vendredi, décembre 5, 2025
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KC-46 : les mauvaises nouvelles s’accumulent pour Boeing

Depuis le lancement du programme de ravitailleur de l’USAF KC-46 Pegasus, les problèmes techniques, les délais et les surcoûts s’accumulent, à tel point que la trentaine d’appareils déjà livrés aujourd’hui sont dans l’incapacité de mener des missions de combat. Le principal problème technique rencontré par le ravitailleur de Boeing semble encore et toujours concerner le Remote Vision System (RVS), un système de caméras et de capteurs permettant à un opérateur de guider à distance la perche de ravitaillement du Pegasus.

Il y a quelques jours, un accord aurait enfin été trouvé entre Boeing et l’USAF afin de résoudre une bonne fois pour toute les problèmes du RVS. Dans un premier temps, Boeing devra livrer des correctifs logiciels et matériels afin d’améliorer autant que possible le RVS. Dans un second temps, toutefois, c’est l’intégralité du RVS qui devra être remplacé par un nouveau système, à la fois sur les appareils déjà livrés et sur les quelques 146 appareils qui restent à livrer. Aucun détail technique n’a filtré sur l’équipementier qui pourrait être sélectionné pour fournir un nouveau RVS. On sait toutefois que des solutions existent déjà sur le marché, puisque le A330 MRTT d’Airbus est équipé d’un système équivalent donnant entière satisfaction.

USAF Boeing KC 46A Pegasus 767 2LKC Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Pegasus à proximité des usines de Boeing dans l’Etat de Washington. La production de tous les avions de ligne est pour le moment arrêtée, ce qui inclut les avions ravitailleurs et les patrouilleurs maritimes basés sur des cellules civiles de Boeing.

Pour Boeing, cette annonce n’est cependant pas une bonne nouvelle. En effet, comme pour les autres déboires techniques qu’il a fallu résoudre ces dernières années, ces importants travaux de remise à niveau se feront contractuellement aux frais de Boeing, qui semble perdre bien plus d’argent qu’il n’en gagne sur ce programme. Heureusement, l’avionneur de Seattle a pu compter sur une aide bienvenue du gouvernement fédéral.

L’USAF a en effet accepté de rendre à Boeing 882 millions de $. Cette somme correspond à 20% du prix des 33 ravitailleurs déjà livrés et que l’USAF avait placé sous séquestre en attendant la résolution des problèmes techniques du Pegasus. Cette somme permettra de soulager un peu Boeing qui a dû fermer la plupart de ses usines en raison de la crise de coronavirus, qu’il s’agisse des chaînes d’assemblages d’avions de ligne vers Seattle ou des usines d’hélicoptères en Pennsylvanie.

Plus d’information sur le KC-46 Pegasus sur Meta-Défense: cliquez ici.

L’US Navy accepte l’USS Delaware au service, 18ème sous-marin d’attaque de la classe Virginia

Le 4 avril 2020, le sous-marin nucléaire d’attaque USS Delaware (SSN 791) a été admis au service actif dans l’US Navy, devenant ainsi le 18ème sous-marin de cette classe à rejoindre la flotte américaine. Mis sur cale en avril 2016 aux chantiers navals Huntington Ingalls Industries, Newport News, le sous-marin a été lancé 17 décembre 2019. Il est le dernier représentant de la série Block III comptant 8 navires de la classe Virginia commandée en 2008. Les 10 prochains navires, représentant le Block IV, ont été commandés en avril 2014, et la première unité, l’USS Vermont (SSN 792) doit entrer en service prochainement, d’ici la fin avril selon le planning.

USS Delaware SSN 791 Rollout Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’USS Delaware (SSN 791) à quelques jours de son lancement

Long de 115 metres (377 ft) pour un tonnage de 7800 tonnes, l’USS Delaware et son equipage de 134 hommes mettent en oeuvre 25 torpilles lourdes Mk48 et missiles anti-navires Tomahawk ansi que 12 missiles de croisière Tomahawk contenus dans 2 silos verticaux sextuples. Il assurera un vaste éventail de missions, allant de la lutte anti-sous-marine et anti-navire à la collecte de renseignement. Les sous-marins de la classe Virginia remplacent les SNA de la classe Los Angeles en cours de retrait dans l’US Navy. L’US Navy a officialisé en décembre 2019 la commande du dernier exemplaire du Block IV et des 8 premiers sous-marins du block V devant en comprendre à terme 10 pour 22 Md$, les navires devant être livrés entre 2025 et 2029. Les block VI et VII initialement prévus seront probablement annulés au profit d’une nouvelle classe de submersibles baptisé pour l’heure SSN(X), devant représenter une evolution profonde en matière de capacités et de doctrines.

A cause de l’épidémie de coronavirus, les puissances militaires montrent leurs muscles

La pandémie actuelle de coronavirus qui touche désormais toute la planète ne semble pas arrêter pour autant les affaires du monde. Au contraire, on pourrait même arguer que la crise sanitaire actuelle accélère un certain nombre de crises politiques et diplomatiques jusqu’à présent en sommeil. Alors que l’activité économique mondiale tourne au ralenti et que le prix du pétrole n’a jamais été aussi bas depuis le début des années 2000, certains pays y voient l’occasion de régler quelques contentieux avec leurs voisins. D’autres encore cherchent à rappeler au monde qu’ils restent sur leurs gardes par le biais de mesures de réassurances. Tous, enfin, cherchent à affirmer que leur puissance est intacte, y compris à travers des exercices et manœuvres militaires.

Sur tous les continents, c’est désormais le même schéma qui s’affiche depuis quelques semaines. Alors qu’une crise économique se profile à la suite de l’épidémie de Covid-19, certains acteurs étatiques et groupes terroristes tentent de saisir leur chance et de voir de quelle manière la situation pourrait évoluer en leur faveur. Inversement, les grandes puissances militaires et diplomatiques, notamment en Occident, cherchent à rassurer leurs populations et leurs alliés sur le maintien de leurs capacités militaires, tout en rappelant à leurs adversaires les limites à ne pas dépasser.

Les opérations continuent

De manière générale, l’épidémie de coronavirus n’a pour le moment pas stoppé massivement les opérations militaires en cours dans le monde. Si n’importe qui peut être touché par le virus Covid-19, les populations militaires – généralement jeunes et en bonne forme physique – ne sont pas spécialement à risques. Néanmoins, les soldats peuvent voir leurs capacités militaires fortement impactées et, surtout, transmettre le virus aux populations civiles avec qui ils sont en contact.

barkhane mirage 2000 MQ 9 Reaper Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Pour le moment, les opérations aériennes françaises menées en Afrique et au Moyen-Orient n’ont pas été réduites par l’épidémie de coronavirus

Ainsi, que ce soit au Moyen-Orient ou en Afrique, les troupes européennes déployées sur place ont modifié temporairement leur mode opératoire. En Irak, notamment, les missions d’entrainement et d’encadrement du personnel de sécurité local ont été stoppées par les États-Unis et leurs alliés, qui ont redéployé une partie de leurs troupes en attendant que l’épidémie de coronavirus ne cesse dans la région. Dans le même temps, cependant, les frappes aériennes de la coalition dans la région se poursuivent, voire s’intensifient dans certains secteurs, puisque ces missions permettent d’opérer à distance de toute contamination au coronavirus.

Côté français, la Task Force Monsabert a été retirée d’Irak le 22 mars et transférée en Jordanie, mais les avions de combat et de soutien basés en Jordanie, au Qatar et aux Emirats Arabes Unis poursuivent leurs opérations contre l’État Islamique. Dans le même temps, une partie des troupes britanniques a été renvoyé au Royaume-Uni après que les missions de formation dans le Golfe Persique aient été suspendues pour une durée de soixante jours.

Au final, c’est donc surtout en Afrique que les opérations se poursuivent pour l’instant sans changement majeur. L’opération Barkhane menée par les troupes françaises et européennes dans la région sahélo-saharienne semblent ainsi se poursuivre presque normalement, qu’il s’agisse des opérations de formation des militaires locaux ou des frappes menées contre l’Etat Islamique au Grand Sahara. Des aménagements de l’organisation ont tout de même été prévus pour éviter que des soldats venus d’Europe ne transportent le virus avec eux. Malheureusement, la détection des premiers cas de Covid-19 parmi les militaires français en Afrique pourrait conduire à renforcer un peu plus les mesures de sécurité et réduire la pression portée sur les groupes terroristes locaux. Pour le moment, le déploiement de la Task Force européenne Takuba prévue cet été n’est pas encore remis en question. La situation pourrait cependant évoluer en même temps que les conditions sanitaires en Afrique.

Déstabilisation et provocations

En Afrique, le coronavirus n’est pas encore aussi répandu qu’en Europe ou en Amérique du Nord. Cependant, une généralisation de l’épidémie sur ce continent pourrait avoir des résultats désastreux sur la sécurité. De nombreux Etats africains sont déjà très fragilisés par une situation économique précaire et de nombreuses épidémies endémiques, ce qui offre bien souvent à des groupes terroristes une opportunité pour revendiquer pouvoir et territoire. C’est notamment le cas de l’Etat Islamique au Grand Sahara, qui pourrait attendre qu’une épidémie de Covid-19 s’installe durablement au Mali avant de lancer une ambitieuse campagne de déstabilisation. Pour peu que les forces de la coalition internationale se mettent d’elles-mêmes en retrait en raison des risques sanitaires, comme elles ont pu le faire en Irak, le retour au statu quo actuel après la fin de l’épidémie pourrait alors prendre plusieurs mois, voire des années.

F 16 Taiwan Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Suite aux incursions chinoises, Taïwan a procédé à plusieurs exercices d’interception de grande ampleur

Bien entendu, il n’y a pas que les groupes armés non-étatiques qui pourraient profiter d’une pandémie de coronavirus. Pour certaines puissances régionales, le regard détourné des médias occidentaux constitue une aubaine pour tenter d’imposer avec un peu plus de force leurs vues diplomatiques. C’est particulièrement vrai en Chine, qui a procédé depuis plusieurs semaines à des manœuvres militaires agressives autour de Taïwan, au point de franchir à plusieurs reprises la ligne de démarcation intermédiaire dans le détroit de Formose.

Pour Pékin, ces manœuvres visaient initialement à exercer une pression sur Washington, puis des représailles. En effet, le 26 mars, Donald Trump promulgué le TAIPEI Act, une initiative sur la protection internationale et le renforcement des alliés de Taïwan considérée comme une véritable provocation pour Pékin. Si le bras de fer qui oppose Taïwan à la Chine ces dernières semaines s’inscrit donc dans une vaste partie d’échec entre Washington et Pékin, il semble aussi évident que les démonstrations chinoises et les réactions musclées de Taïwan visent aussi à montrer que chaque adversaire dispose encore d’une puissance militaire crédible malgré la crise sanitaire qui a durement frappée la région.

Bien plus au Nord, au large du Japon, la Corée du Nord a également montré les muscles récemment en tirant plusieurs missiles balistiques à courte portée au milieu du mois de Mars. Les exercices de tir de Pyongyang ont été vivement critiqués à Séoul et Tokyo, même si tous les observateurs s’accordent à dire qu’il s’agit avant tout d’une mesure de communication plus que de provocation. Si peu d’informations filtrent de Corée du Nord, tout porte à croire que l’épidémie de coronavirus y fait rage. En procédant à un tir de missiles balistiques, Pyongyang rappelle ainsi au monde entier et à sa propre population que ses forces armées restent encore en ordre de marche.

Démonstrations de force et réassurance

Face à de tels déploiements de force, et afin de décourager d’autres pays à se lancer dans leurs propres opérations de déstabilisation, les grandes puissances militaires occidentales ont entrepris de procéder à leurs propres démonstrations de force. Nombre d’entre-elles étaient probablement prévues de longue date, notamment les démonstrations de frappes maritimes que l’US Navy a mené conjointement avec des AC-130 de l’USAF et des AH-64 Apache de l’US Army. Les exercices Pacific Pathways menés conjointement par l’US Army et la Royal Thai Army semblent pour le moment maintenus, mais ont été réduits à l’échelle de l’escouade afin d’éviter toute contamination à grande échelle. D’autres exercices, néanmoins, ont dû être annulées car ils s’avéraient trop dangereux pour les populations civiles et alliées. C’est notamment le cas de l’exercice Defender 2020, particulièrement symbolique, qui a fini par être purement et simplement annulé. Certaines mesures de réassurance, enfin, ont très probablement été improvisées.

capitaine Brett Crozier USS Rooselvet Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Le commandant Brett Crozier a été relevé de son commandement du porte-avions Roosevelt après avoir mis le cap sur Guam pour mettre à l’abri son équipage durement touché par le Covid-19. Cette décision politique pourrait cependant coûter cher à l’US Navy si jamais d’autres navires étaient également touchés par le coronavirus.

Depuis quelques temps, l’US Navy a ainsi pris l’habitude de ne plus publier à l’avance les calendriers de déploiement de ses porte-avions, afin de conserver une certaine dose de surprise opérationnelle vis-à-vis de ses principaux adversaires, notamment l’Iran, la Russie et la Chine. Il est ainsi possible que le Pentagone prévoyait de déployer un de ses porte-avions à proximité de Taïwan, comme mesure de réassurance. Malheureusement, après la contamination au Covid-19 des marins de l’USS Theodore Roosevelt et le véritable fiasco entourant la relève de son commandant, il ne reste plus qu’un seul porte-avions américain opérationnel dans le Pacifique, le Ronald Reagan. Un porte-avions dont le statut sanitaire et la capacité de combattre sera désormais toujours soumis à condition, après ce qui est arrivé au Theodore Roosevelt.

Pour le moment, les forces aéronavales européennes semblent épargnées par de telles annonces dramatiques. Bien qu’il ait effectué une escale à Brest alors que les premières mesures de confinement avaient été annoncées en France, le porte-avions nucléaire Charles de Gaulle ne semble pas avoir connu de situation aussi alarmante que celle du Roosevelt et continue pour le moment ses déploiements et ses exercices en Atlantique Nord.

En effet, le Cavour italien n’a pas encore terminé sa modernisation et ne peut donc pas participer immédiatement aux efforts militaires italiens dans la lutte contre le coronavirus. Si le planing est respecté, ceci dit, le porte-avions italien pourrait bien être utilisé avant tout comme navire-hôpital dans le courant de l’été. Le porte-avions italien serait alors sans doute utilisé en restant à quai, à l’instar du USNS Comfort déployé à New-York.

RFA Argus coronavirus Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Le Argus de la de la Royal Fleet Auxiliary peut prendre en charge une centaine de malades ou de blessés et dispose de dix lits de soins intensifs. Il fait actuellement route vers les Caraïbes.

D’autres pays ont cependant déjà commencé à déployer des navires auprès de leurs territoires d’outre-mer. C’est le cas des porte-hélicoptères français mais aussi du RFA Argus britannique qui est parti pour les Caraïbes il y a quelques jours. Des moyens navals néerlandais devraient également être déployés dans la zone. En Espagne, enfin, l’Operation Balmis vise à déployer des unités navales auprès de zones isolées afin d’apporter un soutien médical aux civils. Le bâtiment amphibie Galicia a déjà été envoyé dans l’enclave de Melilla sur la côte marocaine. Le porte-aéronefs Juan Carlos I pourrait prochainement se joindre à l’Opération Balmis.

Si tous ces efforts méritent amplement d’être salués, ils montrent cependant le manque de moyens navals majeurs au niveau européen. En l’absence de véritable navire-hôpital mis en oeuvre collectivement ou par les principales nations navales du continent, l’Europe est contrainte de déployer ses unités amphibies et aéronavales majeures dans des missions d’aide humanitaire interne. De quoi rassurer les populations européennes, certes, mais en réduisant la possibilité de réaliser des démonstrations de force. En attendant que les nouveaux porte-avions britanniques soient opérationnels, le Charles de Gaulle reste pour le moment le seul capital ship européen en mesure d’intervenir pour une véritable opération militaire. Ce qui limite la portée des mesures de réassurance que les pays européens peuvent réaliser au profit de leurs alliés.

Un Rafale F3 de la composante aerienne de la dissuasion francaise equipe dun missile ASMPA Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Des Rafale équipés de maquettes de missiles nucléaires ASMP-A participent régulièrement aux exercices Poker. La préservation des capacités de frappe nucléaire en toutes circonstances, même lors de crises graves, est essentielle à la crédibilité de la dissuasion nucléaire française

Ceci étant dit, alors que la France est l’un des pays les plus touchés par la pandémie de coronavirus, il a récemment été décidé de maintenir un important exercice de dissuasion nucléaire : un exercice Poker. Cet exercice –qui simule une frappe nucléaire– mobilise une part importante des Forces Aériennes Stratégiques (FAS) françaises. En l’occurrence, l’exercice qui était prévu depuis plusieurs semaines a mobilisé plusieurs avions de combat Rafale ainsi que cinq ravitailleurs. Un des nouveaux ravitailleurs Phénix, régulièrement déployé dans la lutte contre le coronavirus, y aurait d’ailleurs participé. Une démonstration de force qui contribue à garantir la sécurité de la France et de l’Europe alors que de plus en plus de moyens militaires conventionnels sont déployés dans le cadre de la crise sanitaire.

Conclusion

Pour le moment, il semble que deux dynamiques se dégagent dans le sillage de la pandémie de Covid-19. D’une part, certains acteurs internationaux y voient une opportunité d’imposer leurs vues politiques en profitant de la faiblesse supposée de leurs adversaires. Pour l’instant, toutefois, cela ne donne pas lieu à de nouveaux conflits ouverts, les différents protagonistes cherchant essentiellement à repousser les limites de leurs adversaires plutôt qu’à les franchir concrètement.

D’autre part, on constate également chez les principales puissances régionales et mondiales une tendance à protéger leurs acquis géostratégiques et à assurer leurs alliés et partenaires de leur puissance et de leur stabilité politique et militaire. Pour autant, les prochains mois et les prochaines années pourraient bien conduire à réévaluer certains paradigmes géopolitiques, notamment en fonction de l’évolution de l’épidémie aux Etats-Unis et de ses conséquences sur les élections présidentielles du mois de Novembre.

Northrop Grumman lance la production du nouveau missile AARGM-ER pour contrer les systèmes de déni d’accès

Le 31 mars, l’US Navy a annoncé que la production d’un premier lot de missiles Advanced Anti-Radiation Guided Missile – Extended Range (AARGM-ER) avait débuté chez Northrop Grumman. Ce missile air-sol est avant tout destiné à des missions antiradars (SEAD – Suppression des Défenses Aériennes Ennemies), et sera pour cela embarquer à bord des F/A-18E/F Super Hornet, EA-18G Growler et F-35A déployés à bord des porte-avions de l’US Navy. L’USAF devrait également recevoir cette nouvelle arme pour le remplacement de ses missiles HARM emportés par ses F-16, et devrait en généraliser l’usage à sa flotte de F-35A mais aussi à ses futurs F-15EX et ses bombardiers lourds B-21.

En théorie, le AGM-88G AARGM-ER est une évolution du AGM-88E AARGM. Développé au milieu des années 2000 selon une initiative conjointe de l’US Navy et de l’armée de l’air italienne, le AARGM était une évolution du célèbre missile antiradar AGM-88 HARM dont il reprenait la cellule mais remplaçait l’électronique et l’autodirecteur. Avec le AARGM-ER, c’est l’exact inverse qui a été fait : le système de guidage et l’électronique très récente de l’AARGM ont été récupérés et intégrés à bord d’une toute nouvelle cellule qui n’a plus rien à voir avec le HARM conçu au début des années 1980.

AGM 88E HARM AARGM Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’AGM-88E AARGM est la dernière version du missile à reprendre la cellule du HARM initial. Le missile étant incapable d’entrer à bord des soutes du F-35, un nouveau fuselage était nécessaire, conduisant à la création d’un nouveau missile de hautes performances.

Le fuselage beaucoup plus large du AARGM-ER permet d’y inclure un moteur-fusée beaucoup plus volumineux. Il semblerait qu’un moteur statoréacteur similaire à ce que l’on trouve sur le missile air-air européen METEOR a été un temps envisagé, mais le moteur-fusée solide offre un meilleur ratio coût/performances. La voilure caractéristique des HARM/AARGM a également été supprimée au profit d’un fuselage portant. Au final, l’AARGM-ER arrive à être à la fois plus volumineux et plus lourd tout en disposant d’un encombrement réduit, ce qui lui permettra d’être embarqué à bord des soutes des F-35A de l’USAF et des F-35C de l’US Navy.

Enfin, la charge utile de l’AARGM-ER est dérivée de celle de l’AARGM et intégrée dans une section modulaire, permettant d’envisager de développer de nouvelles variantes équipées de charges militaires différentes. Or, c’est exactement ce que l’USAF et l’US Navy envisagent de faire avec le programme Stand In Attack Weapon, ou SiAW. De base, l’AARGM-ER devrait être capable de voler à près de Mach 3, et pourrait sans doute frapper une cible distante de 150 à 200km. Pour lui permettre de détruire des sites radars qui auraient cessé d’émettre, son autodirecteur passif antiradar a été couplé à un radar actif millimétrique et à un système de navigation inertielle/GPS. Concrètement, comme l’AARGM avant lui, l’AARGM-ER est d’ores et déjà capable de frapper des cibles terrestres sur coordonnées ou par reconnaissance de cibles, même s’il ne s’agit pas de radars.

AARGM AARGM ER comparison Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Le AARGM-ER reprend l’autodirecteur et la conception de la charge utile du HARM/AARGM, mais dispose d’un tout nouveau fuselage et d’une nouvelle propulsion lui offrant une portée supérieure d’au moins 50%.

Avec le programme SiAW, l’USAF et l’US Navy pourrait chercher à étendre encore plus loin les capacités de frappe conventionnelle de l’AGM-88G AARGM-ER. En premier lieu, cela pourrait passer par l’adaptation d’une nouvelle charge utile dans la section modulaire. En effet, l’utilisation antiradar des AGM-88 est optimisée par une charge à fragmentation capable de cribler d’éclat les radars adverses mais aussi les PC antiaériens et les rampes de lancement de missiles surface-air elles-mêmes. Avec une nouvelle charge militaire pénétrante ou explosive, le SiAW pourrait être en mesure de traiter des cibles plus durcies, voire même des navires de combat légers. En second lieu, pour optimiser les capacités de frappe du SiAW, l’autodirecteur pourrait sans doute être modifié et simplifié. Le système de guidage passif permettant de cibler des radars et des émetteurs radio sera probablement supprimé, puisque la charge militaire ne sera plus adaptée pour contrer de tels équipements. Un autodirecteur radar actif plus puissant que celui embarqué pour le moment sur les AARGM-ER pourrait alors intégrer le SiAW afin de lui permettre de détecter ses cibles et de les engager de manière autonome sur un plus large périmètre géographique.

Pour l’USAF et l’US Navy, le couple AARGM-ER / SiAW pourrait former le cœur d’une nouvelle capacité anti-A2/AD. Les systèmes A2/AD (anti-accès) développés par la Russie et la Chine reposent aujourd’hui sur de nombreuses plateformes mobiles, qu’il s’agisse de systèmes de défense anti-aérienne, de missiles balistiques, de véhicules de lancement pour missiles antinavires ou pièces d’artillerie lourde. Pour contrer de tels équipements, l’USAF et l’US Navy pourrait se reposer sur des AARGM-ER et des SiAW embarqués dans les soutes de leurs F-35A et F-35C furtifs. L’USAF pourrait même intégrer une dizaine de ces missiles ultra-rapides à bord de ses futurs bombardiers B-21 qui seront alors à même d’ouvrir la voie à des raids de chasseurs-bombardiers conventionnels. Pour le moment, le programme SiAW découle avant tout d’une demande de l’USAF, mais l’US Navy pourrait y voir l’opportunité de développer une capacité air-sol et air-mer à partir de son missile antiradar de référence.

AARGM ER Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Extérieurement, l’AGM-88G AARGM-ER n’a plus grand chose à voir avec sa famille AGM-88 HARM. Son nouveau fuselage et ses performances en font au contraire le premier représentant d’une nouvelle famille de missiles modernes polyvalents.

A terme, les forces américaines disposeraient ainsi de trois types d’armements principaux pour contrer les systèmes A2/AD, en fonction de l’efficacité de ces derniers. Pour les systèmes les moins robustes, comme ceux que l’on retrouve actuellement en Iran ou en Corée du Nord, l’utilisation d’essaims de bombes planantes de type GBU-39 SDB-I ou GBU-53 SDB-II pourrait s’avérer suffisante, en complément de missiles HARM/AARGM. Face à des menaces plus importantes, les cibles d’opportunité pourront être traitées par des avions furtifs embarquant des AARGM-ER et le futur missile SiAW. Enfin, pour la destruction des sites de défense fixes, l’US Navy et l’USAF continueront d’avoir recours aux missiles de croisière lourd, même si ces derniers ne semblent plus être la priorité du Pentagone étant donné la multiplication des systèmes A2/AD mobiles.

Le programme AARGM-ER est ainsi un parfait exemple de développement incrémental bien maîtrisé dans une industrie de la défense américaine qui en manque cruellement. En récupérant les systèmes embarqués de l’AARGM, Northrop Grumman a été en mesure de développer un tout nouveau missile dans un enveloppe budgétaire réduite, et la conception modulaire de la charge utile et de l’autodirecteur permet d’envisager de nouvelles versions du missile requérant très peu de développement.

Tornado allemand equipe du missile HARM Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’Italie a participé à la conception du AARGM et a reçu ses premiers exemplaires en 2012. Pour ses Tornado, l’Allemagne a récemment racheté un lot de missiles AGM-88 AARGM. Depuis le retrait de service du missile ALARM, l’Europe ne dispose plus de capacité de production de missile SEAD, alors même que le METEOR pourrait constituer une excellente base de développement.

Dans le même temps, en Europe, forces aériennes et industriels peinent encore à développer des capacités similaires, alors même que les options ne manquent pas. En France, notamment, l’idée a déjà été évoquée de développer un autodirecteur antiradar adapté au missile air-sol AASM, tandis qu’une version antiradar du missile METEOR pourrait parfaitement répondre aux besoins français et européens au sens large. Mais avec de plus en plus de pays européens embarqués à bord du programme F-35 et un choix allemand qui semble confirmer le maintien d’une capacité SEAD d’origine américaine, l’apparition d’un concurrent européen au AARGM-ER semble de moins en moins probable.

Le commandant du porte-avions Theodore Roosevelt relevé de son commandement par Washington

Le secretaire à la Navy américain, Thomas Modly, a déclaré hiers jeudi 2 avril, que le commandant du porte-avions nucléaire USS Theodore Roosevelt, avait été relevé de son commandement suite à la publication dans les médias de la lettre qu’il avait envoyé à sa chaine hiérarchique, dans laquelle il demandait avec insistance le débarquement de son équipage à Guam alors que l’épidémie de Coronavirus Covid19 progressait très rapidement à son bord, et avait déjà contaminé plus de 200 membres d’équipage.

Cette décision aussi brutale que maladroite du commandement américain est justifiée par le fait que le commandant Brett Crozier, un officier aux états de service pourtant exemplaire, n’aurait pas respecté la chaine hiérarchique en laissant fuiter sa requête au San Francisco Chronicle, ce qui aurait donné une image dégradée et inexacte, selon les termes employées par Thomas Modly, des preoccupations de l’US Navy et du Pentagone pour la santé de ses militaires, ainsi que d’un défaut de compétences du gouvernement américain. Pour l’heure, on ignore ou le capitaine Crozier sera affecté, mais il ne fait aucun doute que suite à une telle mise à pied, sa carrière dans l’US Navy touchera rapidement à sa fin.

capitaine Brett Crozier USS Rooselvet Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
La capitaine de vaisseau Brett Crozier a été diplômé de l’académie navale d’Annapolis en 1992, et a servi comme commandant du navire amphibie USS Blue Ridge et sur le porte-avions Ronald Reagan

Il n’est guère difficile de déterminer d’ou sont venus les ordres dans cette triste affaire. Initialement, Thomas Modly, dans l’interview qu’il donna mardi à CNN suite à la publication de la lettre du capitaine Crozier dans la presse, semblait plutôt enclin à effectivement évacuer le porte-avions, et donc à répondre favorablement aux suppliques de l’officier commandant le navire, car c’est de cela qu’il s’agissait. Mais quelques heures plus tard, le secretaire à La Défense, Mark Esper, donna une réponse à l’opposée de celle de son subordonné, en rejetant en bloc la possibilité de quitter le vaisseau, considéré comme bien trop strategique pour ne pas conserver son équipage. Il est probable, donc, que c’est à Washington et à la Maison Blanche, bien davantage qu’au Pentagone, que la decision de sanctionner l’officier a été prise.

Certes, le respect de la chaine de commandement est un des fondements des armées, sans lequel la cohérence de l’action militaire pourrait s’étioler. Mais un officier commandant est également, et avant tout, responsable de la vie de ses personnels, et il est mis à ce poste par les autorités militaires et politiques pour justement évaluer au mieux la marche à suivre, en fonction de la situation et de l’appréciation des risques. Pour parvenir au poste de commandant d’un porte-avions nucléaire de l’US Navy, et avoir 4800 hommes et femmes sous son commandement, le capitaine Crozier a, selon toute vraisemblance, fait preuve d’une compétence et d’un dévouement sans faille au fil de sa carrière.

Guam naval base Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’USS Theodore Roosevelt est aujourd’hui à quai à la base navale de Guam. Il est commandé par le capitaine Dan Keeler, son commandant en second, dans l’attente de l’arrivée du contre amiral Carlos Sardiello, son précédant commandant

Or, pour qu’un officier de son rang, qui plus en est en poste de commandement, en vienne à diffuser une lettre aussi insistante dans la presse, c’est qu’il avait, selon toute vraisemblance, épuisé toutes les autres voies pour se faire entendre, et qu’il se heurtait à un mur. Il connaissait également très probablement les conséquences d’une tell démarche sur sa carrière. Pourtant, l’homme a pris la decision de le faire, sachant ce que cela lui en couterait. Il a privilégié la santé et la vie de nombreux de ses membres d’équipage à sa propre position. Cela en dit long sur l’homme et sur ses valeurs.

Cela en dit long également sur le manque de discernement de l’administration américaine aujourd’hui qui, d’un coté, accorde la grâce présidentielle à des militaires ayant eu des comportements et mené des actions en dehors de toutes les règles qui encadrent l’action de guerre des forces américaines, et qui, d’un autre coté, relève un commandant pour un motif pour le moins contestable. Il ne faut guère s’étonner, dans ces conditions, que les armées américaines peinent à recruter les profils requis. Surtout, cette décision apparaitra vite comme du pain béni pour la propagande chinoise ou russe, qui ne manquera certainement pas d’en exploiter l’image désastreuse, et de marquer leur différence dans ce domaine.

general de villiers Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
La situation en cours autour du Roosevelt n’est pas sans rappeler la demission du général de Villiers, alors chef d’Etat-Major des Armées françaises, peu de temps après l’investiture du président Macron.

Cet épisode pourrait avoir, pour l’administration Trump, les mêmes conséquences que le départ du Chef d’Etat-Major français, le général Pierre de Villiers, quelques jours à peine après l’investiture du nouveau président Emmanuel Macron, suite à une liberté de ton jugée inappropriée par l’exécutif national. Malgré une Loi de Programmation Militaire en rupture avec les précédentes, marquant le retour des investissements de Défense dans le Pays, et malgré le profil irréprochable du remplaçant du général de Villiers, le général Lecointre, cet épisode a profondément marqué les esprits dans les armées françaises, mais également dans le pays, créant une certaine défiance vis-à-vis du nouveau président, et marquant le premier échec de sa mandature.

Le désir de « faire un exemple », qui dirige parfois les decisions de l’exécutif, notamment dans les armées, est un exercice politique extrêmement complexe, surtout lorsqu’il s’agit d’un général ayant marqué les esprits par son engagement auprés des forces, ou un commandant de porte-avions ayant mis sa tête sur le billot pour préserver la santé de ses hommes. Une chose est certaine, pour beaucoup de militaires, cette decision laissera des traces pour longtemps.

L’US Navy commande 3 drones ravitailleurs MQ-25 Stingray supplémentaires à Boeing

Dans un communiqué de presse publié jeudi 2 avril, Boeing Defense annonçait que l’US Navy venait de l’option pour commander 3 nouveaux drones ravitailleurs embarqués MQ-25 Stingray, pour un montant de 84,7 m$. Cette commande s’inscrit dans la progression planifiée des capacités de la chaine de production, ainsi que dans le soutien des essais en cours. Au premier trimestre 2020, le programme MQ25 a effectué 30 heures de vol à plusieurs altitudes et plusieurs vitesses, conformément au déroulé du programme. Les appareils vont désormais recevoir le module de ravitaillement en vol et les vols de test pourront reprendre plus tard dans l’année. Contrairement aux chaines de production CH47 et V22, la production des MQ25 ne semble, pour l’heure, pas affectée par l’épidemie de coronavirus Covid19.

Sorti vainqueur en aout 2018 de la compétition qui l’opposait aux modèles de Northrop, Lockheed et General Atomics lors de la compétition Carrier Based Aerial Refueling System (CBARS), Boeing est en charge de developper le drone de ravitaillement en vol embarqué MQ-25 Stingay. Le prototype a effectué son premier vol le 19 septembre 2019. A terme, l’US Navy entend commander 72 drones pour un montant global de 13 Md$.

Le MQ-25 Stingray sur Meta-Défense : cliquez ici

De nouvelles étapes sont franchies pour le programme Gripen E/F qui poursuit son développement

En février dernier, nous avions consacré un important dossier au Gripen E/F, la dernière variante du JAS-39 Gripen développé par le suédois Saab à la toute fin de la Guerre froide. Pour Saab, l’enjeu du Gripen E/F était de taille : dans une cellule de chasseur léger ayant déjà fait ses preuves, l’avionneur suédois souhait intégrer les dernières avancées technologiques en matière de combat aérien. Missiles à très longue portée, liaisons de données discrètes, radars AESA, boule optronique et système de guerre électronique : rien n’était laissé au hasard.

Malheureusement, suite à plusieurs revers commerciaux, dont l’annulation de la commande suisse en 2014, le programme Gripen E/F a pris plusieurs années de retard, et l’avion n’est aujourd’hui vendu qu’au Brésil et en Suède, même si Saab fonde de gros espoirs sur le marché finlandais et canadien. Aujourd’hui, cependant, le programme de développement du nouveau Gripen semble enfin sur des rails solides. En effet, alors que le programme de tests du Gripen E avance à bonne vitesse, Saab a annoncé que la première découpe de tôle du Gripen F biplace venait d’avoir lieu. En attendant des nouvelles de Finlande et du Canada, il semble donc que le programme Gripen E/F se poursuive (enfin !) selon les prévisions.

Gripen JAS39 Saab Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Les anciennes variantes du Gripen, les JAS-39 A/B et C/D ont déjà été exportées en Hongrie, en République Tchèque, en Afrique du Sud et en Thaïlande. Face à de nouveaux concurrents, comme le Rafale ou le F-16V, le Gripen E/F peine cependant à s’imposer sur le marché internationnal.

Du côté des essais en vol, il semble que l’ouverture du domaine de vol du Gripen E soit pratiquement terminée. Depuis quelque temps, la plupart des essais en vol visent en effet à tester les capacités tactiques du système de combat ainsi que les différents capteurs de l’appareil. Pour rappel, le nouvel avion suédois embarque une suite de détection livrée conçue au Royaume-Uni et en Italie par les équipes de Leonardo. Cela comprend notamment :

  • Un radar à antenne électronique active (AESA) ES-05 Raven : disposé sur un plateau rotatif, ce radar combine la réactivité d’une antenne active au grand champ d’ouverture d’un radar mécanique.
  • Un IRST Skyward-G, un capteur de recherche et de suivi de cibles air-air fonctionnant dans les bandes infrarouges.
  • Un IFF Mod 5 intégré au bloc radar et doté d’antennes latérales. Cet interrogateur actif permet de différencier une cible amie d’une cible ennemie.

A cela se rajoute une suite de guerre électronique complète conçue directement par Saab et basée sur sa gamme AREXIS. Fonctionnant sur une large bande de fréquence, la suite de guerre électronique sera capable d’intégrer le nouveau pod de brouillage électronique que le Gripen E/F pourra embarquer sous voilure.

gripen 39 9 gripen e Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’avion de pré-série Gripen E 39-9 avec un pod de brouillage électronique sous l’aile droite, entre un missile de croisière et un missile air-air. Pour l’heure, la capacité de brouillage offensif présenté par Saab est unique en Europe, puisque ni le Rafale ni le Typhoon ne présente d’équipement similaire.

Pour le moment, la flotte d’avions d’essais comprend six appareils, qui ont totalisé 300h de vol, dont plus de la moitié dans la seule année écoulée. D’après Eddy de la Motte, directeur commercial du programme Gripen E/F chez Saab, les essais actuels se dérouleraient en avance sur le planning, ce qui ne permettra cependant pas de compenser les années de retard du programme. La véritable bonne nouvelle réside surtout dans le fait que la suite de capteurs de l’appareils aurait a priori des performances supérieures à ce qui est attendu.

Pour le moment, deux avions de série ont été livrés, un Suédois et un Brésilien. Les deux appareils sont actuellement utilisés en Suède par les équipes de test, mais l’appareil brésilien devrait être expédié dans l’année auprès du centre d’essais en vol brésilien. En attendant la fin des essais de validation du système d’arme, les premiers appareils de série devraient continuer à être progressivement livrés aux forces aériennes suédoises et brésiliennes, où l’appareil doit entrer en service vers 2023. Pour l’heure, la Flygvapnet suédoise a commandé 60 Gripen E monoplaces, tandis que la Força Aérea Brasileira a commandé 28 Gripen E et 8 Gripen F biplaces.

Gripen E bresil Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Essai en vol du premier Gripen E brésilien, toujours basé en Suède pour le moment. Pour le moment, les premiers appareils de série n’ont pas reçu l’intégralité des nouveaux équipements, dont l’IRST Skyward-G qui sera ajouté sur le nez de l’appareil

Cette version biplace est, d’ailleurs, conçue sous la responsabilité des équipes brésiliennes du Gripen Design & Development Network (GDDN) de l’avionneur brésilien Embraer, dans l’Etat de São Paulo. Près de 400 ingénieurs y conçoivent la variante biplace de l’appareil, mais aussi une partie du cockpit du Gripen E/F, notamment son large écran tactile principale, et son impliqués dans la construction du tronçon arrière du fuselage du Gripen E. De fait, l’investissement brésilien autour du Gripen F, dont seuls 8 appareils sont commandés pour le moment, est bien plus impressionnant que celui réalisé par les équipes de Saab en Suède pour le monoplace.

Si l’opération n’est sans doute pas rationnelle d’un point de vue industriel, elle permet néanmoins aux ingénieurs brésiliens de se former sur la conception d’avions de combat et de maintenir leurs compétences globales. Enfin, Saab et Embraer ont signé un accord permettant au Brésil de commercialiser le Gripen E/F sur le continent sud-américain et, en cas de contrat, d’assembler au Brésil les avions vendus. Si l’appareil a pu intéresser l’Argentine, avant que le Royaume-Uni (qui fournit une partie de l’avionique) n’y mette son veto, Embraer et Saab visent désormais le marché de remplacement des Kfir colombiens, où le Gripen sera surtout confronté au F-16, même si les avionneurs européens s’intéressent à ce petit marché.

Pour le moment, la principale actualité du Gripen en Amérique du Sud reste la première découpe de tôle du Gripen F biplace. Si cette dernière a eu lieu à l’usine historique de Linköping en Suède, c’est bien le travail des équipes brésilienne du GDDN qui ont été saluées à cette occasion. Pour Saab, même si uniquement 8 Gripen F ont été commandés pour le moment, le développement de cette version biplace est loin d’être anecdotique. L’avion pourra en effet être utilisé pour la formation des pilotes mais également pour mener des missions de combat particulièrement complexes. Alors que Saab propose à ses clients son pod de brouillage électronique, une version biplace optimisée pour les missions de guerre électronique pourrait parfaitement être dérivée du Gripen F conçu au Brésil.

Gripen E et GlobalEye de Saab Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Couplé au GlobalEye de détection avancé, le Gripen E est une solution de défense aérienne à la fois économique et performante. La version biplace Gripen F pourrait, à l’avenir, servir de base à des capacités offensives plus évoluées pour le petit chasseur de Saab.

Néanmoins, pour que le Gripen de nouvelle génération puisse étendre pleinement ses ailes, il lui faudra impérativement décrocher de nouveaux contrats à l’exportation. A l’heure actuelle, Saab est le seul compétiteur européen encore en lice au Canada et pourrait baser son offre sur 88 Gripen E/F, là où seuls 65 appareils devraient être proposés par Boeing et Lockheed Martin. Néanmoins, c’est sans doute en Finlande où le Gripen couplé à l’avion de détection avancé GlobalEye a encore le plus de chances de s’imposer face à la concurrence.

Des hélicoptères de combat AH-64E Apache s’essaient à l’attaque maritime dans le Golfe Persique

Il y a quelques jours, nous avons évoqué les essais menés conjointement dans le Golfe Persique par l’US Navy et l’US Air Force visant à démontrer les capacités d’attaque maritime de l’avion gunship AC-130. Plus récemment, l’US Navy a communiqué au sujet d’essais similaires menés en coopération avec l’US Army et ses hélicoptères AH-64E Apache.

Encore une fois, ces démonstrations menées directement par les unités déployées dans le Golfe Persique servent avant tout à contrer une menace bien réelle. En effet, les essaims de petits bateaux en provenance d’Iran représentent aujourd’hui un danger pour la navigation civile, les déploiements américains et les intérêts pétroliers des pays voisins, notamment ceux des Saoudiens. Qu’il s’agisse de barges de débarquement, de mouilleurs de mines ou de navires d’attaque suicide téléopérés, contrer toutes ces menaces demande des moyens réactifs et mobiles déployant un grand nombre d’armes légères.

ESB Apache Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’ESB-3 Lewis B. Puller vu dans le Golfe Persique en mars 2020 avec des hélicoptères Apache et Balckhawk à son bord (Photo: U.S. Army Spc. Cody Rich)

De manière assez logique, la démonstration a donc été effectuée à l’aide d’AH-64E Apache Guardian déployés à bord de l’USS Lewis B. Puller. Portant le numéro de coque ESB-3, le Lewis B. Puller est un Expeditionnary Sea Base, ou base navale mobile. Avec un déplacement de près de 80.000t à pleine charge et une longueur de 233m, les ESB sont les plus lourds navires de l’US Navy après les porte-avions. Pour autant, il ne s’agit pas de bâtiments de combat à proprement parler. Conçus à partir d’une coque de pétrolier, les cinq bâtiments de ce type sont avant tout destinés à soutenir les opérations asymétriques sur de longues durées.

Au milieu des années 2000, l’US Navy a en effet cherché à concevoir des navires de fort tonnage, simples et économiques. Prépositionnés au Moyen-Orient en dans le Pacifique, ils doivent être capables de soutenir la logistique lourde de certaines opérations de basse intensité : lutte anti-terrorisme, guerre des mines, lutte anti-piraterie, protection littorale, etc. Cinq navires ont donc été commandés permettant de libérer autant de porte-hélicoptères et de navires amphibies pour des opérations de plus haute intensité. Les deux premiers, le Montford Point et le John Glenn, sont des docks de transfert mobiles optimisés pour le soutien des opérations amphibies de l’US Marines Corps. Les trois suivants, dont le Lewis B. Puller est le premier exemplaire, ne disposent pas de barges de débarquement mais sont équipés d’un large pont d’envol et d’un hangar capable d’accommoder jusqu’à trois hélicoptères lourds CH-53 ou autant de convertibles V-22. Spécialisés dans le support des opérations spéciales, ils peuvent bien entendu mettre en œuvre des hélicoptères légers comme le MH-60 Blackhawk ou des hélicoptères d’attaque AH-64 Apache.

AH 64E APACHE GUARDIAN e1585834642122 Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Extérieurement, le AH-64E ressemble énormément au AH-64D. Il est cependant doté d’une avionique modernisée, de moteurs plus puissants et de capacités navales renforcées

La variante AH-64E Apache Guardian, quant à elle, est l’une des versions les plus récentes du célèbre hélicoptère de combat. Dérivé du AH-64D Apache Longbow, le Guardian a été modifié pour faciliter ses opérations navales. Son radar APG-78 Longbow a notamment été modernisé pour permettre son fonctionnement maritime, y compris la désignation de petites cibles navales rapides au profit de missiles AGM-114 Hellfire. Leur efficacité contre des cibles navales rapides est notamment largement exploitée par certains clients export de l’appareil, comme Taïwan.

Comme pour les essais menés avec l’USAF il y a quelques semaines, la désignation des cibles a été faite par le biais de navires de patrouille légers de classe Cyclone, exclusivement déployés au Moyen-Orient par l’US Navy. Un destroyer de classe Arleigh Burke, le USS Paul Hamilton, aurait également pris part à cet exercice conjoint. Pour le moment, aucun détail n’a été dévoilé sur les frappes en elles-mêmes, même s’il apparaît logique que les AH-64E ont probablement utilisé leur canon de 30mm et leurs missiles Hellfire. L’utilisation couplée d’un bâtiment ESB spécialisé dans la conduite d’opérations aéronavales asymétriques et d’une variante de l’Apache optimisée pour le combat naval semble donc parfaitement logique, et s’inscrit dans la logique de développement des capacités de combat multi-domaine des forces armées américaines.

USS Lewis B. Puller ESB 3 at Naval Station Norfolk on 20 April 2016 Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’USS Lewis B. Puller à Norfolk en 2016. Contrairement aux deux premiers ESD de la classe Montford Point, les trois ESB ne sont pas semi-submersibles et ne mettent pas en oeuvre de grosses barges de débarquement. Ils disposent cependant d’un large pont d’envol et se prêtent très bien aux opérations spéciales et à la guerre des mines.

Depuis quelques années, le Pentagone cherche à renforcer les capacités de combat croisé entre les différentes branches des forces armées américaines. Chaque force se doit en effet de soutenir les autres et de pouvoir prolonger dans son domaine de référence un combat initialement engagé dans un autre. En cela, le contexte des opérations amphibies au Moyen-Orient constitue un excellent laboratoire pour évaluer les différents modes d’action qui, demain, pourront servir dans le Pacifique. Dans le Golfe Persique, des unités terrestres surveillées et engagées par les avions de combat de l’USAF peuvent rapidement embarquer à bord de vedettes rapides ou de barges de débarquement, devenant alors une menace prioritaire pour l’US Navy. En cas de débarquement sur la rive Ouest du Golfe, les unités iraniennes seront alors engagées en priorité par l’US Army et les troupes locales.

Tout au long de leur attaque amphibie, les unités adverses pourront cependant être engagées à la fois par les bombardiers de l’Air Force et par l’artillerie de l’Army et de la Navy, sans oublier les Marines qui disposent de capacités d’action globales dans ce type de situation. La coordination entre les différentes branches armées américaines et leurs alliés est donc impérative afin d’offrir une défense efficace, fluide et réactive. Demain, la numérisation du champ de bataille offrira la possibilité de réaliser des opérations multidomaines parfaitement coordonnées.

USS Montford Point T MLP 1 and USNS Bob Hope T AKR 300 with LCAC in October 2014 Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Contrairement à la sous-classe Lewis B. Puller, les deux premiers bâtiments de la classe Montford Point restent considérés comme des navires auxiliaires, avec une désignation USNS plutôt que USS. Ils servent principalement de plateformes de transbordement entre des navires logistiques et les bases à terre, par le biais de leurs engins de débarquement sur coussin d’air LCAC.

Or, une partie des nouveaux systèmes de communication et de combat info-valorisé ont déjà commencé à être déployés sur les équipements les plus récents des forces américaines et de leurs alliés. Ainsi, les AH-64E sont déjà en mesure de prendre le contrôle à distance de drones aériens, et disposent de moyens de communication tactiques particulièrement avancés. Dans les prochains mois, des essais coordonnés entre Navy, Army, Air Force et Marines devraient donc se poursuivre et prendre de plus en plus d’ampleur.

A terme, l’objectif est donc de permettre à l’ensemble des moyens disponibles de travailler conjointement afin de mettre en déroute une menace commune à large échelle. Dans le Golfe Persique, cela devrait impliquer des bâtiments de surface, hélicoptères, avions de patrouille, chasseurs-bombardiers, unités d’artillerie, etc. Une fois maîtrisées, de telles opérations conjointes pourront être envisagées très sérieusement sur des théâtres d’opération bien plus vaste, notamment en Asie-Pacifique, où la coordination avec les avions et navires logistiques, les unités de renseignements et les moyens de frappe lourds sera encore plus cruciale.

Etape par étape, les forces armées américaines semblent donc faire évoluer leur doctrine opérationnelle, qui vise à contrer les systèmes A2/AD anti-accès mis en place par Téhéran, à petite échelle, mais surtout par la Russie et par la Chine. Cela passe par un véritable retour aux sources de la part des différentes branches armées qui se focalisent à nouveau sur leur cœur de métier, la coordination entre les différentes forces étant alors essentielle pour optimiser l’impact tactique et stratégique des différentes manœuvres conjointes.

Pour remplacer ses avions d’entrainement Saab 105, la Suède devrait utiliser des chasseurs Gripen C/D

En Suède, les petits jets biplace Saab 105 (également désignés Sk 60) constituent la principale flotte d’avions d’entrainement. Avec une moyenne d’âge dépassant 50 ans, ces bimoteurs sont aujourd’hui en fin de vie et devraient être retirés du service vers 2025. Pour la première fois, la Flygvapnet envisage donc de remplacer son jet d’entrainement par un avion turbopropulsé pour la phase d’entrainement initial, tandis que la formation avancée sera effectuée directement sur des avions de combat Gripen ! Une situation inédite qui ne devrait toutefois durer que quelques années.

De toutes les grandes forces aériennes européennes, la Flygvapnet suédoise est sans doute celle qui possède le cursus d’entrainement le plus original pour ses pilotes de chasse. Contrairement à la plupart des forces aériennes, les pilotes suédois choisissent très tôt sur quel type d’appareil ils souhaitent faire leur carrière : transport, chasse, hélicoptères. Ce modèle original offre un taux de succès particulièrement élevé pour les élèves-officiers, ce qui est particulièrement important dans un pays disposant d’une faible base démographique pour recruter ses meilleurs pilotes. Mieux encore, pour les futurs pilotes de chasse, l’ensemble des vols d’entrainement se déroulent sur un unique appareil, qui plus est un avion à réaction !

Saab 105 SK 60 Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Le Saab 105 est un bon appareil d’entrainement, fiable et robuste. Il commence cependant à accuser son âge et son retrait est attendu d’ici le milieu de la décennie.

Ainsi, dès leur premier vol, les apprentis pilotes de chasse et de transport sont mis aux commandes du Saab 105, à bord duquel ils effectueront leur formation basique de pilotes. Les pilotes de chasse y resteront pour l’ensemble de leur formation, l’avion étant adapté à l’entrainement tactique avancé en fin de cursus. Sur le papier, la configuration côte à côte de l’habitacle biplace du Saab 105 se prête assez bien à la formation initiale, tandis que les performance du biréacteur suffisent à l’entrainement au combat avancé.

Dans la plupart des autres pays, les pilotes se forment avant toute chose sur de petits avions à hélice, où ils apprennent les rudiments du pilotage, avant d’évoluer vers des appareils de plus en plus évolués, d’abord turbopropulsés puis, le plus souvent, dotés de moteurs à réaction. La multiplication des avions présente de nombreux avantages pour le pilote, qui maîtrise ainsi son métier indépendamment des automatismes que peut conférer un apprentissage sur appareil unique. Pour les forces aériennes, avoir plusieurs avions d’entrainement peut compliquer la logistique, mais c’est généralement compensé par le plus faible coût à l’heure de vol des avions à hélice d’entrainement initial.

La Suède fait donc figure d’exception. Fortement réduite en volume depuis la fin de la Guerre froide, la Flyvapnet dispose encore de nombreux stocks de pièces détachées pour ses Saab 105, dont une quarantaine reste en service aujourd’hui. Quitte à maintenir en vol une flotte d’avions à réaction pour l’entrainement avancé, il pouvait sembler logique de réaliser tout le cursus sur cet appareil, avec une utilisation intensive de simulateurs. Cependant, l’avion arrive aujourd’hui en fin de vie et le coût de sa maintenance s’envole. Au-delà des questions financières, l’avion ne sera également plus en mesure de permettre une transition aisée vers le nouveau Gripen E, attendu en escadrons à partir de 2023.

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Si le Gripen E/F sera très similaire au Gripen C/D actuel, il disposera d’une avionique de nouvelle génération. L’utilisation d’un Gripen D comme avion d’entrainement avancé avant une transition sur Gripen E est alors assez logique.

 Le retrait du Saab 105 est donc une décision logique, même si son remplacement soulève encore des questions. D’une part, il a été annoncé que la phase d’entrainement initial serait transférée dans les cinq années à venir vers un avion turbopropulsé, dont le modèle n’a pas été précisé. A priori, il s’agirait d’un avion capable d’assurer l’entrainement basique des pilotes, sans qu’il ne soit précisé si la configuration côte à côte restait privilégiée, ou si l’avion devrait également couvrir les premières phases de l’entrainement tactique. Le choix pourrait alors aussi bien se porter sur un avion de la classe du Grob G115/G120, utilisés notamment pour la formation des pilotes finlandais, allemands, français et canadiens, que sur un avion plus puissant de type PC-9 ou T-6 Texan II.

D’autre part, la décision aurait été prise, du moins dans un premier temps, de terminer la formation des pilotes de chasse directement sur des chasseurs. Des Gripen D, version biplace du Gripen C, seront a priori utilisés en priorité lors de cette phase de la formation, tandis que les premiers vols en solo pourront être réalisés directement sur des monoplaces Gripen C. Par la suite, les pilots diplômés seront transférés en escadrons opérationnels où ils voleront alors sur Gripen C ou bien sur la nouvelle variante de l’appareil, le Gripen E, doté d’un nouveau cockpit articulé autour d’un unique écran tactile grand format. Cette phase de la formation devrait concerner non seulement les pilotes suédois mais également les pilotes brésiliens de Gripen E/F et, possiblement, une partie des pilotes de Gripen C/D tchèques et hongrois.

T 7A Red Hawk Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Le T-7 Red Hawk a été conçu conjointement par Boeing et le Suédois Saab. L’avion pourrait parfaitement remplacer les Gripen D pour la formation avancée des pilotes, bien que cette hypothèse ne soit pas encore d’actualité.

Néanmoins, il a été précisé à nos confrères de Flight Global que cette situation ne devrait être que temporaire. Après tout, les Gripen biplaces restent une denrée rare et ils resteront sans doute très demandés en escadrons. De plus, seuls 60 Gripen E/F ont été commandés pour les forces suédoises pour le moment, et il est possible que le Gripen C/D vienne jouer les prolongations pendant quelques années face au retour de la menace russe dans la région.

A plus long terme, donc, la Flygvapnet envisage donc de disposer d’un avion d’entrainement avancé pour compléter la flotte d’avions d’entrainement turbopropulsés devant entrer en service dans les cinq prochaines années. Sur le plan politique et industriel, le choix le plus logique serait le T-7 Red Hawk récemment sélectionné par l’US Air Force. En effet, même si l’avion est commercialisé par Boeing, il s’agit d’une conception commune entre Boeing et le suédois SAAB, qui devrait produire une part importante de la cellule du T-7.

Saab Safari 1 Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Avion d’entrainement initial de conception ancienne, le Saab Safari n’est plus en service en Suède mais reste utilisé pour l’entrainement initial des pilote norvégiens et danois.

Le choix n’a cependant pas encore été fait, et n’interviendra probablement pas avant que les livraisons de Gripen E/F en escadron ne soient déjà bien avancées. Le choix du T-7 aurait l’avantage d’être cohérent avec la solution intérimaire à base de Gripen D, les deux avions partageant la même motorisation et le même gabarit général. D’autres solutions peut-être plus économiques pourraient aussi intéresser la Flygvapnet, comme le monoréacteur italien M-345, ou l’avion à hélice suisse PC-21, récemment choisi par l’Armée de l’Air française pour remplacer l’Alpha Jet sur une partie du cursus de formation des pilotes de chasse.

Au-delà des besoins propres à la Vlygvapnet suédoise, il sera peut-être possible d’ici là d’établir un rapprochement régional autour d’un futur avion d’entrainement avancé commun. Le T-7 Red Hawk pourrait ainsi parfaitement remplacer les Hawk 51/66 finlandais, et offrir à la Norvège ou au Danemark (qui ne disposent que d’avions d’entrainement basique) un avion d’entrainement avancé parfaitement compatible avec leur flotte de F-35, pour peu que la volonté politique autour d’un tel projet existe. Une chose est sûre, une telle convergence des moyens locaux aurait sans doute plus de chance de voir le jour si la Finlande sélectionne le Gripen E/F pour le renouvellement de sa force aérienne.

Les forces armées italiennes prêtent main forte dans la lutte contre le coronavirus

Si les yeux de l’Europe sont rivés sur les statistiques italiennes, c’est parce que la péninsule a été le premier pays du continent le plus touché par le coronavirus, suivit de près par l’Espagne et la France, selon les statistiques du Centre Européen de Prévention et de Contrôle des Maladies (ECDC). Son système de santé, affecté par dix ans de manque d’investissements, s’est retrouvé saturé dès la première semaine de forte augmentation des contagions (entre le 7 et le 11 mars, le nombre de cas recensés a doublé selon les données du Ministère de la Santé italien), révélant un manque de personnel, de lits, d’unités de soins intensifs, ainsi que de matériels indispensables tel que respirateurs artificiels, masques, gants et autres formes de protection contre la propagation du virus.

Dès le début de cette crise en Italie, le Ministre de la Défense italien, Lorenzo Guerini, a mis à disposition du personnel et du matériel des trois forces armées pour soutenir les efforts sanitaires dans les zones les plus affectées du nord du pays.  Mais c’est surtout à compter du début du confinement qu’une montée en puissance du déploiement de l’armée italienne s’est opérée. Coordonnées par le commandement opérationnel interarmées (Comando Operativo di vertice Interforze – COI), l’Armée de terre, l’Armée de l’air et la Marine sont aujourd’hui des piliers dans la lutte que mène l’Italie contre l’infection.

Restrictions des mouvements

Le 8 mars, le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, a signé un décret imposant un confinement dans les zones du nord de l’Italie les plus affectées par le coronavirus. Le 9 mars, au vu de la montée en puissance de la pandémie (le nombre total de cas détéctés passe de 7.375 à 9.172 en 24h), Conte a étendu ces mesures à tout le territoire italien. Ont  alors été déployés des militaires en soutien aux forces de l’ordre italiennes (la police et les gendarmes italiens – carabinieri) pour faire respecter ces restrictions. Le 28 mars, ce dispositif a été renforcé par le déploiement des fusiliers marins de la brigade de San Marco.

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Des militaires ont été déployés dès l’annonce du confinement en Italie en soutien aux forces de l’ordre italiennes pour faire respecter ces restrictions

Personnel et matériel hospitalier

Face à la pénurie de lits, d’unités de soins intensifs, de respirateurs artificiels et de désinfectant dans les hôpitaux italiens, Guerini a également vite mobilisé les forces armées sur plusieurs fronts.

Des médecins et des infirmiers/ères militaires ont été déployés dans les hôpitaux, essentiellement du nord au début, en soutien au personnel hospitalier dès fin février. Le 16 mars, alors que le nombre de cas recensés était déjà monté à 27.980, Guerini a également annoncé l’embauche de 120 médecins et 200 infirmiers/ères supplémentaires, en recrutement temporaire et exceptionnel d’une durée d’un an. Ce personnel est destiné à venir en aide au personnel militaire déjà en service dans les domaines de la biologie, de la chimie et de la physique.

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Vingt-cinq techniciens de l’armée italienne son affectés depuis mi-mars à l’entreprise SIARE Engineering pour la soutenir dans la production de 500 respirateurs artificiels par mois

En effet, les forces armées ont mis a disposition de la lutte contre cette crise sanitaire l’Etablissement Pharmaceutique Militaire de Florence. Selon le communiqué de presse du Ministère de la Défense, cet établissement “produira des désinfectants ainsi que des substances germicides et bactéricides qui sont actuellement difficiles à trouver sur le marché.” Produisant, dès le départ 1.000 litres de désinfectant par jour à destination du personnel de santé du pays, l’objectif de cet établissement est d’augmenter sa production pour faire face à la demande croissante.

De même, 25 techniciens de l’armée sont affectés depuis mi-mars à l’entreprise bolonaise SIARE Engineering, unique entreprise nationale à produire des respirateurs artificiels, pour la soutenir dans la production de 500 équipements par mois. En complément, l’Italie a également reçu des respirateurs de la part d’autres pays européens pour faire face à la demande aussi urgente que croissante.

Enfin, du personnel a été déployé pour la gestion d’hôpitaux de campagne, dont deux ont été assemblés en moins de trois jours par l’armée dans les villes de Crémone et Plaisance, et qui sont respectivement opérationnels depuis le 22 et le 24 mars.

Crema Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’armée italienne a contribué à la construction d’hôpitaux de campagne dans certaines provinces particulièrement affectées

Moyens de transport

Pour le transport de matériel hospitalier, l’Armée de terre a mis a disposition de la protection civile 14 camions (lourds et légers) et cinq hélicoptères AB412 du 2ème régiment Aves de la base de Lamezia Terme, en Calabre. Du même régiment seront bientôt également mis à disposition des hélicoptères NH90 et CH47, avec plus grande capacité de transport.

Esercito Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
L’armée italienne a mis à disposition des camions pour faciliter le transport de matériel sanitaire sur le territoire italien

Plus généralement, les forces armées ont déjà mis au point un plan afin de pourvoir aux besoins de transport à venir, à mesure que la pandémie se répand sur le territoire. Cela inclut 240 camions pour le transport de conteneurs, 38 hélicoptères de différentes capacités et cinq avions à voilure fixe répartis sur 12 bases différentes.

L’Armée de l’air, de son côté, contribue à l’effort interarmées en mettant à disposition des moyens de bio-confinement avec les C-130J de la 46ème brigade aérienne et les hélicoptères HH-101A du 15° Stormo (partie intégrante de la 1ère brigade d’opérations spéciales). Ceux-ci servent à transférer les malades des zones les plus touchées vers d’autres hôpitaux sur le territoire ou en Allemagne.

Aeronautica militare Actualités Défense | Avions Ravitailleurs | Construction aéronautique militaire
Un C-103J de l’aéronavale décolle pour Rome afin de transporter en toute urgence un nouveau-né en danger de mort, ainsi que l’ambulance qui l’a transporté de l’hôpital pédiatrique Bambino Gesù de Bari à l’avion

Le coronavirus dans les régions du sud : un rôle plus proéminent pour la Marine ?  

Selon les dernières statistiques publiées par le département de la protection civile italien, le sud de l’Italie resterait encore relativement faiblement atteint par le coronavirus, les foyers se concentrant aujourd’hui dans le nord (Lombardie, Piémont, Vénétie et Émilie-Romagne). Mais le gouvernement italien est inquiet. Nombre d’italiens du sud travaillent dans les régions du nord, cœur industriel de l’Italie, et les retours vers le sud à l’annonce du confinement dans le nord pourraient bien constituer une bombe à retardement. Hors ces régions se caractérisent par leur manque d’infrastructures sanitaires, et les efforts de l’armée se sont pour le moment focalisés dans les zones en crise au nord.

Notre article publié le 23 mars sur le déploiement du porte-hélicoptères amphibie (PHA) Tonnerre en Corse soulignait le rôle des moyens de la Marine Nationale française dans l’évacuation des malades du coronavirus. Si une solution semblable ne semble pas encore avoir été envisagée par Guerini pour le porte-avion Cavour ou le LHA Garibaldi, il est possible que de plus petites unités soient déployées dans les semaines à venir pour soutenir les régions du sud dans leur lutte contre le virus. En effet, celles-ci pourraient soulager les unités de l’aéronavale, déjà fortement engagées dans les zones nord, en facilitant le transport de matériel et de personnel médical.

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Le porte-avion de la Marine italienne, Cavour, pourrait servir d’hôpital flottant dans le cas où une dégradation de la situation sanitaire dans le sud de l’Italie mettrait à l’épreuve le système de santé italien dans son intégralité

Reste aussi à voir si la Marine italienne pourrait également décider de déployer le Cavour et le navire de ravitaillement Etna, deux unités conçues avec des infrastructures sanitaires à bord, afin de les transformer en hôpitaux flottants au large des côtes italiennes dans le cadre d’une saturation du système sanitaire des régions sud. À l’heure actuelle des armateurs de navires de croisière sont déjà prêts à mettre à disposition des navires (autrement à quai hors d’activité) dans un tel contexte, mais l’utilisation des moyens de la Marine italienne serait certainement préférable compte tenu de leur capacité à agir en temps de crise.