Lorsqu’il fut présenté une première fois par Dassault Aviation, lors du Salon du Bourget 2023, le concept d’avion spatial Vortex avait davantage suscité la curiosité que l’adhésion. Trop prospectif, trop coûteux, trop éloigné des priorités capacitaires perçues alors par le ministère des Armées, le projet fut poliment écarté. Deux ans plus tard, pourtant, c’est l’État lui-même qui monte à bord de l’aventure, avec l’annonce conjointe du lancement du démonstrateur Vortex-D. À la clé, une enveloppe modeste de 70 millions d’euros, des ambitions technologiques affirmées, et un calendrier déjà enclenché.
Ce revirement en dit long sur l’évolution des mentalités et des priorités stratégiques, tant au sein de l’Hôtel de Brienne que dans les cercles industriels. Face à l’accélération des efforts chinois et américains dans le domaine orbital, à la montée des enjeux liés à la militarisation de l’espace, et à la transformation rapide des usages civils et militaires du segment suborbital, l’idée d’un avion spatial français, réutilisable, manoeuvrant et polyvalent, n’est plus perçue comme un pari marginal — mais comme un possible atout stratégique majeur.
Le programme Vortex-D, en ce sens, ne se contente pas d’être un nouveau démonstrateur technologique : il ouvre une brèche conceptuelle, stratégique et industrielle, qui pourrait transformer durablement les équilibres capacitaires français et européens à l’horizon 2040. À condition, bien sûr, d’en comprendre les ressorts, les objectifs, et surtout le potentiel — civil, militaire, industriel, dissuasif — qui s’y rattache.
Sommaire
Deux ans après un refus initial, le ministère des Armées embarque à bord de l’aventure Vortex-D
Si l’annonce officielle du programme de démonstrateur Vortex-D, lors du salon du Bourget 2025, a suscité une forte attention médiatique, ce projet n’était pas une nouveauté pour les milieux de défense français. Dévoilé pour la première fois par Dassault Aviation lors du salon du Bourget 2023, en partenariat étroit avec Dassault Systèmes, ce concept d’avion spatial réutilisable avait déjà été présenté, à l’époque, aux équipes du ministère des Armées.

Pourtant, en amont de la préparation de la Loi de programmation militaire 2024–2030, le sujet n’avait pas encore émergé comme une priorité politique ou capacitaire. À l’Hôtel de Brienne, les réflexions portaient alors sur les besoins immédiats de modernisation des forces conventionnelles, et le projet Vortex n’était pas encore sur les radars institutionnels. Les discussions initiales avec l’industriel n’avaient donc pas débouché, en 2023, sur un engagement concret de l’État.
La situation change radicalement à partir de 2024. En quelques mois, les signaux se multiplient : accélération des programmes spatiaux chinois et américains, montée en puissance des systèmes réutilisables, multiplication des démonstrateurs orbitaux, et, surtout, prise de conscience croissante du potentiel opérationnel unique d’un avion spatial dans un contexte de compétition stratégique renouvelée.
C’est dans ce climat que les équipes de Dassault Aviation et de la DGA commencent à se rapprocher à l’été 2024. Dès le départ, l’enjeu est clair : il ne s’agit pas simplement d’un exercice technologique, mais bien d’un investissement structurant dans une capacité stratégique différenciante, au croisement des domaines aéronautique, spatial, et opérationnel.
Une série d’ateliers techniques est mise en place, réunissant experts étatiques et industriels, afin de valider la cohérence, la faisabilité, et les cas d’usage du programme. Ces échanges confirment rapidement que Vortex-D coche toutes les cases d’un démonstrateur dual stratégique, avec des applications militaires, industrielles et civiles à très fort potentiel.

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Bonjour à tous.
Merci à Mr WOLF pour cet excellent article comme d’habitude.
Ce que je trouve enthousiasmant c’est que notre pays, malgré ces difficultés, puisse encore innover avec une vision claire de certains enjeux. Et qu’il nous reste quelques hommes politiques ( Mr LECORNU ) ou industriels ( Mr TRAPPIER ) clairement à la pointe de la réflexion pour que nous puissions encore faire partie de l’histoire.
POURVU que les autres abrutis de nos deux chambres ( la plupart ) ne viennent pas se mêler de ce qu’ils ne connaissent pas.
Une dernière chose, Europe ou coopération extra-Européenne pourquoi pas, MAIS UNIQUEMENT lorsque nous aurons bien lancé le concept et qu’il sera bien clair dans tous les esprits que le leadership est français; ce qui veut dire par exemple sans nos excellents amis d’outre Rhin.
C’est ainsi que notre autonomie stratégique s’est construite tout en minimisant les coûts.
Ces compétences que l’Allemagne nous jalouse au point d’essayer de les piller par des manœuvres pas très reluisantes sur les projets Européens communs en cours par l’intermédiaire de leurs industriels.
Cette capacité pourrait politiquement enfoncer le clou au niveau Européen de l’avance de notre BITD dans ces domaines.
Il y a beaucoup de capacité envisagé dans cet article et donc autant d’écueil à levé et de question en suspens…
Pour ma part j’ai eu l’impression de lire un article promotionnels pour Dassault Aviation
Bonjour, j ai lu certains commentaires du style : Regardez ce dont Dassault est capable avec seulement (pour commencer) 70 millions d euros alors qu un PA ng nous coûtera des milliards et que nos frégates sont sous armées , dépourvues de brouillage, seulement 6 SNA, très peu de rafale..etc
Qu en pensez vous ?
Cette dépenses colossales
Cette dépense colossale est elle absolument nécessaire ?
La réponse est répartie dans l’article et le reste du site.
Certes mais l’idée d’une coopération aussi attrayante qu’elle soit reste délicate ; rappelez vous les scorpènes avec Navantia, les Frem avec Fincantiéri, les satellites avec l’Allemagne, etc…Nous savons désormais ce qu’il ne faut pas faire, errare humanum est perseverare diabolicum !
D
C’est une excellente chose et cela concours pour moi a se montrer intransigeant pour le SCAF.
Je me pose tout de même une question opérationnelle pour le cargo, appelé à pouvoir faire des livraison en deux heures au profit de l’armée française: Il faudra un site de lancement en métropole pour éviter un voyage vers la Guyane.
Concernant la dissuasion ce point de lancement serait aussi indispensable avec à proximité un DAMS sécurisé.
Encore une fois dassault prouve qu’il est capable d’explorer et défricher un tel projet avec un tout petit budget et de s’y tenir ( Neuron ) , pas pour rien qu’il ne lâche pas sur son leardership concernant l’avion sur le SCAF , espérons que cela nous décide à faire le SCAF tout seuls ( avec en fait des partenaires étrangers mais sous leadership dassault ) , M. Wolf l’a déjà souligné je crois bien mais il est certain que nous irions plus vite , ferions naître un produit plus en phase avec nos besoins et que financièrement nous en sortirions même gagnants ( le programme rafale a été conduit sans dépassements et dans les délais , quel exemple plus convaincant ? Et maintenant c’est un immense succès commercial qui est sans foite moins d’être terminé avec le F5).
Encore un article très intéressant sur un sujet dont on a trop peu entendu parler.
J’espère vraiment qu’un premier vol sera possible dès 2028.
J’ai en revanche du mal à voir l’intérêt d’un Vortex en version cargo. Livrer du fret partout dans le monde en moins d’une heure me semble être un joujou hors de prix, davantage taillé pour les ambitions de l’US air force (ou plutôt space force). Un avion cargo accompagné d’un ou plusieurs ravitailleurs peut déjà acheminer du fret quasiment partout sur la planète en moins d’une journée.
Le coût de lancement d’un drone spatial pour gagner entre quelques heures et une journée me paraît difficile à justifier.
Cependant, un drone cargo spatial n’est soumis à aucune restriction de survol des espaces aériens nationaux, et il est également très difficile à intercepter, ce qui est un vrai avantage stratégique.
Dassault reprend les plans du Hermes qu’il avait gardé au chaud et en refait un moins large de 50 centimètres (soit 1 homme de moins), et autrement moins cher vu que les technologies ont évolué.
Pour une fois que ce ne sont pas les américains qui remettent au goût du jour un truc inventé 30 ans plus tôt par des français …
C’est une excellente nouvelle en effet !
À voir quels partenaires étrangers seront embarqué dans ce projet.
Mon côté chauvin espère que les plus belles places seront réservées à des partenaires français.