Avec l’annonce de la commande ferme de 80 avions de combat par les Émirats arabes unis, le Rafale F4 est devenu, avec 242 appareils commandés à l’export auprès de six forces aériennes, le plus grand succès commercial international de sa génération.
Il surclasse ainsi nettement les autres appareils de même catégorie comme l’Eurofighter Typhoon, le Super Hornet ou le Su-35, et même des appareils plus légers de même génération comme le Gripen suédois ou le F-16 Block 70/72+ Viper américain.
Dans le monde, seul le F-35 de Lockheed-Martin, jouissant d’un appui stratégique indéfectible de Washington et d’un budget de R&D 12 fois plus important que celui de l’avion français, fait mieux que le bimoteur français, avec plus de 600 appareils commandés sur la scène internationale.
Pour autant, cette seule année aura vu les commandes de Rafale s’envoler, avec 5 commandes successives venues de 4 pays, pour un total de 146 appareils commandés, soit 60 % des commandes exports totales enregistrées par l’avion français.
Le profil des clients internationaux du Rafale
Ce succès fulgurant et, si pas inattendu, en tout cas fortement espéré, est lié à plusieurs facteurs concomitants, concourant à créer un contexte et une attractivité bien plus importante qu’auparavant du Rafale sur la scène internationale.
En premier lieu, celui-ci est lié à l’aggravation très sensible des tensions internationales, et l’on notera que l’immense majorité des clients du Rafale ont un besoin opérationnel à la fois clair et immédiat, comme c’est le cas de l’Inde face à la Chine et au Pakistan, de la Grèce face à la Turquie, de l’Égypte face à la Libye, au Soudan et la Turquie.
Quant aux Émirats arabes unis, ils doivent faire face à l’Iran et sont engagés dans une compétition intense avec le Qatar, lui-même soutien de la Turquie et en bons termes avec Téhéran.
Sur les six clients internationaux du Rafale, 3 sont en situation de tensions élevées, et deux en situation de tensions moyennes, seule la Croatie étant moins exposée à ses frontières que les cinq autres.
La fidélité des opérateurs de Mirage 2000
On notera également que cinq des clients internationaux s’étant déclarés en faveur du Rafale, utilisaient déjà des avions de combat français, et ce, sur plusieurs générations, et qu’ils mettent en œuvre encore aujourd’hui leurs Mirage 2000, parmi les huit clients exports au total pour le dernier représentant de la famille mirage.
Il existe donc un très important facteur que l’on pourrait qualifier d’atavique dans l’acquisition des avions de combat, non seulement pour le Rafale, mais pour de nombreuses familles d’appareils.
Cette situation n’est pas sans fondement, puisque utiliser un avion de combat importé revient à s’imprégner des doctrines et des procédures de son pays d’origine, tout en développant des liens étroits avec son industrie aéronautique de défense pour la maintenance et l’évolution du parc.
Il est dès lors beaucoup plus simple pour des pilotes et des personnels de maintenance de Mirage 2000 de passer sur Rafale, que pour des personnels habitués aux procédures américaines sur F-16 ou F-18 de faire cette démarche, et inversement.
Si ces deux facteurs ont leur importance dans le présent succès du Rafale, ils n’ont pu se concrétiser que grâce à la perspective de voir arriver le nouveau standard de l’avion français, désigné sous le terme F4.
Depuis son entrée en service au début des années 2000 dans la Marine nationale, le Rafale est passé par de nombreux standards successifs, du F1 naval embarqué spécialisé dans la supériorité aérienne afin de succéder aux vénérables F-8 Crusader, au F-3R actuel, premier standard véritablement omnirôle entré en service en 2018, en passant le F2 spécialisé dans l’attaque pour remplacer les Mirage F-1CT et Jaguar de l’Armée de l’Air, puis le F-3 multimission pour couvrir l’ensemble des besoins des deux forces aériennes.
Une évolution en deux temps : Rafale F4.1 et Rafale F4.2
Le standard F4, quant à lui, entrera en service à partir de 2025, et fera passer le Rafale dans le monde du combat collaboratif et de l’Intelligence Artificielle, ouvrant la voie à des capacités jusqu’ici réservées aux appareils désignés comme étant de la 5ᵉ génération.

En soi, le Rafale F4 vise des ambitions similaires à celles de nombreuses évolutions d’avions de combat moderne, comme l’Eurofighter Typhoon Block 3C, le Gripen E, le Super Hornet Block III ou le F-15EX. À une différence près, mais elle est de taille : cette évolution était prévue par Dassault Aviation dès la conception de l’appareil, permettant à des appareils de génération antérieure, y compris les Rafale F1 et F2, d’évoluer vers ce nouveau standard.
Cette capacité unique d’évolution du Rafale, sans aucun équivalent aujourd’hui, et largement démontrée au travers des évolutions de l’ensemble de la flotte de Rafale de l’Armée de l’Air et de la Marine Nationale, est incontestablement un facteur clé du présent succès du Rafale aujourd’hui.
Et ce d’autant que ces évolutions ne vont pas s’arrêter au standard F4, même si celui-ci marquera un point tournant clé. En effet, celui-ci est basé non pas sur un, mais sur deux standards différents, le F4.1 ouvert aux appareils déjà en service.
La version F4.2, quant à elle, intégrera certaines modifications structurelles devant permettre les évolutions vers certaines capacités spécifiques au standard F5, notamment dans le domaine de la mission de dissuasion française.
Reste qu’aujourd’hui, un client qui fait le choix du Rafale F3R, sait parfaitement que ses appareils, même acquis d’occasion comme pour la Croatie, pourront évoluer vers les standards F4, F5 et ultérieurs au fil des années, limitant le risque d’obsolescence.
Les points clés du Rafale F4
Le Rafale F4 se caractérise par 5 grands chantiers d’évolution, en cours de réalisation depuis que le contrat de 2 Md€ pour son développement a été signifié par le ministère de La Défense en janvier 2019 :
- Modernisation de l’ensemble des senseurs de l’appareil,
Il s’agit notamment du radar RBE-2 de Thales qui verra ses capacités accrues, en particulier dans le domaine air-sol avec une définition plus élevée. Le système Optronique en Secteur Frontal retrouvera son canal infrarouge et verra sa définition et ses capacités de surveillance et discernement renforcées. Le système Spectra d’autodéfense, lui, sera profondément modernisé en recevant notamment de nouvelles antennes AESA GaN offrant des capacités accrues en terme d’agilité de fréquence et de spectre électromagnétique.
À cela s’ajoutera le nouveau pod de reconnaissance AREOS, capable de traiter et d’analyser en très haute définition presque en temps réel des données multispectrales tout-temps pour donner à l’équipage une vision d’une grande précision du théâtre d’opération survolé, tout en discernant les points d’intérêts particuliers comme le ferait un analyste photographique. - Modernisation des outils de communication,
avec l’intégration d’une radio logicielle cryptée UHF/VHF Contact compatible avec le système SCORPION de l’Armée de Terre, d’une communication satellite cryptée compatible Syracuse IV, et d’une liaison directionnelle cryptée à faible énergie pour communiquer et échanger des données au sein d’une même patrouille - Fusion des données venant des senseurs,
mais également des communications afin de présenter les informations d’importance à l’équipage dans une Interface Homme Machine de nouvelle génération au sein d’un cockpit évolué intégrant un nouveau viseur à casque très attendu des pilotes. Il s’agira, ici, d’alléger la charge de travail dans le cockpit et ainsi permettre une conduite de mission optimisée. - Intégration de nouveaux armements,
en particulier le nouveau missile air-air Mica NG à double impulsions offrant une portée accrue, de nouveaux autodirecteurs plus résistants au brouillage et aux leurres, une plus grande manoeuvrabilité pour une plus grande zone d’évasion impossible; ainsi que la nouvelle version de la bombe propulsée ASSM d’une tonne dédiée à l’élimination des bunkers. - Enfin, le Rafale F4 fera largement appel à l’Intelligence artificielle
et s’appuiera sur des capacités de traitement numérique décuplées, tant dans les processus d’analyse des données en provenance des senseurs que pour la maintenance prédictive de l’appareil.
Des atouts certains, même face au F-35 américain
En d’autres termes, le Rafale dans sa version F4 disposera de capacités comparables à celles des avions de combat de 5ᵉ génération, comme le F-22 ou le F-35, dans une version certes moins furtive, mais conservant les attributs clés de l’appareil, comme sa très grande manoeuvrabilité, sa capacité d’emport et son allonge, tous 3 supérieures à celles du F-35A américain.
Accès réservé aux abonnés Premium
Les archives de plus de deux ans sont réservées aux abonnés Premium de Meta-Defense. Cet accès étendu permet de replacer chaque évolution dans le temps long et de suivre la cohérence des analyses.
L’offre Premium inclut l’ensemble des contenus récents et l’accès illimité aux archives.
Les commentaires sont fermés.