Le 22 mars 2025, Donald Trump annonçait depuis le Bureau ovale la désignation du F-47 de Boeing comme futur chasseur de 6ᵉ génération de l’US Air Force, en présence du général Allvin, chef d’état-major de l’USAF. Ce choix stratégique, intervenu à l’issue du programme NGAD, marque une nouvelle victoire politique, capacitaire et industrielle pour l’US Air Force, aux dépens de l’US Navy. Depuis, les signes se sont multipliés : reports de crédits, silence radio côté naval, arbitrages budgétaires défavorables. Le F/A-XX, pourtant destiné à remplacer les Super Hornet dans les groupes aéronavals américains, est officiellement mis en pause.
Selon les déclarations croisées du Pentagone et de plusieurs sources parlementaires reprises par The War Zone, l’arbitrage ne se limite pas à un simple glissement de calendrier. Il pourrait aboutir à un recul de près d’une décennie, imposant à l’US Navy un redémarrage complet de la procédure, et laissant les porte-avions américains sans chasseur de nouvelle génération jusqu’aux années 2040. En parallèle, le F-47, devenu priorité présidentielle, pourrait entrer en service avant 2029 — à temps pour marquer le mandat du 47ᵉ président des États-Unis.
Derrière cette bascule, c’est toute la hiérarchie capacitaire américaine qui se redessine. Le choix du F-47 au détriment du F/A-XX ne dit pas seulement quelle armée domine. Il révèle aussi quelles zones géographiques, quels scénarios d’engagement et quelles postures stratégiques sont désormais privilégiés par le commandement militaire américain. Et, en filigrane, quelle place exacte Washington souhaite encore accorder à la défense de Taïwan face à l’Armée populaire de libération.
Sommaire
Rivalité historique entre l’US Navy et l’US Air Force
Depuis la Seconde Guerre mondiale, l’US Navy et l’US Air Force entretiennent une rivalité permanente pour les arbitrages industriels, doctrinaux et budgétaires autour du développement des avions de combat.

À plusieurs reprises, l’aviation embarquée a su imposer ses choix face à l’USAF, comme ce fut le cas dans les années 1960 avec la standardisation autour du F-4 Phantom II, puis du A-7 Corsair II, sur les ruines du programme Century Series, dont les appareils, malgré leur avance technologique, se révélèrent inadaptés aux besoins opérationnels réels. Mais depuis le début des années 2000, le rapport de force s’est progressivement inversé, au profit de l’aviation basée à terre.
Le programme F-35 est emblématique de cette dynamique. Conçu comme un chasseur multirôle commun aux trois forces (Air Force, Navy, Marines), il a, en réalité, été largement façonné selon les contraintes de la version F-35A de l’USAF, la plus simple et la plus rentable à produire. La version F-35C, embarquée, a dû composer avec des compromis de structure et de performance hérités des F-35A et B, au détriment de l’optimisation navale.
Ce déséquilibre initial a nourri un sentiment de frustration au sein de l’US Navy, qui voyait dans le programme F/A-XX une opportunité de reprendre l’initiative capacitaire sur le segment de la supériorité aérienne embarquée. Mais le choix de donner la priorité au F-47 confirme une fois de plus la domination institutionnelle de l’US Air Force au sein du Pentagone, y compris sur des enjeux stratégiques liés au domaine maritime.
F-47 vs F/A-XX : deux réponses à une même menace chinoise
Depuis 2020, la montée en puissance de l’industrie aéronautique militaire chinoise ne cesse d’inquiéter les planificateurs américains. Avec le J-20, le J-35 embarqué, et la perspective du J-35A basé à terre, Pékin est en passe de refermer l’écart technologique qui la séparait encore de Washington il y a dix ans. Les paires capacitaires se dessinent avec une inquiétante symétrie : J-20 contre F-22, J-16 contre F-15EX, J-10C contre F-16V, J-35A contre F-35A.
Du côté naval, la dynamique est similaire. Le J-15T vient défier le F/A-18E/F, le J-15D affronte le EA-18G Growler, et le J-35 vise clairement le segment occupé par le F-35C. Parallèlement, deux nouveaux appareils en développement — désignés médiatiquement comme J-36 et J-50 — sont régulièrement observés en vol depuis leur révélation publique savamment orchestrée par Pékin, les 26 et 27 décembre 2024. Leur entrée en service opérationnel dans les années à venir ne fait plus guère de doute.

Il reste 75 % de cet article à lire, Abonnez-vous pour y accéder !

Les abonnements Classiques donnent accès aux
articles dans leur version intégrale, et sans publicité,
à partir de 1,99 €. Les abonnements Premium permettent d’accéder également aux archives (articles de plus de deux ans)
ABONNÉS : Si vous voyez ce panneau, malgré votre abonnement, videz le cache de votre navigateur pour régler le problème.