À l’occasion du dernier salon Eurosatory, deux équipements français ont suscité une attention toute particulière : le Caesar MkII et le Leclerc Évolution, tous deux présentés par KNDS France, anciennement Nexter.
En effet, ces deux systèmes de combat terrestres synthétisent, en quelque sorte, tout le potentiel que l’ingénierie française peut apporter en matière de combat terrestre, en étant à la fois mobiles, performants et innovants, tout en ne cédant pas à l’hypertechnologisme qui touche parfois ce secteur, et ainsi proposer des prix très attractifs, en tout cas pour le Caesar MkII, puisque le prix du Leclerc Évolution n’a pas été évoqué.
Pourtant, le destin de ces deux équipements, pourrait être très différent. En effet, là où l’Armée de terre a d’ores-et-déjà commandé 109 Caesar MK2 pour former l’ossature de son artillerie mobile dans les années à venir, le Leclerc Évolution, lui, n’a pas semblé susciter l’intérêt de l’état-major, pas davantage de la DGA et du ministère des Armées, liés par des contraintes budgétaires et des programmes à mener à leur terme.
Dès lors, si le Caesar MkII a déjà entamé sa carrière internationale, en Belgique et en Lituanie, le nouveau char de KNDS France, semble, aujourd’hui, destiné à venir enrichir les longues listes des équipements de grandes valeurs, promis à une carrière internationale exceptionnelle, mais fauchés avant même d’avoir commencé dans leur élan, par des considérations contestables.
En effet, comme nous le verrons, Le Leclerc Évolution n’a pas seulement le potentiel de redonner à l’Armée de terre la puissance de feu et de manœuvre lors d’engagements symétriques féroces, ainsi que la masse lui permettant de soutenir dans la durée un tel engagement.
Il a également, face à lui, un marché international, adressable par la France, plus que considérable avec 8936 chars à remplacer dans le monde, qui n’attend qu’un coup de pouce, disons plutôt de l’avant-bras, du ministère des Armées, pour être efficacement démarché.
Sommaire
Avec 200 Leclerc modernisés, l’Armée de terre ne peut que partiellement remplir ses engagements vis-à-vis de l’OTAN
Dans un précédent article, nous avons montré que le format de la chasse française, visant à doter l’Armée de l’Air de 185 avions de combat, et l’Aéronaval de 40 appareils, était très en deçà des besoins, en particulier pour ce qui concerne les engagements pris par la France vis-à-vis de l’OTAN.

Le même Livre Blanc de 2013, à l’origine du format de l’aviation combat, avait également décidé de ramener le parc de chars de combat de l’Armée de terre à 200 exemplaires, entre autres choses. Or, ce format suffit à peine à armer efficacement deux brigades « lourdes », celles-là mêmes qui sont au cœur d’un engagement potentiel en Europe centrale.
Le fait est, Paris s’est également engagé, vis-à-vis de l’OTAN, à déployer à la demande de l’Alliance, une division forte de deux brigades et 12 à 15 000 hommes, formant une division, et les capacités de commandement pour diriger le corps d’armées du théâtre sud-European, autour de la Roumanie et de la Bulgarie.
Avec six brigades organiques, moyennant quelques délais, cet objectif semblait alors réaliste aux planificateurs français. Toutefois, dans cet organigramme, seules deux brigades étaient qualifiées de lourdes, alors que deux brigades, dites moyennes, s’apparentaient à des Brigades d’infanterie motorisée. Les deux dernières, dites légères, étaient composées d’unités d’infanterie de Marine, de la Légion, des troupes aéroportées et de montagne.
Depuis, la guerre en Ukraine a montré qu’il était très hasardeux, pour ne pas dire suicidaire, d’engager des troupes d’infanterie motorisée, voire des troupes légères, sans disposer de l’appui de blindés lourds et de l’artillerie, et donc de chars de combat. En outre, l’attrition constatée est telle, que l’absence de réserves, y compris à l’échelon divisionnaire, peut s’avérer rapidement catastrophique.

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Reste plus a Nexter a monter un accord avec la Belgique ou l’EAU et faire construire une usine localement pour construire et vendre les Leclerc Evo, si un jour l armée Francaise se réveille elle pourra acheter des chars Leclerc construits a l’étranger!!
Merci pour cette analyse qui semble censée, enesperant que les états majors et bercy vous entendent.
Malgré tout, vous vous placez dans le cadre d’une commande massive à équivalence avec le parc actuel mais qu’en serait-il de l’impact d’une commande de 25 à 50 modèles max? Ceci ne serait-il pas un boost pour le lancement sur le marché export? Quitte augmenter si ca prends?
Merci d’avance
C’est exactement ce qu’on fait les allemands avec la commande initiale de 18 Leopard 2A8 pour la Bundeswehr, à peine le char fut-il rendu public, et ça a très bien marché. Toutefois, il s’agissait, pour eux, de remplacer les 18 Leopard 2A6 envoyés en Ukraine. Dans notre cas, à moins de 60 chars, pour armer un régiment, je ne vois pas bien l’interet.
Bonjour,
Dans le cas que vous proposez d’une commande de 60 unités, quand serait-il du cout réel et quel sont les financements possibles (prolongation/report programme scorpion, etc.)?
Si le lancement d’une commande pourrait à terme rapporter des marchés exports, les recettes compenseraient pour partie l’investissement comme vous l’indiquez….
Merci d’avance.
En tant compte de la R&D, je dirai 1 Md€. Le financement ne peut se trouver dans la LPM, déjà à bloc. C’est la raison pour laquelle il est necessaire, dans ce cas, de se tourner vers des modeles de financement hors LPM, comme evoqués dans cet article : https://meta-defense.fr/2024/08/02/programmes-industriels-de-defense-lpm24/
Il y a quand même un point de cohérence à avoir. D’un coté, la France a acquis des matériels qui semblent onéreux pour leur fonction de combat réel (évolution du prix des matériels d’armement depuis 1970) et de l’autre, relancer la production d’un char assez cher quand on voit que la masse paie peut-être plus que la technologie.
J’aime beaucoup votre volontarisme et apprécie plus que tout votre travail, mais comment pensez-vous résoudre cette contradiction?
Je suis entièrement d’accord avec vous. D’ailleurs, s’il était question de faire un MBT de A à Z, ma perception est justement qu’il faudrait faire un char plus léger, de l’ordre de 45 tonnes, moins onéreux, et qui s’appuie sur les APS, sur la mobilité et sur la discrétion pour en assurer la survivabilité. Cela dit, quand vous dites ca à des cavaliers, ils vous regarde assez bizarrement. Selon eux, l’efficacité se trouve entre 50 et 55 tonnes, et il faut conserver la logique du char telle qu’elle est aujourd’hui. Or, ils connaissent bien leur sujet. Et le marché international pense comme eux. On ne peut pas ignorer cela, sachant que la soutenabilité budgétaire de l’effort dépend du succès export du programme.
En outre, le Leclerc evolved a un atout très précieux : il existe ! c’est presque une solution sur étagère, qui répond bien aux attentes de beaucoup de pays. Donc j’intègre ici un caractère d’urgence et de marché, qui modifie la perception de la réponse au besoin, sachant que le LE est une solution de transition.