. L’axe principal retenu par l’Etat-Major américain repose sur la grande flexibilité offerte par l’intégration des nouveaux systèmes de communication et d’analyse, répartis sur l’ensemble de la « Kill Chain », que nous traduirons ici « Chaine d’Engagement ». Afin d’évaluer les capacités offertes par cette nouvelle approche, et de préparer les officiers comme les équipements à y faire face, la DARPA a lancé un programme d’intelligence artificielle sensée simuler toutes les décisions tactiques, même les plus « sournoises », offertes par la nouvelle doctrine, mais également ses faiblesses face à un adversaire expérimenté, habitué à user de méthodes non conventionnelles pour remporter la victoire. Toute ressemblance avec une certaine brigade parachutiste en Crimée sans marque distinctive pour figer la réponse occidentale le temps nécessaire à la sécurisation de tous les sites stratégiques de la région, serait naturellement parfaitement fortuite.

Ce programme, identifié par le nom de code Gamebreaker, a pour objet de concevoir une Intelligence Artificielle adaptative capable, comme le veut la nouvelle doctrine US, d’exploiter à tous les échelons les opportunités identifiées par les unités de la Chaine d’Engagement, et de réorienter rapidement et efficacement l’effort global pour en optimiser l’efficacité. Après une phase de test et d’apprentissage, le programme sera intégré à la simulation hyper-réaliste développée par Matrix Game « Command : Modern Operation« , capable de simuler tous les engagements allant de la guerre froide à aujourd’hui. L’objectif, à terme, est d’intégrer cette Intelligence artificielle dans la Chaine d’Engagement afin de fournir aux commandants d’unités et de groupement d’unités des alternatives tactiques quantifiées coordonnées à l’échelon du théâtre d’opération.

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Command: Modern Opération a été conçu par les développeurs de la série de simulation navale Harpoon, auquel Tom Clancy participa lorsqu’il écrivit son roman « Tempête rouge »

Jusque là, rien de bien surprenant. Mais qu’en est-il lorsque la Darpa explique que le système sera initialement confronté à des adversaires sur le jeu « Starcraft », autant pour « faire son apprentissage » que pour en évaluer les contours et les performances ? Rappelons que le jeu Starcraft, dont la première mouture a été publiée en 1998 par Blizzard Entertainement, à qui l’on doit également Wacraft et World of Warcraft, est un jeu de stratégie en temps réel largement employé, depuis sa parution, dans les compétitions d’e-sport. Comme tous les RTS (Real Time Strategy), ce jeu suppose de capturer des ressources pour produire des unités et vaincre son adversaire sur une carte fermée ayant un nombre limité de ressources. Mais là ou le jeu de Blizzard a surpassé ses concurrents pour en faire une référence, c’est dans la nature très asymétrique des factions (races) qui s’affrontent, obligeant le joueur à non seulement adapter sa stratégie à sa propre faction, mais à celle de son adversaire, très différente de la sienne.

On comprend, dès lors, à quel point ce jeu du commerce constitue une excellente plate-forme d’apprentissage pour une Intelligence Artificielle devant justement faire montrer d’une capacité accrue à évoluer et exploiter ces rapports de force dissymétriques. En outre, le jeu se déroulant en temps réel, dans un mode « double aveugle », c’est à dire sans qu’aucun des adversaires ne voit le dispositif de l’autre au delà de la portée de détection de ses propres unités déployées, il simule parfaitement bien, dans l’esprit, la réalité des engagements modernes, notamment dans le domaine du combat de haute intensité. En cela, une IA capable de se montrer performante sur Starcraft répondrait bien davantage aux attentes des militaires que celles qui s’imposèrent au jeu d’échecs (Deep Blue : 1997) ou de Go (AlphaGo : 2016) , bien plus éloignée de leur problématique.

starcraft blizzard Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Starcraft est un jeu de stratégie en temps réel d’une intensité hors norme basé sur des affrontements dissymétriques extrêmes entre factions ennemies

Surtout, Starcraft étant un pilier de l’E-sport, les compétitions de sport électronique, il a fédéré une communauté de joueurs extrêmement talentueux, capables de developer des stratégies très élaborées de manière très réactive. Ces champions, car c’est ainsi que l’on désigne ces joueurs qui s’astreignent à une vie comparable aux plus grands champions sportifs, sont en effet capables de visualiser des schémas tactiques, des opérations de reconnaissance, des flux logistiques et des renforcement défensifs, tout en guettant le moindre faux pas de l’adversaire, et ce sur l’ensemble de la carte. De fait, non seulement Gamebreaker pourra apprendre sur un jeu, certes bien plus simple que la réalité du combat moderne, mais dont il reproduit l’essence, mais il pourra également se confronter à des joueurs extrêmement entrainés et performants dans ce domaine, au même titre que l’IA du programme Alpha Dogfight se confrontera aux pilotes de chasse les plus expérimentés.

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Sortie en 2013, le fil « la stratégie Ender » racontait le parcours d’un jeu prodige de la stratégie dans un conflit contre une race Alien

Mais ce scénario n’est pas sans rappeler le roman de science fiction « La Stratégie Ender » d’Orson Scott Card, publié en 1985, et adapté sur grand écran en 2013 avec le jeune Asa Butterfield dans le rôle titre, qui narre la progression d’un jeune prodige de la stratégie recruté par les armées pour entrainer une intelligence artificielle devant diriger les combats face à une race extraterrestre, les Doryphores. Le roman décrit, au fil de la narration, le mince voile séparant ce que le jeune Ender perçoit comme une simulation, et la réalité des combats. Raison pour laquelle si l’Intelligence Artificielle peut assurément avoir un rôle clé dans l’analyse des flots de données de plus en plus riches qui sont générés de manière croissante par les systèmes de combat communicants, elle ne doit, en aucun cas, se substituer à la décision humaine qui, elle, dispose d’une qualité que les IA ne peuvent acquérir, en tout cas à ce jour, l’empathie. Et comme l’avait montré l’étude du Think Tank RAND Corporation sur le sujet, les conséquences d’un mauvais usage de l’Intelligence Artificielle peuvent rapidement être dramatiques ….

Le remplaçant du Super Hornet de l’US Navy avance discrètement

Ce n’est pas un secret, l’US Navy n’est pas vraiment convaincue par les capacités du F35C, la version « lourde » du chasseur de Lockheed-Martin conçue pour opérer à partir de ses porte-avions. Si l’Etat-major naval américain reconnait l’intérêt des capacités de fusion de données de l’appareil, ainsi que de sa furtivité, elle est beaucoup plus circonspecte quand à sa vitesse, sa capacité d’emport, sa configuration mono-moteur et surtout son rayon d’action jugé trop limité, même si la version C a justement été alourdie pour atteindre les 700 miles, 150 de plus que la version A basée à terre. Alors que les systèmes anti-navires russes et chinois voient leurs performances et leurs précisions s’accroitre, cette restriction risque de rendre, à moyen terme, le nouveau chasseur américain inadapté à une utilisation dans un conflit de haute intensité.

C’est la raison pour laquelle en 2016, l’US Navy s’engagea dans le programme F/A-XX, destiné à remplacer les F/A 18 E/F Super Hornet et les AE 18G Growler qui équipent majoritairement les flottilles de chasse embarquée américaine, et qui devront commencer à être retirés du service au milieux des années 2030. Mais les contraintes budgétaires, et les atermoiements politiques, obligèrent à une approche précautionneuse et même discrète, afin de pouvoir mener les études préalables nécessaires pour respecter les délais définis. Ce projet semble désormais prendre de l’ampleur, puisque la semaine dernière, le chef des acquisitions de l’US Navy, James Geurts, a annoncé la création d’une structure dédiée à ce programme, un bureau dédié au programme Next Generation Air Dominance dénommée PMA-230, confié au capitaine Al Mousseau.

Super Hornet Marines Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Malgré ses qualités, le Super Hornet marque déjà le poids des années, et arrive en limite d’évolutivité pour

A l’instar des arbitrages qui prévalurent à la conception du Super Hornet et du Growler, l’US Navy a défini un ensemble de caractéristiques « fermes » pour le programme, notamment concernant les performances aéronautiques de l’appareil, comme un rayon d’action supérieur à 1000 miles et la vitesse supérieure à Mach 2, quitte à accepter des performances moindres en matière de capacité d’emport ou de furtivité. En outre, l’appareil, qui sera naturellement piloté, sera conçu pour interagir nativement avec des drones, à l’instar des programmes européens SCAF ou Tempest, faisant du F/A-XX un véritable appareil de « 6ème génération », si l’on se réfère à la classification dans ce domaine (que nous savons très arbitraire). En d’autres termes, le nouveau chasseur embarqué US sera avant tout une plate-forme de pilotage et de contrôle de systèmes d’armes autonome, qui eux seront chargés de mettre en oeuvre les systèmes offensifs et défensifs.

Conscient des contraintes budgétaires qui pèseront sur le programme, l’US Navy fait d’ailleurs preuve de pragmatisme, n’hésitant pas, par exemple, à envisager de reprendre des pans technologiques entiers venant du programme F35, comme la fusion de données, de sorte à rester dans l’enveloppe définie en terme de budget, de délais et de performances. De même, la Navy entend collaborer avec l’US Air Force, qui participe également au programme Next Generation Air Dominance pour developper le successeur du F22, dans plusieurs domaines, concernant notamment l’électronique embarquée ou l’armement. Et le défi est de taille, puisque la Marine américaine espère developper et construire son nouveau programme dans une enveloppe de moins de 100 Md$, le quart de l’enveloppe employée pour le developpement du F35…

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Le F35C, plus lourd de 2 tonnes et plus cher de 30% au F35A, n’offre pas la vitesse et le rayon requis par l’US Navy pour faire face aux systèmes de déni d’accès russes ou chinois

Pour l’heure, l’US Navy a pris contact avec les constructeurs américains, sans pour autant avoir émis une demande d’information (Request for Information). Sur la période 2020-2025, elle a provisionné une enveloppe de 4,5 Md$ pour entamer les travaux concernant le nouveau programme, la dernière commande de Super Hornet devant intervenir en 2021. Alors que le Pentagone se prépare de plus en plus activement à une possible confrontation avec les forces chinoises et/ou russes, ou leurs proxy équipés par ces derniers, le besoin pour un appareil embarqué rapide et disposant d’un long rayon d’action risque de se faire de plus en plus pressant, alors que le F35, conçu sur des paradigmes d’engagement issus des années 2000, pourrait lui rapidement montrer les limites des arbitrages dont il est la quintessence.

La Hongrie choisie le Lynx de Rheinmetall dans un accord industriel global

Le groupe industriel allemand Rheinmetall a signé, le 16 aout, un accord global portant sur l’acquisition de plus de 200 véhicules de combat d’infanterie Lynx, dans le cadre d’un contrat de fabrication local de plus de 2 Md€ visant à moderniser conjointement les armées et l’industrie de Défense du pays. Il s’agit du premier client du blindé de nouvelle génération allemand, par ailleurs toujours engagé dans la compétition Land 400 Phase 3 australienne, ou il est opposé au Redback K21 sud-coréen, pour un contrat portant sur 450 véhicules de combat d’infanterie.

Aucune information n’a été publiée concernant la configuration exacte retenue par le gouvernement hongrois, que ce soit en matière de protection, de propulsion, d’équipements de communication ou d’armement. Il n’est pas non plus précisé qu’il s’agit de la variante KF31 de 38 tonnes, ou la version lourde KF41 de 50 tonnes. Le communiqué de Rheinmetall se contente d’indiquer qu’une joint-venture entre le gouvernement hongrois et le groupe allemand sera créée afin de mener à bien le projet, et construire l’usine d’assemblage qui produira le blindé, qui entrera en service entre 2026 et 2027 dans les forces hongroises.

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Les forces armées hongroises ont également commandées 20 hélicoptères H145M et 16 H225M auprés d’Airbus Helicopter

L’armée de terre hongroise avait déjà fait confiance aux entreprises allemandes en commandant, en septembre 2019, 44 chars Leopard 2 A7+ et 12 Leopard 2 A4 auprés de l’entreprise Krauss-Maffei Wegman, ainsi que 24 canons automoteur blindé chenillé de 155 mm Pzh 2000 auprés de Rheinmetall, afin de remplacer les chars T72 M1 et les obusiers tractés hérités du pacte de Varsovie encore en service. Les 200+ Lynx remplaceront, pour leur part, les transports de troupe blindés BTR-80 et les véhicules de reconnaissance blindés BRDM-2. Dans le domaine de l’aérocombat, les Mi-24 et Mi-17 hongrois seront, quand à eux, remplacés par 20 hélicoptères d’attaque légers H145M et 20 hélicoptères de manoeuvre H225M Caracal acquis auprés d’Airbus Hélicoptères. Ces investissements sont réalisés par Budapest dans le cadre du programme Zrinyi 2026, visant à moderniser les forces armées hongroise sur la base d’une augmentation des dépenses de défense à 2% du PIB comme requis par l’OTAN.

La Défense israélienne s’opposera à la vente de F35 aux Emirats Arabes Unis

Selon le site israélien Haaretz, citant des sources officielles, le lobbying israélien particulièrement actif aux Etats-Unis pour empêcher les Emirats Arabes Unis ou tout autre état arabe de se doter du F35 sera maintenu, même si certaines sources craignent que le premier ministre Netanyahu ait consenti à la transaction dans un accord secret. Dubai a, en effet, exprimé son intérêt pour acquérir des appareils de haute technologie, comme est supposé l’être le F35, à de plusieurs reprises, s’étant systématiquement heurté au refus américain conditionné par le lobbying politique extrêmement puissant des milieux juifs américains et de leurs alliés. Pour l’Etat hébreux, il est en effet, eu égard au rapport de force démographique très défavorable qui est le sein dans la région, de conserver un avantage technologie suffisant pour dissuader toute offensive arabe contre lui, y compris pour les pays ayant déjà normalisés leurs relations avec Jerusalem, comme l’Egypte.

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Les EAU mettent en oeuvre une soixantaine de mirage 2000-9. Dubaï a a plusieurs reprises émis le souhait de les remplacer par des avions Rafale.

Mais l’accord entre les Emirats Arabes Unis et Israël, si la presse internationale s’est surtout intéressée à son volet palestinien, porte avant tout sur l’Iran, qui va pouvoir, à partir du 18 octobre de cette année, importer à nouveau des systèmes d’armes modernes, qu’ils viennent de Chine, de Russie ou d’autres pays, comme la Turquie. Dès lors, le petit état des Emirats Arabe Unis, et ses 10 millions d’habitants, se trouverait rapidement menacé par l’Iran 8 fois plus peuplée, si tant est que cette dernière puisse acquérir des systèmes modernes. Dubaï a donc un impérieux besoin de renforcer ses capacités militaires, et fait le même parie que Jerusalem en voulant compenser sa faiblesse numérique par un avantage technologique, qu’il s’agisse d’avions furtifs comme le F35, de drones de combat ou de systèmes anti-aériens et anti-missiles évolués, comme le THAAD.

Reste que, entre la marche arrière quasi-immédiate des autorités israéliennes concernant l’abandon de la colonisation des territoires palestiniens, et la reprise du lobbying pour interdire la vente d’équipements de haute technologie, Dubaï risque fort de ne pas y trouver son compte dans cet accord qui n’a visiblement d’historique que la couverture médiatique assurée par la Maison Blanche. De fait, les équipes de Dassault Aviation et de la team Rafale, qui proposent l’avion français aux autorités émirati depuis plusieurs années, pourraient bien retrouver rapidement le sourire, Dubaï ayant dans tous les cas un besoin urgent de renforcer ses moyens de défense par un avion de haute performances, et le Rafale constituant, sans le moindre doute, une excellente solution dans ce domaine.

Européens et Russes s’entendent contre « toute ingérence en Biélorussie »

La Russie ne tolérera pas d’ingérence occidentale en Biélorussie, c’est en substance le message qu’a transmis le président russe Vladimir Poutine à ses homologues français et allemand à l’occasion de deux conversations téléphoniques ayant suivi un point de situation avec le président biélorusse Loukachenko. Selon les communiqués officiels, les deux conversations entre le président russe et ses homologues européens eurent lieux successivement à l’initiative de la Chancelière Merkel et du Président Macron, le président russe ayant tenu, visiblement, le même discours dans les deux cas. A l’issue de ces deux conversations, le président russe s’est entretenu avec Charles Michel, le président du Conseil Européen, se disant préoccupé par les pressions faites par certains pays européens sur les dirigeants biélorusses.

Au delà du contenu des communiqués officiels, les dirigeants européens voulaient avant tout s’assurer de la non-intervention de la Russie dans le processus en cours à Minsk, ce qui provoquerait une crise extrêmement préoccupante entre la Russie et les pays européens. A.Merkel comme E.Macron savent tous deux que le Kremlin ne laissera pas la Biélorussie se porter à l’Ouest, et l’objectif des deux conversations, visiblement parfaitement coordonnées, visait selon toute vraisemblance à rassurer la Russie dans ce domaine, de sorte à prévenir tout enchainement d’événements basé sur des présomptions erronées. A noter que les présidents russes et français ont également abordé, à cette occasion, la situation en Méditerranée orientale et en Libye, et auraient convenu de contacts ultérieurs à ce sujet.

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Le président Biélorusse semble déterminant à user de toutes les « ficelles » à sa disposition pour tenter de rester au pouvoir, même au risque de déclencher une crise majeure entre la Russie et l’Europe.

Si les dirigeants européens et leur homologue russe sont effectivement parvenus à convenir d’un statu quo sur la Biélorussie permettant aux biélorusses de mener leur processus en toute autonomie, sans interférence d’ou qu’elles viennent, il s’agirait incontestablement d’un grand pas dans les relations russo-européennes, ouvrant des possibilités significatives pour faire baisser les tensions entre les deux blocs, ainsi qu’en Ukraine. Il est, à ce titre, interessant de constater que les contacts ont visiblement été pris à l’échelon européen, et non à l’échelon de l’OTAN.

Reste que dans ce domaine, il convient de rester prudent jusqu’au bout, d’autres facteurs pouvant intervenir pour faire fi des progrès enregistrés, d’autant que le président Biélorusse lui-même semble prêt à user de tous les moyens à sa disposition pour tenter de se maintenir au pouvoirAinsi, peu après ces contacts entre les dirigeants européens et le président russe, la présidence Biélorusse a annoncé que les unités militaires déployées aux frontières occidentales du pays étaient prêtent à repousser toute tentative d’invasion. Une déclaration qui érode encore davantage le peu de crédibilité qui reste au dirigeant du pays, après l’humiliation subie hiers lors d’un discours largement conspué par les ouvriers invités à soutenir le président Lukashenko.

Comment le Pentagone se prépare-t-il aux conflits de haute intensité à venir ?

Depuis la fin de la guerre froide, et l’effondrement du bloc soviétique, de nombreuses armées mondiales, y compris les armées américaines, s’éloignèrent des concepts d’emploi symétrique pour accroitre leur efficacité dans les campagnes où l’engagement anti-insurrectionnel était de rigueur. Peu à peu, les armées se sont allégées, pour gagner en mobilité et réactivité, et concentrèrent leurs investissements vers des besoins immédiats, comme les drones ou les blindés protégés contre les IED, au détriment de compétences lourdes, comme le combat mécanisé lourd, la guerre électronique ou la manoeuvre au delà de l’échelon de la brigade.

Alors que les armées occidentales s’adaptaient aux engagements en Afghanistan, en Irak ou au Mali, la Chine et la Russie maintinrent leurs efforts pour se doter de nouvelles compétences de haute intensité, au point désormais de surpasser dans de nombreux domaines les forces de l’OTAN et de leurs alliés. Après la première alerte donnée par l’annexion de la Crimée et la construction d’ilots défensifs artificiels en mer de Chine, les Etats-Unis entamèrent, à partir de 2015, un basculement progressif pour reconfigurer les armées et leurs doctrines afin d’être en mesure de retrouver la prédominance en matière de combat de haute intensité. Avec l’accélération et l’intensification des tensions mondiales, comment le Pentagone se prépare-t-il pour faire face aux enjeux militaires à venir face à des adversaires aussi compétents et bien équipés que les forces américaines, et que leurs alliés ?

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Les conflits récents auquel ont participé les armées occidentales, comme ici au Mali, n’ont que peu en commun avec les conflits de haute intensité qui se dessinent dans l’avenir

Qu’il s’agisse des conflits en Afghanistan, en Irak, en Libye, au Mali ou en Somalie, tous peuvent être qualifiés de conflit de basse intensité, ou de conflits anti-insurrectionnels. Les forces terrestres, navales et aériennes occidentales durent faire face non pas à des armées constituées et équipées de l’ensemble des équipements employés par des forces militaires modernes, mais à des groupes armés très mobiles, se fondant dans la population, exécutant des séries d’attaques éclairs et embuscades, et usant de materiels légers ou artisanaux comme les IED ou des drones du commerces « militarisés ». A l’inverse, un conflit de haute intensité suppose un affrontement « symétrique » entre des adversaires disposant d’équipements technologiques similaires lourds, comme l’utilisation de l’artillerie, de blindés, de moyens aériens, de systèmes anti-aériens et d’unités navales, mis en oeuvre par des militaires entrainés et disciplinés, agissant de manière coordonnée. Il est évident que ces deux formes d’engagement reposent sur des paradigmes très différents.

Ainsi, alors que les bases, et notamment les bases aériennes, avaient traditionnellement le statut de sanctuaire sécurisé en Afghanistan ou en Irak considérés comme des théâtre basse intensité, les frappes par missiles balistiques déclenchées par l’Iran, un adversaire « symétrique », contre les bases américaines d’Al Asad et d’Idleb en Irak en représailles d’une attaque américaine par drone ayant couté la vie au général Souleimani, mirent fin à cette certitude, fournissant un excellent exemple de la différence entre un engagement asymetrique et symétrique. De même, le brouillage intense concernant les communications mais également les signaux GPS déployé par les unités russes à proximité des pays Baltes et de la Finlande à l’occasion de l’exercice Zapad 2017, firent prendre conscience aux occidentaux de la menace qui pesaient sur leurs propres communications, ainsi que sur les systèmes de guidage des armes et des véhicules militaires.

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La Russie dispose de nombreux systèmes de brouillage très efficaces, comme le Borisoglebsk-2 spécialisé dans le spoofing GPS

Loin d’être anecdotique, ces deux éléments ont remis en cause des pans entiers de la doctrine militaire occidentale et américaine employées ces deux dernières décennies. Ainsi, il apparait désormais nécessaire de déployer les forces aériennes à partir de bases beaucoup plus éloignées de la ligne d’engagement, obligeant les appareils à effectuer des transits plus long et requérant un nombre d’avions ravitailleurs plus important. Cela réduit par ailleurs le temps opérationnel sur zone des aéronefs, voir la quantité de munitions disponibles, obligeant à augmenter la flotte aérienne pour disposer du même potentiel aérien opérationnel. Et même à plus de 500 km de la zone d’engagement, les bases aériennes se trouvent désormais vulnérables face aux missiles de croisière et aux missiles balistiques à moyenne portée, surtout si ces derniers sont hypersoniques, réduisant les chances d’interception et le délais de réaction des cibles. En conséquence, il sera nécessaire d’augmenter la répartition et la ventilation des aéronefs sur un nombre plus important de bases aériennes, voir à partir de bases improvisées, modifiant encore davantage les doctrines en cours durant les 30 dernières années. De même, les forces terrestres et navales occidentales perdirent progressivement en volume et en puissance de feu, deux caractéristiques clés en matière de combat de haute intensité.

Pour répondre au challenge posé par les armées russes, et surtout chinoises, le Pentagone s’appuie sur une doctrine nouvelle, celle de l’engagement multi-domaine. Selon celle-ci, le partage des informations entre tous les acteurs alliés du champs de bataille permettrait de répondre de manière optimale aux besoins et aux opportunités, de sorte à prendre l’avantage sur l’adversaire par la vitesse d’exécution et l’imprévisibilité des actions entreprises. Exit les notions de ligne de front et d’action longuement planifiée, l’engagement multi-domaine transforme l’action militaire en une action dynamique mouvante faite d’opportunités et d’actions décisives, coordonnées à tous les échelon de la chaine de commandement pour un résultat optimum. Il s’agit, en quelque sorte, de la doctrine de guerre éclair ultime, tout du moins eu égard à la technologie du moment.

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L’architecture de guerre électronique distribuée de l’US Army intégrera, outre les TLS, de nombreux autres systèmes de brouillage et d’interception de message électronique

Mais parvenir à un tel niveau d’efficacité suppose de profonds bouleversements dans les armées américaines, de sorte à permettre à des unités et des équipements très différents de collaborer de manière efficace et sécurisée, et ceci dans le cadre d’une chaine de commandement gardant la main mise sur les opérations. Ainsi, chaque acteur du champs de bataille, qu’il y soit déployé physiquement ou qu’il agisse en soutien à plusieurs milliers de kilomètres de là, se transforme en unité d’action, de communication, de collecte de renseignement et de décision, et ce quelque soit sa spécialité, son arme et même son pays. Pour de nombreux théoriciens de l’action militaire, il s’agit là du Graal en matière d’efficacité des forces armées.

Reste que pour parvenir à un tel niveau d’intégration, il est indispensable de disposer de la maitrise des ondes, afin de sécuriser les moyens de communication des différents systèmes, comme d’empêcher l’adversaire d’utiliser ses propres moyens d’engagement collaboratifs. Or, il s’agit d’un domaine dans lequel les Etats-Unis comme leurs alliés investirent très peu, pour ne pas dire pas du tout, au cours des 30 dernières années, contrairement à la Chine et la Russie qui, conscients de l’intérêt que représentait la guerre électronique dans l’engagement de haute intensité, maintinrent leurs investissements et leurs moyens, au point de disposer désormais d’un avantage marqué dans ce domaine face aux forces occidentales.

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Le prototype Stryker TLS de Lockheed Martin présenté à l’US Army

Le Pentagone a dès lors entrepris de regagner la bataille des ondes, maillon central de la doctrine d’engagement multi-domaine, et plusieurs programmes virent le jour à partir de 2018 dans ce domaine. L’US Army est en pointe dans ce domaine, avec le programme Terrestrial Layer System ou TLS, un système de brouillage modulaire embarqué sur un blindé Stryker, et agissant en unité constituée de 3 véhicules pour effectuer des interceptions électromagnétiques et des brouillages furtifs, sans que l’adversaire n’ai conscience d’avoir été brouillé ou intercepté. Prévus pour entrer en service dès l’automne 2022, les TLS ne représentent qu’un premier maillon dans l’offre de guerre électronique dont l’US Army veut se doter dans les années à venir.

Une chose est certaine, les forces armées américaines se préparent activement, et avec détermination, à des conflits dont la nature et l’intensité n’auront plus aucun rapport avec ceux ayant marqué les années 90, 2000 et 2010. L’ampleur des bouleversements en cours au sein du Pentagone, qui remet en cause jusqu’à ses doctrines d’engagement, et ce sur des délais très courts à l’échelle militaire, montre à quel point les officiers généraux américains prennent au sérieux les menaces russes et chinoises, et considèrent comme bien réel le risque qu’un conflit n’éclate face à eux. De fait, les armées américaines multiplient les exercices pour valider leurs capacités d’engagement coopératif et multi-domaine.

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A l’exception des Tornado ECR de la Luftwaffe, prochainement remplacés par des EA-18G Growler, l’Europe n’a aucun équipement de guerre électronique offensif en parc.

Cela met également en exergue le contraste qui existe avec la perception du risque qui subsiste en Europe, aucun pays européen n’ayant, à ce jour, adapté sa propre doctrine ou planification militaire pour être en mesure de faire face à de tels adversaires. Même la France, qui fait l’article à qui veut l’entendre du rôle central de l’indépendance stratégique pour l’Europe, reste engoncer dans un format de forces hérité du Livre Blanc de 2013, et ne prévoit pas de le modifier avant la prochaine mandature, à partir de 2022, dépendant donc elle aussi, en matière d’engagement conventionnel, de la protection américaine dans les années à venir. Espérons que les adversaires potentiels auront la bienséance de vouloir patienter jusqu’à ce que nous soyons prêt ….

Avec l’Akinci, la Turquie complète sa gamme de drones armés à longue endurance

Les drones turcs ont, ces derniers mois, largement fait la preuve de leur efficacité opérationnelle, que ce soit sur les théâtres d’opération en Syrie, en Libye ou en Irak. Qu’il s’agisse du drone moyen Anka ou du drone léger TB2, ils associent une endurance remarquable (24 heures), des capacités de détection et de communication efficaces, et des capacités d’emport de munition qui ont fait leur preuve. Ainsi, en Libye, les TB2 turcs auraient détruits plusieurs systèmes anti-aériens Pantsir S1 fournis par les Emirats Arabes Unis aux forces du Général Haftar, tout en n’enregistrant qu’un nombre limité de pertes. En outre, ils sont réputés peu onéreux, le TB2 étant annoncé à un prix unitaire de seulement 5 m$.

Le concepteur du TB2, Bayraktar n’avait de toute évidence aucunement l’intention de se reposer sur ses lauriers, en développant à peine le TB2 entré en service, un nouveau modèle, beaucoup plus lourd, l’Akinci, un drone bimoteur offrant des performances proches de celles des drones MALE américains comme le Reaper. Le nouveau drone, qui avait effectué son premier vol en décembre 2019, vient d’effectuer un second vol d’une heure, selon Bayraktar, l’occasion de présenter les performances de l’appareil et son potentiel opérationnel.

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Cette infographie présente les principales caractéristiques du drone Akinci de Bayraktar

Affichant une masse maximale au décollage de 4,5 tonnes, le Bayraktar Akinci a une envergure de 20 mètres, et une capacité d’emport de 900 kg en carburant et équipements internes, et de 450 kg sur les 4 points d’emport sous voilure et 2 points d’emport sous le corps de l’appareil. Il est propulsé par 2 turbopropulseurs de 750 cv AI450T de facture ukrainienne, lui offrant un plafond pratique de 40.000 pieds, soit plus de 12.000 mètres, le double de celui du TB2. En outre, le drone dispose d’une autonomie de 24 heures, ainsi que d’une électronique embarquée évoluée comprenant notamment un radar AESA et un système de communication par satellite redondant.

L’appareil pourra mettre en oeuvre un vaste panel de munitions air-sol, air-surface et air-air, allant des mini-munitions guidées MAM-L/-C à la bombe guidée JDAM en passant par le missile air-air Bozdogan, faisant du Bayraktar Akinci aussi bien un outil de reconnaissance et d’attaque ciblée qu’un outil d’interdiction, dans un contexte de basse ou de moyenne intensité. Pour l’heure, le prix du système n’est pas divulgué, mais il ne fait aucun doute qu’il sera extrêmement compétitif, se présentant comme une alternative économique aux systèmes israéliens ou américains, et un concurrent potentiel aux systèmes russes et surtout chinois.

La Maquette grandeur nature du drone europeen EuroMale Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
L’avenir du projet Euromale est largement compromis par les désaccords entre les états et les industriels sur l’enveloppe budgétaire globale du programme

Le succès de la Turquie dans le domaine des drones longue endurance, malgré des capacités technologiques sensées plus limitées que celles à la disposition des européens, met en évidence les faiblesses des approches européennes dans le domaines, qu’elles soient nationales ou collectives. Le Bayraktar Akincy n’est pas dans la même catégorie que l’Euromale, un appareil sensé être beaucoup plus imposant (26 mètres d’envergure), plus rapide et plus lourd. Mais il montre aux européens que la configuration bimoteur n’est pas antinomique avec la conception d’un drone MALE economique, contrairement à ce qui est souvent reproché au projet Euromale pour expliquer son cout très élevé.

Il est de fait aujourd’hui crucial d’identifier les raisons des échecs répétés des européens dans le domaine des drones de combat à longue endurance, au delà de la simple désignation à la vindicte populaire de caractéristiques exigées par tel pays, ou par l’incapacité des industriels à proposer un modèle au juste prix. Car si l’Europe, ou ses membres, veulent effectivement atteindre un certain degré d’autonomie stratégique, il sera nécessaire d’être en mesure de concevoir et de fabriquer efficacement des systèmes de drones, que ce soit pour mener des opérations de reconnaissance, des frappes ciblées, des surveillances discrètes, des relais de communication ou des missions de combat. Le drone, qu’il soit MALE, HALE, furtif ou en essaim, est appelé à se diffuser à tous les échelons de l’action militaire, et la maitrise de cette technologie est indispensable à tout pays, ou alliance, souhaitant disposer d’une capacité de résilience significative.

Dassault Aviation et Safran en tête des entreprises Défense ayant connu la plus forte progression en 2019

Comme chaque année, le site d’information Défense américain Defensenews.com a publié son classement des 100 plus importantes entreprises mondiales de Défense. Le classement 2020 (sur les chiffres 2019) offre relativement peut de changements majeurs vis-à-vis du classement de l’année précédente, et les Etats-unis restent les leaders incontestés dans le domaine, avec 7 entreprises parmi les 10 plus importantes et 41 entreprises présentes dans le classement. Les 5 principales entreprises de défense mondiales sont, bien évidemment, toujours américaine, menée par Lockheed-Martin, suivie de Boeing, General Dynamics, Northon-Grumman et Raytheon.

La Chine conforte sa seconde place avec 2 entreprises placées dans le Top 10, et 7 entreprises dans le classement, réparties entre la 6ème et la 24ème place. Elles présentent, pour la plupart, une forte croissance depuis 2019, entre 20 et 35 %, révélatrice de l’extrême dynamisme de la commande domestique chinoise, et de succès croissants sur la scène internationale. Le britannique BAe est le seul « européen » du classement à atteindre le Top 10, se positionnant 7ème au classement, alors que l’européen Airbus est rétrogradé de la 9ème à la 12ème position, suite à une baisse de chiffre d’affaire « Défense » de l’ordre de 14%. L’italienne Leonardo (13ème) et le français Thales (16ème) sont, avec Airbus, les seuls représentants de l’Union Européenne dans le Top 20.

Safran M88 Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
le français SAFRAN, motoriste que produit notamment le réacteur M88 propulsant le Rafale, affiche la plus forte progression du classement de son chiffre d’affaire en 2019, avec un bon de 170%

Pour autant, l’industrie européenne, et notamment française, n’a pas démérité. En effet, deux de ses entreprises, en l’occurence Dassault Aviation et Safran, affichent les plus fortes progressions en terme de chiffre d’affaire du classement cette année. En effet, le spécialiste français des avions de combat a enregistré une insolente croissance de 95% entre 2018 et 2019, son chiffre d’affaire Défense étant passé de 2,9 à 5,7 Md$, propulsant le groupe français de la 38ème à la 22ème place du classement. Mais c’est le motoriste Safran qui marque la plus forte progression, voyant son chiffre d’affaire Défense passer de 1,6 à 4,4 Md$ en une année, soit une progression de 170 %, permettant au groupe de bondir de la 56ème à la 28ème place. Dans les deux cas, les livraisons des contrats exports du Rafale, à l’Egypte et au Qatar, sont aux coeurs de ces progressions. Ce qui laisse d’ailleurs présager d’excellents chiffres pour l’année à venir, puisque les livraisons pour le Qatar et l’Inde sont toujours en cours. En outre, Safran profite du regain de dynamisme de l’activité sur la filière hélicoptère, et de l’activité soutenue dans le domaine des avions militaires lourds, qu’il s’agisse du transport aérien, de la patrouille maritime ou du ravitaillement en vol.

La Russie est la grande absente du classement, même si plusieurs entreprises, dont le géant des blindés Almaz-Antey participent à celui-ci, en se positionnant à la 17ème place (-2 places) en raison d’un chiffre d’affaire contracté de 5%. En effet, seules deux entreprises russes sont listées dans ce classement, la seconde étant le missilier Tactical Missile Corporation JSC, classée 35ème. En revanche, ni le géant de l’aéronautique OAK (Sukhoi, Mig..) ni les chantiers navals USC n’y participent, probablement pour ne pas donner du grain à moudre aux analystes US en charge des sanctions dans le cadre du programme CAATSA. A ce titre, Moscou a annoncé que la publication d’informations relatives à l’activité Défense était désormais interdite, prenant en cela une trajectoire similaire à celle de Pékin, ce qui va probablement complexifier la collecte d’informations de première main concernant l’outil industriel et la Défense du pays.

Su30SM Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
L’industrie russe n’est que partiellement représentée dans ce classement. En effet, les entreprises potentiellement visées par l’application de la législation CAATSA en sont absente, comme le consortium OAK.

Enfin, parmi les faits marquants de ce classement, on peut citer l’entrée fracassante du japonais Mitsubishi Heavy Industries, se classant directement à la 21ème place, une entrée probablement liée à la volonté de Tokyo de se positionner davantage sur le marché international de l’Armement. L’Industrie Turque est également bien représentée, classant 6 entreprises dans le Top 100, 2 de plus que l’année précédente, mais restent cantonnées à la seconde partie du tableau, le spécialiste de l’aéronautique turque TAI se classant 53ème avec une croissance remarquable de 42% de son activité Défense, quand au spécialiste de l’électronique Aselsan, il atteint la 48ème position avec une croissance de 21%.

Ces 5 crises internationales qui menacent la paix mondiale

En seulement quelques semaines, plusieurs zones de tensions internationales ont évolué en crise menaçant de se transformer en conflit ouvert, avec un important risque d’extension, au point de menacer jusqu’à la paix à l’échelle de la planète. En effet, ces crises majeures ont ceci en commun qu’elles impliquent toutes, directement ou indirectement, des nations nucléaires membre permanent du Conseil de Sécurité des Nations Unis, la plupart du temps se faisant face. Dans cet article, nous allons présenter une rapide synthèse des 5 principales crises qui menacent potentiellement de se transformer en conflit, et d’impliquer des nations dotées d’armes nucléaires.

1- La crise Biélorusse

Pour peu que l’on suive les fils d’information pertinent comme l’AFP ou Reuters, ou des chaines d’information comme Euronews, il est impossible de ne pas être au fait de la crise qui secoue la Biélorussie, après la ré-élection du président Loukachenko jugée frauduleuse aussi bien par l’opinion publique biélorusse que par de nombreuses nations. Outre les manifestations d’ampleur croissante de la population du pays qui exige le départ du président, cette crise revêt une dimension internationale par l’implication potentielle de la Russie, auquel le président Loukachenko a fait appel pour venir sécuriser son mandat.

vehicule guerre hybride russie bielorussie Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Des clichés montrant des véhicules militaires russes sans marquage se dirigeant vers la frontière biélorusses ont été publiés sur les réseaux sociaux russes dimanche 16 aout, laissant craindre un scénario à l’ukrainienne.

En effet, plusieurs observations venant de Russie montrent de nombreux véhicules militaires dénués de marquage se diriger en convois vers la frontière biélorusse, laissant craindre un scénario comparable à la prise de la Crimée en 2014. En outre, les annonces répétées des autorités biélorusses mettant en cause une déstabilisations pilotée de l’extérieure, en l’occurence d’Europe, et prétextant des rassemblements de troupes de l’OTAN aux frontières du pays, correspondent au scénario relayé par la Russie pour justifier son intervention en Crimée. Et la réponse des européens ayant invité russes et biélorusses à vérifier par eux mêmes l’inexactitude de ces allégations en utilisant le traité Ciel Ouvert, par ailleurs justement fait pour cela, n’y changera rien.

Mais une intervention russe en Biélorussie serait bien plus problématique que celles qui eurent lieu en Crimée ou en Ossétie du Sud, où l’immense majorité de la population adhérait, du moins initialement, à ce déploiement de force. Car dans le cas présent, l’intervention éventuelle russe s’apparenterait bien d’avantage à celle des chars du pacte de Varsovie à Prague en 1968, face à une population majoritairement hostile à cette intervention. Or, la Russie n’a plus les moyens de s’accaparer un pays par la force aujourd’hui, un exercice mobilisant des forces et des moyens considérables, même lorsqu’une partie de la population y est favorable. Les interventions US en Irak et en Afghanistan en sont la preuve irréfutable.

US force irak Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
L’intervention américaine et britannique en Irak aura nécessité des moyens militaires et humains considérables, pour un cout dépassant les 2.000 Md$.

Outre l’affaiblissement inéluctable de la puissance militaire russe si une telle intervention venait à être déclenchée, les conséquences sur les relations avec l’occident seraient sans précédant, même si une intervention militaire de l’OTAN pour ‘libérer la Biélorussie » est inimaginable. En revanche, les sanctions très sévères qui frapperaient Moscou créeraient, incontestablement, un contexte entrainant la résurgence d’une situation de guerre froide en Europe, sur fond de rapport de force militaire et nucléaire. Et si un tel scénario venait à se réaliser, Moscou n’aurait d’autre choix que de se lier encore davantage économiquement et politiquement à Pékin, pour former un bloc militaire et économique global, ce que beaucoup d’analystes estiment comme étant le scénario du pire dans les années à venir.

2- La crise de Méditerranée Orientale

Les fortes tensions qui opposent ces derniers jours la Grèce et Chypre, avec le soutien de la France, et la Turquie, ne sont en fait qu’un des volets de la crise qui secoue la Méditerranée orientale depuis plusieurs mois, voir plusieurs années. Au centre de cette crise, les ambitions territoriales du président turc R.T Erdogan, qui fait le parie de la force militaire pour, selon lui, corriger des injustices territoriales liées aux conséquences de l’alliance germano-turque durant la première guerre mondiale. La découverte de nombreux gisements gaziers dans la zone, ainsi que la compétition qui fait rage entre les différents programmes de gazoduc pour alimenter l’Europe, générateurs potentiels de milliards d’euro de recettes annuelles récurrentes, ont servi de catalyseur à cette situation en évolution lente jusqu’ici.

orus resis flottile Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Le déploiement du navire d’exploration minière turc Orus Reis et de son escorte militaire entre Chypre et la Crete constitue un casus belli pour Athènes

Car, en effet, la crise qui oppose aujourd’hui Athènes et Ankara ne peut être dissociée de la crise libyenne, dans laquelle les forces turques sont désormais lourdement impliquées (des rapports font états de 5000 hommes sur place), qui oppose les forces de Tripoli du Gouvernement d’union national et les forces militaires et paramilitaires turques, aux forces de Benghazi du général Haftar, soutenues par l’Egypte, les Emirats Arabes Unis et la Russie. Outre l’accès au gaz et au pétrole libyen, concédé par les autorités de Tripoli aux sociétés turques bien au delà des eaux territoriales libyennes reconnues par la communauté internationale, se joue également ici la possibilité de construire le gazoduc du programme EastMed, qui rassemble la Grèce, Israël, Chypre et l’Egypte, et qui se trouverait territorialement dans l’impasse si Ankara venait à faire main basse sur la zone reliant le plateau continental turc au plateau continental Libyen, entre la Crete et Chypre.

Libye US African Command Al Jufra Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Des clichés satellites ont montré le déploiement d’avions de combat Mig-29 et Su-24 d’origine russe sur la base aérienne d’Al Juffra en Libye.

De fait, se prépare aujourd’hui un conflit de grande ampleur en Libye comme en Méditerranée orientale, entre la Turquie soutenue par le Qatar et alliée aux gouvernement de Tripoli, et une alliance de fait rassemblant l’Egypte, les Emirats Arabes Unis, la Grèce et même la Russie, dont les forces Wagner sont largement déployées en soutien des forces du général Haftar. En outre, si l’Union européenne a signifié son soutien à Athènes et Nicosie sans pour autant annoncer de renforts militaires, Paris a pour sa part déployé une frégate à Chypre et deux avions Rafale en Crete pour observer la situation, et a, à de nombreuses reprises, assuré la Grèce et Chypre de son soutien militaire le besoin se faisant sentir. Dans le même temps, le président Erdogan multiplie les ouvertures vers Moscou pour tenter de décrocher son allié potentiel de la coalition qui se forme, alors que l’OTAN semble paralysée par la situation, et que Washington semble plus préoccupé par la crise sino-taiwanaise et les élections présidentielles à venir.

3- La crise sino-indienne

Invisible des médias traditionnels, la crise qui oppose l’Inde et la Chine n’en est pas moins critique, car opposant directement deux nations nucléaires, et potentiellement 3, puisque le Pakistan reste évidement en embuscade pour profiter d’un quelconque affaiblissement de New Delhi. Cette crise se limite pour l’heure aux plateaux du Ladakh le long de la ligne de démarcation valant frontière de-facto entre les deux pays, dans les montagnes himalayennes. et qui avait déjà été à l’origine de la guerre sino-indienne de 1962.

Suite à l’affrontement entre les forces indiennes et chinoises en juin de cette année, affrontement ayant fait 20 morts coté indiens et au moins autant coté chinois, les deux armées se sont officiellement retirées pour éviter la résurgence des engagements. Toutefois, coté chinois comme indien, de nombreux renforts sont venus se positionner à proximité de la zone, de sorte qu’aujourd’hui, la région représente incontestablement une des zones ayant la densité de forces militaires la plus importante de la planète, après, bien évidement, la zone démilitarisée séparant les deux Corées.

122mm wheeled howitzer china Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
La Chine a déployé de nouveaux canons automoteurs de 122mm sur roues dans la zone du Ladakh face à l’Inde.

L’affrontement semble, pour l’heure, se limiter aux déclarations publiques et par voix de presse interposée, chacun se targuant d’avoir les meilleurs troupes et les meilleurs materiels. Mais il semble clair que la moindre étincelle pourrait remettre le feu aux poudres et entrainer un engagement généralisé des forces, avec une potentielle extension vers le Pakistan. Un tel conflit, qui opposerait les deux nations les plus peuplées de la planète, par ailleurs toutes deux dotées d’armes nucléaires et d’une force militaire considérable, serait de nature à embraser l’ensemble de l’Asie, avec des conséquences catastrophiques sur l’économie, et donc la paix mondiale.

4- La crise Iranienne

Si la crise opposant l’Iran et ses voisins des royaumes sunnites du Golfe Persique, ainsi qu’Israël et les Etats-Unis, a fait les gros titres il y a quelques mois lors d’attaques et d’arraisonnement de pétroliers des deux blocs, elle semble depuis être passée sous les radars des rédactions des organes d’information occidentaux. Non pas que la situation soit moins problématique, La Défense anti-missile saoudienne ayant une nouvelle fois intercepté deux missiles balistiques Houtis lancés contre des villes saoudiennes la semaine dernière, mais la situation n’évoluant que peu, l’intérêt médiatique s’est, à force, dissipé.

Flotte vedettes sabotage iran Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
En 2019, les gardiens de la révolution iraniens ont mené plusieurs opérations dans le golfe persique employant leurs vedettes rapides pour attaquer ou arraisonner des pétroliers traversant la zone

Cette crise va, cependant, revenir sur le devant de la scène dans les prochains mois, avec l’absence d’accord pour reconduire l’embargo des Nations Unis sur la vente d’armes à Téhéran.En effet, le 15 aout, les Etats-Unis ont subi un revers sévère lors du rejet de la résolution proposée au Conseil de Sécurité pour étendre cet embargo, puisque seuls deux pays, Etats-Unis compris, votèrent pour, deux pays, la Russie et la Chine ayant voté contre, et 11 pays, y compris les alliés français et britanniques, s’étant abstenus, jugeant la position prônée par le président Trump comme unilatérale et disproportionnée. Washington a promis de mener une riposte dés cette semaine en utilisant un outil juridique très contesté, le Snapback, une forme de droit de véto inversé, pour tenter de forcer l’adoption de la mesure, avec des chances très réduite de succès, puisque Moscou et Pékin pourraient, à leurs tours, user de leur droit de véto pour conduire à une neutralisation législative.

Parallèlement, la très médiatique signature des accords entre Israël et les Emirats Arabes Unis sont, naturellement, liés à ce dossier, les Emirats escomptant bien monnayer les concessions faites à Jérusalem pour obtenir des licences d’importation de materiels américains sensibles, comme le chasseur F35 et le système anti-missile THAAD. Car dès le 18 octobre, l’exportation d’armes vers Téhéran ne sera plus contrainte par les Nations Unis, ouvrant la voie à Moscou mais aussi à Pékin pour renforcer la némésis des Etats-Unis. Or, le renforcement des moyens offensifs et défensifs iraniens constituant une ligne rouge pour Israël, il est probable que la dynamique en cours entrainera l’intensification des tensions entre les deux pays et leurs alliés , avec un possible conflit global menaçant la région et ses flux stratégiques d’hydrocarbures.

5- La crise taïwanaise

Enfin, la crise qui oppose la République Populaire de Chine à l’alliance entre la République de Chine (Taïwan) et les Etats-Unis, constitue sans le moindre doute le plus important risque d’extension. Nous ne reviendrons pas sur les origines de cette crise, largement traitée dans nos colonnes ces derniers jours, ni sur le rapport de force de plus en plus intense que se dessine entre Pékin et Washington autour d’elle, les protagonistes rivalisant d’ingéniosité pour accroitre les tensions entre provocations et ripostes. Ainsi, ce week-end, Washington et Taiwan ont annoncé l’officialisation de la commande portant sur 66 F16V, le modèle le plus performant de l’appareil américain, pour renforcer les forces aériennes de Taipei, ce qui provoqua la colère de Pékin, estimant qu’il s’agit d’un soutien aux velléités sécessionnistes de l’ile.

f 16v taiwan Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Taiwan a acquis 66 nouveaux chasseurs F16V et transforme les 115 F16 en service au sein des forces aériennes taïwanaise à ce standard.

Puisque Pékin, et son président Xi Jinping, ont assuré qu’ils reprendront prochainement l’ile indépendantiste, quelque soit le moyen, et que Washington a assuré Taipei de son soutien militaire, l’affrontement entre les deux plus grandes nations économiques mondiales semble inéluctable à court ou moyen terme. Et puisque Pékin a assuré qu’en cas de conflit avec les Etats-Unis, des mesures de rétorsion militaires seraient prises contre les alliés de ceux-ci, citant le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et, de manière plus étonnante, l’Inde, la globalisation du conflit à l’échelle régionale sera, pour ainsi dire, quasi-systèmatique. En outre, alors que les Etats-Unis devront mobiliser tous leurs moyens militaires pour être en mesure de neutraliser la puissance militaire chinoise, leurs soutiens militaires sur les autres théâtres, comme en Europe ou au Moyen-Orient, seront fortement réduits, ouvrant de nombreuses opportunités pour ceux qui y font face aujourd’hui, comme la Russie et l’Iran.

6- La crise climatique

Il était certes question de 5 crises internationales dans le titre de cette synthèse, à savoir des crises militaires opposant des états, mais l’article serait incomplet si il n’était pas fait référence à la plus menaçante de toute, la crise climatique. S’il reste encore quelques climato-sceptiques pour nier l’ensemble des preuves du réchauffement climatique en cours, la majorité des cercles scientifiques et, fort heureusement, politiques, reconnait aujourd’hui son existence. Pour autant, les conséquences géopolitiques de cette crise sont, à ce jour, largement ignorées, ou tout au moins sous-estimées. En effet, les bouleversements prévisibles du climat mondial vont entrainer, outre l’augmentation des températures, de profonds changements en matière d’accès à l’eau potable, aux terres arables, et à la production même de nourriture sur la planète. Selon les projections, le nombre de réfugiés climatiques d’ici 2050 évoluerait entre 150 et 500 millions de personnes, alors que les modèles mathématiques utilisés pour prévoir l’évolution de la température moyenne montrent, aujourd’hui, un biais probablement trop optimiste concernant les délais et l’ampleur du phénomène.

Or, l’accès aux ressources indispensables à la survie a toujours été la cause première des conflits régionaux, et la raréfaction des terres arables comme de l’accès à l’eau douce entraineront irrémédiablement des tensions internationales extrêmement fortes, accompagnées de larges crises migratoires, et donc d’une déstabilisations globale, massive et durable, de l’économie mondiale.

Conclusion

Alors que le nombre de cas de contamination par le virus Covid19 repart à la hausse en Europe, la majorité des européens sont préoccupés par des considérations à court terme, comme la préservation de leur emploi ou la crainte d’un nouveau confinement. De fait, les crises qui touchent aujourd’hui aussi bien l’Europe que le Moyen-orient ou l’Asie, apparaissent distantes et floues, et ce d’autant que les médias traditionnels traitent très peu de ces sujets. Il n’en demeure pas moins vrais que ces zones de tensions intenses présentent de hautes probabilité de se transformer en crise internationale, voir en conflit pouvant englober toute la planète.

Mais quelle serait la réaction des populations européennes ou, plus globalement, occidentales, si de tels événements venaient à se concrétiser, tant elles ont évolué dans une bulle de sécurité absolue faisant d’un virus ayant un taux de mortalité absolu inférieur à 2% une catastrophe majeure ? Quelle est, en fait, la résilience des européens, et des occidentaux, face à la transformation rapide et radicale de l’environnement international ? Il est malheureusement de plus en plus probable que la réponse à cette question soit donné par l’émergence prochaine d’une crise internationale conséquence d’une ou plusieurs des crises présentées ici.

La Russie va-t-elle voler au secours de Lukashenko en Biélorussie ?

Après avoir instrumentalisé l’opposition avec Moscou en déployant des forces le long de la frontière entre la Biélorussie et la Russie, le président biélorusse Alexander Lukashenko a fait appel à la Russie, ce matin, lors d’un entretien téléphonique avec le président Vladimir Poutine.

Le président biélorusse a justifié cette requête en arguant d’une manipulation des foules et du mécontentement populaire par « des forces extérieures », l’Europe et les Etats-Unis pour ne pas les citer. Et le président russe de répondre qu’il avait la conviction, avec son homologue, que « la situation entrera tres vite dans l’ordre », laissant entrevoir la possibilité d’une prochaine intervention russe dans le pays pour mettre un terme aux manifestations populaires et aux grèves qui se multiplient.

poutine loukachenko Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Après deux décennies de relations sans accrocs, Alexander Lukashenko et Vladimir Poutine avaient des relations sous tension ces derniers mois, ce dernier voulant accélérer le processus d’intégration de la Biélorussie avec la Russie.

Dans ces conditions, les forces russes mécanisées déployées à la frontière biélorusse, comme les unités des armées russes pré-positionnées dans le cadre du Traité de Sécurité Collective, formeront probablement la première vague des forces russes déployées pour prendre le contrôle des sites stratégiques du pays, avec l’espoir d’oter toute velléité de poursuite du mouvement à la population biélorusse, qui n’était pas réputée, jusqu’il y a quelques jours, pour sa nature rebelle. L’autre hypothèse serait qu’au lieu de faire appel à ses forces armées pour mener la mission, Moscou et Minsk s’en remettent à la société militaire privée Wagner de plus en plus omniprésente dans la politique extérieure du Kremlin.

Reste qu’une telle intervention ne serait pas sans risque, aussi bien sur la scène nationale qu’internationale, pour le président russe. En effet, contrairement aux interventions en Ossétie du Sud en 2008 face à la Géorgie, ou en Crimée en 2014, le Kremlin ne pourra pas faire prévaloir l’argument de la protection des minorités russes face à une menace nationaliste réelle ou imaginaire. De fait, il est possible que la population biélorusse s’oppose à cette intervention, au point de rendre impossible l’exercice du pouvoir dans le pays. De même, si tel était le cas, rien ne garantie que les forces militaires régulières biélorusse restent en caserne, plutôt que de s’opposer au déploiement ordonné par Moscou, avec le risque de voir émerger une nouvelle guerre fratricide après le Donbas.

Belarus takes delivery of ten overhauled MiG 29 fighter aircraft 640 001 Actualités Défense | Engagements multi domaines | Etats-Unis
Proches des armées russes, les forces armées biélorusses pourraient toutefois se ranger du coté de la population et s’opposer à une intervention armée dirigée du Kremlin.

En outre, la réponse occidentale à une éventuelle intervention russe serait très probablement très sévère, avec des conséquences plus que néfastes pour ce qui reste de l’economie russe. Rappelons que l’Europe est de loin le premier partenaire économique de la Russie, avec un volume d’echange représentant près de 15% du PIB du pays, là ou les échanges avec la Chine dépassent à peine les 2%. De fait, la possible intervention russe chez son voisin biélorusse, même à la demande du gouvernement déclaré légitimement élu, fragiliserait très significativement la base électorale de Vladimir Poutine et de son parti « Russie Unie », et ce d’autant que de nombreux russes ont des liens familiaux étroits avec la population biélorusse.

Les décisions qui vont être prises et annoncées par le Kremlin dans ce dossier dans les prochains jours, pourraient bien revêtir une dimension structurante forte pour l’avenir de la Russie comme du président Poutine lui même, ainsi que sur l’ensemble des relations entre la Russie et l’Occident, et ce pour de nombreuses années.