mercredi, novembre 13, 2024

Le Pentagone lance un nouveau programme pour concevoir un système anti-missile de nouvelle génération

En mars 2019, le Pentagone avait suspendu le programme Redesigned Kill Vehicle, ou RKV, confié à Boeing et Raytheon, suite à plusieurs impasses technologiques entamant la pérennité du programme, et ayant engendré 6 échecs sur les 17 tests effectués. Destiné à équiper 45 à 64 stations sur l’ensemble du territoire des Etats-Unis, le RKV avait pour ambition, grâce au nouveau Exo-Atmospheric Kill Vehicle de Raytheon, de pouvoir intercepter les missiles balistiques et les planeurs hypersoniques, offrant de fait un bouclier antimissile global à l’ensemble du pays, même contre les systèmes intercontinentaux et hypersoniques les plus modernes contre lesquels les systèmes actuels, comme le THAAD, ne peuvent rien.

Le 21 aout, le sous-secrétaire à la recherche Michael Griffin, a annoncé l’arrêt officiel du programme de 5,8 Md$, jugeant que c’était « la meilleure des décisions possibles ». A peine 2 jours plus tard, la Missile Defense Agency, ou MDA, a publié un appel à proposition pour un nouveau programme, tout aussi ambitieux, avec les mêmes objectifs, et un planning particulièrement serré puisqu’il prévoit un entrée en service des premiers systèmes en 2025. Si Boeing semble mal placé pour se positionner sur ce nouveau contrat, car portant la responsabilité de l’échec du premier système, ce n’est pas le cas de Raytheon, puisque le Pentagone semble estimer l’EKV développé par ce dernier comme le point de départ du nouveau programme. En outre, la RFP émise par le Pentagone attend les propositions des industriels avant le 29 Aout, laissant peu de place à un nouveau venu, hormis peut-être Lockheed-Martin, pour se positionner sur ce marché.

Il faut noter que Vladimir Poutine avait également annoncé que la Russie développait un système anti-missile de ce type, capable d’intercepter des missiles hypersoniques, en se basant sur l’avance de l’industrie russe dans le domaine des armes hypersoniques. Il est également probable que la Chine développe un ou plusieurs programmes de ce type. En revanche, ni la France, ni la Grande-Bretagne, n’ont pour l’heure entrepris de tels développements. Or, si de tels systèmes devaient devenir opérationnels, ils compromettraient de façon dramatique la stratégie de dissuasion qui sous-tend l’ensemble de la Défense Nationale française.

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Avec son avance technologique dans le domaine des missiles hypersoniques, Moscou estime être en mesure de developper des systèmes anti-missiles capables d’intercepter ces menaces

En effet, ces 40 dernières années, l’ensemble des choix concernant La Défense Nationale en France, comme en Grande-Bretagne, a été dicté par la certitude que les forces nucléaires mises en place par les deux pays étaient suffisantes pour dissuader tout aventurisme militaire excessif pouvant menacer l’intégrité territoriale et la population du pays, voir éventuellement de ses alliés. De fait, les deux pays ont consenti à des réductions sensibles des formats de leurs forces conventionnelles, basculant l’immense majorité du spectre des menaces « haute intensité » vers l’emploi potentiel des forces de dissuasion. Si certains pays venaient à disposer d’une défense anti-missile à ce point efficace qu’elle serait de nature à neutraliser la réplique nucléaire française et/ou britannique en cas d’attaque, l’efficacité de l’ensemble de la défense des deux leaders militaires européens viendrait à s’effondrer, emportant avec elle tous les espoirs de Paris pour l’émergence d’une Europe de La Défense. Non seulement l’Europe serait alors extrêmement vulnérable eu égard à la faiblesse de ses moyens conventionnels, mais, en l’absence d’une protection anti-missile américaine, elle serait également vulnérable à de simples menaces d’utilisation d’armes stratégiques.

Il est désormais indispensable de se rendre compte que la majorité des programmes de Défense dimensionnants des 3 grandes puissances militaires mondiales, les Etats-Unis, la Chine et la Russie, visent un palier opérationnel effectif à partir de 2030, et un pic d’efficacité en 2040. Dès lors, se satisfaire de programmes européens qui visent l’entrée en service des équipements de nouvelle génération en 2035 ou 2040, ne relèverait-il pas d’une certaine forme de politique de l’Autruche ?

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