2021 aura été sans nul doute l’année de la consécration pour Dassault Aviation, Safran, Thales, MBDA et les quelques 400 entreprises françaises formant la Team Rafale, avec 146 commandes fermes à l’exportation ou en compensation d’appareils d’occasion. Et 2022 pourrait bien être une année faste elle aussi, avec deux grands contrats en ligne de mire, l’Inde pour sa Marine d’une part, et pour renforcer ses forces aériennes d’autre part face à la montée en puissance chinoise et pakistanaise, et l’Indonésie qui désormais intégré systématiquement le Rafale dans ses présentations concernant l’évolution de sa force aérienne. Dans le même temps, la France elle-même a commandé des appareils pour prendre le relais de ses mirage 2000 C, et ce sont aujourd’hui plus de 100 de nouveaux Rafale qui devront être livrés d’ici 2035 à l’Armée de l’Air et de l’Espace.
Pour autant, ce succès n’est pas sans poser de réels enjeux industriels comme opérationnels pour la France. En effet, la ligne de production Rafale de Merignac peut produire, selon Dassault Aviation, jusqu’à 3 appareils neufs par mois, soit 36 appareils par an. Les commandes prises en 2021, la planification des livraisons pour l’Armée de l’Air, et les prospects plus que sérieux en cours de négociation, suffisent d’ores et déjà à saturer cette capacité industrielle sur les 10 années années à venir. Si cette situation est incontestablement enviée par nombre d’avionneurs dans le Monde, elle n’est pas sans créer de réels handicapes, puisqu’il n’existe plus de marge de manoeuvre industrielle pour répondre à de nouvelles commandes, qu’il s’agisse de commandes nationales, d’exportation ou encore de compensation de vente d’appareils d’occasion, pourtant un marché extrêmement prometteur pour le Rafale. Peut-on, dans ce contexte, imaginer de nouveaux paradigmes pour le Programme Rafale, de sorte à mettre à profit à court, moyen et long terme la dynamique actuelle, tout en répondant aux besoins évidents d’augmentation de masse des forces aériennes françaises ?
Avant de s’engager sur la présentation d’une solution alternative optimisée, il convient de poser quelques postulats expliquant la situation présente. Aujourd’hui, en effet, le programme Rafale est, pour ainsi dire, piloté à vue par les autorités françaises, et ce depuis prés d’une quinzaine d’années. Là ou la France devait initialement commander 320 appareils livrés en une douzaine d’années de sorte à former le pilier industriel sur lequel Dassault Aviation pouvait envisager de construire sa stratégie export, celle-ci a piloté le programme » a minima », c’est à dire en passant des commandes à court termes indispensables pour maintenir la chaine de production en activité, soit 11 appareils par an, le tout en baissant le volume visé d’appareils à 225, et en étalant ces livraisons sur une vingtaine d’années. Ceci entraina au passage une hausse significative des couts de production de l’appareil, ce qui constitua un handicap lors des compétitions internationales.
Les commandes de 2015 (Egypte et Qatar) et de 2016 (Inde), permirent à la France de suspendre ses propres acquisitions, de sorte à préserver ses maigres crédits de défense pour certains autres programmes prioritaires, l’engagement d’acquisition de 11 Rafale par an respecté par la France ayant lourdement entamé les ambitions d’autres programmes, comme FREMM par exemple. Depuis, le paradigme faisant loi autour de ce programme, est de prioriser les commandes exports aux commandes nationales, tant pour répondre aux attentes des clients concernant des livraisons rapides, que pour permettre le financement d’autres programmes tout aussi urgent dans les armées. Et les commandes de 2021 ne font pas exception, puisque les livraisons attendues par les EAU, l’Egypte, la Croatie et la Grèce s’étalent toutes dans les 7 années à venir, ne laissant que très peu de marge industrielle pour intégrer d’autres commandes « urgentes » de la part de clients exports comme de celle des armées nationales.
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