Dissuasion franco-européenne : quels sont les 3 modèles applicables pour la France
Comme il le fit il y a cinq ans maintenant, le président français Emmanuel Macron a bousculé le paysage géopolitique européen, en évoquant la possibilité d’entamer des discussions avec ses voisins, en vue de faire émerger une dissuasion franco-européenne, sur la base des moyens nucléaires français.
En dépit d’une ouverture particulièrement vague concernant le modèle applicable à ce sujet, ce discours de la Sorbonne, seconde édition, a, une nouvelle fois, fait grand bruit, plus spécialement au sein de la classe politique française, il est vrai, engagée dans un processus électoral favorisant les positions tranchées.
Si la majeure partie des acteurs politiques, mais aussi beaucoup de commentateurs, ont interprété les propos du présent comme une possible extension de la dissuasion française à l’Europe, impliquant un abandon de souveraineté pour le pays, les modèles pouvant être envisagés, à ce sujet, sont au nombre de trois, avec des implications parfois radicalement différentes, sur l’outil de dissuasion français comme sur la souveraineté française sur sa propre dissuasion.
Sommaire
La dissuasion franco-européenne retrouve de l’attrait en Europe face à la menace Trump
Lors du premier discours de la Sorbonne, en 2019, Emmanuel Macron avait déjà évoqué une telle possibilité, d’entamer des discussions avec les pays européens qui le souhaitaient, pour employer la dissuasion française afin de les protéger.
L’annonce avait, alors, été très mal reçue, en Europe, comme aux États-Unis, tous y voyant une manœuvre française contre l’OTAN, pour positionner Paris au sommet du concept naissant d’Europe de la Défense. Ainsi, à Varsovie comme à Berlin, ainsi qu’à Washington, les réactions furent aussi négatives qu’elles étaient sévères envers la France.
Depuis, le paysage géopolitique, mondial comme européen, a considérablement évolué. La guerre en Ukraine, le réarmement russe, la montée en puissance de la dissuasion chinoise, et l’arrivée de nouveaux acteurs, comme la Corée du Nord et l’Iran, sur l’échiquier stratégique mondial, ont bouleversé la perception de la menace, y compris en Europe.
Ce sont, cependant, les déclarations répétées de Donald Trump, candidat républicain aux futures élections présidentielles américaines de novembre 2024, et favori des sondages, qui engendrèrent les plus grandes inquiétudes dans les chancelleries européennes.
L’ancien président américain a, en effet, à plusieurs reprises évoqué la possibilité, pour les États-Unis, de se mettre en retrait de l’OTAN, mais aussi d’avoir une interprétation bien moins stricte que promise jusqu’ici par Washington, concernant son Article 5. Joignant le geste à la parole, Trump et le Parti républicain, ont entravé, pendant plus de six mois, le soutien américain à l’Ukraine, provoquant un affaiblissement marqué de Kyiv dans le rapport de forces avec Moscou.
Ces déclarations ont provoqué une prise de conscience brutale et sévère d’une grande partie des européens qui avaient, jusqu’ici, considéré la protection américaine comme acquise et inamovible.
Naturellement, la proposition française de 2019, revêt aujourd’hui, une attractivité bien différente de cinq ans auparavant. C’est dans ce contexte que s’inscrit le second discours de la Sorbonne, réitérant cette proposition française d’entamer des discussions au sujet de la possible émergence d’une dissuasion franco-européenne.
Dissuasion franco-européenne : un concept vague d’Emmanuel Macron largement critiqué en France
Si les ouvertures faites par Emmanuel Macron dans ce discours, ont reçu un accueil beaucoup plus attentif et bienveillant de la part des Européens, conscients du risque que ferait peser l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche dans 8 mois, c’est en France que celle-ci a, cette fois, provoqué le plus de réactions, le plus souvent, très hostiles.
Ainsi, sans grande surprise, avec des élections européennes dans six semaines seulement, les oppositions politiques ont toutes été vent debout contre l’ouverture faite par Emmanuel Macron. Il en est allé de même de beaucoup de commentateurs de la sphère défense française.
Dans les deux cas, il s’agissait de rejeter la perte de souveraineté française sur son outil de dissuasion qu’engendrerait une telle décision, avec certaines nuances cependant. Ainsi, pour certains, l’extension de la dissuasion à d’autres pays européens, entrainerait avant tout une augmentation des risques de voir la France prise pour cible de la Russie, en cas de conflit.
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Vraiment, en ma qualité de jeune abonné, je trouve enfin des articles de fonds passionnants et merci.
Bien d’accord, les articles et notamment celui-ci a pour objet d’éclairer et non d’apporter des solutions
Face au fantasme de la dissuation nucléaire américaine et de son isolationisme naturel ( voir les deux guerres mondiales),représenté par le Trumpisme, nous avons effectivement une carte à jouer.
Mais je ne pense pas que le complexe militaro-américain va laisser faire et va perdre une magnifique rente basée sur un fantasme.
Sauf, si la Russie continue à être menaçant, alors je ne suis pas sûr que nos amis US soient très réactifs, voir Churchill qui a été obligé de faire tracter ses avions par des chevaux…..
Merci beaucoup )
Il va y avoir un bras de fer terrible entre le complexe militaro-industriel US et l’exécutif, si Donald Trump remporte la victoire. Il a même des équipes qui travaillent à la réduction drastique du budget de la défense, dans le but de ramener la BITD US « dans le rang ». Donc, s’il est élu, on ne peut rien exclure, pas même qu’il mette effectivement ses menaces sur l’OTAN et le parapluie nucléaire en Europe, à exécution.
Voir cet article de décembre : https://meta-defense.fr/2023/12/08/politique-defense-de-d-trump-pour-2024/
Je doute fort que cela soit accepté par le lobby Américano-Germanique entre autres….
Cela verrait effectivement la France prendre un leadership inacceptable…
L’objectif de l’article n’est pas de dire ce qu’il faut faire, mais simplement ce qui peut être fait, dans ce domaine, et d’en etudier les conséquences sur la dissuasion française elle-même. Après, l’applicabilité, l’acceptabilité nationale et internationale, ce sont d’autres débats dont je me garde bien de m’approcher ))
Excellente idée Fabrice ( la trois )
Pour la cacophonie des cocos ( LFI) et des fachos ( RN ), faut pas trop en tenir compte parce que si on les écoute, il faut déposer les armes et vivre pacifiquement avec des tyrans et des dictateurs comme partenaire.
Pis en plus si ca peut faire la nique aux tetons c’est que c’est bon :p
À mon sens, c’est la seule option qui pourrait effectivement être mise en œuvre, dans engendrer de catastrophe (hypothèse 2), et avec un effet minimum (je doute que l’option 1 change effectivement quoi que ce soit). Après, faut-il ou pas le faire, c’est de l’avis de chacun.