mardi, décembre 2, 2025
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Les Verts allemands s’opposent à la vente de 48 chasseurs Typhoon à l’Arabie Saoudite

En amont de la conception des chasseurs Typhoon, les industriels britanniques BAe et Rolls-Royce exigèrent qu’un accord soit signé notamment avec Berlin, pour s’assurer que les circonvolutions du paysage politique allemand, ne vienne pas entraver les futures opportunités d’exportation de l’appareil.

Pour autant, en 2018, le Bundestag bloqua la livraison d’armement aux pays engagés dans le conflit yéménite, et plus particulièrement vers l’Arabie Saoudite et les Emirats Arabes Unis.

De fait, malgré l’engagement initial, Berlin refusa de livrer les pièces nécessaires à la construction de Typhoon produits par sa propre industrie vers l’Arabie Saoudite, alors que celle-ci souhaitait exécuter l’option négociée lors de la commande des 72 premiers appareils.

De fait, cette commande pourtant stratégique pour Londres, BAe et Rolls-Royce, et qui portait potentiellement sur 48 nouveaux avions de combat, se retrouva bloquée, ce en dépit des protestations des autorités britanniques furieuses de voir l’Allemagne ne pas respecter ses engagements dans ce domaine.

L'option saoudienne sur 48 chasseurs Typhoon permettrait de garantir la pérennité de la chaine britannique de BAe pour plusieurs années
L’option saoudienne portant sur 48 nouveaux Typhoon permettrait de garantir la pérennité de la chaine britannique de BAe pour plusieurs années

Avec la signature d’un cessez-le-feu et l’ouverture de négociations entre les rebelles Houthis, Riyad et Abu Dabi, BAe entreprit de relancer les négociations au sujet de l’option, alors qu’une nouvelle commande de Typhoon permettrait de préserver la ligne de production britannique de l’appareil, peut-être même jusqu’au lancement de la fabrication du Tempest.

Pour le Chancelier allemand Olaf Scholz et le SPD, à la tête de la coalition au pouvoir en Allemagne, les changements de posture saoudiennes et émiriennes semblent suffisantes pour lever l’embargo stricte contre la livraison d’armes vers ces pays. Mais ce n’est pas le cas des Verts allemands, seconde puissance politique du pays, et pivot de la coalition actuellement au pouvoir.

En effet, selon un article du site allemand Die Welt, et au delà de l’illustration montrant un Gripen suédois présenté comme un Typhoon allemand, le parti politique serait très fermement opposé à une telle hypothèse, la porte-parole de la politique de défense Sara Nanni ayant déclaré « Le gouvernement fédéral ne doit en aucun cas y consentir » aux journalistes allemands.

Sachant les difficultés rencontrées par les partis allemands pour faire émerger une coalition de gouvernement rassemblant le SPD, les Verts et le FPD, il est très peu probable qu’Olaf Scholz prenne le risque de braquer ses partenaires pour un sujet par ailleurs loin d’être populaire auprès de l’opinion publique allemande.

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Le programme franco-allemand SCAF risque fort, à l’avenir, de se retrouver dans la même situation que celle rencontrée aujourd’hui par le programme Eurofighter Typhoon

De fait, sauf retournement de situation aussi peu probable que spectaculaire, on peut s’attendre à ce que les ambitions affichées il y a quelques jours par Gaincarlo Mezzanatto, le CEO du consortium Eurofighter, qui estimait qu’il enregistrerait dans les 2 ans à venir, autour de 200 commandes d’appareils neufs, soient revues à la baisse. La commande saoudienne représentait très certainement une part importante de cet objectif.

Cette situation, qui va certainement provoquer une nouvelle fois l’ire des autorités britanniques, va également provoquer un regain d’inquiétude auprès des autorités françaises, et peut-être espagnoles, au sujet du programme SCAF. En effet, comme concernant le Typhoon pour BAe et Rolls-Royce, les exportations à venir du nouveau chasseur européen se révéleraient indispensables et stratégiques pour Dassault Aviation, Safran, Thales et MBDA, les piliers de la BITD aéronautique française.

En effet, comme le démontre cet épisode, les engagements contractuels de Berlin n’ont que peu de poids face à la vie politique allemande, par ailleurs très complexe, et à son opinion publique, très réactive dans certains domaines.

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Les positions des verts allemands au sujet de l’Arabie Saoudite pourraient également venir faire dérailler une possible commande de 6 A400M par les Emirats Arabes Unis

Ainsi, il convient de souligner que le contrat historique signé par la France avec les EAU en 2021, portant notamment sur l’acquisition de 80 avions Rafale F4 pour 14 Md€, n’aurait pas été possible si Berlin avait eu droit de citer, et ce même si un accord préalable avait été signé dans ce domaine.

On notera au passage que l’opposition allemande vis-à-vis des 48 Typhoon saoudiens, s’appliquerait également aux 6 A400M que souhaiteraient commander les Emirats Arabes Unis, pour les mêmes raisons. Or, l’industrie française est impliquée dans la construction de cet appareil….

Nul doute que cet épisode, qui aujourd’hui reste encore relativement sous les radars en France, inquiétera, ou inquiète déjà les industriels français engagés dans le programme SCAF, et créeront de nouvelles tensions dans les semaines et mois à venir, entre Paris et Berlin à ce sujet, même si Olaf Scholz sera probablement assez démuni.

Plus structuré et moins entravé, le programme GCAP (Grande-Bretagne, Italie et Japon) prend de l’avance sur SCAF

Présenté initialement comme une réponse rapidement assemblée à l’annonce du programme (alors) franco-allemand SCAF d’avion de combat de 6ᵉ génération, le programme GCAP pour Global Combat Air Platform, qui rassemble la Grande-Bretagne, l’Italie et le Japon, semble prendre le large vis-à-vis de son compétiteur européen.

En effet, s’exprimant face à la presse spécialisée sur le site de l’avionneur britannique BAe de Warton, son directeur des systèmes du Futur Système de combat aérien, Herman Claesen, s’est montré plus que confiant dans le futur du programme visant à devenir le premier avion de combat de 6ᵉ génération, faiblement observable, supersonique et piloté, à entrer en service, en dehors des NGAD américains.

Ainsi, Herman Claesen estime désormais que l’objectif d’une entrée en service du GCAP en 2035 est parfaitement atteignable, alors que le démonstrateur du programme devrait prendre l’air « d’ici à 5 ans », c’est-à-dire en 2028, ou avant.

Pour BAe et ses partenaires, ce calendrier très ambitieux s’avère consubstantiel de la stratégie commerciale entourant le programme, et notamment les grandes ambitions en matière d’exportation visées par l’avionneur qui entend bien ne plus jouer les seconds rôles derrière Dassault aviation sur la scène internationale, comme ce fut le cas du Typhoon vis-à-vis du Rafale et du Tornado vis-à-vis du Mirage 2000.

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Le programme GCAP devra prendre le relais des Typhoon au sein de la RAF et des forces aériennes italiennes, ainsi que des F2 japonais. Ces 3 forces mettent également en œuvre une importante flotte e chasseurs bombardiers furtifs F-35 A et B

D’ailleurs, à l’occasion de cette rencontre presse, celui-ci a plusieurs fois abordé la compétition latente avec le programme SCAF, faisant à ce sujet en partie reposer la responsabilité de ses errements au manque d’expérience de l’industrie aéronautique française dans les programmes en coopération, contrairement à la Grande-Bretagne qui en a accumulé beaucoup dans ce domaine avec le Tornado, la Typhoon et le Jaguar avant eux.

Surtout, BAe semble faire du calendrier une arme stratégique pour s’imposer sur le marché international et retrouver des parts de marchés perdus ces dernières décennies au travers des précédents programmes en coopération.

Ainsi, la possible participation de l’Arabie Saoudite au programme a une nouvelle fois été abordée, alors même que Londres risque fort de passer à côté d’une nouvelle commande de Typhoon saoudien du fait du veto allemand. On notera que le Japon a entrepris de modifier sa propre législation pour s’adapter aux exigences britanniques en matière d’exportation, et ne pas les entraver.

Le fait est, le discours de BAe n’a pas tari d’éloges quant à la qualité de la coopération avec Rome et Tokyo dans ce programme, dans une volonté probablement un tantinet trop appuyée pour être parfaitement honnête, de la mettre en perspective les difficultés et retards remontrés par le programme SCAF autour du partage industriel entre l’industrie de défense française et allemande.

Le programme GCAP est le pendant britannique, italien et japonais, du SCAF qui rassemble la France, l'Allemagne et l'Espagne.
Le programme SCAF qui rassemble la France, l’Allemagne et l’Espagne, a rencontré de nombreuses difficultés dans le domaine du partage industriel entre les 3 BITD européennes

Pour autant, alors que le programme Tempest avait hâtivement été jugé comme une tentative britannique de rejoindre le programme SCAF franco-allemand en son temps, et alors que plusieurs experts estimaient que celui-ci ne pourrait pas être financé jusqu’à son terme, il présente aujourd’hui des fondamentaux économiques et politiques autrement solides que son homologue européen, avec des partenaires semblent-ils mieux coordonnés, et partageant des objectifs à la fois bien définis.

Dans le même temps, même s’il est désormais relancé, le programme SCAF demeure encore excessivement fragile, l’accord obtenu par les ministres de la Défense des 3 pays il y a maintenant un an, ne couvrant que la phase 1B pour l’étude de la conception du démonstrateur d’ici à 2027. Au-delà de cette échéance, le flou persiste, notamment pour ce qui concerne le partage industriel de production, qui risque fort de donner lieu à de nouveaux bras de fer bloquants.

Pour autant, la stratégie visée par BAe, sur la base d’un calendrier raccourci et ambitieux, ne garantit pas du succès du programme, particulièrement sur la scène internationale. En effet, la plupart des forces aériennes sont aujourd’hui engagées dans le renouvellement de leurs flottes d’avions de combat, et particulièrement des appareils acquis dans les années 80.

La maquette du FCAS Tempest britannique presente lors du salon de Farnbourough 2018 e1688652257766 Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
Beaucoup de commentateurs, notamment en France, ne prenaient pas au sérieux le programme Tempest britannique lorsque la maquette taille réelle fut dévoilée lors du salon de Farnborough de 2019

De fait, en 2035, le marché global risque d’être peu réactif, et ce, jusqu’en 2040-2045, surtout si entre-temps, d’autres appareils, comme le Rafale F5, viennent proposer les prémices des capacités de la 6ᵉ génération à la fin de la présente décennie, ou au début de la suivante.

Reste que, de toute évidence, le programme GCAP est désormais perçu et entrepris par BAe et la BITD aéronautique britannique, comme une nouvelle compétition franco-britannique, de sorte à ramener Londres au premier plan des grandes nations aéronautiques militaires dans les années à venir, plus au détriment des parts de marchés françaises qu’américaines, de toute évidence. La France, Dassault Aviation et ses partenaires de la Team Rafale, sont dorénavant prévenus.

Le satellite militaire nord-coréen lancé sans succès fin mai, était un Fake, lui aussi ..

Si le lancement pourtant médiatisé du premier satellite militaire d’observation nord-coréen fut un échec, il semble que le satellite lui même était incapable de mener des missions d’observation de qualité militaire tel qu’avancé par Pyongyang. C’est en tout cas ce qu’il ressort de l’analyse des débris récupérés par une très importante mission de la marine sud-coréenne.

À l’occasion d’une nouvelle parade militaire dont le régime de Kim Jong Un semble très friand, en début d’année, des clichés publiés par l’agence de presse officielle nord-coréenne permirent à certains spécialistes de conclure que le prétendu char M2020 de nouvelle génération présenté depuis plusieurs mois comme « à mi-chemin du M1A2 américain et du T-14 Armata russe », était en réalité un fake.

En effet, l’observation attentive des clichés, permit à ces spécialistes de noter que le blindage composite censé protéger le blindé, n’était autre que des plaques d’aluminium soudées et peintes pour donner l’illusion d’un blindage comparable à ceux employés pour protéger les chars occidentaux, alors que d’autres clichés montraient que le blindé n’était prévu que pour les parades, et non le combat.

Apparemment, Pyongyang a tenté, une nouvelle fois, de mystifier son entourage fin mai, à l’occasion du lancement très médiatisé et relayé sur la scène internationale, d’un satellite militaire d’observation devant permettre aux armées nord-coréennes de suivre les mouvements de leurs homologues du sud.

/e satellite militaire nord-coréen, qui s'est écrasé fin mai, était un fake, comme le char M2020 présenté quelques mois plus tôt
Le char M2020, présenté lors de parades militaires à Pyongyang, n’est en vérité qu’une mystification destinée à donner le change aux capacités militaires sud-coréennes en pleine modernisation.

En effet, après que le lancement échoua et que la fusée transportant le prétendu satellite militaire se soit écrasée en mer du Japon, la Marine sud-coréenne entreprit une discrète, mais massive opération navale pour chercher les débris disséminés par l’accident, et les analyser.

Selon l’état-major sud-coréen, cette opération, qui mobilisa d’importants moyens navals, aériens et sous-marins, s’étendit sur 36 jours et prit fin le 5 juin. Elle permit de retrouver de nombreux débris depuis analysés par les spécialistes du sujet en Corée du Sud. Leur verdict est sans appel.

En effet, selon eux, si la fusée nord coréenne transportait bien un satellite d’observation, les systèmes embarqués par celui-ci n’étaient en rien suffisants pour permettre de mener des opérations de renseignement électro-optiques spatiaux de qualité militaire.

En d’autres termes, la qualité et la définition des systèmes embarqués par ce satellite, n’auraient pas permis à Pyongyang d’observer efficacement les mouvements de forces sud-coréens comme affirmé, bien au contraire.

Ce constat vient, une nouvelle fois, entraver les démonstrations de forces répétées de Kim Jong Un, qui multiplient ces derniers mois des déclarations souvent douteuses quant aux avancées technologiques réalisées par la Corée du Nord dans le domaine miliaire.

Miniature nuclear Warhead North Korea Kim Jong un Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
Kim Jong Un, le leader nord coréen, aime à se mettre en scène sur les questions de technologies militaires, comme ici lorsque fut annoncé que la Corée du Nord était parvenue à miniaturiser une tête nucléaire en mars 2023

Ainsi, en mars denier, Pyongyang avait annoncé coup sur coup être parvenu à miniaturiser une tête nucléaire de sorte à l’embarquer à bord d’un missile balistique, ce qui demeurait dans les limites du possible, surtout avec l’aide plus ou moins directe de Moscou ou de Pékin, mais également à être parvenu à concevoir une torpille nucléaire capable de produire des tsunamis géants, ce qui, en revanche, est impossible, même la Poseidon russe de laquelle cette fausse rumeur de tsunami est partie, n’en étant pas capable.

Reste que si, effectivement, la Corée du Nord tente de se faire passer sur la scène internationale comme plus avancée militairement, donc plus menaçante qu’elle ne l’est vraiment, certaines capacités dont elle dispose de manière irréfutable, notamment dans le domaine des missiles balistiques et semi-balistiques, représentent déjà des enjeux de sécurité très sérieux pour ses voisins comme la Corée du Sud et le Japon.

Alors que la géopolitique mondiale se redessine à toute vitesse, on peut en outre craindre que le pays accède à d’autres de ces technologies critiques, notamment en provenance de Chine ou de Russie, de sorte à renforcer un bloc en construction structuré autour de sa seule opposition aux Etats-Unis et aux nations occidentales.

Dès lors, toutes les capacités que Pyongyang se vante de posséder, doivent susciter une expertise poussée. C’est bien pour cela que Séoul a mobilisé autant de moyens pour retrouver les débris de ce satellite, fut-il un fake.

Allemagne vs Inde : La France doit-elle réviser sa doctrine de coopération industrielle de Défense ?

Peu après son accession à l’Élysée en 2017, le président Emmanuel Macron entreprit de donner corps à un des objectifs clés de son action internationale et européenne, en s’accordant avec la Chancelière allemande Angela Merkel pour faire du couple franco-allemand le pivot de l’émergence d’une Europe de la Défense.

Pour y parvenir, les deux chefs d’État annoncèrent une ambitieuse coopération industrielle au travers du lancement de 5 grands programmes industriels de défense franco-allemands : l’avion de combat de nouvelle génération SCAF pour remplacer à horizon 2040 les Rafale français et Typhoon allemands, le char de combat de nouvelle génération MGCS pour remplacer en 2035 les Leclerc et Leopard 2; le programme CIFS d’artillerie à longue portée pour le remplacement des Caesar et Pzh2000 ainsi que des LRU de l’Armée de Terre et de la Bundeswehr, l’avion de patrouille MAWS pour le remplacement des Atlantique 2 et des Orion P-3C ainsi que le programme Tigre III et son missile antichar à longue portée, pour moderniser la flotte d’hélicoptères de combat Tigre et remplacer les missiles Hellfire et Spike actuellement employés.

Lancés alors que les tensions entre Angela Merkel et Donald Trump étaient à leur paroxysme, ces programmes s’étiolèrent rapidement lorsque Berlin et Washington adoucirent leurs positions, et encore davantage après l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche.

P8 Poseidon Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
L’annonce de l’acquisition de P8A Poseidon de Patrouille Maritime pour remplacer les P-3C Orion de la Luftwaffe, a sonné le glas du programme MAWS, même si Berlin s’en défend

C’est ainsi que successivement, l’hélicoptère Tigre III et son missile, le système d’artillerie CIFS et l’avion de patrouille maritime MAWS furent, si pas strictement abandonnés, Berlin n’ayant jamais arbitrés ouvertement à leurs sujets, en tout cas mis aux oubliettes jusqu’à ce que Paris entreprennent de developper ces capacités d’une autre manière, face à la pression opérationnelle et aux échéances qui se dessinaient.

Après avoir frôlé l’explosion en vol autour des tensions opposant Dassault et Airbus DS au sujet du pilotage du premier pilier du programme SCAF, la conception de l’avion de combat NGF lui-même, celui-ci finit par être sorti de l’ornière, il y a peu, pour lancer la phase de conception du prototype, à grand renfort d’une intervention ferme et déterminée des ministres de tutelles français, allemand et espagnol, mais non sans accuser un retard significatif ayant amené la France à lancer un programme Rafale F5 beaucoup plus ambitieux et donc capable d’assurer l’intérim tant dans le domaine opérationnel que commercial.

Quant au programme MGCS, il est aujourd’hui à l’arrêt, notamment après que Berlin y a imposé en 2019 l’intégration de Rheinmetall, venant déstabiliser en profondeur le partage industriel équilibré initial entre le français Nexter et l’Allemand KMW, pour l’occasion rassemblés dans la coentreprise KNDS.

En outre, celui-ci fait désormais face à la reprise de la demande mondiale en matière de chars lourds suite à la guerre en Ukraine, entrainant une reconfiguration profonde du marché et donc d’importants glissements de calendriers potentiellement très bénéfiques pour l’industrie allemande, mais catastrophiques pour l’industrie et les armées françaises.

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Le bouleversement du marché des chars lourds suite à la guerre en Ukraine, a remis le Leopard 2 dans sa nouvelle version A8 sur le devant de la scène, entrainant un report du programme MGCS

A ce tableau déjà largement entamé au sujet de l’éventuelle construction de l’Europe de la défense sur la base du couple franco-allemand, le nouveau chancelier Olaf Scholz a annoncé, fin aout 2022, le lancement de l’initiative European Sky Shield, visant à mutualiser et organiser les moyens de détection et d’engagement des pays européens dans le domaine de la lutte anti-aérienne et anti-missile.

Si 14 pays européens ont rejoint l’initiative à son lancement, la France n’y participe pas, sans que l’on sache vraiment s’il s’agit d’un refus de Paris ou d’une initiative allemande ayant volontairement exclu la France et surtout ses solutions industrielles dans ce domaine.

De fait, force est de constater que les objectifs visés en 2017, ne sont plus d’actualités, alors que nul n’est en mesure de prédire si MGCS et même SCAF arriveront bien à leur terme. Mais les difficultés rencontrées par Paris ces dernières années avec l’Allemagne, ne sont pas spécifiques à ce pays, tant s’en faut.

En effet, traditionnellement, la France considère ses voisins directs (Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni et Belgique), comme des partenaires potentiels dans ce domaine, et a multiplié les initiatives ces dernières décennies à ce sujet, sans qu’elles aient connu de meilleures destinées que les programmes franco-allemands.

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Le drone de combat Taranis de BAe avait été développé, comme le Neuron, dans l’optique du programme FCAS franco-britannique, annulé par Londres en 2017

Ainsi, il convient de se rappeler le retrait unilatéral de Londres des programmes PA2 visant à concevoir un modèle de porte-avions commun, puis FCAS qui devait concevoir un drone de combat, ou encore des destroyers anti-missiles communs à la France, l’Italie et la Grande-Bretagne.

Par ailleurs, des initiatives lancées lors des accords de Lancaster House, il ne subsiste que le programme de guerre des mines navales et le missile antinavire léger ANL/Sea Viper proches de leur entrée en service, alors que le programme de missiles de croisière FMC/FMAN, après de nombreux stop&go, semble désormais sur une trajectoire solide pour une entrée en service en 2028.

La situation n’est guère meilleure concernant la coopération avec l’Italie, avec qui la France a efficacement conçu le système anti-aérien SAMP/T Mamba et le missile Aster, ainsi que le destroyer anti-aérien Horizon après le retrait des Britanniques, mais qui s’est heurtée à de profondes divergences au sujet du programme de frégate FREMM dont les modèles français et italiens ne partagent que 15% des composants, et encore davantage autour de l’initiative ayant visé à rapprocher Fincantieri et Naval Group, pour au final ne donner naissance qu’à Naviris, bien loin de « l’Airbus Naval » initialement envisagé.

Les coopérations avec l’Espagne ont été moins nombreuses et moins ambitieuses, ceci expliquant qu’elles se sont souvent mieux passées, en dehors de celle ayant visé un rapprochement entre DCNS (devenu depuis Naval Group) et Navantia dans le domaine des sous-marins pour concevoir le Scorpène, qui se termina devant les tribunaux sur des accusations de pillage industriel de DCNS contre son partenaire espagnol, et le retrait de Madrid du programme Scorpène pour developper son propre modèle, le S-80.

FREMM Italy Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
Les FREMM italiennes et françaises ne partagent que 15% de leurs composants

Dans les faits, seule la Belgique, pourtant vertement critiquée, en particulier par la France, pour son choix du F-35 plutôt que d’un appareil européen, s’est montrée un partenaire solide dans le domaine de la défense ces dernières années, avec le programme CaMo pour doter les armées de terre des deux pays des mêmes matériels et doctrines pour une grande interopérabilité, et le programme McM de guerre des mines confié à Naval Group et au belge ECA, du fait des pressions de la partie belge sur la partie néerlandaise du programme.

On le voit, tout indique que la doctrine visant à considérer ses voisins directs comme les partenaires privilégiés de la France pour le développement de programmes industriels de défense, est loin d’être efficace, bien au contraire.

Non seulement a-t-elle un taux de réussite particulièrement faible, ce quel que soit le pays, mais elle engendre, le plus souvent, des délais et des surcouts venant handicaper l’effort de défense français, et parfois l’effort industriel lui-même.

A l’opposée de ce spectre, se trouvent les clients de l’industrie de défense française, ceux-là mêmes qui permettent à la France de conserver une industrie de défense globale et efficace, et qui contribuent de manière très sensible au financement de l’effort de défense national.

Il s’agit de pays comme la Grèce et la Belgique en Europe, l’Égypte, le Qatar et les Émirats Arabes Unis au Moyen-Orient, de l’Inde et probablement de l’Indonésie en Asie, ainsi que le Brésil et, dans une moindre mesure, l’Argentine, en Amérique du Sud.

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Paradoxalement, les plus importants clients de l’industrie de défense française ne sont pas les partenaires privilégiés de Paris pour les programmes industriels de défense en coopération

Pour Paris, même si ces pays contribuent considérablement à l’effort de défense national français, et si leur arbitrage en faveur d’équipements français, contribuent à créer un rapprochement géopolitique avec eux, ils ne sont, le plus souvent, considérés que comme des clients, certes stratégiques, mais avec lesquels il n’est pas, pour l’heure, question d’entreprendre des programmes communs destinés potentiellement à équiper les armées françaises, comme c’est le cas avec l’Allemagne, du Royaume-Uni ou de l’Italie.

Or, tous ces pays, aujourd’hui, souhaitent développer leur industrie de défense et leurs capacités technologiques, et sont prêts à produire d’importants efforts pour y parvenir.

En outre, étant plus en demande dans ce domaine que les pays européens, et donc moins concurrents de l’industrie de défense française, la coopération bilatérale ou multilatérale serait simplifiée, permettant des montages industriels efficaces tant pour eux que pour préserver et accroitre les compétences industrielles et technologiques françaises.

Enfin, nombre de ces pays disposent d’importantes capacités d’investissements, potentiellement supérieures à celles de nombreux pays européens, et d’une organisation de gouvernement à la fois plus permanente et plus centralisée que les démocraties européennes, particulièrement volatiles et donc soumises à de certains revirements selon les résultats des échéances électorales.

Une coopération industrielle entre l'Inde et la France au sujet d'un char de combat intermédiaire aurait beaucoup d'attraits
Le programme de char lourd indien représente une opportunité pour la France de co-développer un char de génération intermédiaire basé sur la tourelle EMBT de Nexter

Nous avons, à plusieurs reprises, évoqué dans des analyses publiées sur ce site, de telles coopérations potentielles, qu’il s’agisse de concevoir un char de combat de génération intermédiaire avec l’Inde, d’un Rafale de guerre électronique avec les Émirats Arabes Unis, ou d’un successeur au Mirage 2000 avec la Grèce et l’Égypte.

Par ailleurs, le profil des besoins de ces pays a beaucoup plus de chances de correspondre à celui de nombreux autres pays dans le monde, plutôt que l’Allemagne ou la Grande-Bretagne, ce qui donnerait un avantage concurrentiel certain à ces matériels sur la scène internationale.

Notons également que des pays comme l’Inde, la Grèce, l’Égypte ou l’Indonésie, ont des personnels parfaitement qualifiés et susceptibles de s’intégrer sans difficultés dans les processus des industriels français, comme l’a montré la construction des sous-marins de la classe Kalvari en Inde.

Ils ont également des couts de revient sensiblement inférieurs à ceux de leurs homologues européens, ce qui permettrait de disposer potentiellement d’un avantage concurrentiel sur le marché export loin d’être négligeable.

Enfin, si la coopération entamée avec l’Allemagne dans le cadre du programme SCAF ou MGCS, engendrera certaines pertes de compétences dans le domaine industriel et technologique pour les grands groupes de défense français, de telles coopérations permettraient, au contraire, de les étendre, et donc de renforcer la pérennité des industries françaises appartenant à la BITD.

Kalvari class Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
La visite de Narendra Modi en France pour le 14 juillet pourrait donner lieu à la commande de 3 sous-marins Scorpène supplémentaires construits par l’industrie navale indienne

On le voit, au-delà d’un fantasme européen qui n’existe que dans la vision du président français, et qui est le plus souvent loin d’être partagé par nos partenaires européens, la doctrine de coopération industrielle de défense française, focalisée sur les voisins directs, n’est visiblement pas la plus efficace pour amener la France et son industrie de défense vers une position dominante alors que le marché se réorganise rapidement dans ce domaine depuis quelques années, sous l’effet des tensions mondiales.

A l’inverse, se tourner vers les clients traditionnels de l’industrie de défense française, ceux qui depuis des décennies, font précisément vivre cette industrie, et qui aujourd’hui sont clairement en demande de ce type de coopération, porterait de nombreuses opportunités tant dans le domaine opérationnel en permettant d’équiper les armées sans devoir assumer intégralement les couts de développement, que dans le domaine industriel et technologique en préservant et étendant les compétences des industriels, et du point de vue politique, en positionnant la France comme un partenaire clé pour tous ces pays appelés à jouer un rôle croissant sur la scène internationale.

Alors que la prochaine visite du premier ministre indien Narendra Modi en France à l’occasion du défilé du 14 juillet est porteuse de nombreuses attentes, dans le domaine aéronautique avec la probable commande de 26 Rafale M, ainsi que dans le domaine naval avec la possible commande de trois sous-marins Scorpene supplémentaires et une coopération franco-indienne dans le cadre du programme de sous-marins nucléaires d’attaque indiens, il est certainement temps pour la France de réviser sa doctrine de partenariats et de coopération industrielle de défense, pour se tourner vers ces pays qui, aujourd’hui, sont les plus prometteurs et probablement les moins contraignants.

La Japon assouplit ses règles d’exportation pour satisfaire aux exigences du programme GCAP Tempest

Traditionnellement pacifiste, le Japon est l’un des pays les plus restrictifs pour ce qui concerne les exportations d’équipements de défense. Bien que son industrie de défense soit performante et produise des matériels souvent efficaces, le cadre législatif nippon interdit fermement l’exportation de matériels militaires létaux, et encadre très strictement l’exportation des autres.

Cette posture pose évidement d’importants problèmes dans le cadre du Global Combat Air Program, ou GCAP, nouvelle désignation du programme FCAS Tempest depuis que Tokyo ait annoncé le rejoindre aux cotés de la Grande-Bretagne et de l’Italie il y a quelques mois.

En effet, si Londres et Rome ont accueilli avec enthousiasme l’industrie et les financements nippons pour developer leur futur avion de combat de 6ème génération, il n’était pas question que Tokyo puisse s’opposer à d’éventuelles exportations par la suite, notamment vers certains partenaires traditionnels de l’industrie aéronautique britannique comme l’Arabie Saoudite, le Koweit ou Oman.

Il était donc indispensable pour le Parti Libéral Démocrate du premier ministre Fumio Kishida, et son allié centriste le parti Kômeitô, d’amender le cadre législatif actuel dans ce domaine, de sorte à donner aux britanniques et italiens les garanties requises pour poursuivre sereinement le développement de ce programme.

L'accord obtenu par le PLD-Kômeitô autour de la révision des règles d'exportation d'armes par le japon, répond à minima aux attentes de l'exécutif
L’accord obtenu par le PLD-Kômeitô autour de la révision des règles d’exportation d’équipements de défense nippons, répond à minima aux attentes de l’exécutif

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la posture traditionnelle nippone dans ce domaine a la vie dure. En effet, en dépit des déclarations des autorités sur le sujet, la commission PLD-Kômeitô chargée de trouver un accord à ce sujet, a produit des conclusions répondant à minima aux exigences de l’exécutif.

Ainsi, si les parlementaires nippons sont convenus qu’il n’était pas possible d’interdir l’exportation de matériels réalisés en coopération, comme ce sera le cas du GCAP, ils n’ont toutefois pas donné un accord illimité dans ce domaine, obligeant à obtenir, à chaque nouvelle offre, un accord formel du parlement pour autoriser l’exportation.

En revanche, dans les autres domaines, à savoir l’exportation potentiel de matériels militaires, qu’ils soient létaux ou non, le cadre japonais va demeurer très contraignant, n’autorisant les exportations que de 5 catégories d’équipements, sauvetagetransport, surveillance, vigilance et déminage, sans qu’il soit nécessaire d’obtenir l’accord de la commission en charge de ces dossiers, que l’on sait très procédurière.

En revanche, le reste des équipements développés strictement par l’industrie de défense nippone, ne pourront toujours pas être exportés, sauf à obtenir une dérogation très exceptionnelle, comme ce fut envisagé lors des discussions au sujet des sous-marins de la classe Soryu proposés à l’Australie au début de la précédente décennie.

rail gun japan Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
Le japon a lancé ces dernières années plusieurs programmes ambitieux, notamment dans le domaine des armes à énergie dirigée et des canons électriques

On notera au passage que les discussions entre Tokyo et Canberra avaient à cette époque également amené les autorités nippones à réviser les règles d’exportation de matériels militaires en 2014, précisément pour permettre ce type de dossier.

Quoiqu’il en soit, le nouveau cadre législatif en devenir au Japon, devrait créer un cadre favorable pour multiplier les programmes en coopération dans les domaines de l’industrie de défense, alors que les autorités nippones ont annoncé plusieurs programmes particulièrement interessants ces dernières années, notamment dans le domaine des armes hypersoniques, à énergie dirigée et du canon électrique.

Reste à voir si, au delà de la Grande-Bretagne, les européens sauront profiter du potentiel offert par cette nouvelle législation, ou s’ils laisseront ces opportunités aux industriels américains et australiens…

L’Autriche et la Suisse veulent rejoindre l’initiative European Sky Shield de défense anti-antiaérienne allemande

L’initiative European Sky Shield, dévoilée par Olaf Scholz en août 2022 à l’occasion d’un discours à l’Université de Prague, vise à mettre en commun les moyens et les informations de défense anti-aérienne et anti-balistique de l’ensemble de ses membres, de sorte à renforcer leurs capacités de réponse face à ces menaces ramenées au premier plan des préoccupations depuis le début de la guerre en Ukraine.

Celle-ci séduisit immédiatement un grand nombre de pays européens. Outre l’Allemagne, 14 autres pays européens rejoignirent l’initiative dès son lancement : Belgique, Bulgarie, Estonie, Finlande, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Norvège, Pays-Bas, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Slovaquie et Slovénie.

Toutefois, deux des acteurs clés des capacités anti-aériennes en Europe, la France et l’Italie à l’origine du système SAMP/T Mamba et de la famille de missiles antiaériens Aster, étaient absents de cette liste.

En effet, Berlin avait construit ce programme sur la base de 3 systèmes complémentaires : l’IRIS-T SLM à courte et moyenne portée d’origine allemande, le Patriot PAC américain à moyenne et longue portée et doté de capacités anti-balistiques à courte portée, ainsi que le système israélien Arrow 3 pour l’interception exo-atmosphérique.

le système franco-italien SAMP/T Mamba aurait sa place au sein de l'European Sky Shield comme alternative européenne au Patriot PAC3 américain
le système franco-italien SAMP/T Mamba est une alternative européenne au Patriot PAC3 américain

Bien évidemment, pour Paris et Rome, l’exclusion du Mamba, et plus globalement des autres systèmes européens comme le missile Mistral à très courte portée, ou le MICA VL à courte portée, représentait un répulsif puissant et d’une certaine manière, une trahison des efforts entrepris vers l’autonomie stratégique européenne, en privilégiant des systèmes américains et israéliens alors que des alternatives européennes existent.

Pour autant, cette posture, ainsi que les réserves que l’on peut avoir quant à l’utilité du système Arrow 3 dans ce dispositif alors que la Russie ne dispose pas de vecteurs à la portée du dispositif israélien optimisé pour contrer les missiles iraniens, semble ne pas dissuader d’autres pays européens de rejoindre cette initiative, y compris certains non alignés.

C’est ainsi que ces derniers jours, l’Autriche, mais également la Suisse, tous deux neutres et n’appartenant pas à l’OTAN (l’Autriche appartient à l’UE), ont annoncé leur intention de rejoindre ce dispositif.

L’hypothèse n’est pas, en soit, surprenante de la part de Bernes, en dépit de sa neutralité qui d’ailleurs engendrent des oppositions dans le pays à ce sujet, la pays ayant déjà annoncé en 2021 sa préférence pour le Patriot PAC-3 américain vis-à-vis du Mamba.

European sky shield n'integre pas de systèmes français comme le MICA VL
Le MICA VL de MBDA est une alternative à l’IRIS T SLM allemand

En revanche, elle l’est davantage de la part de Vienne, dont les armées mettent en oeuvre, en matière de défense anti-aérienne, des missiles Mistral à courte portée. On peut supposer dès lors que le pays envisagerait, dans les mois à venir, d’acquérir soit des systèmes IRIS-T allemands, soit, et ce serait plus surprenant, une ou plusieurs batteries Patriot PAC-3.

Quoiqu’il en soit, ces annonces semblent montrer que la posture française et italienne au sujet de l’European Sky Shield, n’est probablement pas la bonne. Même s’il est évident que cette initiative a pour objet de renforcer le rôle de pivot de Berlin dans ce domaine, et au passage de faire de l’IRIS-T SLM le socle de la défense anti-aérienne à courte portée du vieux continent, il ne sera, de toute évidence, pas possible pour la France et l’Italie d’amener l’immense majorité des européens à réviser leurs décisions de l’extérieur.

A l’inverse, si Paris et Berlin se déclaraient conjointement favorable à l’initiative, si tant est que les systèmes nationaux de défense anti-aérienne puissent eux aussi y être intégrés, cela mettrait l’Allemagne dans une situation plus difficile, devant soit refuser d’ouvrir l’initiative aux systèmes européens pour préserver ses propres accords commerciaux, soit accepter et perdre une grande partie de son avantage concurrentiel.

Une chose est certaine : en manière de relations internationales, avoir raison tout seul, est souvent une posture bien plus difficile à tenir, que d’avoir tord en groupe…

Des chercheurs Britanniques démontrent l’efficacité de l’investissement dans l’industrie de défense

Dès lors qu’il est question d’investissement de défense, et plus particulièrement d’acquisition de matériels militaires, il est commun de voir s’opposer dans le discours publiques les investissements d’état dans ce domaine vis-à-vis des besoins dans d’autres domaines, le plus souvent l’éducation, la santé ou la lutte contre la pauvreté.

De fait, l’investissement industriel de défense est parfois perçu comme un manque à gagner dans ces autres domaines, d’autant plus pressant qu’ils revêtent une dimension immédiate dans une grande partie de l’opinion publique, alors que les questions de défense sont désormais souvent très éloignées des préoccupations de celle-ci.

Depuis 2017, les travaux réalisés en France autour du programme Socle Défense et de l’approche économique « Defense à valorisation positive« , tente d’apporter un point de vue différent notamment au niveau des décideurs politiques, en mettant en perspective, dans un pays comme la France, les dépenses d’Etat au sein de l’industrie de défense et les retours économiques qu’ils engendrent, plus particulièrement pour le budget de l’Etat, en évaluant les recettes fiscales et sociales qui découlent de ces investissements et viennent de fait soulager le poids de cet investissement.

Malheureusement, même si le sujet a intéressé plusieurs députés sensibles aux questions de défense, cette approche n’a pas, à proprement parler, engendré de changement de doctrine dans ce domaine en France, pourtant le pays le mieux placé en Europe avec son industrie de défense globale, faiblement exposée aux importations et délocalisations, et fortement exportatrice.

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Depuis son lancement en 2018, le programme britannique Global Combat Air Program ou GCAP fait l’objet d’une étude économique et industrielle constante et méthodique de la part de BAe et du Ministère de la défense britannique

Mais un rapport publié par des chercheurs britanniques de l’université d’Oxford, pourrait peut-être amener ces mêmes décideurs à plus de considérations vis-à-vis de cette approche. En effet, les universitaires ont réalisé une étude exhaustive de l’impact pour l’économie britannique de l’entreprise BAe Systems, la plus grande entreprise aéronautique et de défense du pays au coeur du nouveau programme GCAP, et plus particulièrement des investissements de l’état britannique dans le domaine de l’aéronautique militaire autour des programmes Eurofighter et Tempest.

En effet, au delà d’une débauche de chiffres autour des investissements réalisés, des emplois créés ou encore de l’effort soutenu par l’entreprise en matière de formation, certaines valeurs clés permettent de consolider le raisonnement sur lequel la démonstration du retour budgétaire français est basée.

Ainsi, les chercheurs estiment que l’activité industrielle et économique de BAe alimente chaque année 132.000 emplois équivalents temps plein en Grande-Bretagne, alors que l’entreprise elle-même n’a que 49.000 salariés.

Ces emplois surnuméraires sont à trouver dans la chaine de sous-traitance du groupe aéronautique britannique, mais aussi dans les emplois locaux alimentés par la consommation des emplois directs et indirects générés par l’activité industrielle elle-même.

De fait, selon ces chiffres, 1 emploi industriel alimente 1,7 emplois équivalent temps plein dans le réseau de sous-traitance et le tissus économique britannique, là ou, dans la Défense à Valorisation Positive, la valeur de calcul avancée était de 1,5 (8 emplois indirects et 7 emplois induits pour 10 emplois directs).

Atelier Rafale 1 Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
L’efficacité économique, sociale et budgétaire de l’industrie de défense française est probablement supérieure à celle de la Grande-Bretagne, du fait d’exportations plus importantes, et d’une pression fiscales sensiblement plus importante.

De fait, en prenant en considération un taux d’emploi direct cohérent de 10 emplois par m£ investis auprès de BAe, et en référence le cout moyen salarié en Grande-Bretagne (38k£) et le taux de prélèvement moyen dans le pays (34%), 1 m£ investis par l’état britannique chez BAe rapporteraient aux finances publiques 350.000£.

Cette valeur par défaut, les salaires dans l’industrie aéronautique étant plus élevés que le salaire moyen, doit en outre être corrigé des effets corrigés des exportations d’une part, et éventuellement des économies sociales réalisées si l’investissement, et donc la chaine de valeur.

En procédant de cette manière, il apparait que l’investissement industriel de défense pour un pays comme la Grande-Bretagne s’avère très efficace pour les finances publiques et l’économie nationale.

Il l’est encore plus en France, l’industrie de défense française exportant davantage, alors que les taux de prélèvement et les économies sociales sont bien plus significatifs qu’en Grande-Bretagne de ce doté de la Manche.

Dans ce contexte, il apparait qu’il serait indiscutablement des plus efficaces qu’une étude comparable à celle réalisée par les chercheurs de l’Université d’Oxford, soit appliquée à la BITD française ou à certaines grandes entreprises représentatives du pays, de sorte à connaitre de manière incontestable, la ventilation des emplois directs, indirects et induits créés ou maintenus par l’investissement d’Etat dans ce secteur.

Il serait ainsi possible de déduire le retour budgétaire, là encore direct (impôts et taxes) et induits (cotisations sociales déduites des déficits compensés par l’Etat, économies sociales), de sorte à orienter de manière efficace et rationnelle les décisions dans ce domaine.

Le canon automoteur sud-coréen K9 Thunder vise une portée au delà de 100 km d’ici quelques années

Avec plus de 2400 exemplaires livrés et commandés, dont la moitié à l’exportation vers 8 forces armées dans le monde, le canon automoteur K9 Thunder du sud-coréen Hanwha, est incontestablement un des grands succès de ces 30 dernières années dans le domaine des blindés chenillés lourds comme de l’artillerie automotrice.

Bien protégé, équipé d’un système d’artillerie à chargement automatique et d’un tube de 155mm et 52 calibre lui conférant une portée de 40 km avec obus conventionnels et de 50 km avec obus propulsés, et mobile grâce à son moteur turbodiesel de 1000 cv pour une masse au combat de 47 tonnes lui conférant un rapport puissance-poids de de 21 cv par tonne, le K9 Thunder a effectivement de quoi séduire.

Ses atours sont d’autant séduisants qu’il est économique avec un tarif unitaire de l’ordre de 11 m$ et un environnement opérationnel développé avec notamment un blindé de transport de munition avec transfert automatisé K10 basé sur la même plate-forme.De fait, aujourd’hui, le K9A1 Thunder est incontestablement l’un des meilleurs systèmes d’artillerie sous blindage en service.

Il y a quelques jours, les autorités sud-coréennes ont annoncé le financement d’une évolution, K9A2, permettant d’améliorer l’automatisation du système, et de le doter de systèmes d communication et de pointage balistiques modernisés, de sorte à en accroitre la précision, la vitesse de mise en batterie et de sortie de batterie, ainsi que la cadence de tir, tout en améliorant l’interopérabilité avec les forces et systèmes environnants.

Pour cela, Séoul va investir 2,36 billions de wons, ou 1,81 milliard de dollars, avec l’objectif que le K9A2 soit opérationnel d’ici 2027. Mais l’histoire du Thunder ne s’arrêtera pas là. En effet, les armées sud-coréennes et Hanwha Defense travaillent sur la version A3 du système qui devrait entrer en service au début de la prochaine décennie, et qui promet une progression très importante en terme de capacités.

En effet, à l’instar du programme Extended Range Cannon Artillery, ou ERCA, de l’US Army, le K9A3 devrait être équipé d’un tube de 58 calibres, soit 58 fois le diamètre des munitions (155mm) donc 9 mètres, contre 52 calibre pour le K9A1/2 (8,06 mètres).

Ce tube plus long permettra à l’obus de subir l’accélération conférée par la détonation de la poudre, pendant plus longtemps, lui conférant une vitesse initiale de sortie de bouche sensiblement plus élevée, donc une plus grande énergie cinétique, et donc une portée accrue.

Selon les essais réalisés par l’US Army, un tube de 155mm.58 calibre permet d’atteindre une portée de 70 km avec des obus planants conventionnels, contre 40 km pour les tubes de 52 calibres comme le K9A1, le Pzh2000 ou la Caesar, et de plus de 100 km avec des obus à propulsion additionnée, contre 50 à 60 km avec les tubes classiques.

comme le K9 Thunder, le programme ERCA de l'US Army étudie un tube de 58 calibre
lors des essais du programme ERCA, le tube de 58 calibre a montré des signes d’usure et de fatigue accéléré

Ainsi armé, le K9A3 aurait un avantage certain sur les systèmes d’artillerie européens qui représentent aujourd’hui ses principaux concurrents, entre le PZH2000 allemand plus onéreux mais mieux protégé et plus lourd, et le Caesar français, beaucoup plus léger et mobile, mais nettement moins blindé et monté sur un châssis 6×6 ou 8×8, et non chenillé, et dans une moindre mesure l’Archer Suédois et le SpGH Zuzana slovaque.

Le chemin pour passer d’un tube de 52 calibre à un tube de 58 calibre sera encore long et difficile pour les ingénieurs sud-coréens. En effet, la surpression qui confère davantage de vitesse initiale à l’obus, engendre également des contraintes mécaniques et thermiques plus importantes dans le tube, entrainant une fatigue et son usure beaucoup plus rapide au fil des tirs.

A ce sujet, l’US Army s’était montrée prudente il y a quelques mois quant à la possibilité de parvenir à résoudre ces difficultés à court ou moyen terme dans le cadre du programme ERCA, même si elle semble désormais plus confiante dans ses plus récentes déclarations le concernant.

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Le Pzh2000 allemand est plus onéreux mais également mieux protégé que le K9A1

Reste que si les Etats-Unis et la Corée du Sud se sont engagés avec détermination et ambition pour doter leurs futurs capacités d’artillerie d’un tube allongé leur conférant une portée accrue, il faudra probablement que français, allemands et suédois, qui aujourd’hui tiennent l’offre européenne dans ce domaine, s’engagent eux aussi à court terme dans cette direction.

Faute de quoi, ils pourraient bien se retrouver comme l’étaient les Etats-Unis et les britanniques ces 20 dernières années avec le M109 ou l’AS90, des systèmes d’artillerie dépassés tant du point de vue opérationnel que commercial par les systèmes concurrents.

La Royal Air Force envisagerait d’acquérir le missile Rampage israélien pour remplacer les Storm Shadow cédés à l’Ukraine

Depuis quelques semaines, et l’officialisation par Londres de la livraison de munitions à longue portée Storm Shadow à l’Ukraine, le missile de croisière franco-britannique de MBDA démontre d’exceptionnelles qualités, notamment pour se refaire de la DCA et résister au brouillage intense mis en oeuvre par les forces russes.

Comme nous l’évoquions précédemment, l’envoi de ces missiles indispensable aux forces aériennes ukrainiennes pour frapper les sites logistiques, poste de commandement et infrastructures de transport clés de l’adversaire, se fait au détriment des stocks déjà réduits de la Royal Air Force, et de l’Armée de l’Air et de l’Espace après que la France ait, elle aussi, rejoint l’initiative.

Il n’y a donc rien de surprenant à ce que la RAF cherche à acquérir de nouveaux missiles de ce type pour maintenir un stock opérationnel minimum, alors que la livraison de ces missiles à Kyiv n’est pas destinée à diminuer dans les mois à venir, même s’il ne s’agira que d’une capacité intérimaire dans l’attente de l’entrée en service en 2028 du Futur Missile de Croisière FMC développé conjointement par la Grande-Bretagne, la France et l’Italie.

Considérant les excellents résultats opérationnels du Storm Shadow face aux défenses anti-aériennes russes, et son ADN franco-britannique, tout portait à croire que la Royal Air Force se tournerait vers MBDA pour acquérir de nouveaux missiles de même type. Grosse erreur, du moins à en croire un article du site émirien thenationalnews.com.

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Le prix unitaire de 3 m€ avancé concernant le Scalp/Storm Shadow, correspond dans le faits au tarif d’acquisition rapporté à l’unité des 150 MdCN, dont 50 à changement de milieux, commandés par la marine nationale

Selon l’article publié le 30 juin, la RAF souhaiterait en effet se tourner vers le missile aérobalistique israélien Rampage entré en service en 2018 et développé par IAI, en lieu et place du Storm Shadow, sur des critères principalement économiques, le missile européen étant jugé trop onéreux avec un prix unitaire de 3 m$. La RAF aurait à ce titre dépêché des officiers et une équipe technique en Israel pour évaluer le missile et la manière dont il pourrait être intégré aux Typhoon.

Depuis sa publication, l’article a été largement repris par la presse spécialisée. Pourtant, nombre des affirmations portées sont très surprenantes pour ne pas dire franchement douteuses.

Ainsi, le prix du Storm Shadow, annoncé à 3 m$, correspond au prix d’acquisition des missiles MdCN équipant les frégates et sous-marins de la Marine Nationale, et non le prix du Scalp / Storm Shadow. il est vrai que beaucoup de valeurs aussi fantaisistes que mal sources ont été diffusées au fil des années concernant le prix de ce missile.

Les valeurs de référence, concernant les couts d’acquisition unitaire du Storm Shadow, s’établissent autours de 900.000 € selon, que ce soit au concernant l’acquisition des 900 unités par la Royal Air Force, ou les 500 exemplaires pour l’Armée de l’Air et l’aéronautique navale françaises, selon les données publiées en 2011 par le parlement britannique.

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D’une portée de 300 km, le Rampage est un missile aéro balistique de 4m7à de long pour une masse de 570 kg

De fait, il est très difficile de croire que le prix unitaire du missile ait été multiplié par 3 en 12 ans, même en considérant qu’il n’est désormais plus produit en série par MBDA comme lors des commandes initiales françaises et britanniques.

En second lieu, il convient de rappeler que rien n’indique à ce jour que la guerre en Ukraine soit appelée à prendre fin à court terme. Dans ces conditions, il ne fait aucun doute que les européens devront continuer à soutenir Kyiv en lui fournissant des systèmes d’armes efficaces pour contenir une menace russe qui, loin de s’effondrer, semble au contraire se renforcer.

Dans ce contexte, l’acquisition de Rampage semble absurde, dans la mesure ou Jerusalem s’oppose fermement, depuis le début du conflit, à la livraison de systèmes d’armes de facture ou conception israéliennes aux armées ukrainiennes, raison pour laquelle, par exemple, aucun des nombreux acquéreurs européen du missile antichar Spike n’a pu envoyer le missile aux défenseur ukrainiens.

Enfin, il convient de garder à l’esprit que l’acquisition de missiles de facture nationale renforce sa propre BITD, créé ou préserve des emplois hautement qualifiés, et génère des recettes économiques et sociales qui viennent alimenter à leur tour le budget de l’Etat.

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Seul un ressort de Storm Shadow permettra à la Grande-Bretagne (et de la France) de soutenir dans la durée l’effort de guerre Ukrainien dans ce domaine.

Mises bout à bout, ces constations semblent exclure le recours à un missile israélien pour armer les Typhoon, tant la décision semble contre-productive à tous les niveaux.

Reste qu’avec Londres et les Armées britanniques, qui ont développé ces dernières années un véritable super-pouvoir pour faire des arbitrages aussi onéreux qu’inefficaces dans de nombreux domaines, tout reste possible.

Espérons toutefois qu’il ne s’agit là qu’une des nombreuses rumeurs mal sourcées qui circulent sur les réseaux sociaux et les sites internet se reproduisant l’un l’autre, et non d’une réelle trajectoire pour la Royal Air Force.

L’unité d’innovation du Pentagone veut une solution de fret spatial opérationnelle « dans les 2 ans »

En application de la doctrine EOBA du corps des Marines, l’unité d’innovation du Pentagone a lancé un appel à projet pour mettre en œuvre une solution de fret spatial afin de projeter à court terme équipements et matériels n’importe où sur la planète.

Avec la multiplication des théâtres d’engagement potentiel, et l’émergence de forces armées de premier rang représentant des adversaires potentiels majeurs pour les armées américaines, la logistique, et plus globalement la capacité de projection rapide d’hommes et de fret, sont devenus des enjeux critiques pour le Pentagone.

En effet, la stratégie employée jusque-là, notamment durant la guerre froide, consistant à prépositionner un important stock de matériels et parfois d’hommes à proximité des zones d’engagement probables, est devenue aujourd’hui à la fois très onéreuse du fait des couts des matériels, et très complexe à mettre en œuvre du fait des contraintes RH qui s’imposent sur les Armées US comme sur toutes les armées occidentales.

La conjonction de ces contraintes et de la multiplication des théâtres d’engagement probables, a amené le Pentagone à vouloir se doter de nouveaux moyens de projection de force et de flux logistiques, de sorte à conserver l’essentiel des forces aux Etats-Unis tout en conservant des moyens de réactions à court terme partout où cela peut s’avérer nécessaire.

C’est ainsi que plusieurs programmes ont été lancés ces dernières années dans ce domaine, comme la conception d’un ekranoplane de transport logistique baptisé Liberty Lifter, une référence aux Liberty ships de la 2ᵉ guerre mondiale, confiée à General Atomics par la DARPA.

Liberty Lift DARPA Exportations d'armes | Allemagne | Arabie saoudite
Le programme d’Ekranoplan de transport logistique Liberty Lifter piloté par la Darpa est particulièrement adapté aux contraintes et enjeux du théâtre Pacifique face à la Chine

Dans le même domaine, et toujours pour répondre aux besoins spécifiques du théâtre pacifique face à la Chine, l’US Marines Corps a entrepris la conception de bâtiments de projection légers Light Amphibious Warship, se voulant le pivot de la nouvelle doctrine EOBA d’engagement distribué, de sorte à projeter et soutenir du point de vue logistique de petites unités d’infanterie de marine dans les archipels Pacifique.

Mais l’initiative la plus ambitieuse, et incontestablement la plus innovante, n’est autre que le programme Rocket Cargo, supervisé par l’unité d’innovation du Pentagone depuis 2018, et qui vient de franchir une nouvelle étape décisive avec la publication d’une sollicitation d’offres commerciales auprès des grands opérateurs du transport spatial américain, comme SpaceX, Blue Origin, VOX Space et Rocket Lab USA.

Ce projet vise à transporter des charges logistiques de fret de la terre vers une orbite, de pouvoir changer d’orbite une fois l’altitude requise atteinte, et enfin de pouvoir effectuer une entrée atmosphérique de précision pour délivrer le fret transporter là où il est attendu, dans des délais de quelques heures sans commune mesure avec les autres capacités en dotation ou à l’étude.

De manière astucieuse, l’Unité d’innovation du Pentagone a décomposé son appel à solution technologique selon ces 3 capacités, de sorte à profiter des meilleures avancées technologiques de chacun des industriels, en espérant pouvoir les combiner en une solution unique.

SpaceX ouvre des perspectives dans le domaine du transport de fret spatial
Les capacités des nouveaux modules spatiaux réutilisables comme pour SpaceX, ouvrent de nombreuses perspectives dans le domaine du transport de fret par voie spatiale

L’enjeu est évidement de taille, puisqu’il serait possible, par cette approche, de livrer une quantité de fret de plusieurs tonnes n’importe ou sur la planète en quelques heures, de sorte à répondre à des situations d’urgence par l’envoi de moyens disponibles aux Etats-Unis. .

En perspective, on imagine bien que si le transport de fret par ce procédé s’avère effectivement fiable et efficace, il sera naturellement envisagé, à l’avenir, de transporter également des moyens humains par ce moyen, même s’il est exorbitant du point de vue budgétaire.

L’objectif du Pentagone est de disposer de cette capacité rapidement, puisque la sollicitation publiée demande aux soumissionnaires de proposer des technologies susceptibles d’être opérationnelles dans les deux années suivant l’attribution du contrat, un délais remarquablement court dans ce domaine extrêmement complexe.

Reste à voir, désormais, si effectivement le Pentagone obtiendra les réponses attendues de la part des industriels américains, et si les solutions proposées seront suffisamment souples pour pouvoir être effectivement combinées de sorte à répondre aux attentes formulées.

Pour autant, en cas de succès, celui-ci disposera d’une capacité de projection de fret unique dans le monde, susceptible de répondre à différents scénarios de crise sans solution à ce jour.