mardi, décembre 2, 2025
Accueil Blog Page 82

La moitié des avions de chasse en Europe auront été construits par Lockheed-Martin en 2035.

Avec l’annonce d’une prochaine commande de 48 avions de chasse F-35A par la Roumanie, Lockheed-Martin s’assure d’une position dominante au sein des flottes de chasse européennes d’ici à 2035, alors qu’il équipera plus des trois quarts des forces aériennes du vieux continent à cette date.

Cette appétence des forces aériennes européennes pour les chasseurs américains, alors que trois avionneurs produisent des chasseurs de qualité sur son sol, ne peut se satisfaire des seules explications articulées autour des suspects habituels, à savoir la dépendance à la protection US et aux technologies américaines.

Dans ce contexte, comment peut-on expliquer le succès des chasseurs américains en Europe, y compris auprès des forces aériennes de pays participants à la construction de chasseurs européens ? Est-il possible d’agir pour contenir ou limiter ce phénomène dans les décennies à venir ?

La Roumanie va commander 48 F-35A auprès de Lockheed-Martin

Après les Pays-Bas, l’Italie, la Pologne et 8 autres pays européens, la Roumanie va se tourner vers le chasseur F-35 de Lockheed-Martin pour moderniser sa force aérienne. Selon un document diffusé hier par les sites spécialisés roumains, Bucarest prévoit d’acquérir 48 appareils en deux phases.

La première, qui débuterait d’ici à la fin de l’année, concernerait 32 appareils, soit deux escadrons de chasse, pour un budget de 6,5 Md$, et comprendra aussi l’ensemble des systèmes nécessaires à la mise en œuvre de ce nouveau chasseur.

F-16 Roumanie
Les F-35 qui vont être commandés par la Roumanie remplaceront les F-16 d’occasion acquis récemment par Bucarest comme solution intérimaire.

Une seconde phase portant sur 16 F-35A supplémentaires, soit un 3ᵉ escadron, et jugée très sensiblement moins onéreuse, sera lancée par la suite. Il s’agira probablement de remplacer les F-16C/D acquis d’occasion, et dont la durée de vie opérationnelle demeure limitée.

Il s’agit d’un nouveau succès majeur de Lockheed-Martin et de son F-35 en Europe, alors que d’autres forces aériennes (Espagne, République tchèque et Grèce) devraient, elles aussi, annoncer une commande du chasseur American.

La surreprésentation des avions de chasse américains en Europe en 2035

Le fait est, selon les informations connues à ce jour, 12 à 14 des 20 forces aériennes européennes mettant en œuvre une flotte de chasse, devraient être partiellement ou totalement équipée de F-35 A et B en 2035.

Cette fourchette atteint 15 à 17 lorsque le F-16, lui aussi de Lockheed-Martin, est pris en considération. Au total, donc de 75 % et 85 % des forces aériennes européennes mettront en œuvre des chasseurs conçus et fabriqués par Lockheed-Martin en 2035.

Plus de 50 % de chasseurs de Lockheed-Martin en Europe

En portant l’analyse sur le nombre d’appareils, ce seront de 500 à 730 F-35A et B et 192 à 210 F-16, essentiellement des Block 70/72 ou ultérieurs, sur un total de 1680 à 1990 chasseurs en service au sein des forces aériennes européennes en 2035.

Dassault Rafale B Grèce
La Grèce a été le premier pays européen à acquérir le chasseur français Rafale

De fait, les chasseurs de Lockheed-Martin devraient représenter entre 43 et 50 % des avions de chasse mis en œuvre par les forces aériennes européennes, loin devant les 22 à 26 % de l’Eurofighter Typhoon, les 14 à 17 % du Rafale, ou encore les 9 à 10 % du Gripen suédois.

Seules 4 forces aériennes européennes équipées uniquement en chasseurs européens

Cette situation est, pour ainsi dire, unique sur la planète. En effet, à ce jour, seuls cinq pays disposent de l’ensemble des compétences pour concevoir un avion de combat, les cinq membres du Conseil de Sécurité des Nations Unis. Deux autres pays, la Corée du Sud et la Suède, disposent quant à eux de toutes les compétences nécessaires, exception faite des propulseurs.

De fait, les avionneurs et motoristes européens représentent plus de 40 % des compétences et savoir-faire mondiaux dans le domaine des avions de combat.

Paradoxalement, les Européens se tournent aujourd’hui majoritairement vers des modèles d’avions de combat américains, y compris pour la Grande-Bretagne et ses partenaires italiens, espagnols et allemands avec qui ils ont développé le Panavia Tornado puis l’Eurofighter Typhoon.

Plus surprenant encore, seules 4 des 20 forces aériennes européennes dotées d’avions de chasse, seront équipées exclusivement d’appareils européens. Il s’agit, en l’occurrence, de la France et de la Croatie qui voleront sur Rafale, et de la Suède et la Hongrie, dotées de Gripen.

Avions de chasse européens Rafale et Gripen
Les forces aériennes françaises et suédoises sont parmi les seules en Europe à n’être équipées que d’avions de chasse de conception nationale.

Enfin, il est intéressant de noter que les 1700 à 2000 avions de combat qui équiperont les forces aériennes européennes en 2035, surpasseront de probablement 50 % le format des forces aériennes russes à cette date.

Cette flotte de chasse européenne dépasse par ailleurs, dans les mêmes proportions, la force aérienne que les Etats-Unis pourraient, dans le meilleur des cas, déployer en Europe en cas de conflit.

Pourquoi ce succès des avions de combat américains en Europe ?

Il convient donc de s’interroger sur les raisons qui amènent l’immense majorité des européens à se tourner vers des avions de combat de facture américaine, plutôt qu’européenne, au point d’en faire un véritable standard européen, alors même que les avionneurs européens sont capables de produire des appareils parfaitement dimensionnés pour contenir la menace russe ?

Pour répondre à cette question, les « usual suspect » traditionnellement mis en avant, à savoir une soumission excessive des européens aux Etats-unis, exacerbée par un activisme américain très efficace sur les chancelleries européennes, ne suffisent pas à expliquer l’ampleur du phénomène. Ce d’autant qu’il ne se retrouve pas dans d’autres domaines, comme les blindés, ou encore les navires de combat et sous-marins.

Les limites de l’argument de la dissuasion partagée de l’OTAN

L’argument de la participation à la dissuasion partagée au sein de l’OTAN, a quant à lui une certaine validité. Il a, en effet, de toute évidence été au cœur des arbitrages allemands ou encore belges en faveur du chasseur américain, et fut un paramètre d’importance en Italie et aux Pays-Bas.

Toutefois, cette explication, selon laquelle les Etats-Unis ont artificiellement favorisé le F-35A en Europe en limitant la qualification de la bombe nucléaire gravitationnelle B61-Mod12, qui sera au cœur de la dissuasion partagée de l’OTAN pour les 20 années à venir, est en partie biaisée, en particulier du point de vue français.

F-35A Bombe nucléaire B61-Mod12
Le F-35A sera le vecteur premier de la dissuasion nucléaire partagée de l’OTAN pour délivrer la bombe nucléaire B61-Mod12.

Ainsi, s’il est incontestable que Washington a privilégié l’acquisition de F-35 par ce biais, particulièrement face au Typhoon et au Super Hornet, ce bras de levier n’existe que par le refus de Paris et de Londres de partager leurs propres armes nucléaires au sein de la dissuasion nucléaire partagée de l’OTAN.

En effet, rien n’empêche les deux nations dotées européennes, d’elles aussi proposer un stock de bombes ou missiles nucléaires sous commandement OTAN activés selon le principe de la double clé, comme c’est le cas des B61 américaine.

Toutefois, ni Londres, ni Paris, n’ont jamais accepté de porter une telle responsabilité partagée en Europe, qui pourrait mécaniquement les lier à un conflit potentiellement nucléaire en partageant le destin de ses voisins et alliés, comme c’est censément le cas des Etats-Unis.

Au contraire, pour la France comme le Royaume-Uni, la dissuasion est considérée comme une bulle de protection ultime exclusivement nationale, ne souffrant d’aucune interaction de voisinage, permettant spécifiquement d’assurer la sécurité ultime de la nation, même en cas de conflit généralisé.

Bien évidemment, cette posture, toute édulcorée qu’elle peut être par des ouvertures peu convaincantes des dirigeants des deux pays, constitue un frein considérable pour les européens, et notamment les européens de l’est, lorsqu’il s’agit de s’équiper d’équipements aussi critiques que les avions de combat.

La très efficace stratégie commerciale et technologique de Lockheed-Martin autour du F-35

La stratégie commerciale et marketing employée par Lockheed-Martin, et soutenue par Washington, constitue une autre par de l’explication de ce raz-de-marrée du F-35 en Europe.

Le F-35, un avion du futur, quitte à sacrifier ses performances présentes

En effet, l’avionneur américain n’a jamais cessé, depuis 15 ans maintenant et la compétition néerlandaise, de présenter son avion de combat comme l’appareil du futur, particulièrement en faisant apparaitre les Eurocanard ou le Super Hornet comme des avions du présent, et donc, rapidement, du passé.

F-35 canopy
Lockheed-Martin a accepté de sacrifier les capacités présentes de son F-35 pour privilégier les performances à venir, tout au moins dans son discours commercial.

Pour ce faire, Lockheed-Martin a systématiquement privilégié, dans son discours, mais aussi dans sa stratégie industrielle, les capacités à venir de son chasseur, quitte pour cela à sacrifier les performances immédiates du chasseur.

Ainsi, tous les acquéreurs européens du F-35 à ce jour, savent qu’ils ne recevront probablement pas une version pleinement opérationnelle de l’appareil, comme c’est le cas des quelque 150 chasseurs déjà livrés aux forces aériennes, britanniques, néerlandaises, italiennes, danoises ou norvégiennes à ce jour.

Ils sont, en revanche, une confiance, peut être excessive, dans le fait que le moment venu, le chasseur américain offrira effectivement les performances et capacités promises par Washington, pour s’engager dans un conflit de haute intensité.

La faible visibilité technologique des chasseurs européens

Par ailleurs, ces capacités à venir, présentées dans un planning de progression de plus de 20 ans par LM, participent à construire l’efficacité du chasseur en termes de dissuasion, qu’il s’agisse de sa faible observabilité ou ses capacités d’engagement collaboratif.

À l’inverse, les chasseurs européens proposent une perspective technologique claire sur un calendrier beaucoup plus resserré, de l’ordre de 5 à 7 ans au mieux, en dépit du fait qu’il s’agit de chasseurs aujourd’hui très efficaces, sans le moindre doute davantage que ne l’est le F-35A, et qu’ils ont tous trois remarquablement évolué ces 30 dernières années.

De fait, une force aérienne qui aujourd’hui se tournerait vers le Rafale, le Typhoon ou le Gripen, ferait le choix d’un chasseur très efficace en 2030. Le F-35, lui, promet d’être très efficace en 2040 et au-delà. Cet argument a joué à plein dans plusieurs compétitions récentes, notamment en Suisse et en Finlande.

La défiance des européens vis-à-vis des grandes puissances européennes

Enfin, qu’on le veuille ou non, il existe aujourd’hui une réelle défiance en Europe, en particulier en Europe de l’Est, vis-à-vis d’un éventuel soutien militaire de la France, mais aussi de l’Allemagne ou de l’Italie, si un conflit majeur venait à débuter en Europe centrale.

Rafale B Armée de l'Air et de l'Espace
Avec à peine plus de 200 chasseurs en 2035, les forces aériennes françaises seront loin d’avoir la masse suffisante pour justifier d’un standard technologique convaincant.

Et ce n’est probablement pas sans raison. D’abord, alors qu’à eux trois, ces pays représentent 35 % de la population et plus de 50 % du PIB de l’Union européenne, ils représenteront uniquement 20 % des forces terrestres, et 30 % des forces aériennes européennes en 2035.

Pour des pays qui, comme la Pologne, la Roumanie, la République tchèque ou les Pays baltes, qui se dirigent tous vers un effort de defense au-delà de 3 % et des formats d’armées considérablement plus importants, proportionnellement parlant, il s’agit incontestablement d’un motif érodant la confiance qu’ils peuvent donner à Paris, Berlin ou Rome, en cas de conflit.

Au-delà des moyens eux-mêmes, ces pays n’ont pas démontré, ces dernières années, d’une détermination importante pour s’opposer à la Russie, au contraire. S’étant eux-mêmes mis sous le parapluie américain en ne livrant certains équipements majeurs à l’Ukraine qu’une fois le feu vert US donné, ils ne pouvaient plus apparaitre comme une alternative crédible à Washington.

L’inverse est d’ailleurs également vrai. En s’étant montrée inflexible face à la Turquie ces dernières années, Paris a acquis un très important capital confiance de la part de la Grèce, qui s’est tournée vers le Rafale et les frégates FDI françaises pour moderniser ses forces aériennes et navales.

De même, la position équilibrée française dans les Balkans a probablement joué un rôle déterminant dans le choix de Zagreb de se doter de Rafale, et dans l’intention de Belgrade de faire de même.

Conclusion

On le voit, les arbitrages des chancelleries européennes en faveur d’avions américains, et du F-35 particulièrement, aux dépens de modèles européens, s’avèrent aussi paradoxales qu’ils sont compréhensibles une fois les différents biais initiaux éliminés.

Surtout, il apparait que plusieurs des paramètres ayant amené les dirigeants européens à se tourner vers l’avion de Lockheed-Martin, est, en partie au moins, la conséquence de postures et de décisions des avionneurs européens eux-mêmes, ainsi que de leurs gouvernements respectifs.

C’est donc probablement vers ces critères ayant eu pour effet d’affaiblir l’offre européenne, plutôt que sur la critique stérile des dirigeants européens et de l’omniprésence américaine, qu’il conviendrait d’orienter les efforts et le débat, de sorte à garantir la pérennité et l’efficacité de cette industrie et de ses savoir-faire dans les décennies à venir.

Lance-roquettes à longue portée : la France a toutes les briques technologiques nécessaires pour faire.

Interrogé par les députés de la commission défense de l’Assemblée nationale au sujet du remplacement des lance-roquettes à longue portée LRU de l’Armée de Terre, le Délégué général de l’Armement, Emmanuel Chiva, a laissé entendre que l’hypothèse du développement d’un système national, était à l’étude, pour en déterminer la faisabilité et la pertinence.

Il est vrai que l’Armée de Terre ne prévoyant, dans le cadre de la Loi de Programmation Militaire 2024-2030, d’acquérir au mieux qu’une douzaine de ces précieux, mais onéreux systèmes d’artillerie à longue portée, capables de frapper dans la profondeur du dispositif adverse, et qu’elle n’envisage, à terme, que d’en posséder que 26, dans le meilleur des cas, les questions des couts de développement sont déterminants.

Atouts et contraintes du développement d’un système lance-roquettes à longue portée français

Certes, disposer d’un système d’arme de facture national, aussi important que les lance-roquettes à longue portée, qui d’ailleurs mettent aussi en œuvre des missiles balistiques, a de nombreux intérêts, en particulier pour ce qui concerne la liberté de manœuvre et de décision du pouvoir politique et des armées.

En se tournant vers le Himars américain, le K239 Chunmoo sud-coréen ou le PULS israélien, comme le font les autres pays européens, l’Armée de terre ferait certainement de substantielles économies, en s’évitant de devoir financer le développement d’un système d’arme réputé complexe.

lance-roquettes à longue portée PULS elbit
Le PULS israélien a déjà été retenu par les Pays-Bas, le Danemark et l’Allemagne, et pourrait être choisi par l’Espagne prochainement.

La question est d’autant plus pressante que nombre d’armées, européennes et au-delà, se sont déjà tournés vers ces systèmes, ce qui limite, de fait, les opportunités d’exportation, voire de partenariat technologique, de Paris, pour un système d’artillerie à très longue portée de facture française.

En revanche, elle céderait en partie son autonomie de décision à l’un de ces pays, que ce soit pour déployer ses systèmes, pour les mettre en œuvre, ainsi que pour acquérir de nouvelles munitions, voire de nouveaux systèmes.

Propulsion, guidage et calculateur : les industriels français ont toutes les briques technologiques requises

Mais, dans ce domaine, il s’avère que l’industrie de défense française dispose déjà des briques technologiques nécessaires pour pouvoir developper, en autonomie, un tel système, ce qui pourrait en réduire significativement aussi bien les couts que les délais de développement.

Un système lance-roquettes à longue portée se compose, en effet, de trois briques technologiques majeures. En premier lieu, il est nécessaire de concevoir et fabriquer une roquette, voire un missile balistique, et plus particulièrement son système propulsif.

MBDA Aster 30
La BITD française dispose d’un haut de gré de compétence dans le domaine de la propulsion de missiles et de roquettes. Ici, le missile sol-air à moyenne portée Aster 30 capable d’intercepter des cibles aériennes à plus de 100 km de distance.

Par son expérience en matière de missiles, y compris balistiques, l’industrie de défense française, et notamment le missilier MBDA et Société nationale des poudres et explosifs, disposent d’ores et déjà des compétences, mais aussi des technologies, pour un tel développement, en particulier pour concevoir et fabriquer le propulseur de la munition, et sa ou ses différentes charges militaires.

La seconde technologie requise, concerne le contrôle de la trajectoire de la munition et la précision de la frappe. Là encore, la BITD française dispose d’un savoir-faire avéré, qu’il s’agisse de MBDA qui a conçu les missiles de croisière SCALP et ASMPA, ou de Safran, qui a conçu la bombe guidée propulsée AASM Hammer.

La troisième et dernière brique technologique nécessaire à la conception d’un lance-roquette à longue portée efficace et de ses munitions, concerne le calculateur baltique, et le système d’infirmation et de communication indispensable dans un environnement de haute intensité désormais très dynamique.

CAESAR ukraine
Le calculateur balistique du Caesar couplé à la centrale inertielle SAGEM permet une mise en batterie en moins d’une minute, ainsi qu’une grande précision, y compris avec des obus conventionnels et à longue distance.

Dans ce domaine, les compétences acquises par Nexter et Sagem autour du calculateur balistique du CAESAR et de sa centrale à inertie, s’avèrent déterminantes.

Elles permettent, en effet, au canon portée français de connaitre en permanence sa position, celle de sa ou ses cibles, et de calculer dynamiquement une trajectoire balistique de grande précision, même à longue portée, avec un délai de mise en batterie particulièrement court, de l’ordre d’une minute.

Un potentiel opérationnel et technologique dépassant les besoins immédiats de l’Armée de terre

Bien évidemment, toutes ces technologies devront être réintégrées, modifiées et transposées pour donner naissance à un système d’artillerie à longue portée performant de facture nationale. On comprend, toutefois, pourquoi l’hypothèse d’un développement national est sérieusement explorée par la DGA.

Le sujet est d’autant plus important que les besoins pour ce type de systèmes, sont, semble-t-il, plutôt destinés à croitre dans les années et décennies à venir, plutôt qu’à s’étioler comme on pouvait le penser, il n’y a de cela que quelques années.

Retrouver une expertise avancée dans ce domaine, permettrait enfin à la France de se doter à nouveau, au besoin, d’une capacité de frappe nucléaire à courte ou moyenne portée, c’est-à-dire dans la bande allant de 300 à 1 000 km, à l’instar, par exemple, de ce que permettent les Iskander et Kinzhal russes, eux aussi capables de transporter des charges nucléaires.

Iskander-M russie
La Russie disposerait de 160 à 200 systèmes balistiques 9K720 Iskander-M armés chacun de 2 missiles SRBM d’une portée annoncée de 490 km, et pouvant potentiellement mettre en œuvre une tête nucléaire de 5 à 50 kt.

Alors que tout laisse anticiper, aujourd’hui, un retour de la course aux armements et des postures nucléaires ostentatoires, disposer de systèmes balistiques à courte ou moyenne portée, armer ou non de charge nucléaire, peut permettre à la France de répondre efficacement à un bras de fer entamé par la Russie s’appuyant sur une forme de chantage nucléaire.

Cette réponse serait d’autant plus efficace que, contrairement aux sous-marins et aux Rafale, des Transporteur-Érecteurs-Lanceurs ou TEL, armés de ces missiles, comme l’étaient les Hadès et Pluton pendant la guerre froide, peuvent être déployés ouvertement de sorte à montrer la détermination française à se protéger, ou à protéger ses alliés, y compris avec des munitions nucléaires de faible intensité.

Les contraintes budgétaires de la Loi de Programmation militaires 2024-2030

Reste que le développement d’un système lance-roquettes à longue portée pour l’Armée de terre, ne peut que s’inscrire dans le jeu budgétaire à somme nulle défini par la LPM 2024-2030, donc au détriment d’autres programmes, que l’on peut, eux aussi, supposer critiques.

Ce sera sans le moindre doute le nombre de chiffres composant le cout total du programme, s’il devait être développé en France, qui déterminera son avenir, ou au contraire, entérinera son abandon.

Espérons que les Industriels français sauront percevoir le potentiel stratégique que le fait d’être le seul pays européen à disposer de cette compétence technologique, leur conférera dans les années venir, et qu’ils feront les efforts nécessaires pour que les carrés composant le cout du programme, puissent entrer dans les petits ronds de l’enveloppe budgétaire mobilisable par l’Hôtel de Brienne.

Le premier canon à micro-ondes Leonidas livré à l’US Army par Epirus

L’US Army a pris possession du premier des 12 prototypes du canon à micro-ondes Leonidas conçu par la société Epirus, et vainqueur de la compétition pour le programme IFPC-HPM. Dans les mois à venir, les mitaines américaines vont pouvoir expérimenter les systèmes, pour préparer les procédures et doctrines d’emploi de ce système conçu pour éliminer les essaims de drones.

Parmi les très nombreux enseignements ayant émergé de la guerre en Ukraine, le rôle prépondérant des drones, et la menace qu’ils représentent, sont certainement les plus déterminants pour préfigurer la nature des engagements militaires dans les années à venir.

La menace drone omniprésente en Ukraine

En effet, du petit drone commercial destiné à localiser des positions adverses et d’ajuster les tirs de l’artillerie, aux drones supersoniques à longue portée ayant frappé les aérodromes militaires russes jusqu’à Engels, en passant par les munitions rôdeuses et les drones d’attaque à longue portée Geranium, ceux-ci interviennent désormais à tous les échelons de l’engagement, du combat d’infanterie à la frappe de portée stratégique.

En outre, ceux-ci ont investi dorénavant l’ensemble des espaces de conflictualité, bien au-delà du seul ciel ukrainien, avec des drones de surface et sous-marins employés pour frapper les navires et infrastructures russes en Crimée, et des drones terrestres russes employés pour brècher, ou au contraire pour miner, des itinéraires.

ukrainian naval drone strike Armes Laser et énergie dirigée | Conflit Russo-Ukrainien | Défense antiaérienne
Les drones navals ukrainiens sont parvenus à repousser la puissante flotte de la mer Noire russe hors de Sevastopol pour trouver refuge dans les ports russes.

Ces drones omniprésents ont fait dire, il y a quelques semaines, à l’amiral Ben Key, le First Sea Lord de l’Amirauté britannique, qu’il se développait aujourd’hui un Moment Dreadnought lié à l’arrivée des drones aériens, navals et sous-marins, à savoir un grand bouleversement, lié à l’arrivée d’une technologie s’implantant l’ensemble des technologies et doctrines employées jusque-là.

La prédiction de l’amiral Key est d’autant plus pertinente que les drones employés aujourd’hui en Ukraine, ne sont que les prémices de ce qu’ils seront dans les années à venir, que ce soit en capacités, performances, et surtout en nombre.

La révolution à venir des essaims de drones

En effet, à ce jour, tous les drones employés par les armées russes ou ukrainiennes, nécessitent soit un opérateur de contrôle pour leur permettre d’adapter leur comportement à leur environnement, soit ceux-ci suivent-ils un plan de vol ou de navigation préprogrammé, à l’instar d’un missile.

Ces limitations technologiques rendent les drones très sensibles au brouillage, soit en perdant le contact avec l’opérateur de contrôle, soit avec les satellites de navigation. En outre, ils requièrent le plus souvent un opérateur par appareil, donc consomme des ressources précieuses en temps de guerre. Enfin, ils ne peuvent pas agir de manière coordonnée, même s’ils peuvent, effectivement, être employés simultanément.

essaim de drones
Les essaims de drones ont le potentiel de profondément bouleverser l’action militaire dans les années à venir.

C’est là la différence entre un groupe de drones, soit plusieurs drones agissant simultanément, mais de manière individuelle, et un essaim de drones, dans lequel l’action de chaque drone est déterminée par le groupe.

De fait, l’arrivée des essaims de drones, va représenter un bond capacitaire et technologique de premier plan, que l’on peut aisément qualifier de Moment Dreadnought, tant ils pourront venir à bout de la plupart des systèmes de défense existants à ce jour, grâce à une plus grande autonomie d’action, des communications plus résilientes au brouillage, et surtout par le nombre venant saturer les systèmes.

Le programme IFPC-HPM de l’US Army et le canon à micro-ondes Leonidas de la société Epirus

Pour répondre à cette révolution en devenir, plusieurs pistes sont étudiées par les grandes armées du monde. Aux Etats-Unis, cette menace est traitée par le programme Indirect Fire Protection Capability, ou IFPC, qui vise à concevoir une défense multicouche et multivecteur susceptible de contrer aéronefs, missiles, obus et drones.

La protection contre les drones, et plus particulièrement contre les essaims de drones, revient au sous-programme IFPC-HPM, pour High Power Microwave. Entamé en 2018, ce programme vise à developper, pour la seconde moitié de la décennie, un canon à micro-ondes opérationnel capable de s’intégrer dans le dispositif défensif de l’US Army, et d’éliminer drones et essaims de drones de manière discriminée, de sorte à ne pas éliminer concomitamment les drones alliés.

canon à micro-ondes leonidas de Epirus
Le Leonidas peut viser des espaces précis de l’espace aérien afin de détruire des drones adverses tout en préservant les drones alliés ;

C’est le Leonidas de la société Epirus, qui s’est imposé en décembre 2022, à l’issue d’une évaluation l’ayant opposé à plusieurs autres prototypes. Le Leonidas avait, depuis, été évalué et testé par le Rapid Capabilities and Critical Technologies Office (RCCTO) de l’US Army, pour en déterminer le potentiel opérationnel et préparer une doctrine d’emploi intégrée à l’ensemble du dispositif de l’US Army.

À l’instar des autres canons à micro-ondes, le Leonidas projette un puissant rayonnement directif de micro-ondes, celui-ci venant directement exciter les électrons au sein des circuits électroniques des systèmes visés. En d’autres termes, à l’instar d’un téléphone mobile dans un four à micro-ondes, l’Epirus parvient à faire griller à distance les circuits et les puces électroniques des systèmes visés, entrainant de fait leur destruction.

L’US Army vient officiellement de recevoir le premier Leonidas, il y a quelques jours, et attend la livraison de trois autres exemplaires dans les semaines à venir, afin de former la première section de ce type.

Intégrer le Leonidas dans le dispositif opérationnel et défensif de l’US Army

Piloté par le RCCTO, le programme doit maintenant définir l’ensemble des procédures liées à l’utilisation efficace de ce système, mais également préparer son interopérabilité avec les autres systèmes aériens et antiaériens employés ou par les brigades de combat de l’US Army, ou en cours de développement.

En effet, le programme IFPC porte sur plusieurs systèmes. Outre le IFPC-HPM et son canon Leonidas, l’US Army développé par ailleurs le IFPC-HEL (High energy Laser), un laser à haute énergie dont la fonction sera d’intercepter les missiles de croisière et les obus d’artillerie et de mortier, et le IFPC Inc 2, un système de détection et d’interception de missiles et de drones, composé d’un radar de détection et de missiles antiaériens en conteneur, aujourd’hui des AIM-9X Sidewinder.

Laser HEL MD e1634131885669 Armes Laser et énergie dirigée | Conflit Russo-Ukrainien | Défense antiaérienne
Le système de laser à haute énergie HEL MD de l’US Army ambitionne d’atteindre les 250 à 300 kw.

Par ailleurs, pour la protection rapprochée des unités de combat, l’US Army a développé le Stryker Guardian DE M-SHORAD, un système laser de 50 kw monté sur un véhicule blindé 8×8 Stryker, capable d’intercepter des drones légers à moyens, ainsi que des missiles légers.

Enfin, pour les menaces plus lourdes et à plus longue portée, comme les avions de combat et les missiles balistiques, l’US Army s’appuie sur le système Patriot PAC-3, ainsi que le système d’interception balistique THAAD. Le développement d’un troisième système, pour couvrir l’intervalle aujourd’hui laissé vacant entre le plafond du Patriot (35 km), et le plancher du THAAD (60 km), est depuis peu à l’étude, et pourrait débuter dès 2025.

Iskander-M russe
Le système Iskander-M russe emploie un missile à trajectoire semi-balistique conçu pour évoluer au-dessus du plafond du Patriot et sous le plancher du THAAD

Cet intervalle d’altitude non couvert est aujourd’hui précisément celui exploité par plusieurs missiles à trajectoire semi-balistique comme l’Iskander-M et le Kinzhal russes, qui évoluent à une altitude moyenne de 50 km, n’étant à portée du Patriot que lorsqu’il plonge sur sa cible, si tant est que le Patriot soit déployé à proximité de celle-ci.

De fait, d’ici à la fin de la décennie, l’US Army devrait disposer, en effet, de la panoplie complète pour contenir l’ensemble des menaces présentes et à venir. On remarquera, toutefois, que pour y parvenir, elle devra déployer un nombre très important de systèmes, tous onéreux, ce qui en limitera naturellement le nombre, donc les capacités effectives de protection des unités américaines.

Retrait allemand du programme SCAF : une fake news pourquoi faire ?

Un article du site britannique thetimes.co.uk, publié le 1ᵉʳ novembre, affirmait que Berlin s’apprêtait à se retirer du programme SCAF, par décision du chancelier Olaf Scholz, après des négociations discrètes avec Londres, pour rejoindre son pendant, le programme GCAP qui rassemble Londres, Rome et Tokyo.

Selon le journaliste, le chancelier allemand était même prêt à mettre dans la balance la levée des sanctions allemandes contre l’Arabie Saoudite, qui bloquent aujourd’hui une commande de 48 Eurofighter Typhoon par Ryad, commande par ailleurs indispensable pour assurer la survie de la ligne d’assemblage britannique du chasseur européen jusqu’au lancement de la construction du Tempest, son successeur issu du programme GCAP.

La réaction prudente des autorités françaises à une probable fake news

Comme nous l’écrivions dès le 1ᵉʳ novembre, si un certain contexte de tension entre la France et l’Allemagne sur plusieurs sujets interdisait de se détourner, purement et simplement, de cette information par ailleurs non sourcée, rien n’indiquait, en revanche, que Berlin puisse avoir suivi une telle trajectoire, porteuse d’une rupture historique avec Paris.

Les responsables industriels et d’État français du programme SCAF, comme du programme MGCS qui lui est intimement lié, n’ont donc pas, le moins du monde, traité par le mépris cette annonce, même s’ils étaient tous pour le moins sceptiques quant à sa véracité.

programme SCAF Next generation Fighter
Les autorités françaises ont rapidement mené des investigations pour évaluer la crédibilité de l’information publiée par le Times.

Rapidement, ceux-ci se sont tournés vers Berlin et Londres, pour tenter d’y voir plus clair, et éviter, le cas échéant, de réitérer la surprise qui fut celle de l’annonce de l’annulation du programme de sous-marins australiens en aout 2021.

Comme on pouvait d’en douter, les informations recueillies étaient très rassurantes. Berlin jura ses grands dieux qu’aucune négociation de ce type n’était en cours avec Londres, et que l’Allemagne restait totalement focalisée sur les programmes SCAF et MGCS. Un démenti officiel devait, à ce titre, être prochainement publié.

Même son de cloche du côté des autorités britanniques, qui déclarent ignorer d’où une telle information a pu émerger, tout en rejetant les allégations selon lesquelles elles mèneraient des négociations dissimulées avec Berlin au sujet du GCAP.

Un retrait du programme SCAF de l’Allemagne jugé possible, mais peu crédible

Bien sûr, en de nombreux aspects, les affirmations du Times pouvaient être suspectes, même si, effectivement, la fenêtre actuelle est probablement la dernière durant laquelle Berlin peut espérer pouvoir rejoindre GCAP, ou tenter de fusionner les deux programmes.

Ainsi, et cela surprendra peut-être beaucoup de monde, en particulier en France, la collaboration industrielle entre les industries françaises et allemandes, est désormais apaisée et efficace, y compris entre Dassault aviation et Airbus DS, de l’aveu même de l’avionneur français.

Il semble, en effet, que la reprise en main politique du programme SCAF, puis du programme MGCS, ait permis d’apaiser les relations tumultueuses entre les industriels des deux cotés du Rhin, qui dorénavant avancent conjointement et efficacement pour donner corps à ceux deux projets critiques.

Sébastien lecornu Boris Pisitorius
Sébastien Lecornu et Boris Pistorius sont engagés conjointement pour mener à terme les programmes SCAF et MGCS

Par ailleurs, cet apaisement doit beaucoup à l’investissement personnel de Sébastien Lecornu, le ministre français des Armées, et à son homologue allemand, Boris Pistorius, qui, eux aussi, ont des relations efficaces et apaisées, et qui, semble-t-il, s’estiment mutuellement.

Les conséquences politiques d’une telle décision supposée d’Olaf Scholz, plaidaient, elles aussi, en faveur d’une fausse information. D’abord, si de réelles tensions opposent effectivement Paris et Berlin sur plusieurs dossiers, Emmanuel Macron comme Olaf Scholz sont tous deux très attachés au projet européen, alors qu’une telle rupture de ban de la part de Berlin, provoquerait une crise historique entre les deux plus puissantes économies de l’Union européenne.

Même son de cloche outre-manche, alors que le premier ministre, Rishi Sunak, a déployé des trésors de diplomatie pour faire oublier l’épisode AUKUS, et pour relancer la coopération avec Paris. Il serait très étonnant, dans ces circonstances, que Londres comme Berlin aient pris une telle trajectoire, créant in véritable séisme politique sur le vieux continent.

Enfin, force est de constater que les départs tonitruants, ne sont pas, à proprement parler, une spécialité allemande (ce serait plutôt une spécialité française), qui préfère, en règle générale, stopper un programme en cessant de s’y investir, comme c’est le cas de MAWS, de CIFS ou du Tigre 3.

De fait, entre l’absence de contexte alarmant, et par les retours rassurants venus de Londres et Berlin, les pilotes français des programmes SCAF et MGCS, estiment désormais que cette information, est très probablement fausse.

Quel est l’origine, et les objectifs, de cette fake news ?

Reste que, si Londres ou Berlin ne sont pas à son origine, celle-ci n’est pas, pour autant, apparue spontanément. Il est donc probable qu’elle ait été créée pour servir un dessein. Mais lequel ? Et par qui ?

Eurofighter Typhoon arabie Saoudite
La vente d’Eurofighter Typhoon, ou de Rafale, à l’Arabie Saoudite, pourrait être le maitre-mot de cette fake news.

À ce niveau des informations recueillies, seules deux hypothèses émergent à ce sujet. La première repose sur un journaliste empressé, et des sources peu fiables, et éloignées du dossier. C’est aussi la plus probable, d’autant qu’un tel sujet allait nécessairement créer un buzz médiatique important, fussent au détriment de la crédibilité du journaliste et du Times.

La seconde hypothèse inscrirait cette démarche dans les négociations entreprises entre Paris et Ryad au sujet de l’acquisition de 54 avions Rafale. Les autorités saoudiennes ont, en effet, requis, il y a quelques jours, de Dassault Aviation, une offre pour palier l’impossibilité pour la Grande-Bretagne de livrer les 48 Typhoon en option, du fait du veto allemand.

La concordance de sujet, puisque au-delà du GCAP, il est aussi question de la levée des sanctions allemandes contre Ryad, et son calendrier, sachant que Dassault doit rendre son offre avant le 10 novembre, crédibilisent l’hypothèse d’une manœuvre désespérée des industriels britanniques, pour mettre à mal l’offre française auprès des autorités saoudiennes, en laissant supposer que Berlin pourrait prochainement lever son veto.

Reste que cette hypothèse serait extraordinairement court-termiste, puisqu’il était plus que probable que Berlin démentirait, et pourrait même être encore davantage déterminé à ne pas lever les sanctions contre l’Arabie Saoudite.

Quoi qu’il en soit, tout semble indiquer, aujourd’hui, que cette information n’en est pas une. Mieux, elle laisse penser que l’industrie britannique craindrait vraiment un succès français en Arabie Saoudite. Enfin, elle a permis de mettre en avant que, contrairement à ce qui se passait il n’y a de cela que quelques mois, le programme SCAF est désormais sur des rails efficaces et solides, et que les industriels, des deux cotés du Rhin, collaborent efficacement.

Ces 4 pivots de la guerre en Ukraine anticipés par Meta-défense

Depuis le début de la crise qui donna naissance à la guerre en Ukraine, le site Meta-defense a su anticiper les basculements stratégiques de ce conflit, parfois avec plusieurs mois d’avance, et toujours à contre-courant de l’idée dominante. Quels sont ces pivots, et pourquoi est-ce aujourd’hui important ?

Une fois, c’est un hasard. Deux fois, c’est une coïncidence. Trois fois, c’est un schéma, Cette célèbre maxime de James Bond dans Goldfinger, est souvent employée, à tort, pour illustrer les fameuses règles de Moscou. Mais qu’en est-il lorsque, par quatre fois, le site Meta-defense a su anticiper, parfois avec plusieurs mois d’avance, les pivots stratégiques autour de la guerre en Ukraine ?

En effet, depuis le début de cette crise, à de nombreuses reprises, les lecteurs assidus du site ont pu prendre connaissance d’articles argumentés, souvent à contre-pieds de l’idée dominante du moment, autour de ce conflit et surtout des grands basculements dont il a fait l’objet.

Avril 2021 : Le scénario géorgien et la Maskirovka russe

Le premier pivot critique de ce conflit, se situe non en février 2022, mais en avril 2021. À cette date, les armées russes entreprirent de déployer, sous couvert d’un exercice, près de 100 000 hommes et leurs matériels, aux frontières du Donbass. À ce moment-là, une majorité d’analystes estimaient qu’il s’agissait alors, pour Moscou, d’une gesticulation visant à peser sur les négociations autour du prix du gaz vers l’Europe.

Assaut russe contre la géorgie en 2008
La stratégie employée par Moscou pour préparer son offensive contre l’Ukraine était identique à celle employée 14 ans plus tôt contre la Géorgie, comme l’avait anticipé Meta-defense dès le mois d’avril 2021.

De son côté, Meta-defense avançait l’hypothèse d’une redite du scénario Géorgie de 2008. En effet, entre 2007 et aout 2008, les armées russes avaient, à plusieurs reprises, déployé des moyens importants aux frontières de la Géorgie, sous couvert d’exercices. Rappelons qu’à cette date, Tbilissi, comme Kyiv, s’étaient ouvertement rapprochés de l’OTAN, au plus grand déplaisir du Kremlin.

Chacun de ces déploiements permit aux armées russes d’accroitre le dispositif et les moyens lourds déployés le long de la frontière géorgienne, mais aussi d’accroitre les provocations contre les armées de Tbilissi protégeant la frontière.

C’est en réponse à une nouvelle de ces provocations, au travers d’une Maskirovka efficace menée par le GRU, que le président géorgien, Mikheil Saakachvili, persuadé d’une protection américaine et occidentale en cas de conflit avec la Russie, entreprit de reprendre la ville de Tskhinvali, tenue par les indépendantistes ossètes soutenus par des forces russes, créant le casus belli attendu par le Kremlin pour lâcher la 55ᵉ armée sur la Géorgie.

Pour Meta-defense, les déploiements répétés des armées russes à la frontière ukrainienne, visaient à reproduire cette même stratégie. 9 mois plus tard, à l’issue d’un nouveau déploiement entamé en novembre 2021, et d’une Maskirovka qui cette fois échoua, les armées russes entamaient leur offensive sur l’Ukraine.

Novembre 2021 – 223 février 2022 : l’offensive russe et la résistance ukrainienne

Au début du mois de novembre 2021, Moscou entreprit donc un nouveau déploiement massif de forces autour de l’Ukraine. Si l’immense majorité des analystes européens, y compris au sein de plusieurs services de renseignement, tardèrent à y voir les prémices d’une offensive majeure contre l’Ukraine, ce ne fut pas le cas de Meta-defense, qui prédit l’offensive, mais également sa date, et surtout, la résistance ukrainienne, alors que tous étaient persuadés qu’en cas d’attaque par les forces russes, les armées de Kyiv ne pourraient opposer qu’une résistance symbolique.

guerre en ukraine char russe détruit
Une offensive russe contre l’Ukraine ne pourrait résulter que d’une mauvaise appréciation du potentiel militaire ukrainien et de la géographie du pays, selon Meta-defense en novembre 2021.

Pour Meta-defense, la nature du déploiement russe, son ampleur et son calendrier encadrant les fêtes de fin d’année, ne pouvaient mener qu’à une très probable offensive massive russe, y compris au-delà du Donbass.

En outre, plusieurs articles anticipaient qu’en cas d’offensive russe contre l’Ukraine, les armées russes rencontreraient bien plus de difficultés qu’anticipé par ailleurs.

En effet, entre les armées ukrainiennes bien entrainées et motivées, même si insuffisamment équipées, et la géographie ukrainienne obligeant les armées russes à s’emparer de grands centres urbains pour contrôler les axes de communication, il était avancé que les forces ukrainiennes parviendraient à bloquer la progression russe pour mener des actions de guérilla dans la profondeur de la colonne russe.

C’est précisément ce qui s’est passé contre la colonne russe en route vers Kyiv, mais aussi celle qui devait prendre Kharkiv. Comme tous, Meta-defense a été surpris des mauvaises performances des unités russes dans ces premiers mois de guerre. En revanche, il avait parfaitement anticipé l’efficacité et la détermination des militaires ukrainiens lors de cette première phase de guerre.

Mars – avril 2022 : basculement vers une guerre d’usure

L’euphorie s’empara des médias et analystes occidentaux, exacerbés par une propagande ukrainienne qui, au final, s’avérera contre-productive, à partir de la mi-mars 2022, après l’échec de l’assaut dur Kyiv et sur Kharkiv, même si les armées russes enregistrèrent de meilleurs résultats dans le sud du pays, avec la prise de Kherson puis de Mariopol.

M777 Ukraine
D’une guerre de mouvement, le conflit en Ukraine a basculé vers une guerre d’usure, comme anticipé par Meta-defense dès le mois de mars 2022.

Forcer à reculer jusqu’en Biélorussie ou en Russie, les unités russes, parfois fortement entamées et sévèrement démoralisées, laissèrent de nombreux espaces de manœuvres aux unités ukrainiennes, avec des mouvements très rapides de la ligne d’engagement.

C’est pourtant à ce moment-là que Meta-defense anticipa le basculement du conflit vers un conflit d’usure (ou d’attrition), avec une stabilisation du front autour de ligne défensive difficiles à déborder. Dès cette date, l’avantage défensif sur les moyens offensifs disponibles des deux cotés, semblait s’imposer.

Quelques semaines plus tard, après un retrait tactique bien ordonné par lé général Sourovikin, et exécuté par des unités russes érodées, mais non en déroute, permis aux armées russes de se retrancher dans des lignes défensives préparées. Et si les forces ukrainiennes purent rapidement progresser, donnant l’apparence d’un basculement du conflit, elles se firent fixer par ces lignes défensives russes.

C’est alors que la guerre d’usure, qui vit son point d’orgue durant la bataille de Bakhmout, s’imposa de part et d’autre.

Janvier 2023 : Le changement de stratégie de Moscou et le poids de l’économie de guerre russe

En janvier 2023, analystes et journalistes occidentaux n’avaient que la future contre-offensive ukrainienne à l’esprit et sous la plume. Tous anticipaient, après la livraison des premiers chars lourds Leopard 2 et Challenger 2 promis par les européens, ainsi que des véhicules de combat d’infanterie Bradley, Marder et autres CV90, une percée ukrainienne dans le dispositif défensif russe.

uralvagonzavod
La nouvelle stratégie industrielle russe, lancée à l’automne 2021, a renversé la stratégie russe et la physionomie du conflit, comma l’avait annoncé Meta-defense dès le mois de janvier 2023.

Meta-defense une nouvelle fois, allait à contre-courant, en concentrant son analyse sur l’évolution de l’outil industriel de défense russe, et la montée en puissance de la production militaire, caractérisée par l’usine de char Uralvagonzavod.

Au travers de plusieurs articles successifs, le site mit en avant le fait que Moscou était parvenu à dépasser les conséquences des sanctions occidentales qui avaient, quelques mois plus tôt, presque mis à l’arrêt la BITD du pays, mais aussi à étendre la production de ses usines, au-delà de ce qu’elle était ante bellum.

À ce même moment, les médias, qu’ils soient traditionnels ou internet, ne cessaient de se gargariser à la vue de l’arrivée de T-62 et de T-55 au sein des armées russes, omettant de constater que le nombre de T-90M et de T-72B3M ne cessait de croitre, y compris dans les pertes documentées.

Rapidement, Meta-Defense mit en garde contre les effets de cette nouvelle stratégie russe, offrant une perspective de victoire à moyen ou long terme au Kremlin, alors que celui-ci avait désormais une main mise absolue sur son opinion publique et sur le pays, permettant d’absorber des pertes humaines considérables.

Et de conclure que les espoirs de victoire pour l’Ukraine, reposerait sur une production industrielle occidentale, en particulier en Europe, répliquant en miroir la production russe, pour équiper à l’équivalent les armées ukrainiennes, et priver Moscou de sa stratégie dans la durée.

Les déboires de la contre-offensive ukrainienne et le mea culpa publié par le généralissime ukrainien, Vasily Zaluzhny, finirent de valider ces derniers points, 10 mois après la publication du premier article pointant ce risque.

Quelles perspectives pour la guerre en Ukraine

De manière évidente, les lecteurs de Meta-defense ont été parmi les mieux informés en Europe concernant l’évolution du conflit en Ukraine, avec, à chaque fois, une anticipation plus que sensible concernant les grands basculements de celle-ci.

Leopard 2
La seule alternative permettant d’empêcher une défaite ukrainienne repose désormais sur les capacités industrielles européennes et la volonté des dirigeants du vieux continent ou vouloir empêcher un tel désastre.

Au-delà de l’autosatisfaction stérile, il s’agit, ici, avant tout de donner du poids aux analyses récentes, mettant en avant une très possible défaite ukrainienne, faute d’un basculement radical de la stratégie européenne en soutien à Kyiv.

Car ce ne seront ni les F-16, ni les Gripen, ni les ATACMS pas davantage que des Star Destroyers, qui pourront sauver l’Ukraine d’une stratégie russe bien plus efficace et contrôlée que nombre ont bien voulu le voir, obnubilés qu’ils étaient par des considérations tactiques et des actions d’éclat,

La clé de ce conflit n’est, en fait, ni à Kyiv, ni à Washington, et certains pas dans les inventaires miliaires des armées occidentales, mais dans un effort européen sans précédent pour déployer une capacité industrielle défense venant s’opposer à celle mise en œuvre en Russie, dans un bras de fer économique et géopolitique par Proxy, qui ne peut pas tourner en faveur de la Russie et de son PIB dix fois plus faible de celui de l’Union européenne.

À l’inverse, si le statuquo actuel est maintenu, il sera impossible aux dirigeants occidentaux, de feindre la surprise, lorsque les chars russes enteront dans Kyiv, puis dans Lviv, et que des millions de réfugiés ukrainiens se presseront aux frontières de la Pologne.

Le général Zaluzhny très pessimiste sur la poursuite de la guerre en Ukraine en 2024

La contre-offensive est un échec, et c’est mon erreur… C’est en substance le discours tenu par le général Zaluzhny, chef d’état-major et commandant en chef des armées ukrainiennes depuis le début de la guerre, dans une interview donnée à l’hebdomadaire britannique The Economist.

Après 12 mois d’une euphorie surjouée, tant par les autorités ukrainiennes que par les médias occidentaux, après les succès spectaculaires obtenus par les combattants ukrainiens à la fin de l’été et au printemps 2022, et une confiance exagérée dans le succès d’une contre-offensive ambitieuse, la nouvelle posture de celui qui est élevé au rang d’icône nationale par les Ukrainiens, a de quoi inquiéter.

Le constat pessimiste du général Zaluzhny, commandant en chef des armées ukrainiennes

Pour le général de Kyiv, en effet, la contre-offensive entamée en mai dernier, n’a permis que de récupérer l’équivalent de 17 km de profondeur le long de la ligne de front, face à un dispositif défensif russe bien plus performant qu’imaginé par l’état-major ukrainien, et par ses conseils occidentaux.

Surtout, Zaluzhny reconnait qu’il avait parié sur les effets d’une guerre d’attrition pour éroder la détermination du Kremlin. Cependant, après 150 000 tués selon lui, les armées russes, pas davantage que le pouvoir de Vladimir Poutine, ne semble chanceler sûr ses bases.

général Zaluzhny
Élevé au rang d’icône nationale, le général Valery Zaluzhny est dorénavant pessimiste quant au devenir de la guerre qu’il mène contre la Russie.

Le conflit tend à se transformer d’une guerre d’attrition à une guerre de position, qui donne, de l’avis même du chef d’état-major ukrainien, un avantage certain dans la durée à la Russie, qui dispose d’une puissante industrie de défense, d’une population rendue docile par l’élimination des contre-pouvoirs, et des opposants, et par l’élimination de toute forme de contestation, et par une érosion prévisible d’une aide occidentale de toute évidence en cours d’érosion.

La conclusion du général Zaluzhny est, elle aussi, teintée de pessimisme, puisque bien que reconnaissant les risques d’une telle tactique, celui-ci estime devoir maintenir une posture offensive, afin d’empêcher que ce conflit ne transforme la ligne de front en frontière dans un statu quo qui signerait la fin des espoirs ukrainiens de retrouver son intégralité territoriale et une victoire stratégique pour Vladimir Poutine.

Un aveuglement ukrainien exacerbé par la dynamique médiatique occidentale

Le fait est, le constat amer du chef d’état-major ukrainien, ne devrait pas être une surprise. Cela fait, en effet, de nombreux mois que des signes évidents permettent de comprendre la stratégie à l’œuvre côté russe, mais également l’aveuglement des autorités ukrainiennes, baignées dans une légende auto entretenue de supériorité militaire et technologique appuyée par les occidentaux.

Ainsi, dès le mois de janvier 2023, les annonces russes concernant la production de chars et de blindés, donnaient des éléments clés pour apprécier la stratégie et le calendrier russe, basé sur une vision à moyen et long terme, et une trajectoire visant la supériorité militaire par la mobilisation de l’industrie de défense et l’érosion de l’aide occidentale à l’Ukraine.

Leopard 2A4 Ukraine
La centaine de chars Leopard 2 et Challenger 2 envoyés par les européens en Ukraine, n’auront pas suffi à percer le dispositif défensif mis en œuvre par le général Sourovikine.

En outre, la densité du dispositif défensif déployé par les armées russes, à l’initiative du général russe Sergueï Sourovikine, dès le mois de septembre 2022, permit aux forces de Moscou de fixer une ligne de front qui n’a presque plus bougé depuis, sauf à l’occasion de redéploiement tactique, entrainant Kyiv vers une offensive qui ne pouvait sauver que très couteuse en hommes comme en matériels.

Une trajectoire russe impossible à contenir pour les armées ukrainiennes

Or, dans ces domaines, les moyens à disposition du Kremlin sont considérablement plus importants que ceux aux mains de Zelensky. D’une part, l’opinion publique russe est dorénavant entièrement sous assistance respiratoire mentale, étant harcelée chaque jour par une propagande sans vergogne, alors que l’ensemble des voix d’incidentes ou indépendantes, a été mis en sourdine.

Dans le même temps, le pays s’est activement transformé pour absorber au plus vite les conséquences des sanctions occidentales, et pour renforcer son économie de guerre.

Uralvagonzavod ligne de production
La production industrielle russe a considérablement augmenté ces derniers mois, et pourrait encore croitre dans les mois à venir.

Ainsi, dans une interview donnée à la chaine d’information continue russe Rossiya-24 TV il y a quelques jours, Sergey Chemezov, le CEO du géant de l’armement Rostec, a donné des précisions sur la transformation de la production militaire russe ces derniers mois.

« Nous avons multiplié la production. En une seule année, la production de chars a été multipliée par 7, de blindage léger – BMP, BMD et autres véhicules blindés – 4,5 fois, d’artillerie et de MLRS – 2,5 fois, et de munitions et de certains types de produits, 60 fois », a-t-il déclaré.

Plus tôt, Alexander Potapov, le PDG de Uralvagonzavod (appartenant au groupe Rostec), a déclaré que la possibilité de produire des chars T-80BVM, pour accroitre encore cette production.

Selon des informations difficiles à corroborer, l’industrie russe aura produit, ces douze derniers mois, environ 400 chars T-90M et T-72B3M et plus de 200 T-62M. Elle ferait aujourd’hui face à un goulot d’étranglement concernant les moteurs diesel (d’où la reprise de la production de T-80BVM équipés de turbines) et les canons équipant ces chars, et les transformations nécessaires pour les dépasser nécessiteraient encore quelques mois avant d’être opérationnelle.

Vers une guerre de position à l’avantage des armées russes

De fait, pour ne parler que des chars lourds, l’industrie russe pourra produire, dans les mois à avenir, de 60 à 80 nouveaux chars chaque mois, peut-être même davantage, soit plus qu’elle n’en perd en Ukraine en position défensive, en dehors des erreurs absurdes de type Avdiivka, et surtout bien plus que n’en reçoivent les armées ukrainiennes, elles aussi soumises à une sévère attrition.

guerre de position en Ukraine
Selon le général Zalouzhny, la guerre en Ukraine se transforme en guerre de position, à ‘l’avantage de la Russie sur la durée.

La mauvaise appréciation de la réponse russe aux défaites enregistrées par ses armées à l’automne dernier, par l’état-major ukrainien, a également touché l’adaptation tactique et technologique de l’adversaire, qui a su s’appuyer sur des tactiques et des technologies originales et efficaces, pour déjouer le renforcement ukrainien.

Les dernières frappes massives du 30 octobre, contre près d’une centaine de villes ukrainiennes, à l’aide principale de drones à longue portée, mais aussi de quelques missiles plus performants, ou l’arrivée massive des munitions rôdeuses Lancet sur le front, en sont l’un des exemples.

Enfin, la dernière erreur de l’état-major ukrainien, aura été, de l’aveu même de Zaluzhny, de trop vouloir croire en une solution technologique au déséquilibre du rapport de forces face aux armées russes, en particulier en montant en épingle certains systèmes d’armes comme l’ATACMS, le Storm Shadow ou le TB2, alors même qu’ils n’ont pas la possibilité d’influencer pleinement sur la réalité opérationnelle.

Sauf un changement radical de posture des européens, la guerre en Ukraine sera perdue par Kyiv

Cela ne fait aucun doute, Zaluzhny est aujourd’hui pessimiste. Et il a des raisons de l’être, puisque les objectifs politiques, à savoir recouvrer l’intégrité du territoire ukrainien, sont aujourd’hui hors de portée des armées ukrainiennes, ce quel que soit le scénario (réaliste) envisagé.

Surtout, en s’inscrivant dans un conflit de longue durée, le rapport de force ne pourra aller qu’en se détériorant pour Kyiv, sous l’effet conjugué de l’érosion de l’aide occidentale, et de la montée en puissance des effets de l’économie de guerre russe.

trump orlando meeting Armes Laser et énergie dirigée | Conflit Russo-Ukrainien | Défense antiaérienne
La menace d’un arrêt de l’aide américaine à l’Ukraine, en cas de victoire de Donald Trump en 2024, pèse évidemment sur l’appréciation pessimiste de ‘l’état-major ukrainien

Des pares-feus sont bien étendus déployés par Kyiv, qui mise depuis quelques mois, avec l’aide de Washington et de quelques capitales européennes, sur le renforcement de sa propre industrie de défense, pour soutenir le défi russe.

Toutefois, on le sait, toutes les infrastructures industrielles ukrainiennes, seront à portée des missiles et drones russes, alors que l’inverse n’est pas vrai. De fait, l’état-major russe n’aura qu’à attendre d’avoir produit suffisamment de ces systèmes de frappe à longue distance, pour venir saturer les défenses déployées par l’Ukraine autour de ces infrastructures critiques, et les détruire.

Cela, Zaluzhny ne peut l’ignorer. Comme il sait que les F-16 promis par les occidentaux, n’auront pas davantage que les ATACMS ou les Storm Shadow, le pouvoir d’inverser la situation au-dessus du champ de bataille, alors que les défenses antiaériennes russes ont été considérablement durcies.

Bien évidemment, ces équipements, et d’autres livrés par les occidentaux, permettront à Kyiv de gagner des batailles, et de faire des actions d’éclat. Mais, sur le long terme, la messe semble dite pour l’Ukraine, sauf un profond changement de paradigme de la part des Européens, qui accepteraient de soutenir l’Ukraine en miroir de la production russe, pour priver Moscou de sa stratégie actuelle.

Chute de Saigon 1975
50 ans après, Kyiv sera-t-il un nouveau Saïgon ?

Reste que la situation en Ukraine est désormais des plus préoccupantes, et requiert une réaction immédiate et déterminée des européens, ou au moins de certains d’entre eux, pour briser la dynamique en cours.

Faute de quoi, Kyiv pourrait bien être, en 2025, une redite de Saïgon et de la défaite des armées sud-vietnamiennes, 50 ans après ce qui fut l’une des plus grandes humiliations américaines de l’histoire.

L’Allemagne va-t-elle quitter le programme SCAF pour rejoindre le GCAP Tempest britannique ?

Un article du Times indique que l’Allemagne serait sur le point de se retirer du programme SCAF franco-allemand , pour rejoindre le GCAP aux côtés de la Grande-Bretagne, de l’Italie et du Japon, ainsi que de lever l’opposition de Berlin à l’exportation de Typhoon vers l’Arabie Saoudite. Une telle décision, qui serait le fait d’Olaf Scholz, entrainerait une dégradation sans précédent des relations entre la France et l’Allemagne, peut-être aussi avec la Grande-Bretagne, deux ans seulement après l’épisode des sous-marins australiens.

L’article, publié aujourd’hui par le site du Times, pourrait bien faire l’effet d’une bombe, et provoquer une crise en Europe comme il n’y en a probablement jamais eu depuis bien longtemps.

Selon celui-ci, Olaf Scholz aurait entrepris de négocier avec Londres pour permettre l’Allemagne de rejoindre le programme GCAP qui rassemble déjà, outre la Grande-Bretagne, l’Italie et le Japon.

Berlin préparerait son départ du programme SCAF, et la levée du veto au sujet des Typhoon saoudiens

En gage de bonne foi, Berlin aurait mis sur la table la levée des sanctions allemandes bloquant les exportations de chasseurs Eurofighter Typhoon vers l’Arabie Saoudite, qui jusqu’ici empêchait Londres de signer un contrat pour 48 nouveaux chasseurs vers le Royaume, ruinant probablement les chances du Rafale dans le pays.

eurofighter typhoon arabie saoudite
Berlin pourrait lever son véto à la vente de chasseurs Eurofighter Typhoon à l’Arabie Saoudite.

Les sources de l’auteur de l’article, des proches du pouvoir allemand, auraient indiqué que le chancelier allemand redouterait une explosion des couts autour du programme SCAF, pour developper un appareil très performant, avec un important risque d’échec à mi-parcours.

En outre, le leader allemand n’aurait pas apprécié le passage en force français pour permettre à Dassault de conserver le pilotage du développement du démonstrateur NGF, et ne verrait aucun intérêt à developper deux appareils de même type en Europe.

Bien évidemment, toutes ces informations, provenant de sources anonymes, doivent être prises avec d’immenses précautions. Aucun rapport officiel n’indique, en effet, que le programme SCAF, et avec lui MGCS pour le développement du char de combat du futur, puissent être à risque aujourd’hui.

Ceci étant dit, plusieurs considérations donnent une certaine crédibilité à ces allégations. Ainsi, tout indique, aujourd’hui, que l’Allemagne tenterait de minimiser ses dépenses de défense au-delà du périmètre du fond spécial de 100 Md€ annoncé en 2022.

D’autre part, il est effectivement très possible que Berlin n’ait pas gouté les dernières négociations avec Paris, que ce soit concernant le programme SCAF ou MGCS, alors que la France s’est montrée particulièrement ferme sur les périmètres industriels et technologiques initialement définis.

MGCS
Si le programme SCAF venait à péricliter, le programme MGCS suivrait.

Par ailleurs, plusieurs rapports ont fait état, la semaine dernière, d’une fin précoce de la ligne d’assemblage britannique du Typhoon, sans une nouvelle commande venant de Ryad.

Berlin en position de force pour négocier avec Londres sur fond de tensions franco-allemandes

En conséquence, Berlin est désormais en position de force pour négocier, avec Londres, son entrée au sein du programme GCAP, alors que plusieurs informations ont fait étant, la semaine dernière, de la possible fermeture de la ligne britannique du Typhoon, en l’absence de nouvelles commandes saoudiennes.

En outre, il est fort probable que si la ligne britannique venait à devoir fermer, entrainant la mise en danger de plus de 25 000 emplois directs et induits dans le pays, jusqu’à l’ouverture de la ligne Tempest, il en sera de même en Allemagne, avec le risque de voir d’importantes compétences industrielles s’étioler.

On notera également que les relations entre Paris et Berlin, Emmanuel Macron et Olaf Scholz, sont probablement au plus bas depuis plusieurs décennies, tant les deux pays et leurs chefs d’État respectifs, se sont opposés sur de nombreux sujets allant du prix de l’énergie à la défense antiaérienne européenne, parfois de manière virulente.

GCAP Tempest
Le Tempest du programme GCAP est optimisé pour la supériorité aérienne et pour opérer aux côtés du F-35.

Enfin, à en croire la communication française, il serait impensable, pour Paris, de developper seul un chasseur de 6ᵉ génération comme le NGF et son environnement SCAF, raison pour laquelle le partenariat avec l’Allemagne et l’Espagne était indispensable.

De fait, en se retirant pour rejoindre Londres et le GCAP, Berlin parie probablement sur un déclassement de l’industrie aéronautique militaire française, qui aujourd’hui fait tant de mal au Typhoon avec son Rafale, et avant cela avec son Mirage 2000 au Tornado.

SCAF, MGCS … : vers la fin des ambitions européennes pour Emmanuel Macron ?

Reste qu’une telle décision, de la part de Berlin, pourrait venir dégrader pour de nombreuses années les relations entre la France et l’Allemagne, les deux plus importantes économies de l’Union européenne, mais aussi entre Paris et Londres, les deux puissances nucléaires européennes, ce après le premier coup de poignard du programme australien AUKUS, d’autant que la fin de SCAF viendrait faire dérailler, sans aucun doute, le programme MGCS avec lui.

Ce serait aussi un immense camouflet pour Emmanuel Macron, qui avait fait ds grands programmes industriels de défense franco-allemands, les piliers de sa politique de défense depuis 2017, et obligera, là encore sans le moindre doute, la France à relancer, en urgence, une nouvelle revue stratégique, voire un nouveau Livre Blanc, ainsi qu’une nouvelle Loi de Programmation Militaire, alors même que l’encre de la LPM 2024-2030 n’a pas même encore séchée.

Programme SCAF Rafale F5 Neuron
Le Rafale F5 et le Neuron, qui doivent arriver au début de 2030, donneront aux forces aériennes et à l’industrie française, le temps nécessaire pour se retourner si l’Allemagne venait à tuer le programme SCAF

Pour autant, la France est en position de réagir et de s’adapter. D’abord, avec l’arrivée du Rafale F5 et du drone de combat Neuron en 2030, offrant aux forces aériennes françaises des moyens adaptés pour maintenir une suprématie aérienne dans la décennie à venir, et aux industriels de continuer à produire et exporter sur un marché très en demande.

D’autre part, Paris a récemment fait sensiblement évoluer sa doctrine de partenariat et d’exportation, d’équipements de défense, rendant beaucoup plus crédible d’éventuels partenariats industriels et technologiques avec d’autres États comme l’Inde, l’Égypte, les Émirats arabes unis ainsi que la Grèce.

Il va cependant falloir attendre la réaction française et allemande à la parution de l’article du Times, pour se faire une idée de sa véracité. Si la presse britannique est loin d’être fiable de manière générale, le Times n’est pas le Sun, et s’avère le plus souvent parfaitement crédible. Il ne faut donc pas, non plus, ignorer l’information, et rester passif, au risque de se retrouver dans la même situation qu’en aout 2021, lors de l’annonce du programme AUKUS.

Les armées polonaises ont-elles été davantage une vitrine politique qu’une force militaire ces dernières années ?

Ces derniers mois, il ne se passait pas une semaine sans que les armées polonaises fassent les gros titres de la presse spécialisée. Il est vrai que le gouvernent Duda multipliait les annonces spectaculaires avec des programmes d’une ambition sans équivalent sur le vieux continent.

C’est ainsi qu’en quelques mois seulement, Varsovie avait annoncé la commande de 500 systèmes HIMARS et de 96 hélicoptères d’attaque Apache AH-64E auprès des Etats-Unis, de plus de 700 véhicules blindés de combat d’infanterie lourds construits sur le chassas du K9/Krab sud-coréen, de 3 frégates Arrowhead 140 et de missiles antiaériens CAMM britanniques, pour ne citer que les plus importants.

L’année précédente, c’était un millier de chars K2, 600 systèmes d’artillerie K9 ainsi que plus de 200 lance-roquettes multiples K239 et 48 chasseurs légers FA-50 qui ont été commandés auprès de Séoul, aux côtés de 250 chars lourds M1A2 Abrams américains.

Une grande période d’incertitudes pour les armées polonaises suite à la défaite du PiS

Pour mettre en œuvre cette puissance de feu considérable, Varsovie, et son très médiatique ministre de la Défense Marius Błaszczak, avaient annoncé la création, d’ici à 2035, de deux divisions supplémentaires, portant à six le nombre de divisions mécanisées polonaises, et le recrutement de plus de 100 000 militaires pour atteindre une force de plus de 250 000 hommes, en faisant, sans comparaison, la plus importante force militaire conventionnelle du vieux continent, et célébrée comme telle par la presse spécialisée et les médias généralistes.

Marius Blaszczak
Le ministre de la Défense Marius Błaszczak a fait les titres de la presse défense pendant de nombreux mois. Mais le visage dépend par l’homme politique des armées polonaises pourraient être très différent de la réalité.

Depuis la défaite électorale du PiS du début du mois d’octobre, Varsovie est, par contraste, presque absent de la scène médiatique défense. Au mieux sait-on que le nouveau gouvernement entend-il ne pas renoncer à l’ensemble des initiatives prises par son prédécesseur, même si d’importantes adaptations seront nécessaires.

Si l’on pouvait, jusque-là, anticiper des renégociations à venir avec les principaux industriels auprès desquels le gouvernement Duda s’était engagé, il semble bien que les armées polonaises vont aussi devoir, dans les mois et à venir, entamer une profonde mutation, pour corriger les dérives induites par le précédant gouvernement en son sein.

De ces dérives, on ne savait que peu de choses jusqu’ici. Au mieux, avait-on la connaissance de certaines de leurs conséquences, comme par exemple l’augmentation très importante du nombre de départs auprès des cadres militaires expérimentées polonais ces derniers mois, venant même directement menacer les ambitions affichées par Marius Błaszczak jusqu’à son éviction électorale.

Les nombreuses dérives qui gangrènent les armées polonaises aujourd’hui

Un article publié par le site polonais defence24.pl, l’un des meilleurs sites spécialisés en Europe sur les questions de défense, donne certaines réponses, et un visage bien différent des armées polonaises, que celui véhiculé par les médias jusqu’il y a peu.

armées polonaises défilé
Au-delà des apparences, les armées polonaises font face à d’importantes difficultés révélées par le départ de plusieurs milliers de cadres en 2023.

Selon celui-ci, les armées polonaises ont, en effet, été profondément perverties ces dernières années, par un pouvoir politique omniprésent s’étant profondément installé au plus profond de l’ensemble des branches décisionnaires.

Plus concrètement, l’article préconise 16 mesures immédiates à mettre en œuvre par le nouveau ministre de la Défense, pour reconstruire les armées polonaises et leur redonner le rôle et la légitimité qui doivent être les leurs, dans la société polonaise.

Parmi les mesures évoquées, on peut citer la dépolitisation des armées, la restauration des droits de la défense dans les dossiers opposant les armées à un citoyen, ou encore un retour à la crédibilité, en cessant de communiquer sur des capacités fantasmées, ou des programmes non financés.

Les importantes difficultés auxquelles le futur ministre polonais de la Défense devra faire face

Le tableau dépend par l’article présente des armées polonaises entièrement sous le contrôle du ministère de la Défense, très politisées jusque dans ses plus profonds rouages, pour devenir, au final, une vitrine politique efficace, bien davantage qu’une force armée opérationnelle destinée à garantir la sécurité de la nation.

Donald Tusk victoire électorale
La victoire électorale de l’alliance de centre gauche de Donald Tusk aux élections législatives polonaises d’octobre 2023, semble faire s’effondrer le mythe d’une armée polonaise surpuissante entretenue par le PiS.

Comme le fait très justement remarquer l’auteur en introduction, la remise en ordre des armées polonaises devraient, idéalement, commencer par un audit extérieur et neutre. Toutefois, l’exigence de compétences et de confidentialité qu’une telle mission exigerait, suppose de faire appel à des militaires, de fait évoluant déjà dans cet environnement pour le moins corrompu, si pas au niveau financier, en tout cas au niveau des idées.

Il est donc plus que probable que le nouveau ministre de la Défense polonais, aura fortement à faire, pour tenter de rétablir une situation, de toute évidence, fortement dégradée, alors même que la menace à l’Est n’aura jamais été aussi pressante, et la protection américaine aussi vacillante.

Le bouclier militaire polonais sera bien moins résistant qu’espéré par les européens

Surtout, l’ensemble des pays européens, en particulier les grandes puissances économiques comme l’Allemagne, la France, la Grande-Bretagne et l’Italie, qui ont renoncé à accroitre leurs forces terrestres conventionnelles destinées à l’engagement de haute intensité face à un adversaire symétrique, persuadés qu’ils étaient du bouclier que représenteraient les Armées polonaises dans les années à venir, devront rapidement revoir leurs planifications.

K2 Black Panther Pologne
Seuls 180 chars K2 ont été jusqu’ici commandés par Varsovie.

Faute de quoi, en dehors de la protection américaine, il est probable que les armées européennes ne seront pas suffisamment dissuasives pour contenir les aspirations de Moscou, voire celles d’autres pays à tendance expansionniste.

Il semble bien, ces dernières semaines, que l’ensemble du Pantomime derrière lequel les puissances européennes ont voulu se convaincre de leur sécurité, se déchire de toutes parts, laissant apparaitre une réalité bien préoccupante face à des menaces qui ne sont plus émergentes depuis longtemps.

Les raids d’artillerie des Caesar ukrainiens au cœur de la résistance d’Avdiivka

La dizaine de canons CAESAR mis en œuvre par la 55ᵉ Brigade d’artillerie ukrainienne, jouent un rôle décisif dans la défense de la 110ᵉ Brigade mécanisée qui assure la défense d’Avdiivka face à l’offensive russe. Il faut dire que le système d’artillerie portée, développé par Nexter, a de nombreux atouts à faire valoir.

Depuis le début de l’offensive russe en Ukraine, en février 2022, plusieurs matériels ont démontré leur inefficacité ou leur trop grande vulnérabilité. C’est notamment le cas du canon tracté M777 américain, dont plus de la moitié des 108 tubes envoyés par l’US Army auraient déjà été détruits par les tirs de contrebatteries russes.

À l’inverse, d’autres équipements se sont auréolés d’une réputation de grande efficacité, comme le missile antichar Javelin, le drone MALE léger TB2, le missile de croisière Storm Shadow SCALP ou le lance-roquettes à longue portée HIMARS américain.

Dans le domaine de l’artillerie, le Pzh2000 allemand a, lui aussi, fait preuve de son efficacité et de sa résistance. Mais, c’est incontestablement le CAESAR du français Nexter qui s’est taillé la meilleure réputation de performances et d’efficacité en Ukraine.

En effet, au combat depuis maintenant plus d’une année, les CAESAR livrés par la France, mais également par le Danemark dans sa version lourde 8×8, ont, a plusieurs reprises, joué un rôle décisif dans les batailles face aux armées russes. Jamais toutefois autant qu’ils s’avèrent déterminant aujourd’hui dans la défense de la poche d’Avdiivka.

La résistance ukrainienne dans la poche d’Avdiivka

Après 6 mois de posture défensive pour contenir la poussée ukrainienne, les armées russes ont entamé, au début du mois d’octobre, de reprendre la ville d’Avdiivka, au nord-ouest de Donetsk. Cette ville, qui autrefois abritait 35 000 habitants, fait l’objet depuis une vingtaine de jours d’âpres combat, suite aux offensives répétées et souvent très couteuses des unités russes.

Avdiivka bataille
À l’instar de Bakhmout et de nombreuses autres villes ukrainiennes, Avdiivka est désormais vidée de presque tous ses habitants, et presque intégralement détruite.

C’est la 110ᵉ brigade mécanisée qui assure la défense de la ville. Déjà usée par les précédents combats et par les 20 jours d’assaut russes, la résistance de cette brigade dépend aujourd’hui du maintien des voies de communication et d’approvisionnement, régulièrement attaquées par les unités et l’artillerie russe.

Pour contenir cette menace, les défenseurs ukrainiens sont soutenus par la 55ᵉ brigade d’artillerie, armée majoritairement de canons tractés d’origine soviétique, mais surtout de 10 canons automoteurs CAESAR de 155 mm livrés par la France. Ceux-ci jouent un rôle déterminant dans la résistance d’Avdiivka, selon un article publié par Forbes.

Le rôle des Caesar dans la défense d’Avdiivka

Les CAmion Équipés d’un Système d’ARtillerie, ou CAESAR, se composent d’un camion 6×6 équipé d’un moteur turbo diesel de 215 cv, d’un système d’artillerie de 155 mm équipé d’un tube de 52 calibres (52 fois le calibre de l’arme, soit 8 mètres), et d’un système de navigation et de pointage balistique, lui permettant de se mettre en batterie en moins d’une minute.

Associé aux obus à sous-munitions américains M864, le CAESAR peut tirer plusieurs obus larguant chacun une centaine de grenades sur une cible distante de plus de 30 km, et lever la batterie en moins de quatre minutes, un délai trop court pour permettre à la contrebatterie russe de le détecter, le viser et l’engager avec ses propres moyens d’artillerie.

CAESAR 8x8
Le Danemark a offert ses 18 canons CAESAR 8×8 aux armées ukrainiennes.

Outre les M864, le CAESAR peut également tirer des obus bonus conçus pour détruire les véhicules lourdement blindés, qui larguent au-dessus de la cible deux sous-munitions autoguidées qui se dirigeront vers les blindés à proximité, ou des obus explosifs classiques, pour éliminer avec une grande précision, les bunkers et sites défensifs russes.

Au-delà de sa portée et de sa précision, c’est surtout la très grande mobilité du CAESAR qui, aujourd’hui, joue un rôle majeur dans la défense d’Avdiivka.

La tactique des raids d’artillerie éprouvée en Irak par l’Armée de Terre française

La 55ᵉ Brigade d’artillerie ukrainienne met, en effet, en œuvre ces systèmes dans une tactique développée par l’Armée de terre française en Irak, et pour lequel le CAESAR est l’arme idéale : le raid d’artillerie.

Sur ce théâtre, les Caesar de l’Armée de terre employaient leur grande mobilité pour mener des raids leur permettant d’enfoncer dans le territoire tenu par Daech, pour aller frapper certaines cibles hors de portée des autres systèmes d’artilleries, avec une précision accrue pour éviter les dégâts collatéraux qui interdisait l’utilisation des HIMARS.

caesar Irak
Les Caesar de l’Armée de Terre ont mené de nombreux raids d’artillerie contre l’État Islamique, pour détruire des cibles dans la profondeur en limitant les dégâts collatéraux.

En Ukraine, bien évidemment, le contexte est différent. La tactique employée, cependant, demeure la même. Les Caesar ukrainiens évoluent hors de portée des systèmes d’artillerie russes, jusqu’à venir dans la zone de tir, de sorte à gagner en allonge, pour des frappes intenses, mais particulièrement courtes, avant de se retirer à nouveau hors de portée de la riposte russe.

En précédant ainsi, les unités ukrainiennes minimisent considérablement les risques de contrebatteries, mais aussi les frappes de munitions rôdeuses comme le Lancet, sauf à venir malencontreusement croiser la route d’un de ces drones déployés pour une tout autre mission.

Un rapport efficacité-prix inégalé pour le CAESAR

D’autres systèmes d’artillerie peuvent appliquer la même tactique, comme l’Archer suédois, ou le Zuzana slovaque. Toutefois, aucun n’attend la mobilité hors norme d’un CAESAR ne pesant sur la balance que 17 tonnes au combat, atteignant 100 km/h sur route et 50 km/h en tout terrain, et doté d’une autonomie de 600 km.

En outre, le CAESAR est particulièrement économique, à moins de 5 m€ l’unité pour la version 6×6, en faisant davantage une alternative de l’artillerie tractée, que du Pzh2000 allemand, ses 58 tonnes et ses 18 m€, soit le prix de presque 4 CAESAR.

pzh2000
Mieux protégé que le Caesar, le Pzh2000 allemand est aussi incomparablement plus lourd, moins mobile et onéreux.

Produit désormais à 6 exemplaires chaque mois, bientôt 8, le système de Nexter s’avère de fait, sans la moindre équivoque, le système d’artillerie de 155 mm le mieux adapté pour répondre aux besoins ukrainiens, en associant performances, prix bas et production intensive.

Il conviendra de garder cela en tête lorsqu’il s’agira de combler les espaces laissés par un éventuel retrait américain, pour continuer à alimenter l’Ukraine en systèmes d’armes performants. En attendant, à Avdiivka, les CAESAR font le job, et le font même très bien.

Ouragan Trump : les européens ont 2 mois pour réagir à temps

En campagne pour les primaires Républicaines en vue des élections présidentielles américaines de 2024, Donald Trump avait indiqué, il y a quelques jours, qu’il entendait mettre les Etats-Unis en réserve de l’OTAN, et réviser l’interprétation faite de l’article 5 de l’alliance une foi élu, sauf si les européens acceptaient l’ensemble de ses exigences.

L’ancien président est à nouveau revenu sur cette posture qu’il entend donner aux Etats-Unis après son élection, à l’occasion d’un meeting donné à Sioux City, dans l’Iowa, l’un des fameux « Swing States » lors des élections américaines.

À cette occasion, Donald Trump a évoqué une prétendue anecdote lorsqu’il était président, alors qu’il avait menacé les européens de retirer la protection américaine si ceux-ci n’augmentaient pas leurs dépenses de défense.

« Vous voulez dire que si la Russie attaquait mon pays, vous n »interviendrez pas ? » lui aurait lancé un leader européen, « oui, c’est exactement cela« , aurait-il répondu, ajoutant qu’après cela, « l’argent est arrivée« .

Cette anecdote a provoqué des applaudissements nourris dans l’auditoire, montrant que l’électorat trumpiste est, de toute évidence, sensible à ce type de stratégie.

Ukraine / OTAN : Les menaces du programme de Donald Trump

Après avoir clairement annoncé que les Etats-Unis ne soutiendraient plus l’Ukraine s’il était élu, Donald Trump fait dorénavant de son bras de fer avec les européens, et d’un retrait qui ne dit pas son nom de l’OTAN des Etats-Unis, un thème de campagne majeur.

Cette stratégie peut paraitre surprenante, dans la mesure où depuis plusieurs semaines, le candidat républicain sort très régulièrement en tête des sondages face à Joe Biden. On aurait pu croire, dans un tel scénario, qu’il eut été plus sage d’éviter les sujets clivants comme l’OTAN.

Trump Merkel
Le programme de Donald Trump en 2023 est assez proche de celui de 2016. Mais la situation internationale est tout autre.

Au contraire, Trump multiplie les postures privilégiant le rapport de force avec ses alliés européens, qu’avec les adversaires désignés de Washington, comme la Chine ou la Russie. Se dessine donc, pour l’ancien président américain, une stratégie fortement teintée d’isolationnisme, un thème que l’on sait, d’expérience, fertile outre Atlantique, surtout lorsque des crises majeures se dessinent.

Donald Trump semble prendre l’avantage dans les sondages américains

Cette menace majeure pour la paix en Europe est désormais particulièrement palpable. En effet, à en croire les agrégateurs de sondages suivant la présidentielle américaine comme 270towin.com, le candidat Trump a pris, ces derniers mois, une certaine avance sur le président sortant, Joe Biden.

Ainsi, selon ce site, et sur la base des 6 derniers sondages nationaux, Donald Trump obtiendrait, aujourd’hui, 44 % des suffrages, contre 42 % pour Joe Biden, alors que 14 % des sondés ne se prononcent pas où sont encore indécis.

À l’échelle des états, le Parti républicain est Donald Trump s’imposerait sur 26 des Etats suivis, contre seulement 12 pour Joe Biden. Il convient évidemment de pondérer ces résultats du nombre de Représentants à la Chambre par état, qui dépend de sa Population.

Ainsi, la Californie, et ses 54 Représentants, est très en faveur de Joe Biden avec 57 % des sondés, contre seulement 26 % pour le candidat républicain, alors que le Nebraska, et ses 2 Représentants, est tout acquis à Donald Trump.

Trump meeting Illinois
Donald Trump semble prendre l’avantage dans les sondages américains

L’élection sera très probablement déterminée par les fameux Swing States, ces états à l’électorat traditionnellement équilibré entre les deux grands partis, et qui disposent d’un grand nombre de grands électeurs.

Quoi qu’il en soit, aujourd’hui, les chances de voir Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025, dépassent les 50 %. Lorsque l’on considère les conséquences qu’aurait un tel scénario pour la sécurité européenne, il est évident que les européens, aujourd’hui, jouent à la roulette russe, mais avec trois balles dans le barillet.

Quelles sont les conséquences prévisibles pour l’Europe du programme de Donald Trump ?

En effet, sur la base des seules 2 annonces sécuritaires principales de Donald Trump, à savoir l’arrêt de l’assistance militaire à l’Ukraine, et la mise en retrait de Washington de l’OTAN avec une réinterprétation de l’article 5, les conséquences prévisibles pourraient aisément être qualifiées de cataclysmiques pour le vieux continent.

Privées de l’aide américaine, les armées ukrainiennes ne pourraient résister aux forces russes plus de quelques semaines, au mieux quelques mois. Dans une telle hypothèse, non seulement Moscou obtiendrait une victoire symbolique majeure contre l’occident, mais il est plus que probable que le Kremlin ne s’arrêterait pas à Kyiv.

HIMARS ukraine
L’aide américaine a l’Ukraine est aujourd’hui indispensable pour permettre à Kyiv de résister aux armées russes

Ainsi, dans un premier temps et une fois les armées russes reconstituées par une économie de guerre globale déjà à l’œuvre dans le pays, on peut s’attendre à ce que plusieurs anciennes républiques soviétiques n’appartenant pas à l’OTAN, comme la Moldavie, la Géorgie, et pourquoi pas l’Arménie, seraient, elles aussi, absorbées par la Fédération de Russie, plus ou moins militairement, sur un délais court.

L’effondrement des gouvernements libéraux de ces pays, engendrera sans le moindre doute des vagues massives de réfugiés vers l’Europe, bien supérieures à celle de 2022 lors de l’attaque russe contre l’Ukraine.

Plus avant, si effectivement les Etats-Unis venaient à se mettre en retrait de l’Alliance Atlantique, privant les européens du bouclier nucléaire américain et rendant caduque la dissuasion partagée de l’OTAN, on peut s’attendre à un chantage nucléaire sur les voisins européens du bloc russe, comme les Pays Baltes.

Au-delà de la menace russe, on peut craindre, une telle l’hypothèse, de nouvelles tensions en Mer Égée, voire une offensive turque contre les iles grecques, Chypre ou en Thrace orientale.

Petr pavel
Pour le Président et ancien général tchèque Petr Pavel, si l’Ukraine venait à tomber, d’autres pays européens suivraient, y compris au sein de l’Union européenne et de l’OTAN (CTK Photo/Vit Simanek)

Au final, la décision de Trump, si elle était appliquée, viendrait très probablement menacer l’existence même de l’OTAN, mais également celle de l’Union européenne, pour une réécriture globale de la géopolitique européenne, entre des pays sous protectorat américain ayant accepté les exigences du nouveau Président américain; des pays soumis, volontairement ou par la force, à Moscou, voire à Ankara; ainsi que les deux nations européennes dotées, protégées par leurs dissuasions respectives.

Comment les Européens peuvent-ils se préserver de ces conséquences ?

Pour autant, l’avenir de l’Europe n’est pas nécessairement entre les mains des électeurs américains, et les chancelleries européennes disposent, encore pour quelques temps, de certaines marges de manœuvre pour contenir un tel cataclysme.

Mise en œuvre d’une dissuasion européenne autour de la France et de la Grande-Bretagne

De toute évidence, la première des réponses est entre les mains des deux nations dotées du vieux continent, la France et la Grande-Bretagne. Bien que disposant d’une dissuasion propre et dimensionnée pour contenir la menace russe dans ce domaine, ces deux pays, appartenant à l’OTAN, ne se sont jamais engagés à protéger, par cette dissuasion, leurs voisins européens, laissant cette responsabilité à Washington.

ASMPA Rafale
La dissuasion française et britannique devra être étendue aux pays européens pour contenir la mise en retrait de l’OTAN des Etats-Unis annoncée par Trump s’il était élu.

Il serait donc, rapidement, indispensable que Paris et Londres s’entendent pour proposer une mise sous protection des pays européens reposant sur les dissuasions des deux pays, soit 8 sous-marins nucléaires lanceurs d’engin à capacité stratégique (contre 10 en Russie aujourd’hui), et deux escadrons de Rafale français armés du missile de croisière supersonique ASMPA.

Il est probable que, dans une telle hypothèse, une révision du format de la dissuasion et des moyens européens soit nécessaire, avec la construction de deux SNLE supplémentaires permettant à la France et la Grande-Bretagne de maintenir chacun 2 navires à la mer, mais aussi en donnant la possibilité à certains alliés de mettre en œuvre le couple Rafale-ASMPA sur la base d’une dissuasion partagée, semblable à celle de l’OTAN basée sur le couple F-35A/B-61.

Déploiement industriel défense et nouvelle alliance militaire européenne

En second lieu, les grandes nations industrielles défense européennes, Allemagne, Italie, France, Grande-Bretagne et Suède, devront engager un vaste plan pour se substituer à l’aide américaine à l’Ukraine, et ainsi empêcher l’effondrement du pays dans la durée.

L’effort devra évidemment être conséquent, puisqu’il s’agit ici de produire en miroir l’équivalent des productions industrielles russes, de sorte à priver Moscou de perspectives de victoire à moyen et long terme.

Rappelons qu’aujourd’hui, les usines russes produisent, selon les estimations, entre 400 et 600 chars lourds modernes neufs, autant de véhicules de combat d’infanterie et de véhicules blindés de combat, 120 à 160 systèmes d’artillerie autoportée, ainsi qu’autour d’une quarantaine d’avions de combat Su-57, Su-35s et Su-34, pour ne citer que les principaux marqueurs.

Ces chiffres sont probablement appelés à croitre dans les mois et années à venir, étant donnée l’investissement croissant de l’Etat russe dans le domaine de l’industrie de défense.

Chaine de production de Krauss-Maffei-Wegmann pour le Leopard 2
L’Europe devra déployer en un temps record les infrastructures industrielles défense nécessaires pour se substituer à l’aide américaine à l’Ukraine

Les armées européennes, quant à elles, devront entreprendre un rapide effort de transformation, pour simultanément accroitre leur format et leur réserve, mais aussi pour être en mesure de déployer, dans les pays frontaliers de la Russie (et de la Turquie), les moyens conventionnels requis pour prévenir toute initiative militaire.

Enfin, il est évident qu’une nouvelle alliance militaire européenne devra être créée, centrée autour du parapluie nucléaire franco-britannique et conçue pour répondre aux enseignements de ces dernières années, particulièrement pour ce qui concerne les défaillances structurelles de l’OTAN.

Les européens ont jusqu’à janvier 2024 pour espérer réagir à temps

Reste que mettre en œuvre de telles mesures, requiert du temps, ce d’autant qu’il sera nécessaires que chacune d’elle soit opérationnelle à l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche en janvier 2025.

Même en admettant une puissante dynamique franco-britannique, susceptible d’entrainer les européens sur un calendrier raccourcie, un minimum d’une année semble indispensable pour négocier une alliance européenne, pour étendre la dissuasion des deux pays à leurs voisins européens, et surtout pour déployer et mettre en œuvre l’outil industriel indispensable pour soutenir Kyiv face à Moscou.

Char Leclerc Armée de Terre
Une Armée de terre à 200 chars Leclerc, et une British Army à 160 Challenger 3, ne seront pas suffisantes pour fédérer les européens autour d’un projet franco-britannique

De fait, il ne reste que quelques mois, au mieux jusqu’en janvier 2024, à Paris et Londres pour éventuellement entamer la mise en œuvre de ces mesures conservatoires destinées à adapter l’Europe à la nouvelle réalité géopolitique en développement.

Une réaction salutaire, même si Joe Biden restait à la Maison-Blanche en 2024

Notons que ces initiatives ne seraient en rien « peines perdues », si Joe Biden venait à être réélu en novembre 2024. En effet, d’une manière ou d’une autre, les Etats-Unis vont être contraints d’arbitrer entre les différents théâtres d’intervention pour espérer contenir la dégradation sécuritaire internationale en cours.

Ainsi, en mettant en œuvre ces mesures, et sans venir menacer le lien transatlantique, les Européens permettraient aux armées américaines de se concentrer sur la zone indo-pacifique allant du Moyen-Orient à la Mer de Chine, laissant aux Européens la mission de contenir le théâtre européen, Méditerranéen et proche-oriental, et peut-être partager leurs investissements dans le Caucase et en Afrique.

USS Eisenhower
Même si Joe Biden venait à s’imposer en 2024, une initiative européenne permettant de contrôler la menace russe et de sécuriser plusieurs théâtres proches, permettrait aux Etats-Unis de peser de tout leur poids dans le Pacifique face à la Chine, l’Iran et la Corée du Nord.

Reste que la perspective de voir Trump revenir à la Maison-Blanche, avec les conséquences que l’on connait, n’est pas, à proprement parler, nouvelle, tout comme les tendances isolationnistes et populistes du candidat républicain.

Or, jusqu’à présent, personne en Europe, ni les Français, ni les Britanniques, et pas davantage les Allemands ou Italiens, semblent prêts à prendre la mesure du désastre potentiel qui s’annonce pour engager les politiques indispensables afin de les contenir.

Au contraire, tout indique que les chancelleries européennes, sont revenues dans une posture de déni, comme c’était le cas avant l’attaque russe contre l’Ukraine, en voulant à tout prix éviter de faire face aux réalités géopolitiques, pour se concentrer sur des sujets de politique intérieure et de luttes de pouvoir, plutôt que de prendre la mesure des évènements historiques qui se dessinent.

Conclusion

Une chose est certaine, toutefois. Si les européens ont pu feindre la surprise le 24 février 2022, avec l’attaque russe contre l’Ukraine, en dépit des nombreux signes qui indiquaient le haut degré de la menace, il sera impossible de faire de-même au lendemain d’une possible, si pas encore probable, élection de Donald Trump.

Pas davantage lorsque celui-ci viendra tenter d’extorquer, par la menace sur la protection américaine, des avantages commerciaux auprès des Européens, ou une implication bien plus ferme de ceux-ci sur le théâtre indo-Pacifique, tout en reculant, quoi qu’il en soit, sur la protection US.

Rishi Sunak Emmanuel Macron
Rishi Sunak et Emmanuel Macron seront-ils les futurs Churchill et De Gaulle, ou les prochains Chamberlain et Daladier ? Cela se décidera probablement dans les 2 mois à venir…

Notons, à ce titre, que cette menace Trump est parfaitement bien identifiée et prise au sérieux outre-atlantique, amenant le Congrès et l’administration Biden à mettre en œuvre des pare-feux et garde-fous pour contenir les éventuelles décisions excessives d’un Donald Trump réélu, qu’il s’agisse de l’OTAN ou de l’Ukraine.

Toutefois, si ces mesures pourront, éventuellement, donner un délai supplémentaire aux européens pour réagir, elles ne pourront pas s’y opposer au-delà de quelques mois, surtout si les Républicains sont majoritaires dans les deux chambres.

Nous verrons bien si les dirigeants européens, en particulier Emmanuel Macron et Rishi Sunak, sauront prendre la mesure des responsabilités qui sont les leurs dorénavant, pour suivre les traces de De Gaulle et Churchill, ou s’ils deviendront les nouveaux Daladier et Chamberlain du 21ᵉ siècle.