dimanche, novembre 10, 2024

SSN-AUKUS est-il une option réaliste pour le Canada ?

À l’occasion d’une annonce, fort attendue par les armées canadiennes, d’une hausse à venir des dépenses de défense par Ottawa, le premier Ministre Justin Trudeau, a annoncé s’être entretenu avec ses homologues américains, britanniques et australiens, au sujet d’une possible adhésion du Canada à l’alliance AUKUS.

Le dirigeant a également fait part de discussions, avec ces mêmes interlocuteurs, pour qu’Ottawa puisse rejoindre, éventuellement, le programme SSN-AUKUS, visant à concevoir un sous-marin nucléaire d’attaque de nouvelle génération pour équiper les marines britanniques et australiennes.

Or, si le choix de la propulsion nucléaire pour les futurs sous-marins d’attaque canadiens, aurait beaucoup de sens, l’ensemble des autres paramètres, concernant cette hypothèse, allant du calendrier aux couts d’un tel programme, sonnent faux face aux réalités canadiennes.

Vers une extension de l’alliance AUKUS pour faire face à la Chine dans le Pacifique

Depuis plusieurs semaines, les États-Unis multiplient les ouvertures diplomatiques pour tenter de renforcer l’alliance AUKUS, face aux tensions croissantes avec la Chine. C’est ainsi que le sujet a été évoqué avec le premier ministre japonais Fumio Kishida, à l’occasion de sa visite officielle à Washington pour rencontrer le président Biden.

Sous-marin classe Taigei JSDF
Le Japon dispose d’une puissante flotte sous-marine conventionelle, qui se modernise rapidement avec l’arrivée des Taipei, premiers sous-marins dotés de batteries Lithium-ion.

Pour Tokyo, il s’agirait de rejoindre le second pilier de l’alliance AUKUS, ne portant que sur la coopération militaire, et non sur sa participation au programme de sous-marin nucléaire d’attaque SSN-AUKUS.

Rappelons que les forces navales d’autodéfense nippones disposent déjà d’une très performante flotte sous-marine, en cours de modernisation avec les nouveaux sous-marins de la classe Taïgei, premiers navires équipés de batteries Lithium-ion. En outre, constitutionnellement, le pays n’a pas la possibilité de déployer ses forces, limitant considérablement l’utilité de sous-marins à propulsion nucléaire.

Justin Trudeau évoque des discussions avec les États-Unis, le Royaume-Unis et l’Australie pour rejoindre AUKUS

Ce n’est pas du tout le cas, en revanche, du Canada. Non seulement Ottawa partage, avec les trois membres créateurs de l’alliance AUKUS, son appartenance aux Five Eyes, les alliés les plus proches des États-Unis, mais le pays n’a pas les contraintes constitutionnelles qui encadrent l’utilisation des forces armées japonaises.

En outre, la Marine royale canadienne a engagé un programme pour remplacer ses quatre sous-marins de la classe Victoria, par six à douze nouveaux sous-marins, pour renforcer simultanément sa présence sur sa façade Atlantique et Pacifique.

Vctoria-class sous-marin
Les 4 sous-marins de la classe Victoria de la marine royale canadienne, sont entrés en service entre 1990 et 1993.

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2 Commentaires

  1. Bonsoir M. Wolf,

    à nouveau merci pour vos articles si intéressants.
    J’ai une question sur les capacités de production de Naval Group dans le domaine des sous-marins.
    Car si Naval Group est bien avancé dans la série des Suffren français, vont venir ensuite les 4 (5 ?) nouveaux SNLE qui s’annoncent comme des « monstres » à la construction complexe. Pourraient s’y ajouter les 4 Barracudas néerlandais, et pourquoi pas quelques Scorpènes pour des acquéreurs qui n’auraient pas les compétences pour les construire (ce qui n’est pas le cas de l’Indonésie qui veut, si j’ai bien compris, construire ses Scorpènes chez elle en transfert de technologie). La question est-donc celle des capacités de construction de Naval Group.
    Les chantiers navals français ne seraient-ils pas affectés du même mal que leurs homologues américains? Car si Naval Group n’est pas loin de ses capacités maximales avec peu de possibilités pour les augmenter, une commande canadienne (même peu probable) serait difficile à honorer.
    Avez-vous des informations côté français ?
    Bien cordialement.

    • Bonsoir m Manciaux
      C’est, en effet, un paramètre déterminant. Avec la commande néerlandaise, et les SNLE, on peut considérer que le site de Cherbourg sera au taquet pendant une dizaine d’années, sauf à accroitre les capacités industrielles. En Indonésie et en Inde, ce sera de la construction locale, donc pas de souci. Probablement aussi en Pologne. Pour le Canada, sincèrement, je doute que Washington lassera Ottawa se tourner vers Paris, mais l’argument prix peut faire la différence. D’ailleurs, depuis la rédaction de cet article, ils semblent être revenus sur ces propos, et semblent s’intéresser à 3 ou 4 modèles de SSK, à savoir le KSS-III Dosan Anh Chango sud-coréen, le Type 212CD allemand, et peut-être le Soryu japonais. Pour l’heure, il n’y a eu aucune communication récente de Naval Group concernant ce dossier (contrairement au trois précédemment cité), mais les industriels français sont traditionnellement très discrets dans leurs démarches commerciales.
      Toutefois, si d’autres commandes se profilent (Pologne, Malaisie, Argentine..), on peut penser que Naval Group pourrait être tenté d’étendre son infrastructure industrielle de Cherbourg, ce qui ouvrirait des options pour le Canada. Et si, effectivement, le Blacksword Barracuda est 25 % moins cher que ses concurrents, il risque de faire très mal, pour peu que les capacités industrielles soient effectivement disponibles. De fait, si Naval Group répond effectivement à la compétition canadienne, on peut penser que l’industriel envisage sérieusement cette option.

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