Le futur missile antiradar français en dit long sur le Rafale F5 et sa future doctrine
L’une des grandes et bonnes surprises de la Loi de Programmation Militaire 2024-2030, a été l’annonce du développement d’un missile antiradar français à destination du futur standard Rafale F5 et de son drone de combat dérivé du Neuron, afin de permettre aux forces aériennes et aéronavales françaises de réinvestir le domaine de la suppression des défenses aériennes adverses, abandonné à la fin des années 90 avec le retrait du dernier escadron équipé de Jaguar et de missiles AS-37 Martel.
Pour autant, les ambitions technologiques et opérationnelles de ce nouveau missile, et de cette capacité SEAD (Suppression of Enemy Air Defense), demeuraient floues jusqu’à présent. Le chef d’état-major de l’Armée de l’Air et de l’Espace, le général Jérôme Bellanger, a donné, à ce sujet, certains détails dans une interview accordée au quotidien Le Figaro.
Les informations partagées par le CEMAAE au sujet de ce nouveau missile, permettent également de mieux appréhender la doctrine d’utilisation et les performances du Rafale F5, et de ses drones d’accompagnement et de soutien, qui pourraient bien constituer, dès le début de la prochaine décennie, une réponse très efficace face aux évolutions en cours en matière de guerre aérienne, et ce, en dépit du manque de furtivité du chasseur français.
Sommaire
Le besoin urgent d’un missile antiradar pour les forces aériennes françaises
Ces vingt dernières années, les forces aériennes et aéronavales françaises, ont démontré à plusieurs reprises leur efficacité opérationnelle, que ce soit en appuyant les forces françaises et alliées dans le ciel afghan, irakien, syrien ou en Afrique sud-saharienne, en menant des raids à très longue distance (opération Hamilton), ou en éliminant une menace militaire constituée sans frappe préparatoire (Harmattan).

Cependant, et en dépit des atouts du Rafale et de son système d’autoprotection SPECTRA, ayant déjà permis au chasseur français d’opérer en environnement contesté, comme dans le ciel Libyen, de nombreuses voix (y compris ce site), ont alerté depuis plusieurs années, au sujet de l’absence de capacités de suppression des défenses antiaériennes adverses, également désignées sous l’acronyme anglo-saxon SEAD.
En effet, contrairement à la plupart des grandes forces aériennes occidentales, la France n’a pas doté ses Rafale de missiles antiradars, comme l’AGM-88 HARM américain, qui équipe les chasseurs de huit forces aériennes de l’OTAN (Allemagne, Grèce, Italie, Espagne, Turquie, États-Unis, Pays-Bas, Pologne), ni n’avait entrepris de developper sa propre munition antiradar, pour remplacer l’AS37 Martel.
La guerre en Ukraine a cependant montré, sans équivoque, le rôle déterminant des défenses aériennes ukrainiennes et russes, dans la neutralisation des flottes de chasse des deux camps, appelées dès lors à jouer un rôle presque secondaire pendant les deux premières années du conflit.
Face au risque croissant de devoir se confronter à un adversaire doté d’une défense antiaérienne multicouche efficace, comme la Russie, et aux limites, dans ce domaine, de la protection offerte par SPECTRA et par les munitions standoff classiques du Rafale, comme la bombe propulsée A2SM ou le missile SCALP-ER, le besoin de developper un nouveau missile antiradar s’est imposé, dans le cadre de la LPM 2024-2030, avec la conception d’un standard Rafale F5 bien plus ambitieux qu’initialement prévu, et accompagné d’un drone de combat lourd, ainsi que de drones Remote Carrier Expendable plus légers.
Si le Rafale F5 doit entrer en service en 2030, et son drone de combat dérivé du Neuron, peu de temps après, le nouveau missile antiradar, lui, est aujourd’hui prévu pour 2035, parallèlement à l’entrée en service du missile ASN4G qui remplacera le missile supersonique de croisière ASMPA-R armant, aujourd’hui, la composante aérienne de la dissuasion française.
Longue portée, vitesse supersonique élevée…: Le futur missile antiradar français repose sur des arbitrages très spécifiques
Le ministère des Armées, la DGA, Dassault Aviation, comme l’ensemble de la BITD aéronautique française, ont été, comme à leur habitude, très discrets autour de ces nouveaux programmes, déterminants pour l’avenir de la puissance aérienne française.

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Comment un avionneur de la taille de Dassault champion de l innovation et de la pertinence n’a pas pensé que l un de ses clients ou futur clients ne ressente pas un jour le besoin d’intégrer l’ AGM88 HARM dans sont arsenal et de se contenter du SPECTRA ? C’est quand même une très grosse faute d anticipation à mon avis . Ce n ‘est que mon avis.
Une question me taraude sans que j’arrive à trouver la réponse : comment fait-on pour avoir un drone wingman qui a le rayon d’action du Rafale (avec ses réservoirs supplémentaires) plus disons 500 km. Ravitaillement en vol (plus ou moins automatique ?)
c’est une question de masse de carburant sur masse totale. L’UCAV n’a pas les contraintes d’un avion de combat (notamment la tonne d’équipements pour les pilotes) ni besoin d’avoir les memes performances (puissance-poids, manœuvrabilité). C’est pour cela qu’un UCAv fera 15-18 tonnes en masse max avec un unique M88 privé de PC, là ou le F5 aura besoin de deux T-REX pour cela. De fait, à masse transportée Eagle, la consommation d’un UCAV sera sensiblement inférieure à celle d’un avion de combat.
Mais cela impose de transporter beaucoup de carburant. Ce sont ces contraintes qui ont amené Dassault à préconiser un UCAV « lourd », et non « moyen » comme envisagé initialement par l’AAE et le MINARM, précisément pour pouvoir accompagner le Rafale sur l’ensemble de sa mission.
Bonjour, on peut se demander si Elon Musk n a pas raison, le garçon est loin d être stupide en disant que l avenir est aux drones ; donc réaliser un avion très discret disposant d’ une soute ( pour quoi faire ?)et coûteux est il finalement utile ? Alors que des drones hyper vlo feront le boulot aussi bien en sead qu en defense air air. Mis a par peut être pour les missions que poker et encore, si la soute du drone de combat est grande pour y loger l ASN4G.
Le coût tout simplement, car qui dit drone pas cher, dit attrition maximum qu’il faut compenser en achats.
Article très intéressant sur les possibilités qui s’annoncent. Mais on parle rarement du pilote! IA à toutes les sauces ou pas, je serai curieux de savoir si un pilote peut gérer 3 ou 4 drones en plus de son appareil ?
Petite réflexion complémentaire, que met on en œuvre pour débusquer l’infanterie dans les taillis ou dans les plaines type A10? L’Ukraine semble démontrer que cela serait très utiles d’avoir un moyen aérien pour rafaler en masse matériel et fantassins
Au contraire, l’Ukraine montre que les Su-25 (équivalent soviétique du A-10) et les Mi-28/Ka-52 ne parviennent plus à se rapprocher de la ligne d’engagement pour faire du CAS (Close Air Support). L’appui feu est confié à l’artillerie, aux drones légers et aux bombes planantes : trop de manaps, trop de SHORAD et trop de systèmes antiaériens à moyenne et longue portée, combinés aux chasseurs équipés de missiles air-air. Même le vol tactique n’est plus suffisant pour s’approcher suffisamment prêt pour faire usage du canon embarqué.
j’ai vu un article sur la nacelle talios qui va être dopée à l’ IA pour 2026. cela lui donnera de nouvelles fonctions de répérage de cibles plus petites et donnera un ordre de graduation des cibles potentielles pour le rafale. après je ne pense pas que cela concerne les fantassins en direct mais plutot des cibles plus importantes.
après, il n’y aura pas de defense antiaérienne multicouche sur tous les théatres.
oui peut être mais il vaut mieux le savoir avant car autrement cela fait un peu roulette russe quand même ?
tant mieux si justement la confiance européenne est brisée envers les usa, cela va les secouer. il n’y a que dans les crises que l’on se sert les coudes et que nous réagissons. il va y avoir un moment de « flou artistique » ou justement il faut se concerter rapidement à 5/6 pays fondateurs, de base de l’europe, et reconstruire rapidement une défense européenne sans les usa. nous avons ce qu’il faut pour démarrer , même si les moyens sont limités pour l’instant, ils sont suffisants ! il faut de l’envie commune et justement trump donne l’envie de s’émanciper ENFIN des américains. le BEBE europe va t’il devenir adulte ?
le suite au prochain épisode…
Et pourquoi pas un Super Mirage pour garder nos capacités export au-delà du SCAF ?
(et je me réponds à moi-même …) L’autre chose à faire sans doute est de commencer à travailler à une nouvelle version du missile meteor pour répondre au défi posé par l’augmentation de portée des missiles AA et pouvoir garder à distance la chasse ennemie.
Merci pour votre analyse, toujours aussi pertinente. Je me pose deux questions supplémentaires:
– comment assurer la sécurité et la résilience des communications entre les différents noeuds de cette kill chain (rafale, MALE, remote carrier, …) dans un contexte de haute intensité? En particulier comment ne pas perdre la furtivité des UAV et du rafale en leur faisant émettre plein pot niveau en liaisons de données.
– Le commentaire final sur le « super rafale » est orienté sur les missions de frappe dans la profondeur. I est possible que pour les missions de supériorité aérienne, on ait besoin d’un « super rafale » pour disposer d’une plateforme un minimum furtive. Par ailleurs, l’autre supposition forte du standard F5 est qu’on arrive à faire tenir dans une cellule de rafale actuelle tout ce qu’on veut y mettre. C’est plausible, mais pas 100% certain à ce stade.
Pour la sécurité des connexions, c’est un sujet aussi vaste que complexe, qui va bien au-delà du seul problème des drones de combat. C’est bien pour cela, d’ailleurs, que ceux-ci embarqueront une IA très évoluée, pour poursuivre la mission en émissions restreintes, voire en émissions suspendues.
Après, mon sujet ne concerne pas seulement les frappes. Bien au contraire, toute la question sera de faire effectivement du drone de combat un chaseur polyvalent furtif, disposant de son radar-radar, de son irst et de ses propres effecteurs (missiles), pour engager, seuls, et surtout en coopération (multistatisme), les appareils alliés.
Finalement, mon commentaire sur la fusion éventuelle du projet scaf avec le projet anglais, sous un aspect franchouillard que j’assume, montre que ce je pense, depuis le début, que le f5 est le plan b et doit être doté de tous les moyens pour en assurer toutes les fonctions. A un coût sans rapport avec les milliards prévus pour des systèmes d’aéronefs qui, certainement, ne verront jamais le jour. Comme vous le mentionnez, tres justement, ce sera une oportunité commerciale pour nous et une oportunité politique pour ceux qui en voudront.
Les informations distillées restent assez floues, c’est difficile de se faire une idée du concept opérationnel et de sa pertinence. Si c’est un missile SEAD lourd, j’imagine qu’un Rafale n’en emporterait pas plus d’un sous chaque aile, avec éventuellement une nacelle de guerre électronique en point central et sa dotation de 6 missiles MICA/METEOR. Si c’est adapté pour certaines cibles (S300/400…) j’ai l’impression que pour neutraliser de nombreuses batteries variées ou navires, dans un contexte de haute intensité un volume plus important de missiles serait appréciable, que ce soit tirés depuis le Rafale (2 sous chaque aile sur des pylônes doubles) ou un drone de combat (4 en soute). Je soupçonne que l’utilisation du RJ10 s’explique plus par la possibilité d’économiser sur le coût et de réduire les délais que par une réflexion poussée sur le concept d’emploi.
rien n’empeche le drone de combat d’embarquer des A2SM, voire des SPEAR EW, pour du sead contre des unités plus légères, eventuellement désignées par les RCE. C’est plutot ainsi que je vois les choses.
J’ai de plus en plus de mal à savoir si on a vraiment besoin d’un avion de chasse pour ça. S’il est repoussé 200 km en arrière… pourquoi pas un camion ou un petit bateau? C’est quoi la plus value d’un avion?
Quant à l’aarok qui sert de relais de communication… pourquoi ce ne serait pas lui le maillon faible? Après tout, il n’est pas furtif, il émettrait des tas de sigaux, ce qui n’est pas très discret… enfin bref… je suis dubitatif, en l’état de connaissances limitées.
Le drone de pointe qui émet. Furtif ou pas…
Merci Mr WOLF, cela parait particulièrement intéressant et un peu encourageant pour une foi.
Malgré tout je m’interroge, un missile tel que le RJ10 coutera à n’en pas douter une fortune (RAMJET) et ne pourra être employé massivement comme pour les SCALP actuels (j’ai cru comprendre qu’ils étaient très rare et utilisés de manière extrêmement parcimonieuse au point ne pas tenter de RAID audacieux qui amènerai une trop grand attrition sur ce matériel par la défense aérienne). Ainsi, un tel missile ne pourra être utilisé que pour des objectifs à très haute valeur ajoutée tel que S300/400/500 et encore, ne détruira « que » le radar sans toucher le reste du module. Je ne parle même pas des plus petits systèmes moins cher type PANTSIR et SHORAD qui vont se multiplier. Pour finir, je ne sais pas si c’est possible mais si la mise en réseau de ces système permettrait de palier à la perte d’un radar qui serai remplacé par un radar d’une autre unité déportée voir d’un bateau/avion/Etc…cela amoindrirai considérablement l’effet final en ne permettant pas d’empêcher une batterie de tirer.
Ensuite sur l’architecture globale tel que décrite, là aussi c’est enthousiasmant mais j’imagine que le coût de l’ensemble sera extrêmement cher. Le drone type Neuron qui servira à détecter et éclairer devra posséder des détecteurs trés performants ce qui l’amènera pas si loin du pris d’un avions seul. Même un F35 furtif ne l’est que jusqu’à une certaine distance, donc il se fera détecter tout de même s’il s’approche trop près hors le drone Neuron aura justement pour tâche de s’approcher pour détecter….cercle vicieux.
Je ne suis qu’un simple lambda qui s’intéresse à tout ca mais l’équation me semble quand même horriblement chère pour détruire un « simple » radar.
Je suis heureux malgré tout heureux que ca avance et surtout dans une config qui semble maline et qui en plus permettra de valoriser chaque brique par la suite via le SCAF et pourquoi pas à l’export….
Il y a aussi le volet international, ou le super-rafale va vraiment interesser tous les pays utilisateurs de Rafale versus l alternative d une nouvelle version du F35. Il est important pour tous militaires compris d’intégrer ce facteur pour continuer à avoir une industrie militaire à l’aube de la secondem oitié du siècle.La question serait plutot est ce que le Rafale F5 reste indispensable si on a un super-rafale a un prix similaire?
Si le prix Rafale F5 + drone de combat est suffisament attrayant, la carrière internationale jusqu’à l’entrée en service du SCAF, sera préservée. Comme expliqué dans l’article, tout est une question de prix comparés.
cocorico, bon avec un peu d’avance mais je pense qu’il y en aura encore qui s’agaceront de l’audace française. par contre vous annoncez le scaf pour 2040, cela me parait tôt au vu du peu d’empressement que le programme a pris jusqu’à présent. c’est surement la date annoncée au départ, mais qui risque de déraper vers 2045 voir plus non ? qu’en pensez vous tenable comme date prévisionnelle ? je suis dubitatif !
Je ne suis pas certain que la confiance dans les USA survive aux événements actuels.
Il me semblait que le supersonique était le missile anti navire et le subsonique furtif était le missile de croisière, avec une portée de 1000km+ suite aux exercices Polaris 21
Bien vue, j’ai corrigé. Je me suis un peu emelé ))
Article très intéressant et bien construit qui donne les perspectives à dix ans de la doctrine d’utilisation de nos forces aériennes. Je rajouterai que cela permet d’entrevoir une solution souveraine et efficace répondant à l’accélération de la sophistication technique des appareils et de leur coût exorbitant comme pour le F35 et son homologue Chinois.