Il est tentant de faire un parallèle entre la situation de l’Ukraine précédant le déclenchement de l' »Opération Militaire Spéciale » russe le 24 février, et la présente situation de Taïwan vivant sous la menace de plus en plus pressante d’une intervention militaire chinoise. En effet, dans les deux cas, ces pays démocratiques font face à des régimes autoritaires disposant de moyens militaires considérables, alors qu’en l’absence de traité d’alliance ferme et du fait d’une complaisance certaine de l’Occident vis-à-vis de Pékin et Moscou sur fond d’intérêts économiques, ils peinent à moderniser leurs armées. Très peu de pays occidentaux en dehors des Etats-Unis, ont ou avaient la volonté de défier la Chine ou la Russie en vendant des systèmes d’armes à l’Ukraine ou à Taiwan, au risque de déclencher l’ire et d’importantes mesures coercitives économiques de Pékin comme de Moscou. De fait, comme pour les armées ukrainiennes au 24 février, les armées Taïwanaises semblent insuffisamment préparées et surtout sous-équipées pour faire face à la menace, avec une majorité de matériels d’ancienne génération souvent obsolètes sur un champs de bataille moderne.
Pour répondre à ce défi, Kyiv comme Taïpei développèrent une industrie de défense nationale, le premier en se basant sur les acquis de l’industrie de défense soviétique, le second sur une économie florissante et un important potentiel technologique. Et l’un comme l’autre ont pu developper des équipements performants, certains basés sur des plate-formes anciennes comme le char ukrainien T-64M et son pendant taïwanais M60A3 TTS, ainsi que des systèmes entièrement nouveaux, comme le missile Neptune ukrainien ou le chasseur AIDC F-CK-1 Ching-Kuo taïwanais. Pour autant, l’un comme l’autre dépendent aujourd’hui comme hier, principalement sur le bon vouloir des grandes puissances militaires occidentales pour les équiper de matériels modernes susceptibles effectivement de tenir en respect, voire de repousser la menace. Mais il est un domaine pour lequel les armées taïwanaises affichent un très important retard sur leurs homologues ukrainiennes aujourd’hui, celui des effectifs et de la préparation opérationnelle.
En effet, suite aux revers enregistrés dans le Donbass en 2014 et 2015 face aux unités de ligne russes, Kyiv mit en oeuvre une stratégie très efficace pour developper rapidement une capacité de mobilisation à la fois efficace et aguerrie, au travers d’une conscription stricte de 12 à 18 mois, et d’un passage de quelques semaines à quelques mois de chaque conscrit sur la ligne de front dans la guerre larvée que se livraient ukrainiens et russes dans le Donbass depuis. En outre, les autorités militaires et politiques ukrainiennes développèrent de nombreuses brigades territoriales, composées d’anciens réservistes et de volontaires, capables d’être mobilisées rapidement en cas d’agression, en particulier pour renforcer la défense des grands centres urbains. De fait, dès le début de l’agression russe, Kyiv était en mesure de mobiliser rapidement un grand nombre de combattants, pour partie disposant d’un entrainement efficace et même d’une réelle expérience du combat, dans des structures proches de celles des armées occidentales disposant d’un important corps de sous-officiers et d’officiers expérimentés. Bien évidement, l’immense majorité de ces unités constituées à la hâte ne disposaient au début du conflit que d’un faible armement, souvent obsolète, les rendants incapables de mener des opérations offensives ou des manoeuvres quelconques. Toutefois, en assurant le durcissement de la défense des centres urbains, et en libérant de cette mission les unités de ligne de l’Armée Ukrainienne mieux équipées, ces unités contribuèrent efficacement à stopper l’avancée russe contre Kyiv, Kherson ou encore Mykolaiev.
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