La participation de la marine des รtats-Unis (United States Navy) ร la quarante-septiรจme รฉdition de l’exercice BALTOPS (BALTic OperationS) s’est notamment illustrรฉe par la mise en ลuvre pour la premiรจre fois dans cet exercice de l’Airborne Mine CounterMeasures (AMCM) par l’Helicopter Sea Combat Squadron Two Eight (HSC 28). Il s’agit de l’une des rares solutions opรฉrationnelles de lutte contre les mines navales par petits fonds (0 โ 15 mรจtres).
La lutte contre les mines navales demeure un enjeu fondamental afin de prรฉserver la libertรฉ d’action des flottes de pรชche, commerciales, militaires et scientifiques, voire de plaisance, d’un รtat afin de pouvoir exercer son droit (Convention de Montego Bay (1994) ร la libertรฉ de navigation. Les accรจs ร un port, une base navale, un chenal, des dรฉtroits, des lieux de concentration de la navigation ou des zones entiรจres peuvent รชtre minรฉs et donc restreindre partiellement ou totalement la libertรฉ de manลuvre des protagonistes prรฉ-citรฉs. L’une des caractรฉristiques maritimes majeures est que les routes maritimes sont les mรชmes pour tous.
Il existe plusieurs types de mines navales โ dรฉrivantes, fixรฉes par petits ou grands fonds, mines intelligentes โ qui font dรฉtonner leur charge selon un ou plusieurs stimuli extรฉrieurs. Il peut s’agir de mines ร contact (entre celle-ci et la coque du malheureux bรขtiment), ร influence magnรฉtique, dรฉpressionnaire, par reconnaissance acoustique, voire mรชme de mines combinant un ou plusieurs de ces stimuli. Certaines mines emploient, plutรดt qu’une charge explosive, une torpille.
La dรฉpollution de ces petits fonds est un enjeu revivifiรฉ car la diffusion de certaines techniques terrestre comme, par exemple, les Engins Explosifs Improvisรฉs (EEI ou Improvised Explosive Device (IED) pollue directement les petits fonds. Le recours ร des dispositifs plus ou moins artisanaux, de dรฉtournement de matรฉriels militaires, voire mรชme d’utilisation de vรฉritables mines navales s’est rรฉcemment illustrรฉe au Yemen (minage du port d’Hodeรฏda).
L’une des plus grandes difficultรฉs de la lutte contre les mines est leur localisation par petits fonds. Il est possible d’employer un sonar actif pour ce faire. Mais celui-ci doit รชtre placรฉ ร l’avant du bรขtiment-porteur et orientรฉ en secteur frontal. La plupart des sonars de lutte contre les mines sont orientรฉs vers le bas, afin de pouvoir investiguer les fonds. ร ce problรจme matรฉriel s’ajoute les difficultรฉs liรฉes ร ร l’exploitation du chenal acoustique le long de la surface de la mer en raison des caractรฉristiques de propagation des ondes sonores. Connaรฎtre la prรฉsence d’objets dans des petits fonds de 0 ร -15 mรจtres de profondeur est une chose, les localiser prรฉcisรฉment en est une autre.
D’autres moyens furent essayรฉs pour contourner cette difficultรฉ premiรจre. La dรฉtection radar fut expรฉrimentรฉe par exemple. Des traitements particuliers du signal รฉmis par le radar furent essayรฉs. Les ondes radioรฉlectriques pรฉnรจtrent le milieu liquide de seulement quelques mรจtres. Mais ces procรฉdรฉs ne donnent que de minces rรฉsultats, et uniquement par une mer d’huile.
Lโobservation optique donne quelques rรฉsultats pour des profondeurs de 0 ร -5 mรจtres. Cela suppose, toutefois, de pouvoir se placer suffisamment haut afin de pouvoir apercevoir l’objet sous-marin, idรฉalement depuis un hรฉlicoptรจre. Cette technique repose, elle aussi, sur d’assez bonnes conditions environnementales.
Dans cette perspective, la dรฉtection laser (LIght/Laser Detection And Ranging (LIDAR) est autant la plus prometteuse que la plus efficace de toutes ces techniques. Un senseur LIDAR intรฉgrรฉ ร une plateforme aรฉrienne (aรฉronefs ร voilure tournante ou fixe) est capable de pรฉnรฉtrer la mer de 0 ร -10, voire -15 mรจtres de profondeur. Deux utilisations sont possibles, voire complรฉmentaires : des levรฉs topo-bathymรฉtriques (le Service HydrOgraphique de la Marine (SHOM) expรฉrimente depuis 2015 la technique avec le HawkEye III) et donc la dรฉtection d’objets sous-marins.
L’Airborne Mine CounterMeasures (AMCM) mis en ลuvre par l’Helicopter Sea Combat Squadron Two Eight (HSC 28) est l’un des ensembles du module Mine Counter-Measure (MCM) qui รฉquipe les Littoral Combat Ship des classes Independance et Freedom. L’AMCM repose sur deux principaux รฉquipements : le premier est l’Airborne Laser Mine Detection System (ALMDS). Cachรฉ sous ce nom se trouve, justement, un LIDAR intรฉgrรฉ au sein d’une nacelle portรฉe par un hรฉlicoptรจre, MH-60S. Le deuxiรจme est l’Airborne Mine Countermeasures System – Archerfish (AMNS-AF).

La nacelle ALMDS sert donc au repรฉrage des objets sous-marins avec des traitements particuliers afin de pouvoir identifier les mines navales par petits fonds. Les performances seraient trรจs bonnes jusqu’ร -15 mรจtres. Le dรฉfaut du systรจme toucherait ร ses capacitรฉs de balayage.
Le degrรฉ de fiabilitรฉ du systรจme ALMDS est aussi ร considรฉrer vis-ร -vis du fait qu’une capacitรฉ concurrente incarnรฉe par l’AQS-20A reposรฉe sur l’emploi d’un sonar. Aprรจs la rรฉception de dix exemplaires, ce programme fut annulรฉ.
Les mines repรฉrรฉes doivent รชtre dรฉtruites. L’emploi d’un canon de 30 mm avait รฉtรฉ prรฉfรฉrรฉ jusqu’au dรฉveloppement de ce systรจme. Les problรจmes de pรฉnรฉtration dans l’รฉlรฉment marin (rรฉflexion, rรฉsistance ร l’avancement) des obus โ mรชme supercavitant โ n’offrent pas toutes les garanties nรฉcessaires pour faire dรฉtoner la mine navale. Une drague magnรฉtique comme la MK-105 Magnetic Influence Minesweeping System remorquรฉe par un CH-53 Sea Dragon fait les rรฉagir les mines ร influence magnรฉtiques. Mais pas les autres.
L’AMNS-AF propose une technique intรฉressante pour la rรฉ-acquisition des mines repรฉrรฉes par l’ALMDS, leur identification et leur neutralisation rapide. Il s’agit d’une nacelle pouvant dรฉployer quatre torpilles reliรฉes ร celle-ci par une fibre optique dont la tรชte est รฉquipรฉe d’un sonar ร haute frรฉquence et d’une voie optique ร faible lumiรจre. L’Archerfish est donc guidรฉ jusqu’au contactรฉ repรฉrรฉ et classifiรฉ comme mine probable en se mouvant par ses propres moyens jusqu’ร dรฉtonner si le contact est positif. Le faible du volume du systรจme permet de l’intรฉgrer depuis des drones de surface jusqu’ร un hรฉlicoptรจre.
Contrairement ร l’emploi d’un vรฉhicule tรฉlรฉopรฉrรฉ effectuant le mรชme travail, l’ AMNS-AF parie sur une vitesse d’exรฉcution nettement supรฉrieure, ce qui souligne la constance des choix amรฉricains en matiรจre de lutte contre les mines : pouvoir passer, malgrรฉ les mines navales, et vite.
La proposition technique pour la lutte contre les mines navales par petits fonds contenue dans l’Airborne Mine CounterMeasures (AMCM), une des composantes du module Mine Counter-Measure (MCM) des Littoral Combat Ship, apparaรฎt comme l’une des plus crรฉdibles au monde, eu รฉgard aux dรฉconvenues enregistrรฉes par les sonars ร secteur frontal, si tant est qu’ils รฉquipent les bรขtiments de guerre des mines.