Le renouvellement du groupe de guerre des mines absent du plan de modernisation des Forces Navales Roumaines (2017 – 2026)

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Les Forces Navales Roumaines (FNR ou Forțele Navale Române (FNR) bénéficient d’un plan de modernisation (2017 – 2026) composé de trois actes principaux que sont l’acquisition de corvettes, de sous-marins et la modernisation de deux frégates. Même si cela n’est pas explicité dans la programmation navale roumaine, Bucarest pourrait avancer rapidement sur le dossier du renouvellement de sa composante de guerre des mines en raison de l’âge avancé des bâtiments et du caractère obsolète des matériels employés.

Le théâtre des Forces Navales Roumaines, la Mer Noire, est largement bouleversé : l’annexion de la Crimée (2014) par la Russie dont la Flotte de la Mer Noire est en cours de renouvellement renforce l’empreinte de Moscou. La marine turque procède elle-aussi à la modernisation de ses sous-marins en service et à la construction d’une nouvelle génération de sous-marins alors que la place de la Turquie au sein de l’Alliance Atlantique est remise en cause. La présence navale de l’OTAN suivait la mise en place de la European Phased Adaptive Approach (2009) qui redéploie la posture anti-missile balistique américaine en Europe : présence quasi-continue d’un des quatre destroyers de type Arleigh Burke basés à Rota (Espagne) et installation de deux sites terrestres AEGIS Ashore (un radar AN/SPY-1D plus 24 RIM-161 Standard Missile3 (SM-3) à Deveselu en Roumanie et en Pologne (2018). La guerre civile en Ukraine justifiait un accroissement de la posture des marines de l’OTAN dans leur ensemble.

C’est en 1998 la dernière fois qu’un bâtiment de guerre fut mis à l’eau en Roumanie. Après ces « vacances navales » sans aucune mise sur cale au cours des vingt années suivantes, le plan de modernisation (2017 – 2026) des FNR promet une transformation radicale des capacités navales roumaines. La Roumanie assume un effort militaire à hauteur de 1,81% de son PIB en 2017 – contre 1,5% pour la France. Elles reposent aujourd’hui dans sa grande majorité sur les bâtiments acquis au près de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques (URSS) ou construits sous licence dans les chantiers navals roumains à partir des plans de projets soviétiques.

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Le plan naval roumain (2017 – 2026) se décompose en trois actes principaux que sont l’acquisition de corvettes, la modernisation de deux frégates et l’assemblage en Roumanie de sous-marins :

L’acquisition de nouvelles corvettes vise à pourvoir au remplacement des bâtiments du 50ème escadron de corvettes (base navale de Mangalia) des projet 1048 ou Tetal-I en code OTAN (Amiral Petre Bărbuneanu (1983), Vice-Amiral Eugeniu Roșca (1987), deux autres unités désarmées) et projet 1048M ou Tetral-II en code OTAN (Contraamiral Eustațiu Sebastian (1989), Contraamiral Horia Macellariu (1989), construction de deux autres unités abandonnée).

Corveta Horia Macelariu 265 Analyses Défense | Constructions Navales militaires | Contrats et Appels d'offre Défense
La corvette Contraamiral Horia Macellariu de la Marine Roumaine

Les bâtiments du projet 1241 ou Tarantul en code OTAN (Zborul (1990), Pescărușul (1991) et Lăstunul (1991) sont aussi classés en tant que corvette dans la typologie de la flotte roumaine. Ces corvettes bénéficieront d’une modernisation dans le cadre du plan naval plutôt que d’être visées explicitement par l’acquisition des quatre corvettes. Il s’agit peut-être là d’une manière de les conserver au service jusqu’à ce que la marine roumaine demande la commade de corvettes supplémentaires afin de pouvoir les remplacer et entretenir un format similaire en la matière.

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Au terme de la procédure lancée en 2016 par Bucarest, Naval group fut déclaré vainqueur de l’appel d’offres le 3 juillet 2019 pour la fourniture de quatre corvettes Gowind 2500 pour 1200 millions d’euros. La première unité devrait être usinée à Lorient en moins de trois ans et les trois suivantes assemblées en Roumanie par Constanța Shipyard et être livrées avant 2026.

Gowind2500 roumanie Analyses Défense | Constructions Navales militaires | Contrats et Appels d'offre Défense
Les 4 Gowind 2500 commandées par Bucarest à Naval Group cont considérablement accroitre les performances anti-sous-marines et anti-navires de la Marine Roumaine

La 56ème flottilles des frégates (base navale de Constanța) bénéficiera de la modernisation des deux frégates Regele Ferdinand (2004) et Regina Maria (2005) du Type 22 acquises le 14 janvier 2003 auprès du Royaume-Uni (mises en service, respectivement, en 1988 et 1987). Cette opération a été joint au programme d’acquisition de nouvelles corvettes (4 + 2) et sera donc exécutée au cours de la même période.

La modernisation du Mărășești (1992) n’est, étonnament, pas comprise dans le lot. La frégate est considérée comme obsolète. Il aurait été jugée préférable de la sortir du service plutôt que de lancer un programme de modernisation probablement jugé trop coûteux car devant s’appliquer à un bâtiment unique.

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Le troisième grand acte est le renouvellement de la composante sous-marine qui repose aujourd’hui sur le sous-marin Delfinul (1985). Le gouvernement roumain acceptait l’offre soviétique pour un sous-marin du projet 877 (Kilo en cote OTAN). Deux unités supplémentaires avaient été envisagées mais n’avaient pas pu être commandées. Considéré inapte au service en 1995, le Delfinul est déclaré de nouveau opérationnel en 2018. Le plan naval (2017 – 2026) ambitionne de le remplacer par trois nouveaux sous-marins, comme en Pologne qui détient elle aussi un sous-marin du projet 877.

DelfinulSubmarine Analyses Défense | Constructions Navales militaires | Contrats et Appels d'offre Défense
Le Delfinul, sous-marin de la classe Kilo projet 877, est le seul sous-marin de la Marine Roumanie.

Ces trois grands actes du plan naval (2017 – 2026) tournent autour d’une dominante clefs : la lutte anti-sous-marine. L’axe de reconstruction des flottes de surface et sous-marine étant on ne peut plus explicite, il est étonnant de ne trouver aucun programme de renouvellement de la composante de guerre des mines. Le projet existait préalablement à la crise financière, économique et des dettes souveraines (2007 – 2009).

Les capacités reposent actuellement sur les bâtiments du 146ème escadron de guerre des mines (base navale de Constanța), c’est-à-dire quatre dragueurs de mines (Locotenent Remus Lepri (1986), Locotenent Lupu Dinescu (1989), Locotenent Dimitrie Nicolescu (1989) et Slt. Alexandru Axente (1989) de la classe Musca et un mouilleur de mine, le Viceamiral Constantin Bălescu (1981) de la classe Cosar (la deuxième unité a été démantelée). Ces bâtiments détiennent des aptitudes limitées à la lutte anti-sous-marine qui ont pu être employées.

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Le dragueur de mine D. Nicolescu de la Marine roumaine

Dans la pratique, les quatre dragueurs de mines ne sont pas des « chasseurs » de mines et sont mêmes totalement obsolètes. Ils sont construits autour d’une coque en acier, ce qui les rend forcément vulnérable aux mines à influence magnétique, même en démagnétisant la coque, . Par ailleurs, et c’est le plus dommageable, ils ne sont équipés ni de sonar à haute résolution, ni de véhicule sous-marin télécommandé. Les bâtiments n’ont bénéficié d’aucun programme de modernisation majeur depuis leur admission au service actif. Les travaux menés en 2015 n’ont servi qu’à traiter certaines obsolescences.

Sur le plan historique, il est remarquable que la Mer Noire fut le théâtre de nombreuses campagnes de minage et de contre-minage pendant les guerres de Crimée (1853 – 1856), russo-turque (1877 – 1878) et au cours deux guerres mondiales (1914 – 1918 et 1939 – 1945). L’entretien, la modernisation voire l’extension des capacités de guerre des mines et sous-marines par les flottes russe et turque ne sont pas de nature à faire disparaître l’emploi des mines navales au XXIe siècle, bien au contraire.

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Naval Group et le belge ECA-Robotics proposent la solution de guerre des mines acquise par la Belgique et les Pays-bas

Les dragueurs de mines sont pourtant très actifs et participent régulièrement aux exercices menés, notamment par le Standing NATO Mine Counter Measures Group Two (SNMCMG2) avec les autres marines de l’OTAN qui y sont intégrés. Les bâtiments roumains sont même aperçus franchissant ponctuellement les détroits du Bosphore afin d’aller s’exercer en mer Méditerranée.

Eu égard à l’âge des bâtiments de la classe Musca (38,25 ans en moyenne) et à leur caractère obsolète, le fait qu’aucun plan de remplacement n’ait été présenté publiquement apparaît comme une incohérence majeure vis-à-vis du plan naval (2017 – 2027) qui vise, pourtant, à renouveler les capacités opérationnelles de lutte sous la mer.

Bucarest, conscient de l’enjeu, malgré son silence sur le dossier, serait prêt à avancer rapidement sur le renouvellement des bâtiments du 146ème escadron de guerre des mines avant de s’engager dans un nouveau programme majeur : l’acquisition de trois sous-marins. Et Naval group est logiquement aussi bien placé qu’intéressé, eu égard à son succès enregistré auprès des marines belge et hollandaise. Un remplacement nombre pour nombre des bâtiments roumains, eu égard à l‘offre de Naval Group et ECA-Robotics en Belgique, exigerait 627 millions d’euros. La Roumanie pensait devoir dépenser 1600 millions d’euros pour l’acquisition de quatre corvettes : l’offre de Naval group ne coûtait « que » 1200 millions d’euros : soit le budget pour quatre chasseurs de mines… D’où peut-être un certain optimisme pour Naval group.

Rien n’est encore dit quant au besoin de renouveler une capacité offensive de mouillage de mines. L’introduction de la première capacité de guerre des mines fondée sur l’emploi de drones de surface et sous-marins pourrait obliger les autres protagonistes de la mer Noire à se mettre à niveau.

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