mercredi, décembre 3, 2025
Accueil Blog Page 326

Moscou ouvre les vannes technologiques vers Pékin

Le Président russe Vladimir Poutine a déclaré, lors de la conférence annuelle du Valdai Discussion Club, que la Russie allait aider la Chine à concevoir un système de surveillance anti-missiles stratégiques, domaine dans lequel les ingénieurs russes ont une expertise considérable. Cette annonce ouvre, cependant, de nombreuses implications dans le domaine de la coopération technologique entre la Russie et la Chine, Moscou ayant, jusqu’ici, toujours refusé de transférer des technologies sensibles, comme celles liées à La Défense anti-missile, vers Pékin.

La Russie dispose, depuis 1971, d’un système anti-missiles balistiques qui protège les grandes métropoles du pays, comme Moscou et Saint-Petersbourg, d’attaques par missile balistique de moyenne portée ou de portée intermédiaire. Le système A-35 déployé initialement a été remplacé dans les années 90 par le système A-135. Un nouveau système, le A-235, est en cours de déploiement, et sera capable d’intercepter des cibles distantes de plus de 1.500 km à une altitude de 800 km et une vitesse dépassant Mach 20. Il sera épaulé, à courte distance (au sens balistique) par le système S-500 qui entrera en service l’année prochaine. Outre la technologie missile, les système A-135 et A-235 reposent sur un radar anti balistique spécialisé, le Don-2N, qui n’a cessé d’être modernisé depuis les années 70.

Radar antibalistique DON 2N Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
L’imposante structure du radar DON-2N prés de Moscou

Le Don-2N est un système radar PESA UHF composé de 4 cotés trapézoïdaux longs de 130m et haut de 33m, offrant une surveillance à 360° sur 2000 km. Il est situé à proximité de Moscou, et son système d’information est controlé par un super calculateur Elbrus de fabrication russe. C’est cette technologie qui, semble-t-il, sera partagée avec la Chine, et l’on comprend bien à quel point elle s’avère critique pour Moscou. Car en ayant une vision approfondie du système anti-missiles qui protège Moscou, Saint-Petersbourg ou Irkoutsk, la Chine pourrait très bien developper des technologies pour s’y soustraire.

Cette déclaration est la conséquence directe du nouvel accord de coopération en matière de Défense signé entre les deux pays cet été, accord qui étend sensiblement, dans son contenu, la portée de cette coopération qui, jusqu’ici, était limitée à des échanges et des exportations de systèmes d’arme. Désormais, outre une coopération technologique très renforcée, les forces russes et chinoises procéderont régulièrement à des exercices bi ou multilatéraux, comme ce fut le cas lors de l’exercice Tzcentr 2019, ou lors du raid stratégique mené conjointement par des Tu-95 russes et des H-6 chinois en mer de Chine et autour du Japon, il y a deux mois.

A135 silos Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Les Silos de missiles anti-balistiques du système A-135 qui protège aujourd’hui Moscou

Cette collaboration renforcée peut rapidement s’avérer problématique pour l’occident, et pour l’Europe. En effet, aujourd’hui, les deux pays ont développé des compétences de haut niveau dans certains domaines, mais ont des défaillances critiques d’en d’autres, laissant une marge technologique confortable à l’occident pour pallier l’écart numérique de force par son avance technologique homogène. Or, si la Chine, ses capacités en matière de technologie numérique et digitale et sa puissance industrielle et économique, venait à collaborer de manière très étroite avec la Russie, qui dispose de savoir-faites uniques en matière de moteur d’aéronefs, de blindage et de missiles, et d’importantes réserves de matière première, l’avantage technologique mais également économique de l’occident pourrait rapidement s’étioler, pour ne laisser place qu’à un rapport de force numérique défavorable ….

Il semble désormais urgent pour les européens de trouver une posture permettant de renouer un dialogue constructif avec Moscou, tant que la population russe continue de se percevoir plus européenne qu’asiatique, de sorte à redéfinir un contrat d’entente et de collaboration avec la Russie. Faute de quoi, le retour à une opposition de bloc semble se dessiner rapidement. Cette nouvelle posture ne peut passer que par un important renforcement des capacités de Défense des pays européens, condition indispensable pour renouer un dialogue constructif avec le Kremlin sans interférence de Washington, tout en laissant à ce dernier l’opportunité de concentrer ses moyens afin de contenir la puissance chinoise. Plutôt que de se demander comment résoudre l’équation du double-front, il serait peut-être préférable d’étudier celle qui permettrait à la Russie de revenir vers l’Europe ?

L’US Air Force confirme son changement de stratégie industrielle

Will Roper, le Directeur des acquisitions et nouvel homme fort de l’US Air Force, a semble-t-il eu gain de cause en ce qui concerne sa vision des futurs programmes industriels aéronautiques américains. Le 2 octobre, il a nommé le Colonel Dale White, jusqu’ici directeur des programmes de surveillance, renseignement, reconnaissance et opérations spéciales, au nouveau poste de Program Executive Office for Advanced Aircraft, spécialement créé à cet effet.

A ce poste, le Colonel White aura pour fonction de transformer le fonctionnement actuel des programmes d’acquisition et de developpement de l’US Air Force, basés sur des compétitions entre industriels et des contrats à très longs termes, comme le F35, vers une gestion en séries plus réduites, plus récurrentes et plus spécialisées, empruntant aux développements logiciels ses paradigmes de gestion de projet comme Agile. En ligne de mire, le developpement d’une nouvelle « Century series » d’appareils pour l’US Air Force, qui permettrait de concevoir des appareils spécialisés et performants, avec une maitrise des couts et des risques ventilée sur l’ensemble des programmes, et une meilleure répartition des travaux dans la BITD américaine.

Mieux répartir les travaux pour préserver la BITD

Cette dernière notion fait clairement référence à la situation difficile que traverse aujourd’hui Boeing suite au choix de Lockheed-Martin pour les programmes F-22 et F-35 de l’US Air Force, ne laissant au géant de Seattle que peu d’opportunités pour developper de nouvelles technologies et de nouveaux concepts, et risquant même de lui faire perdre une partie de ses savoir-faire dans ce domaine critique, au risque de laisser à Lockheed un monopole jugé comme problématique.

F22 Raptor Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
le programme Next Generation Air Dominance doit renforcer les capacités de défense aérienne de l’USAF qui ne dispose que de 182 F22 Raptors dédiés à cette mission aujourd’hui

Le parallèle avec la situation en Europe est flagrant. Ainsi, les européens, qui veulent eux aussi préserver leurs acquis et savoir-faire industriels dans le domaine aéronautique, se dirigent vers le developpement de deux nouveaux appareils, le SCAF rassemblant France, Allemagne et Espagne, et le Tempest qui rassemble la Grande-Bretagne, l’Italie et la Suède. Mais là ou Will Roper veut developper des séries spécialisées plus courtes, tant pour disposer d’appareils plus performants dans leurs missions car conçus pour, que pour mieux répartir les travaux entre industriels, les Européens restent enfermés dans le concept de l’appareil multi-fonction et les programmes à très longue échéance, menant à la conception de deux appareils qui seront aussi similaires que le sont le Rafale et le Typhoon, et abandonnant des pans entiers de marché aux industries américaines ou asiatiques.

L’exemple des frégates FREMM françaises est éclairant

Et de fait, le calcul des européens est tronqué par une mauvaise appréciation des couts des programmes, et l’ambition de toujours faire « au mieux pour moins cher ». C’est cette doctrine qui ramena la flotte de FREMM françaises de 17 unités pour 8 Md€, à 8 unités pour … 8,5 Md€. En effet, le cout industriel n’est pas lié à la production d’unité, mais principalement à la masse salariale active. Or Naval Group, à l’époque DCNS, s’était dimensionné pour la production de 17 FREMM au rythme de 1 unité tous les 7 mois pour répondre au cahier des charges du programme FREMM. Lorsque les arbitrages budgétaires à court terme firent baisser le nombre de navires, cette masse salariale, elle, restait, et la société d’Etat qu’est Naval Group ne pouvait la réduire rapidement. De fait, sur la même durée, les arsenaux de Lorient produisirent 6 FREMM, plus deux FREDA en construction, au lieu de 17, pour un cout global équivalent … Quand à la Marine Nationale, elle dut commander 5 FDI Belh@rra pour remplacer 5 FREMM annulées, car les bureaux d’étude de Naval Group et de Thales se retrouvaient en sous-activité, ce qui ajouta 4 Md€ à la note, pour des navires plus légers et moins bien armés que les FREMM, même s’ils disposent du radar Sea Fire et d’un système digital évolué.

La Marine Nationale disposera de 6 FREMM et 2 FREMM DA Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le programme FREMM a été un exemple flagrant des conséquences de mauvais arbitrages et d’un manque de perspectives économiques et budgétaires à moyen terme

Mais le désastre ne s’arrête pas là, puisque les FREMM de Naval Group, au lieu de pouvoir être proposées autour de 500 m€ l’unité sur le marché international, ont vu leur prix croitre au delà de 750 m€, réduisant le marché adressable et le rapport performances-prix des navires. C’est d’ailleurs un argument comparable qui fut mis en avant par Naval Group pour justifier du developpement des FDI, moins chères et mieux adaptées que des FREMM (à 750 m€) aux compétitions internationales… On trouve plusieurs exemples similaires au cours de 20 dernières années, concernant notamment l’hélicoptère Tigre qui est passé de 10 à 35 m€ en passant de 220 à 65 unités commandées, mais aussi le Rafale, le char Leclerc … Autant de systèmes qui, aujourd’hui, mériteraient d’être disponibles en plus grande quantité dans nos armées. Au total, depuis 2000, les annulations, reports et réductions de format des programmes de Défense auront engendrés une perte de prés de 20 Md€ dans le budget d’équipements des armées.

Vers une réduction du format de F35 dans l’US Air Force ?

Les positions et ambitions de Will Roper ne font pas que des heureux outre-atlantiques, et des voix s’élèvent déjà pour tenter de faire dérailler ce qui semble être l’initiative la plus pertinente de ces 40 deniers années en matière de politique industrielle de Défense en occident. La cause est simple : la Century série qu’il préconise viendra nécessairement éroder le format prévisionnel de F35A de l’US Air Force. En effet, avec l’apparition d’appareils plus spécialisés, donc plus performants dans leurs domaines et plus fiables, car ne nécessitant pas de devoir répondre à tous les scenarii, le F35A va rapidement se retrouver en compétition défavorable dans de nombreuses missions. A moins que l’US Air Force n’envisage de doubler son format global dans les prochaines années, il n’y aura pas assez de pilotes et personnels au sol pour justifier de 1750 F35A et 4 ou 5 avions de combat spécialisés en série de plus de 250 unités. De fait, le nombre de F35A commandés par l’US Air Force sera nécessairement appelé à diminuer.

F35A USAF Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
L’USAF pourrait devoir réduire le format de sa flotte de F35A pour accueillir les appareils de la nouvelle Century Series

Or, le programme F35 a été conçu pour être en mesure de se battre, non pas contre d’autres appareils et systèmes sol-air, mais contre des attaques politiques et industrielles. Pour ce faire, Lockheed-Martin a distillé les investissements et activités liées au programme dans un grand nombre d’Etats et de contés, choisis pour leurs poids politiques à Washington. En outre, si le programme F35 venait a être amputé de 500 appareils par l’USAF, les conséquences en terme de prix et d’image seraient très sensibles, et restreindraient les chances de l’appareil de continuer à s’imposer sur les compétitions internationales, entravant de fait, la main mise américaine sur La Défense de ses alliés. Il n’est pas étonnant de voir, dès lors, des personnalités politiques de tout bord s’émouvoir de l’initiative de Will Roper.

Conclusion

Mais le paramètre rarement pris en compte par les diverses analyses portant sur la nouvelle Century série, le F35 et même le SCAF, c’est le planning de developpement de ceux qui sont à l’origine de ces bouleversements, à savoir la Chine et la Russie. Car si cette dernière semble mettre l’accent aujourd’hui sur le Su-57 comme base de developpement de sa prochaine gamme de d’appareils lourds spécialisés, prenant en cela le relais du Su-27, la Chine, elle, est impliquée dans un programme par « petites séries à récurrence élevée » depuis prés de 30 ans. C’est grâce à cette approche que le pays est passé, en 30 ans, de la production d’appareils de 3eme génération copiés ou sous licence russe, au J-10, J15/16 et J20 ces 10 dernières années. En moyenne, un nouveau model d’avion de combat est présenté en Chine tous les 5 à 6 ans, et nous devrions voir, prochainement, le successeur du chasseur bombardier JH-7, un bombardier tactique de 5eme génération, faire son entrée sur la place publique.

PL15 et PL10 sur J20 Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
EN 30 ans, la Chine est parvenue a rattraper 60 années de developpement technologique en matière d’avions de chasse. Qu’en sera-il dans 20 ans ?

De fait, d’ici 2040 et l’entrée en service du SCAF et du Tempest, la Chine devrait disposer de 3 à 4 appareils de nouvelle génération, allant de l’intercepteur lourd au chasseur léger, en passant par le bombardier tactique, et entamera l’entrée en service de la génération suivante, en ayant accumulé des compétences techniques et tactiques très importantes au fil des années. On ne peut, dès lors, qu’espérer que le profond changement de paradigmes initié par Will Roper pour l’US Air Force, serve d’électrochoc au niveau européen, pour prendre la mesure du décalage qui existe entre les stratégies et doctrines appliquées, et celles mise en oeuvre par ses compétiteurs et possibles adversaires.

La Corée du Sud entame l’assemblage du prototype du K-FX

En 2001, les autorités sud-coréennes, en partenariat avec les autorités indonésiennes, établirent un protocole visant à developper un appareil de nouvelle génération de future locale à horizon 2030. Ce programme, le K-FX, qui mobilise 1200 ingénieurs depuis l’entame des travaux en 2001, est sur le point de franchir une étape stratégique, puisque l’assemblage du premier prototype va débuter avant la fin du mois d’octobre, avec un premier vol espéré pour 2021.

Bien que mouvementé, le programme K-FX montre la détermination de la Corée du Sud à developper sa propre défense via une industrie de Défense autonome et compétitive dans le domaine aéronautique, comme elle l’a fait dans le domaine naval et des armements terrestres. Appareil bimoteur de 13 tonnes à vide, et de 25 tonnes en charge, le K-FX sera un chasseur évoluant entre à la lisière de la 5ème génération, et destiné à remplacer, dans un premier temps, les F4 Phantom et F5 Tiger encore en service dans l’Armée de l’Air sud-Coréenne.

Il disposera d’une avionique de facture locale moderne, avec notamment un radar AESA, un IRST, une liaison de données et d’une fusion de données, à l’instar des avions de sa génération, et mettra en oeuvre des technologies de furtivité qui, selon la DAPA, amène la Surface Equivalent Radar de l’appareil autour de 0,5 m2. En outre, l’appareil sera économique, puisque son concepteur KAI vise un tarif Fly Away condition de 50 m$. Les forces aériennes sud-coréennes souhaitent acquérir 250 exemplaires de cet appareil, alors que son sort dans les forces aériennes indonésiennes est plus incertains, suite à de nouvelles négociations en court entre les deux pays. Le financement du programme, assuré à 80% par la Corée du Sud, est estimé à 15 Md$, et le premier lot d’appareils est attendu pour 2026 par les forces aériennes sud-coréennes.

KFX maquette Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Maquette du K-FX présentée par le constructeur KAI

Une fois cette appareil opérationnel, et s’il remplit ses objectifs, il sera en mesure d’attirer de nombreux acheteurs, en recherche d’un appareil de combat peu onéreux mais capable. En effet, l’appareil est conçu pour avoir un rayon d’action 50% supérieur à celui du F16, ainsi qu’une capacité d’emport doublée vis-à-vis du même appareil. Selon le constructeur KAI et la DAPA, l’agence d’armement sud-coréenne, 78% des technologies clés du programme ont déjà été développées, incluant l’ensemble des technologies critiques. Le programme a en effet subit un assaut en règle de la part des occidentaux, que ce soit de la part des Etats-Unis qui firent leur possible pour l’enterrer au profit du F35, et de EADS qui se retira du programme lorsque, finalement, les autorités sud-coréennes décidèrent d’acquérir le F35 et non le Typhoon pour remplacer une partie de leurs appareils. En outre, les autorités US mirent leurs veto concernant 4 technologies critiques du programme, le radar AESA, l’IRST, la fusion de donnée et la liaison de données tactiques, toutes les 4 finalement développées par les ingénieurs coréens.

T50 Golden eagle Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
En amont du programme K-FX, l’industrie aéronautique sud-coréenne a conçu et produit l’avion d’entrainement et d’attaque T-50 Golden Eagle

Les choix des sud-coréens dans ce programme, identiques d’ailleurs à ceux des turques pour le programme T-FX, s’appuient sur des technologies matures et fiables, pour concevoir un appareil moderne mais représentant un gain important vis-à-vis de la flotte qu’il doit remplacer, tout en visant un prix de vente compatible avec ce que peuvent financer la majorité des Etats. Cette approche, qui fut longtemps celle de Dassault Aviation, lorsque l’entreprise développait les Mirage III/V, Etendard, Mirage F1 et Mirage 2000, risque fort de provoquer un basculement d’une partie significative des clients traditionnels de l’industrie de Défense européenne, et même américaine, vers des solutions alliants performances et prix, de sorte à ne pas sacrifier la quantité à une qualité excessive. Au delà des développements technologiques générationnels indispensables, comme le SCAF, la France, et l’Europe, pourrait être bien avisées de ne pas abandonner ce marché par une vision trop idéalisée de ce que doit être une force aérienne moderne…

La Corée du Nord a testé un nouveau SLBM, et cela change beaucoup de choses…

Le 2 octobre, les forces stratégiques nord-coréennes ont procédé au lancement d’un missile balistique de moyenne portée à partir d’une plate-forme navale, selon l’agence officielle nord-coréenne NKCA. Le missile aurait vu sa trajectoire modifiée afin « de ne pas menacer les pays de la zone » selon ce même communiqué. Ce test est intervenu à quelques jours de la rencontre entre les autorités américaines et nord coréennes, prévue pour le 5 octobre, et qui doit permettre la reprise du protocole de négociation au sujet d’un désarmement potentiel des capacités nucléaires offensives du pays.

Les autorités japonaises, qui ont vu un élément de ce missile tomber dans leur zone économique exclusive, ont déclaré avoir suivi le test du missile, qui a atteint une apogée à 900 km d’altitude, et estiment que le missile pourrait atteindre une portée maximum de 2500 km, mettant l’ensemble du territoire japonais, mais également l’Ile de Guam, à portée d’une attaque nord-coréenne. En revanche, si elles ont confirmé que le missile avait bien été lancé à partir d’une plate-forme navale, elles ne peuvent déterminer si le tir à eu lieu à partir d’un sous-marin, ou d’une plate-forme d’essais. La communauté internationale a vivement condamné ce test, qui vient en violation des résolutions du conseil de sécurité des Nations Unis. Mais, pour l’heure, ni le département d’Etat, ni le président Trump ne sont exprimés sur le sujet, ni n’ont indiqué si cet essais remettait en question la rencontre bilatérale du 5 octobre.

Le leader nord coreen Kim Jung un Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Les récents essais de missiles balistiques nord-coréen donnent à Kim Jong Un un assise confortable à la table des négociations

La Corée du Nord a procédé à plusieurs lancements de missiles balistiques depuis 2 mois, sans que l’on ne sache vraiment quels objectifs politiques étaient visés par l’homme fort de Pyongyang. Selon les informations transmises par NKCA, et le cliché du tir qui les accompagnaient, il semble bien que le missile, identifié comme un Pukkuksong-3, ait été tiré à partir d’un lanceur sous-marin. Il constitue, dès lors, un important bon capacitaire vis-à-vis du Pukkuksong-1 ou NK-11, le précédent missile balistique lancé de sous-marin (SLBM) de Corée du nord, dont le dernier test remonte à 2017, et dont la portée projetée ne dépassait pas les 1300 km. En outre, le Pukkuksong-1 avait enregistré de nombreux échecs lors de sa campagne d’essais de 12 lancements d’octobre 2014 à février 2015.

Avec ce nouvel essai, et ce nouveau missile, Kim Jong Un se met, dès lors, en position de force face aux Etats-Unis, ainsi que face à la Corée du Sud au Japon, dans les négociations qui doivent avoir lieux. Il n’y a, aujourd’hui, que 7 pays disposant de la capacité de mettre en oeuvre des SLBM, dont les 5 membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unis, l’Inde et la Corée du Nord. Même si les sous-marins nords coréens sont réputés obsolètes et très bruyants, le fait de disposer d’une telle capacité fait peser une menace de riposte très importantes sur un agresseur éventuel, fut-il légitime, en rendant plus improbable le succès de stratégies de frappes préventives destinées à décapiter l’Etat et les moyens de ripostes du pays.

Visit KJU SSK Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
EN juillet 2019, Kim Jong Un visitait le chantier naval qui construisait ce qui était présenté comme un nouveau sous-marin lanceur d’engins sur la base d’un sous-marin de type Romeo soviétique datant des années 50

De fait, entre les essais de missiles à trajectoire semi-balistiques de ces derniers mois, et celui du missile Pukkuksong-3, Kim Jong Un a clairement positionné les capacités nucléaires nord-coréennes, tant dans l’esprit des négociateurs américaines que des opinions publiques. A voir, désormais, comment il compte « valoriser » cela, au travers d’une négociation très ambitieuse, ou au travers d’une opposition militaire, comme ces 70 dernières années.

Les armées norvégiennes ne peuvent pas défendre le pays, selon son chef d’Etat-Major

Selon le général Rune Jakobson, commandant opérationnel des forces norvégiennes, le format actuel de ses forces serait insuffisant pour défendre le pays dans l’attente de renforts venus de l’OTAN. En outre, le pays serait incapable de conserver une posture défensive minimale tout en remplissant ses engagements opérationnels vis-à-vis de l’OTAN. Il faudrait, selon ce général de division de 58 ans, une deuxième brigade aux forces terrestres pour atteindre ce format minimum. Bien que disposant de forces aériennes et navales solides, avec un format prévu de 52 F-35A et 5 P8 Poseidon pour la première, et de 6 sous-marins et 4 frégates pour la secondes, les forces norvégiennes sont très restreintes, avec seulement 23.500 personnels d’active, conscrits y compris, et 40.000 réservistes. Les forces terrestres, rassemblent 7.830 personnes, parmi lesquels seuls 3.600 sont des militaires, principalement rassemblés dans une unique brigade, la brigade « Nord ».

Ce n’est pas faute de budget, la petite armée norvégienne ayant un budget annuel dépassant de 7,5 Md$, et est un des rares pays du continent à dépenser plus de 2% de son PIB dans sa Défense. D’ailleurs, les militaires norvégiens sont plutôt très bien équipés. A titre de comparaison, les forces armées belges, qui rassemblent 24.000 personnes, n’ont, elles, qu’un budget de 4,9 Md$. Et cela se ressent dans le nombre d’équipements en service ou en commande : 36 F35A pour la Belgique, 52 pour la Norvège ; 2 frégates pour la Belgique, 4 frégates (5 construites) modernes pour la Norvège ; aucun sous-marins pour la Belgique, 4 pour la Norvège (6 aujourd’hui) ; aucun char de combat pour la Belgique, 52 Leopard 2 A4NO pour la Norvège (36 en service) ….

Atterrissage premier F35 norvegien Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
La Norvège est le seul pays Européen qui verra sa flotte de chasse augmenter en passant du F16 au F35, passant de 46 F16 opérationnels (72 initialement) à 52 F35

En Norvège, comme pour la majorité des pays européens aujourd’hui, le principal problème repose sur le recrutement des personnels. Dans un pays ou le salaire moyen dépasse les 60.000 $ par an, et qui connait un taux de chômage très bas depuis plusieurs décennies, il est très difficile de faire naitre la vocation pour le métier des armes, par nature contraignant et limité en matière de perspectives salariales. En outre, Oslo ne déroge pas aux autres capitales européennes, en s’étant persuadée de la fin des conflits entre états avec la fin de la guerre froide, et en renforçant l’idée qu’une telle hypothèse était impossible dans la population. Enfin, et là encore, comme beaucoup de pays européens, la Norvège a accepté de faire reposer, en grande partie, la sécurité du pays sur sa seule appartenance à l’OTAN, et plus précisément, sur la suprématie militaire des Etats-Unis dans le Monde.

Or, en quelques années seulement, nombre de ces certitudes se sont évanouies, avec le renforcement rapide de la puissance militaire russe, l’apparition d’une hypothèse de double-front avec la Chine pour les Etats-Unis, et même le constat alarmant concernant les capacités effectives du Sea Lift Command, la force de transport navale américaine, dont la moyenne d’âge des navires dépasse aujourd’hui les 50 ans. En ajoutant à cela l’apparition de nouveaux systèmes d’arme, comme les missiles hypersoniques Tzirkon et Kinzhal ou les torpilles stratégiques Poseidon, et la puissance grandissante et menaçante de la Chine dans le Pacifique qui menace potentiellement les Etats-Unis et nécessite une concentration de moyens plus importante dans cette zone, le renfort potentiel de forces américaines pour répondre à une offensive russe en Europe se trouve, si pas annulé, en tout cas sensiblement réduit, et retardé dans le temps.

Leopard 2 norvege Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Contrairement à beaucoup de pays, la Norvège à conserver une force blindée lourde, avec un régiment de Leopard 2 A4NO

De fait, comme beaucoup de pays d’Europe du nord et de l’est, la Norvège en vient à reconsidérer ses options défensives, et notamment le besoin d’augmenter ses propres forces, de sorte à augmenter la durée de la résistance potentielle norvégienne, dans l’attente d’un renforcement américain ou européen. Mais, s’il est relativement simple et rapide de sortir le carnet de chèque pour acquérir de nouveaux équipements, il est beaucoup plus délicat, et long, d’augmenter les effectifs d’une force armée, qui a besoin de structure, d’encadrement, d’une pyramide des âges et des compétences équilibrées, et surtout de volontaires. Tout cela prendra du temps, et nécessite des moyens au delà des crédits consacrés au ministère des armées, car il s’agit de créer dans la population, à nouveau, l’élan qui amène certains à vouloir servir et protéger le pays.

En ce sens, la Norvège, comme la Suède avant elle, de part leur population réduite et leur exposition face à la Russie, apparaissent comme précurseurs de ce qui devra être fait dans toute l’Europe, y compris en Allemagne et en France, afin de re-capitaliser les défenses de chacun, et par là même, élever le potentiel dissuasif de l’ensemble, avec, et surtout sans, les Etats-Unis en arrière garde. La sécurité et la paix, sur l’ensemble du continent, dépendra très certainement de la clairvoyance des élites politiques à s’emparer de ce problème avant qu’il ne soit trop tard, et que les évènements commandent d’eux mêmes.

Le premier sous-marin « Improved Kilo » destiné à la flotte de la Mer Noire débute ses essais à la mer

La classe de sous-marins russes à propulsion conventionnelle identifiée comme « Kilo » par l’OTAN, et qui rassemble les navires des projets 877 et 636, est aujourd’hui la plus importante classe de sous-marins en service au monde, avec 60 unités en service, talonnée de peu par les Type 209 de l’Allemand TKMS. Mais là ou le modèle allemand est en fin de vie, et en perte de vitesse, les nouveaux submersibles Kilo du programme 636.1 ou 636.3 continuent d’être construits, et proposés sur les marchés internationaux. Ainsi, sur les 10 dernières années, 14 sous-marins « Improved Kilo », sont entrés en service, au Vietnam (6×636.1), en Algérie (2x636M) et en Russie (6×636.3) Fiables, efficaces, silencieux et bien armés, les 636 sont, qui plus est, économiques, et adaptés pour un usage prés des côtes ou en mer fermée. C’est pourquoi, en 2016, l’Etat-Major de la Marine Russe commanda la construction de 6 nouvelles unités destinées à renforcer la flotte de la Mer Noire.

La construction de la première unité de cette nouvelle série, le Petropavlovsk-Kamchatsky, a été entamée en juillet 2017, et le navire a été lancé en mars 2019, à peine 20 mois après la pose de la quille, révélant au passage que certains chantiers navals russes, comme les chantiers navals de l’Amirauté à Saint-Petersbourg qui construisent le Petropavlovsk-Kamchatsky, sont à la fois performants et rapides. Selon l’agence Tass, le nouveau submersible ferait aujourd’hui route vers le Golfe de Finlande pour entamer ses essais à la mer, et devrait, selon le CEO des chantiers navals de l’Amirauté, Alexander Buzakov, être admis au service avant la fin de l’année.

Kilo 636 submarine Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
14 sous-marins « Kilo » sont entrés en service depuis 2010, dont 8 pour des clients exports de la Russie

Les 6 exemplaires de cette nouvelle série devraient avoir rejoint la flotte de la Mer Noire avant la fin de 2022. Longs de 74 m pour une jauge en plongée de 4000 tonnes, les 636.3 emportent, en outre, 18 torpilles anti-sous-marines et anti-navires mis en oeuvres grâce à 6 tubes de 533mm, et 4 missiles anti-navires & croisière Kalibr PL mis en oeuvre dans 4 silos. Bien que ne disposant pas de propulsion anaérobies, ils peuvent parcourir plus de 400 nautiques en plongée à une vitesse de 3 noeuds, et rester immergés plus de 6 jours. Une fois sur batteries, ces submersibles sont réputés pour être très silencieux, et donc très difficiles à repérer par des moyens acoustiques passifs comme ceux utilisés par les avions de patrouille maritime P8 Poseidon américains.

De fait, avec 6 exemplaires en service dans la flotte de la mer Noire, renforcés de 6 frégates légères de la classe Grigorovich, la Marine Russe s’assure d’avoir, dès 2022, un avantage certain afin de prendre le contrôle de cette mer si besoin. En effet, les marines bulgares, roumaines, ukrainiennes et géorgiennes ne sont pas dimensionnées ni équipées pour y faire face, malgré la commande de 4 corvettes anti-sous-marines Gowind 2500 par la Roumanie. La marine Turque, quand à elle, concentre l’essentiel de ses moyens en Méditerranée orientale pour maintenir une posture opérationnelle face à la Grèce. Quand aux autres flottes de l’OTAN, elles sont contraintes par la convention de Montreux pour le franchissement du Bosphore, et ne peuvent, dès lors, prépositionner de moyens dans cette mer de manière substantielle.

LST Ivan Gren lors des tests a la mer Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le second navire d’assaut de la classe Ivan Grene de la Marine Russe sera affecté à la Flotte de la mer Noire, renforçant sensiblement les moyens de déplacement des forces russes sur ce théâtre

Ainsi, avec la main mise sur la mer Noire, la Russie s’assure de disposer d’importants moyens de deplacement de troupes sur tout le flanc oriental et sud de l’OTAN et de ses alliés, et de prévenir toute incursion navale qui tenterait de s’y opposer. A ce titre, le second navire d’assaut de la classe Ivan Grene, un LST de 6600 tonnes capable de mettre à terre 350 hommes et 13 chars de combat, qui pourtant pourrait paraitre bien peu à l’aise dans une mer fermée dont l’accès est controlée par un membre de l’OTAN (la Turquie), est en fait destiné à la flotte de la mer noire, et non à la flotte du nord, ou du Pacifique, comme on aurait pu s’y attendre. Il s’agit là d’un exemple caractérisant la stratégie russe actuelle, très pragmatique, et capable de faire de plusieurs faiblesses évidentes, une mer fermée controlée par un adversaire, une classe de LST aux faibles performances nautiques et une classe de frégates trop légères pour être véritablement hauturière, un avantage tactique et stratégique sur l’OTAN.

Le LCS Garbrielle Giffords dispose désormais de missiles anti-navires NSM

Peu de classes de navires n’ont été aussi contestées que les Littoral Combat Ships de l’US Navy. Initialement prévus pour remplacer les frégates O.H. Perry, les LCS devaient représenter la colonne vertébrale des capacités légères et côtières de l’US Navy, avec 55 bâtiments envisagés. Mais au fil des livraisons des deux modèles, la classe Freedom de Lockheed-Martin et Fincantieri, et la classe Independance de Austral, les espoirs de voir ces navires, et leur concept sous-jacent, atteindre un niveau d’efficacité acceptable s’est évanouie, et avec lui, 20 des LCS commandés qui ont transformés en urgence en 20 frégates polyvalentes du programme FFG/X. De fait, aujourd’hui, sur les 19 LCS en service, 4 sont réservés exclusivement aux tests de l’US Navy, et 6 sont dédiés à l’entrainement des équipages, et seuls 4 bâtiments ont été déployés au delà des eaux territoriales américaines à ce jour.

L’un de ces navire est le USS Gabrielle Giffords, un LCS de la classe Independance lancé en février 2015, et admis au service en juin 2017. Contrairement aux autres navires de sa classe, le Gabrielle Giffords s’est vu adjoindre, à l’été 2019, 2 lanceurs quadruples de missiles anti-navires Naval Strike Missile du norvégien Konsberg, un missiles subsonique à trajectoire rasante atteignant une portée de 180 km, et disposant d’un autodirecteur « intelligent » capable de discriminer et hiérarchiser les cibles ainsi qu’un drone MQ-8-C Scout capable d’étendre la portée de détection et d’engagement du navire, et donc de ses missiles. C’est précisément ces missiles qui ont été testés le 1er Octobre, à l’occasion de l’exercice Pacific Griffin avec la Marine de Singapour. Et si un test aussi banal fait l’actualité, c’est parce que, jusqu’ici, les LCS étaient remarquablement sous-armées, et donc inefficaces, dans tous les domaines.

USS Freedom 130222 N DR144 174 crop Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le LCS Freedom, premier navire de la classe éponyme, représente l’autre modèle de LCS. Il emporte un canon de 57mm et un système SeaRam d’autoprotection.

En effet, les LCS devaient initialement disposer de 3 modules leur permettant d’intervenir avec les senseurs et armements nécessaires pour plusieurs types de missions, allant de la lutte anti-sous-marine au déminage. Mais les difficultés rencontrées, que ce soit en terme de fiabilité des équipements comme d’entrainement des équipages, amenèrent l’US Navy à abandonner cet aspect, au profit d’une vision plus traditionnelle alliant un navire spécialisé dans une mission, et servi par un équipage qualifié dans cette fonction. De fait, une partie des LCS subissent, depuis 2 ans, des modifications en vu de se voir doter de nouveaux armements, afin de renforcer leur unique canon de 57mm et système anti-aérien d’autodéfense qu’ils emportaient initialement. C’est ainsi que le Gabrielle Giffords, pendant longtemps le seul LCS déployé de l’US Navy, s’est vu doté de missiles NSM, de sorte à disposer d’une capacité anti-navire sur un théâtre ou il peut être amener à faire face à des bâtiments chinois ou russes.

En revanche, le navire ne dispose toujours d’aucune capacité anti-sous-marine, ni d’aucune capacité de protection anti-aérienne ou anti-missile, limitant grandement son utilité pour un navire de 3000 tonnes et 750 millions de $. A titre de comparaison, une corvette Buyan-M russe, qui coute moins de 75 m$, emporte dans ses 950 tonnes 8 missiles de croisière Kalibr ou anti-navire lourds P-800 Onix, un système de protection anti-aérien Pantsir et un canon de 100mm, et est équipée d’une électronique sensiblement comparable à celle d’un LCS. A l’inverse, les FDI Belh@rra de Naval Group, dont le prix une fois equipée avoisine les 700 m$, emportent 16 missiles anti-aériens longue distance Aster 30 servis par un radar AESA Sea Fire, 8 missiles anti-navires MM40 Block III, un canon de 76mm et une suite anti-sous-marine complète associant sonar de coque, sonar à profondeur variable et torpilles.

Russias Latest Buyan M Corvette Reinforces Russian Mediterranean Group Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
10 fois moins chères que les LCS, les corvettes Buyan-M russes ont pourtant des capacités opérationnelles supérieures à ces navires

On comprend pourquoi nombreux sont ceux, dans l’US Navy comme au Pentagone, à vouloir réduire autant que possible l’hémorragie financière provoquée par le programme Littoral Combat Ship, pour revenir à des conception plus classiques, plus efficaces, et beaucoup moins onéreuses, alors que la Chine fabrique aujourd’hui, pour le même prix qu’un LCS, un destroyer Type 052D emportant 64 missiles en silos et jaugeant 8000 tonnes …

Les Etats-Unis menacent l’Europe de représailles concernant son plan Espace

Une des premières initiatives de la nouvelle commission européenne repose sur un plan visant à promouvoir l’industrie spatiale européenne, au travers d’un ambitieux plan de coopération européenne dans le domaine que Sylvie Goulard, commissaire au marché intérieur, doit présenter demain à la commission pour validation. Mais cela n’est pas du tout du gout de l’administration américaine qui, par la voix de Scott Pace, directeur du conseil national spatial, a menacé l’Europe de représailles si ces mesures venaient à empêcher les entreprises américaines de participer aux appels d’offres des pays européens dans le domaine spatial.

Il ne s’agit, ni plus ni moins, que des prolongations des menaces faites il y a 3 mois au sujet des programmes et fonds de défense européens, eux aussi perçus par l’administration Trump, comme une entrave vers son marché le plus important, qui lui rapporte chaque année plus de 20 Md$ pour les équipements et services de défense vendus aux pays européens. En outre, si l’Europe venait à se doter d’une industrie de défense et spatiale totalement autonome, les Etats-Unis perdraient d’importants leviers politiques, via notamment la législation ITAR, sur ces pays sur la scène internationale. De récents exemples montrent que l’administration US ne se privent guère de faire valoir ces leviers lorsqu’elle le juge nécessaire, même vis-à-vis de ses plus proches alliés, comme l’Australie.

Le president francais E.Macron la premiere ministre britannqiue T.May et la chancelierre allemande A. Merkel 1 Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le président français E.Macron, la première ministre britannique T.May et la Chancelière allemand A. Merkel en Bulgarie au sommet de l’UE de Sofia le 17 Mai 2018

L’argument mis en avant par Scott Pace est, à ce titre, proche de celui avancé concernant les programmes de Défense. En effet, il s’inquiète du fait que le developpement d’une industrie spatiale européenne autonome pourrait nuire aux pays membres de l’OTAN et non de l’Union européenne, comme la Norvège, le Canada ou l’Islande. De fait, si l’Europe venait à persister dans sa volonté de mettre en oeuvre ce programme spatial, les Etats-Unis pourraient décider de prendre des mesures de représailles économiques et technologiques vis-à-vis des européens, menaces strictement similaires à celles faites au sujet du PESCO, et qui restent valides, puisque non arbitrées, et notamment interdire aux entreprises européennes de concourir aux appels d’offres de Défense des armées américaines.

Cette menace fera certainement réagir certains membres de l’UE, comme la Suède dont Saab participe avec Boeing au programme T-FX de l’US Air Force, mais également l’Allemagne avec Rheinmetall qui propose son Lynx avec Raytheon face au Griffin III de General Dynamics pour le remplacement des Bradleys de l’US Army, ou encore l’Italien Fincantieri et l’Espagnol Navantia, tous deux impliqués dans la compétition pour la construction de 20 nouvelles frégates pour l’US Navy. Rappelons également que c’est Airbus Helicopter qui construit le Lakota, l’hélicoptère utilisé pour la formation des pilotes de l’US Army.

FREMM Italie Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
l’Italien Fincantieri propose sa FREMM pour la compétition FFG/X visant à concevoir et fabriquer 20 frégates pour l’US Navy

Cependant, pour chacune de ces offres, les entreprises européennes ont systématiquement créé une filiale sur le sol américain, le plus souvent en partenariat avec une entreprise de la base industrielle technologique de Défense américaine. Dans les faits, le fonctionnement prôné par la Commission Européenne ne fait qu’équilibrer celui appliqué aux Etats-Unis vis-à-vis des entreprises européennes depuis 1950. Rappelons également que, si des entreprises comme SpaceX peuvent offrir des tarifs aussi attractifs sur le marché international, c’est avant tout grâce aux très lucratifs contrats passés avec les armées américaines et la Nasa, avec des montants très supérieurs à ceux du marché…

S’il est peu probable que la Commission Européenne face machine arrière sur son plan spatial, comme elle avait résisté aux menaces concernant le PESCO, il est en revanche certain que cet épisode va, à nouveau, donner lieu à des attaques acerbes du président Trump et de son administration, ainsi qu’à des menaces répétées sur les entreprises européennes. Décidément, les pays européens paient très chers leur dépendance à la protection américaine ….

Bell présente le Bell 360 Invictus à la compétition FARA

Alors que le programme Futur Vertical Lift, un des piliers de la modernisation en cours de l’US Army, devait initialement se concentrer uniquement sur le remplacement des hélicoptères de manoeuvre Black Hawk, programme pour lequel Bell avec le V-280 Valor et Sikorsky avec le SB-1 Défiant sont en compétition, les autorités militaires américaines ont décidé, il y a un an, de l’accélérer en intégrant, dès la première phase, le remplacement des hélicoptères légers de reconnaissance OH-58 Kiowa, retirés du service depuis 2014. Le programme FARA, pour Futur Attack Reconnaissance Aircraft, a pour objet de sélectionner d’ici 2020 les deux industriels qui construiront chacun un prototype. Les deux appareils seront évalués jusqu’en 2023 pour déterminer le modèle retenu, pour une entrée en service dès 2028, et peut-être plus tôt, si l’US Army parvient à accélérer le programme.

Le FARA sera un hélicoptère léger, d’une masse inférieure à 6 tonnes, manoeuvrant et rapide, puisque l’US Army exige que qu’il ait une vitesse de croisière supérieure à 180 noeuds, soit plus de 350 km/h. En outre, il devra être capable de déjouer les systèmes de défense anti-aérienne modernes, et d’emporter des armements pour engager des forces légères si besoin, même si son rôle principal restera la reconnaissance armée. 5 industriels ont été sélectionnés par le Pentagone, après l’élimination notamment d’Airbus hélicoptère, en avril 2019 : AVX Aircraft/L3 Harris Technologies, Boeing, Karem Aircraft, Sikorsky et Bell helicopters. Contrairement à Sikorsky qui propose une technologie similaire à celle du Défiant, Bell a choisi de présenter un hélicoptère beaucoup plus classique, mais optimisé, le Bell 360 Invictus, qui signifie imbattable en latin.

S97 Raider Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le S-97 Raider de Sikorsky préfigure la proposition de ce dernier pour le programme FARA

L’Invictus est un hélicoptère léger proche, dans son aspect, du RAH-66 Comanche de Boeing et Sikorsky, le programme d’hélicoptère de combat léger avorté en 2004 après avoir couté prés de 15 Md$. Pour sa conception, Bell s’est appuyé sur son dernier modèle d’hélicoptère moyen, le Bell 525, dont il reprend beaucoup de caractéristiques. Mais le 360 apporte également son lot d’innovations, comme des commandes électriques intégrales, des ailes assurant 50% de la sustentation à haute vitesse, et un système de puissance relais appelé Supplemental Power Unit (SPU), capable d’augmenter temporairement la puissance fournie par la turbine principale pour les phases d’accélération et les phases critiques, à l’image d’une post-combustion sur les avions de chasse. Le reste de l’architecture du Bell 360 reste, elle, très classique, avec un rotor quadripales pour la sustentation et un rotor anti-couple à la queue,

De fait, l’appareil ne pourra atteindre les performances de celles escomptées par Sikorsky avec la technologie employée sur le S-97 Raider, lui conférant une vitesse constatée de 207 noeuds, et une vitesse espérée de 250 noeuds en croisière. Bell parie sur un autre aspect que les performances pures pour remporter la compétition, le prix de son appareil. En effet, le constructeur estime, sans toutefois se dévoiler, que le Bell 360 sera sensiblement moins cher que ses concurrents, et notamment que le modèle proposé par Sikorsky, et donc très en deçà des 30 m$ par appareil budgété par l’US Army. Cette approche a déjà réussi à Boeing cette année, lorsque la société de Seattle a remporté, avec Saab, le contrat pour la construction du prochain appareil d’entrainement de l’US Air Force, grâce à une offre de prix ferme particulièrement attractive. En outre, le FARA a pour objet de remplacer le Kiowa, un appareil léger qui avait l’avantage d’être particulièrement économique, en comparaison d’un hélicoptère de combat comme l’AH64.

AVX L3 US ARMY 900x417 Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le concept d’AVX / L3 Harris Technologies associe beaucoup de solutions différentes, et nécessitera donc beaucoup de developpement

De fait, la stratégie de Bell pourrait s’avérer payante, dans un contexte ou l’US Army doit faire face à d’importantes dépenses simultanées, avec le remplacement des M2/3 Bradley, la modernisation des M1 Abrams et des Stryker, l’évolution de son artillerie, le developpement de nouveaux systèmes hypersoniques et de systèmes d’arme à énergie dirigée, et le financement du programme de remplacement des hélicoptères de manoeuvre Black Hawk en cours. D’autre part, le constructeur n’avait probablement guère d’autres choix, s’il voulait tenter sa chance avec la compétition FARA. En effet, la technologie des rotors basculants, utilisée sur le V-280 Valor avec, semble-t-il, beaucoup de succès, s’avère inadaptée pour les hélicoptères légers. De fait, l’avionneur ne pouvait intégrer ses développements technologiques en cours dans un nouveau modèle, comme le fait Sikorsky, dont la technologie de l’hélice propulsive et rotors contrarotatifs peut, elle, être adaptée à un appareil léger.

Enfin, Bell pourrait faire valoir des délais de developpement raccourcies, et donc une entrée en service accélérée, accompagné d’un risque technologique parfaitement maitrisé, ce qui est loin d’être le cas de Sikorsky ou d’AVX, et qui pourrait répondre a des attentes non exprimées de l’US Army. Alors que les tensions, en Asie comme en Europe, s’intensifient rapidement, l’ensemble de ces points clés pourraient emporter la décision.

Les forces russes commandent 2 nouveaux systèmes d’artillerie automoteurs légers

L’Artillerie est au coeur des stratégies russes depuis des décennies, raison pour laquelle les forces russes disposent aujourd’hui de 8 à 10 fois plus de systèmes d’artillerie que leurs homologues occidentales, une fois ramené au nombre de militaires engagés. Ceci explique notamment le dynamisme des industriels russes pour concevoir de nouveaux systèmes très performants, comme le Koalitsiya-SV ou le Lotos qui entreront bientôt en service. De manière plus spécifique, les forces russes emploient un nombre important d’obusiers et de mortiers tractés, pour procurer un soutien au plus prêt des zones de combat. Toutefois, le manque de mobilité des systèmes tractés les rendent, aujourd’hui, très vulnérables pour peu que l’adversaire dispose lui aussi de systèmes d’artillerie, et de radar de contre batterie.

C’est la raison pour laquelle, l’Etat-Major russe a entamé des travaux, au début de la décennie, en vue de transformer son parc de systèmes de 120 mm tractés et de mortier de 82mm pour les intégrer sur des véhicules blindés légers à forte mobilité, à l’image de ce que fait la France avec le CAESAR et le Griffon 2R2M. Ce programme, appelé « nabrosok » (croquis en russe), termine actuellement ses phases de test, ce qui a permis au ministère de la Défens de passer commande pour les premiers exemplaires de série, selon les déclarations faites par le général Alexei Maslov, représentant pour la coopération militaire et technique avec la société Ouralvagonzavod. Concrètement, ce sont deux nouveaux systèmes qui vont donc prochainement entrer en service dans les forces d’infanterie russes.

phlox floks 120 mm self propelled mortar system 3 e1550723395914 Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le Floks est équipé d’un système d’information et de visée évolué, lui permettant d’apporter un soutien d’artillerie rapide et précis aux forces engagées

Le canon automoteur de 120 mm Floks, du nom de la fleur Phlox, est un système d’artillerie hybride permettant un usage allant du canon à tir tendu au tir balistique des obusiers et des mortiers, identique à celui qui équipé le nouveau système d’artillerie automoteur LOTOS qui entre en service dans les forces aéroportées russes. Le canon peut ainsi tirer toutes les munitions de ce calibre, à une portée de 13 km lorsqu’il s’agit d’obus d’obusiers à fragmentation ou explosif, à 7,5 km lorsqu’il s’agit d’obus de mortier ou de mines. Il peut également utilisé l’obus guidé Kitolov-2M pour attaquer des cibles blindés, avec une portée maximale de 10 km. Le Floks emporte ainsi 80 munitions de différents types, dont 28 sont immédiatement prêtes à l’emploi. Sa cadence de tir est de 8 obus par minute en configuration obusier, et de 10 en configuration mortier. Il dispose, en outre, d’un système de visée automatique évolué, lui conférant une grande précision, selon les tests effectués.

Le Floks est monté sur un camion blindé 6×6 Ural-63704-010 propulsé par un moteur turbo-diesel de 440 Cv YaMZ-652 (Renault dCi 11 produit sous licence), lui donnant une vitesse de pointe de 85 km/h, et d’importantes capacités tout terrain, avec un franchissement verticale de 1 m. L’équipage dispose d’un habitable blindé contre les armes légères et les shrapnels, et résistant au IED jusqu’à 2 kg. Le camion est également monté d’une tourelle de 12,7 mm téléopérée pour son autodéfense, et peut évoluer en environnement contaminé.

Drok 82mm mortier Alliances militaires | Analyses Défense | Coopération internationale technologique Défense
Le Drok lors du salon Army 2019.

Monté sur un véhicule blindé 4×4 Taifun K-4386, le 2S41 Drok (genet en russe) emporte un mortier de 82mm ayant une portée allant de 100m à 6000m, ainsi que 40 munitions et une mitrailleuse de 7,62mm d’auto-protection. Equipé d’un moteur diesel de 350 cv, il atteint une vitesse de 100 km/h, pour une autonomie de 1200 km. L’équipage de 4 soldats est protégé contre les armes légères et les shrapnels, mais c’est la grande manoeuvrabilité du Taifun qui assure la meilleure protection au véhicule, qui dispose également de systèmes de communication et de ciblages numériques.

On ignore pour l’heure combien de Floks et de Drok seront commandés, mais les forces russes ont toujours en ligne prés de 2000 mortiers et pièces d’artillerie tractées de ce type de calibre, et il est plus que probable que ces deux systèmes seront appelés à remplacer une grande part d’entre eux. Ils viendront alors renforcer les quelques 2600 systèmes d’artillerie automotrice blindés chenillés en service, et les quelques 1500 lance-roquettes multiples qui les accompagnent.