A la suite de la guerre contre la Géorgie en aout 2008, ayant vu s’affronter les forces russes et géorgiennes pour le contrôle des oblast sécessionnistes d’Abkhazie et d’Ossétie du Sud, les forces russes, pourtant victorieuses, prirent consciences de nombreuses défaillances, notamment dans des domaines stratégiques comme le renseignement, la logistique ou la coordination des forces. Un plan de réforme fut entrepris, et les résultats ont pu être observés que ce soit en Crimée, dans le Donbass et surtout en Syrie, ayant permis aux états-majors d’inscrire les forces dans une démarche d’améliorations continues.
La première des réformes portaient sur la professionnalisation des effectifs. Si l’armée russe continue d’intégrer des effectifs de conscrits, ceux-ci sont passés de 450.000 en 2008, soit presque la moitié des 1,1 millions d’hommes sous les drapeaux, contre seulement 270.000 en 2017. Parallèlement, les effectifs sous contrats sont passés de 180.000 à 380.000 durant la même période. Outre les bénéfices classiques de la professionnalisation en matière d’entrainement et de performance des forces, les armées russes ont également gagné en réactivité et capacité de projection, l’opinion public russe étant particulièrement rétive à l’envoi de conscrits en opération extérieure, l’Afghanistan ayant laissé d’importantes traces dans la société russe.
Un effort très important a été fait concernant les équipements de communication et les dispositifs de commandement, avec la livraison massive d’équipements radio cryptés, et de systèmes de gestion du champ de bataille et de coordination des forces, interconnectés avec un nouveau centre national de gestion de la Défense.
Mais c’est du coté des drones que les améliorations sont les plus représentatives de l’effort russe. Les quelques drones de reconnaissance tactique Pchela-1T disponibles lors de l’offensive en Géorgie montrèrent très rapidement leurs limites, là ou les forces géorgiennes disposaient de drones MALE israéliens performants. En 2015, le nombre de drones de reconnaissance était passé de quelques douzaines à peine, à plus de 1700, pour beaucoup conçus avec l’aide des technologies occidentales. En Syrie, les drones russes démontrèrent leurs efficacités, tant en matière de reconnaissance que de désignation de cible pour l’artillerie et l’aviation, et l’industrie russe a entrepris de concevoir et réaliser son propre drone de combat furtif, le ‘okhotnik’, dont le premier vol devrait intervenir l’année prochaine.
Enfin, les forces terrestres ont engagé, dès fin 2008, de profondes transformations pour adapter leurs équipements et leurs organisations aux contraintes de la guerre moderne. Contraintes par une économie vacillante, les armées russes entreprirent de moderniser des modèles existants, comme les chars T73B3, le T80 et T90, afin d’en augmenter la survabilité, les capacités de communication, et la puissance et la précision des armements. Avec prés de 30.000 T72 en parc, cette stratégique a permis aux forces russes de passer de moins de 1000 chars modernes en 2012, à 3000 aujourd’hui. Chaque année, les forces russes perçoivent 200 à 250 chars lourds modernisés, amenant l’arsenal disponible à 4500 unités en 2025, 5 fois le nombre de chars modernes en Europe.
Parallèlement, les industriels ont entrepris la conception d’une nouvelle génération de blindés, du T14 Armata au Boomerang, qui devront entrer en service au cours de la prochaine décennie. L’artillerie reste au cœur de la stratégie terrestre russe, avec prés de 1000 systèmes automoteurs en service aujourd’hui, dont les performances ont été améliorés en terme de portée et de précision, pour rivaliser et même souvent dépasser leurs homologues occidentaux.
La Syrie, et dans une moindre mesure, le Donbass, servent aujourd’hui de laboratoire pour tester les nouveaux équipements comme les nouvelles tactiques. Les résultats sont souvent satisfaisants et amène à une entrée en service dans les forces, comme ce fut le cas du chasseur de char Terminator 2. En revanche, certains équipements en test révélèrent de graves lacunes, comme le drone terrestre Uran-9, incapable de s’adapter aux contraintes opérationnelles réelles, ou le Pantsir P1, qui semble incapable de faire la différence entre une mouette et un missile de croisière.
Quoiqu’il en soit, en 10 ans, les armées russes ont profondément transformé leurs organisations et leurs moyens, de sorte à montrer, aujourd’hui, des qualités comparables aux meilleures forces occidentales. Si, du point de vu des effectifs, les armées russes n’ont que peu évolué depuis 2008, elles sont désormais très performantes, et disciplinée, comme l’ont montré les récents exercices Zapad 2017 et Vostok2018. Ayant participé à 3 conflits ayant des aspects de haute intensité en 10 ans, elles ont acquis une expérience et un aguerrissement très supérieur à la majorité des forces occidentales.