Depuis le début de son invasion de l’Ukraine, les armées russes se sont heurtées à de nombreuses difficultés, en partie liées à un manque évident de performance et d’efficacité de ses propres forces, mais également à l’exceptionnelle combativité et Intelligence tactique des ukrainiens eux-mêmes. De fait, en dépit d’un avantage très marqué en matière de puissance de feu, de technologie et de capacités aériennes, les 3 premières semaines de cette guerre en Ukraine furent marquées par une difficile avancée des armées russes dans le pays, et des pertes d’une intensité oubliée depuis la seconde guerre mondiale ou la guerre de Corée. Ainsi, en 24 jours de combat, les armées de Moscou ont perdu entre 20.000 et 35.000 hommes selon les estimations, dont 6 à 9000 tués, mais également plus de 750 véhicules blindés dont 260 chars lourds (documentés), une quinzaine d’avions de combat et plus du double d’hélicoptères, ainsi que plus de 500 véhicules logistiques, soit 20% du dispositif initialement déployé autour du pays, et prés de 10% des effectifs et materiels des armées russes elles-mêmes. Même son commandement a été durement touché, avec la perte confirmée de 5 généraux (plus un général Tchétchène) dont un Lieutenant Général, l’équivalent de nos généraux de division, ainsi que de prés de 3 dizaines de colonels et lieutenant-colonels, pour l’essentiel des chefs de corps.
Si désormais l’hypothèse d’une invasion globale de l’Ukraine, et de la mise en place d’un gouvernement de complaisance à la botte du Kremlin semble écartée, les autorités russes ont, semble-t-il engagé leurs armées dans une toute nouvelle stratégie, potentiellement bien plus difficile à contenir pour les défenseurs ukrainiens. Pour comprendre cette évolution, et les risques qui désormais pèsent sur l’Ukraine, peut-être de manière moins visible mais pour autant bien plus pressante, il est indispensable de revenir sur les 3 phases majeures qui, jusqu’ici, ont marqué cette guerre, et la stratégie du Kremlin pour soumettre l’Ukraine et sa population.
Phase 1 : l’échec de la stratégie de décapitation
Aux premières heures du conflit, le 24 février, la stratégie employée par les armées russes semblaient bel et bien d’une grande efficacité. Après avoir convaincu les ukrainiens que l’essentiel de la poussée russe viendrait des républiques indépendantes du Donbass en vue de s’emparer de l’ensemble des Oblast de Luhansk et de Donetsk, les forces russes ont mené trois attaques massives qui ont, d’une certaine manière, surpris l’Etat-major ukrainien : l’une au sud du pays venue de Crimée vers le Dniepr et la ville de Kherson, l’autre vers la ville russophone de Kharkiv, et la troisième vers Kyiv et le pouvoir ukrainien. Comme nous le savons désormais, l’objectif de cette stratégie était de double. D’une part, par la prise de villes massivement russophones comme Kharkiv et Kherson, les armées russes espéraient pouvoir légitimer sur la scène internationale comme nationale leur intervention, en montrant des scènes comparables à celles ayant suivi l’intervention en Crimée en 2014. En outre, par une action aéroportée complexe incluant la prise de l’aérodrome d’Hostomel au nord de Kyiv par les forces spéciales, puis par le déploiement d’une force aéroportée importante dans Kyiv via cet aéroport, Moscou voulait prendre le controle de l’ensemble des centres de pouvoir ukrainien, et probablement de ses représentants politiques, comme les membres de la Rada, le parlement ukrainien, le maire de Kyiv et le président Zelensky.
Cette stratégie se révéla être une erreur monumentale, puisque non seulement les forces spéciales ukrainiennes parvinrent à repousser l’assaut russe sur l’aéroport d’Hostomel, annihilant les possibilités d’assaut aéroporté d’ampleur, mais les villes de Kharkiv et de Kherson n’accueillirent pas les forces russes avec enthousiasme, et opposèrent au contraire une très importante résistance, au point que 3 semaines après le début de l’opération, Kharkiv reste sous controle ukrainien, et Kherson, bien que tombée au mains des russes, continue d’être le théâtre d’une forte résistance civile de la part de ses habitants. Au final, hormis dans le sud du pays pour rejoindre le Dniepr, la première phase de l’offensive russe fut un échec retentissant, ce qui permit aux autorités ukrainiennes de galvaniser le moral et la resilience de toute la population, mais également de convaincre les occidentaux, européens en tête, que l’Ukraine ne tombera pas aussi facilement qu’anticipé, et qu’il était donc nécessaire et utile de mener une politique de sanction sévère contre la Russie et de soutien militaire vers l’agressé.
Phase 2 : l’enlisement de la stratégie de saturation
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