100 m$ pour un avion de combat, 25 m$ pour un char, 1 Md$ pour une frégate… Les armements occidentaux ont atteint, ces dernières années, des prix pharaoniques, obligeant les armées à réduire leurs formats et leurs flottes, pour en être dotées.
Mais qu’en est-il, vraiment, de ce constat empirique ? Les prix des armements, aujourd’hui, sont-ils réellement plus élevés qu’ils ne l’étaient, il y a quelques décennies de cela, une fois le paramètre de l’inflation intégré ? Et cette hausse du prix des armements s’applique-t-elle uniformément aux différents équipements, et aux différents pays ?
Pour répondre à ces questions, ainsi que pour en identifier les causes, et les conséquences sur les capacités opérationnelles des armées, une analyse méthodique s’impose. Et, qui sait, peut-être fera-t-elle émerger des constats inattendus ?
Sommaire
La loi d’Augustine et les augmentations inexorables des couts des équipements de défense
En 1978, Norman R. Augustine, ancien sous-secrétaire d’État pour l’US Army de 1975 à 1977, et qui sera président de Lockheed Martin à la fin des années 1990, fit une prédiction devenue célèbre sous le nom de Loi d’Augustine.
« Si les méthodes du Pentagone et l’évolution des coûts ne changent pas, le budget du Pentagone autour de 2050 servira à acheter un seul avion tactique. Celui-ci sera confié trois jours par semaine à l’US Air Force, trois jours à l’US Navy et un jour à l’US Marines Corps. »
Fort heureusement, cette prédiction ne se vérifiera pas. Enfin, pas tout à fait. En effet, dans le même temps, le budget du Pentagone, quant à lui, a été multiplié par 11, passant de 83 Md$ en 1970, en pleine guerre du Vietnam, à 877 Md$ en 2022, soit davantage que les 810 % d’inflations qu’ont connues les États-Unis de 1970 à cette date.
Pourtant, selon le Secrétaire à l’Air Force actuel, Frank Kendall, le nouveau chasseur de l’US Air Force, issu du programme NGAD, coutera plusieurs centaines de millions de dollars l’exemplaire, soit le prix d’une centaine de F4 Phantom II, en 1970, le chasseur lourd de référence de l’US Air Force jusqu’au milieu des années 70, et l’arrivée des premiers F-15.
Mais cette course aux performances technologiques, qui a entrainé ces hausses de prix incontrôlées, semble avoir atteint, aujourd’hui, son seuil de soutenabilité. Ainsi, l’US Air Force a mis le programme NGAD en état de stase, le temps, selon le discours officiel, d’évaluer la pertinence des paradigmes employés jusque-là pour la conception de ces avions de combat de 6ᵉ génération, alors que la concurrence chinoise semble dérouler un programme industriel militaire bien mieux maitrisé, et très efficace.
Il serait donc intéressant, dans ce dossier, d’étudier précisément l’évolution des prix des différents équipements de défense, en se basant sur les prix des familles d’équipements phares des trois grands exportateurs d’armement mondiaux, pour en comprendre les causes, et, peut-être, en atténuer les conséquences néfastes.
De 1970 à 2020, le prix des armements a été multiplié par 5 en Occident
Pour cela, il convient de lister les prix de certains des équipements américains, français et russes, phares de cette période, et d’en déterminer le prix compensé de l’inflation en 2020, pour en déterminer la hausse réelle, hors des évolutions macroéconomiques de leurs pays d’origine.
2,4 m$ le F4 Phantom 2 en 1970, 150 m$ le F-22 Raptor en 2010, le prix des avions de combat US a été multiplié par 60 en 50 ans
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Article très intéressant, n’est-il pas bon de se demander si ce biais technologique des pays occidentaux n’est pas aussi une excuse des industriels pour gonfler artificiellement les prix en profitant des gros programmes sur plusieurs décénies et avec des budgets variant régulièrement ? C’est peut-être un peu « complotiste » mais je pose cette question.
bjr, belle démonstration, à nouveau, vos articles sont édifiants et interrogent… un point sur nos avions rafale et scaf. si le rafale 5 est apte à gérer des drones legers ou lourds, dès 2030, quel est l’intérêt de partir sur un avion hyperlourd (scaf), hypercher surement qui sera peut être inutile en 2040/45 au vu de la vitesse de l’obsolessence des matériels.
hum hum …
Merci ) La question se pose en effet. Vous pouvez lire ces deux articles de 2023, qui analysent le sujet. Depuis, SCAF est sorti de l’ornière à court terme, donc il faut garder à l’esprit le fait que ces deux articles ont deux ans.
https://meta-defense.fr/2023/08/30/rafale-f5-scaf-besoins-france/
https://meta-defense.fr/2023/03/07/standard-rafale-f5-evoluer-super-rafale/