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Le contrat pour la construction des 12 sous-marins australiens avec Naval group est signé

Naval Group avait frappé un grand coup en 2015, en étant officiellement choisi par le gouvernement australien pour la conception et la construction de ses 12 nouveaux sous-marins d’attaque océaniques « Attack », sur la base du modèle « Shortfin Barracuda ». Le 11 février, voilà que le contrat de partenariat, d’une durée de 50 ans, entre les deux protagonistes a été signé, après plus de 3 années de négociations.

Il s’agit d’un des plus importants contrats de défense jamais signé entre deux nations ces 30 dernières années, d’un montant dépassant les 30 Md$. Si l’essentiel des travaux seront effectués en Australie, Naval Group estime que ce contrat génèrera 500 emplois en France.

Le premier sous-marin devrait entrer en service en 2032, et sera en mesure de mettre en œuvre un panel d’armements et d’équipements, incluant des missiles de croisière et des drones, offrant à la Marine Royal Australienne une avance technologique notable pour faire face à la montée en puissance de la Marine chinoise.

Le Socle Défense, un outil pour reconstruire la Défense grecque

Depuis la crise de 2008, les forces armées grecques ont vu leurs crédits de fonctionnement et d’équipements divisés par 2. Aujourd’hui, les armées du pays disposent annuellement d’un budget annuel de 4,5 Md€, très inférieur aux besoins pour faire face aux enjeux de sécurité réels du pays. Dans le même temps, les crédits d’équipements ont été ramenés à moins de 500 m€ par an, créant d’importants problèmes pour la modernisation et le remplacement des équipements, notamment des équipements majeurs comme les bâtiments de combat de la Marine, les avions de chasse de l’Armée de l’Air, ou les blindés et hélicoptères de l’armée de terre.

Dans ce contexte, est-il possible de concevoir un modèle économique qui permettrait de sortir de cette impasse budgétaire, et de reconstruire les capacités défensives du pays ?

La montée en puissance militaire turque

La principale menace concernant la Grèce et ses intérêts reste, comme depuis des décennies, la Turquie. Au delà des différents territoriaux et du cas chypriote, les ambitions du président Erdogan de revenir aux frontières de 1912 menacent directement l’intégrité même du pays. Or, depuis son élection à la tète de l’Etat en 2002, R.T Erdogan a entrepris de considérablement augmenter les moyens des forces militaires de son pays, comme de son industrie de Défense. En moins de 20 ans, le budget des armées est passé de 7 à 19 Md$ aujourd’hui. Grâce à cela, les armées turques ont lancé l’acquisition de nombreux équipements modernes, comme la centaine de F35A dont la Turquie est un des principaux partenaires, ou les 6 sous-marins Type 214 AIP commandés auprès de l’Allemagne. Elle a également diversifié ses sources d’approvisionnement, en se rapprochant de la Chine et surtout de la Russie, auprès de laquelle elle a acquis 4 régiments de S-400.

S400 Turquie livraison Archives | Aviation de chasse | Budgets des armées et effort de Défense
Les batteries de S400 russes livrées à la Turquie ont la capacité d’interdir l’accès aux forces aériennes grecques au dessus de l’ensemble des iles grecques de la mer Egée

Son industrie de Défense a également fait d’immenses progrès, devenant un acteur sur la scène internationale. En 2018, la Turquie aura ainsi exporté pour 2 Md$ d’équipements de Défense. Cette dynamique a permis aux autorités turques de lancer des programmes de défense très ambitieux, comme le programme de chasseur de nouvelle génération TFX, réalisé avec de très importants transferts de technologies de la parts des britanniques de BAe et de Rolls-Royce, ou le programme naval MILGEM. De fait, sur la décennie 2020-2030, la Turquie va acquérir pour 60 Md$ d’équipements majeurs de défense, soit prés de 10 fois le budget prévisionnel des forces grecques sur la même période, un écart de moyens réduisant très significativement la capacité de dissuasion de la Grèce vis-à-vis de son voisin.

La Défense à Valorisation Positive, une approche économique innovante de l’investissement de Défense

Il apparaît donc que la Grèce est dans l’obligation impérieuse d’augmenter rapidement ses capacités d’investissement en matière de Défense, particulièrement concernant l’acquisition d’équipements modernes capables de s’opposer aux nouveaux équipements turques. La solution peut venir d’une nouvelle doctrine économique développée en France, la Défense à Valorisation Positive. Cette doctrine propose de remplacer le pilotage de l’investissement de Défense avec le seul critère de la dépense, par la prise en compte du solde budgétaire de l’investissement réalisé. En effet, lorsque l’Etat investit dans des équipements de Défense construits dans le pays, il génère des emplois, qui génèrent eux-mêmes des retours budgétaires par les charges et taxes payées sur les salaires et par les salariés, ainsi qu’en économisant sur le cout social que représente un chômeur chaque année.

Ainsi, en Grèce, lorsque l’Etat investit 1 million d’Euro dans l’industrie de Défense, il génère 64 emplois, représentant la somme des emplois directs, de sous-traitance et de consommation résultants de cet investissement. Chaque emploi salarié génère, en moyenne, dans le pays, 16.000 € de recettes et économies fiscales et sociales chaque année, en prenant en considération l’abaissement de charges prévus. En conséquence, 1 million d’euro investit génère 1,024 million d’euro de recettes et économies budgétaires, soit un retour optimum de 100%.

T129 Atak Archives | Aviation de chasse | Budgets des armées et effort de Défense
Depuis une vingtaine d’années, les forces turques ont entrepris un très important effort de modernisation et de renforcement, de même que l’industrie de Défense du pays. Ici l’hélicoptère de combat T129 turc

On le comprend, il y a un immense intérêt pour un pays disposant de capacités industrielles, à développer au maximum le recours à sa propre industrie de Défense. Par ailleurs, la grille d’évaluation basée uniquement sur l‘évaluation des couts, classiquement employée par les autorités de tous les pays européens, ne permet pas d’appréhender le solde budgétaire représentant le cout effectif pour l’Etat de cet investissement.

Le Socle Défense, un modèle adapté aux spécificités de la Grèce

Si la doctrine Défense à Valorisation Positive apporte un éclairage nouveau sur la conception de l’effort de Défense, elle ne peut être appliquée directement à la problématique Grecque, du fait des délais entre l’investissement initial et le retour budgétaire effectif, qui atteint 6 années. Or, le pays n’a pas capacité à produire un effort initial sur une durée aussi longue, sans déstabiliser profondément les efforts de restructuration de l’économie et de la dette du pays.

Le modèle économique du Socle Défense permettrait de résoudre cette équation.

Ce modèle repose sur une société d’Etat, donc détenue majoritairement par l’Etat grecque, qui se porterait acquéreuse des équipements de Défense pour le compte des armées, et qui les loueraient à ces mêmes forces armées, pour une durée de 20 à 25 ans. En procédant ainsi, l’Etat n’a besoin de payer que les loyers des équipements en service, ce qui lisse les dépenses sur l’ensemble de la durée de production. En procédant ainsi, les dépenses sont suffisamment étalées pour permettre à l’Etat d’optimiser ses recettes budgétaires. En outre, cette approche, pour peu qu’elle respecte certaines règles en matière de valeur résiduelle, et de portée de la location, permet de ne pas intégrer le reste à payer dans la dette souveraine de l’Etat. Dans le cas de la Grèce, cette spécificité est capitale.

Au delà de la période de location, les équipements peuvent être soit acquis par la Grèce, à un tarif très attractif, d’autant qu’il est basé sur une valeur financière vieille de 25 ans, soit proposer les équipements sur le marché international de l’occasion. Cette dernière solution est d’ailleurs probablement la meilleure, car la dynamique industrielle créée permet d’équilibrer le modèle dans la durée. Le Graphique ci-dessous présente le modèle Socle Défense avec les hypothèses suivantes :

  • 2,6 Md€ de financements par an, maintenu dans la durée
  • 60% des travaux en Grèce, 40% dans le pays partenaire
  • Abondement de 20% de la valeur de la part du pays partenaire
  • 1er loyer de 10%, Valeur résiduelle 20%, durée 25 ans
courbes evo Socle Defense grece Archives | Aviation de chasse | Budgets des armées et effort de Défense

Les dépenses croissent sur 2 ans, puis se stabilisent à leur niveau nominal. Les loyers payés par l’Etat ont une croissance linéaire jusqu’à atteindre le niveau des dépences au bout de 25 ans. Les recettes de l’Etat ont une croissance pendant 6 ans, puis se stabilisent à 75% des dépenses, correspondant à nos hypothèses de départ.

 Le solde budgétaire, enfin, est positif pendant 17 ans, puis se stabilise autour de -500 m€/an, soit le niveau actuel des dépenses. Dans ce modèle, les créations d’emplois en Grèce atteindraient les 82.000, soit une baisse de plus de 1,7% du taux de chômage actuel.

Reste un problème crucial : Comment financer la société d’Etat qui porte les acquisitions ?

Pour cela, le Socle Défense propose la création d’un produit d’épargne dédié, à destination des grecques eux-mêmes, et garanti par l’Etat. Ce type de produit d’Epargne est utilisé en France pour financer la construction de logements sociaux. Il présente l’avantage de ne pas être intégré, lui non plus, dans la dette souveraine du pays. En procédant ainsi, la Grèce disposerait d’un outil de financement totalement autonome, renforçant le lien entre les grecs et leurs armées. Il ne s’agit pas d’une opération de Crowdfunding, une méprise récurrente lorsqu’il s’agit de comprendre le Socle Défense, mais bien d’un produit d’épargne, proposant un rendement de 1,5% sur la base d’une inflation inférieure à 1%. Il est nécessaire de limiter les possibilités de dépôts, trop de dépôts risquant de déstabiliser la rentabilité du modèle.

La France, un partenaire privilégié pour la Grèce

Reste à déterminer quel partenaire serait le plus approprié pour la Grèce. Outre les solutions technologiques, le pays partenaire devra être à même d’accepter les conditions du modèle économique, comme le partage des travaux 60%/40%, et l’abondement d’Etat de 20%. La France répond parfaitement à ces critères !
Du point de vu économique, la France à l’expérience des partages industriels en faveur du partenaire. Dans le cas de l’appel d’offre pour le remplacement des F16 belges, la France proposait la garantit de 5000 emplois sur 20 ans, soit un offset de 75%. Du point de vu technologique, elle est apte à couvrir de façon autonome l’ensemble des besoins militaires du pays, allant des avions de chasse aux blindés légers, en passant par les sous-marins et les satellites.

Le Rafale F3R Archives | Aviation de chasse | Budgets des armées et effort de Défense
En appliquant le Socle Défense, la Grèce pourrait mettre en oeuvre 5 escadrons de Rafale F3R/F4 tout en modernisant les 2 escadrons de mirage 2000-5 dont elle dispose

Dans le cas de notre exemple précédent, de 30 Md€ sur 12 ans, la France pourrait par exemple proposer 5 escadrons de Rafale au standard F3R / F4, soit 100 appareils et 8 Frégates de taille intermédiaire de la classe FDI, suffisant pour maintenir en alerte 3 frégates capables de verrouiller la mer Egée si besoin, et disposant de 64 missiles MdCN de croisière pour une riposte le cas échéant, amplifiant le rôle dissuasif des bâtiments . Le tarif inclut les équipements, les munitions, les outils de formation, et les transferts de technologie. En outre, 1 Md€ sont consacrés à la restauration et modernisation des mirage 2000-5 grecs lors des 2 premières années, ainsi que l’acquisition et la modernisation de 2 Frégates légères d’occasion pour renforcer rapidement les capacités défensives du pays. Pour l’Armée de Terre, enfin, ce niveau d’investissement intègre 120 chars légers EBRC, 300 VBCI équipés de la tourelle CT40, 1200 VBMR, 120 CAESAR 8×8, ainsi que la modernisation des 183 Léopard 2A4 au standard E-MBT équipé de la tourelle du char Leclerc. A cela s’ajoute 1000 missiles anti-char de nouvelle génération MMP avec 150 postes de tir d’infanterie, 400 missiles anti-aérien Mistral NG et 25.000 kits d’infanterie FELIN. Enfin, il comprend 36 hélicoptères de Manoeuvre Caracal, et 48 H160M dont 16 au standard naval. Ces éléments sont donnés à titre d’illustration, mais ont fait l’objet d’une concertation avec certaines autorités militaires et politiques du pays.

Prototype de lEBRC Jaguar lors de sa presentation publique Archives | Aviation de chasse | Budgets des armées et effort de Défense
Les forces terrestres grecques ont également un impérieux besoin de moderniser leurs forces blindées, notamment pour être en mesure de tenir tête à une offensive blindée turque en Thrace orientale

Il ne s’agit là que de la première tranche de modernisation, sur la base du modèle précédemment présenté. Au delà de 12 ans, une nouvelle tranche interviendrait. Un cycle de modernisation est, de façon optimal, composé de 2 tranches de modernisation de 12 ans chacune, avec une année de transition. En outre, la France est très impliquée pour promouvoir des solutions de Défense Européenne. Un tel projet venant de Grèce saura convaincre les autorités du pays de faire les efforts nécessaires pour faire avancer l’idée d’Europe de la Défense. Enfin, et contrairement à beaucoup d’autres pays, la France est très peu impliquée en Turquie du point de vu Défense, et elle a plusieurs fois montré qu’elle n’hésitait pas à intervenir pour soutenir ses alliés. Un partenariat de Défense avec la seule nation européenne continentale nucléaire représente, à lui seul, un effet dissuasif important.

Conclusion

Le Socle Défense, et la doctrine Défense à Valorisation Positive, permettraient donc à la Grèce de redonner à ses forces armées des capacités opérationnelles suffisantes pour dissuader toute agression de la part de la Turquie. Ce modèle permettrait par ailleurs de créer de nombreux emplois, et de renforcer le partenariat stratégique de la Grèce avec une des plus importantes puissances militaires européenne. Cet article ne présente que les grands principes du modèle, et de nombreux aspects ne sont pas abordés pour ne pas nuire à son accessibilité. En tout état de cause, la mise en œuvre d’un tel projet nécessitera une phase préparatoire de plusieurs mois, et d’une longue négociation avec le partenaire choisi. Il n’en demeure pas moins que cette approche répond de façon précise aux très nombreuses contraintes auxquelles la Grèce fait face, tout en permettant d’y apporter une réponse économiquement et socialement positive.

Après la Roumanie, la Pologne commande le système HIMARS

Les autorités polonaises ont annoncé qu’elles signeraient le 13 février une commande pour 20 High Mobility Artillery Rocket Systems, ou HIMARS, pour un montant de 414 m$. Il s’agit du second pays européens, après la Roumanie, a sélectionner ce système lance roquettes longue portée en Europe.

Le HIMARS est un système lance roquette multiple emportant 6 roquettes d’une portée pouvant atteindre 300 km, monté sur un camion à roue, et non un blindé chenillé comme le M270. Le résultat est un système plus léger, plus rapide et disposant d’un rayon d’action très supérieur au M270.

Le HIMARS est en service dans 5 brigades d’actives et 8 brigades de la Garde nationale américaine, ainsi qu’en Jordanie, aux Emirats Arabes Unis, et à Singapour. 

La Russie se prépare-t-elle à un conflit majeur ?

L’Agence Suédoise de recherche sur la Défense, ou FOI, a publié un rapport détaillé étudiant l’évolution des exercices stratégiques en Russie, pour en déduire les objectifs et capacités des forces armées russes. Plusieurs aspects sont particulièrement notables dans ce rapport. En premier lieu, on constate une très importante augmentation du format des exercices auxquels se livrent les forces russes. Ainsi, si en 2010, les exercices rassemblaient 5 à 10.000 hommes, ils en rassemblent désormais entre 100.000 et 150.000. Il en va de même pour la Marine, passant de 10 à 40 bâtiments engagés par exercice, et les forces aériennes, passant de quelques douzaines à plusieurs centaines d’aéronefs par exercice. En outre, les exercices sont devenus majoritairement interarmées, là ou ils étaient consacrés à une seule armée précédemment.

Le second aspect remarquable repose sur les inspections surprises, apparues en 2013, et qui ont considérablement augmenté les capacités de réaction et de préparation des forces armées russes. Ainsi, le rapport estime qu’il ne faudrait désormais que 2 à 4 semaines aux forces russes pour engager une force de 150.000 hommes capable de maintenir une action militaire d’envergure dans la durée. A titre de comparaison, la RAND avait estimé que la France était en mesure de mettre en œuvre 2 brigades mécanisées avec les unités de soutien en 4 semaines (soit 12.000 à 15.000 hommes), comme la Grande-Bretagne, alors que l’Allemagne ou l’Italie peineraient à mettre en œuvre une brigade pleinement opérationnelle dans les même délais.

Enfin, le rapport insiste sur l’amélioration très notable des capacités opérationnelles des forces russes, que ce soit du point de vu de l’entrainement et de l’aguerrissement des effectifs, comme des équipements et de la chaine logistique, et de conclure que désormais, la Russie était en mesure de s’engager dans un conflit de grande envergure, que ce soit contre l’OTAN ou la Chine, et serait capable de soutenir l’effort dans la durée. En projetant les programmes de Défense annoncés, et les reformes engagées, tant en Russie, qu’en occident et en Chine, on s’aperçoit que la Russie bénéficiera du meilleur différentiel de force entre 2025 et 2035, face à l’Europe. Au delà, les programmes de nouvelle génération, comme le SCAF et le MGCS, seront de nature à rétablir la dominance technologique occidentale, en admettant que la Russie reste sur les programmes actuels, comme le Su-57 et le T-14.

Coté chinois, le différentiel sera satisfaisant à partir de 2030, lorsque la flotte chinoise disposera de 6 porte-avions, des nouveaux croiseurs Type 055 en quantité, et des nouvelles générations de sous-marins, que l’armée de l’air disposera de J-20 en quantité, ainsi que du remplaçant du JH-7 et du H-6, et que l’armée de terre aura finalisé sa transformation vers des équipements modernes, comme le char T-99. Dès lors, la période 2030-2035 apparaît comme la période optimum pour une alliance sino-russe pour s’imposer militairement sur les forces occidentales, afin de redéfinir la carte géopolitique du continent eurasiatique.

Il serait, dès lors, largement profitable pour la France, comme pour les pays Européens, d’adapter leurs programmes de Défense à cette réalité géopolitique. Si l’intention de la Russie de mener une offensive en Europe n’est pas établie, le fait est qu’elle en aura les moyens, comme la Chine aura les moyens de s’imposer sur la ceinture indopacifique. Les deux pays accroissent également leurs efforts diplomatiques pour constituer un réseau d’alliances militaires et économiques garantissant leurs résiliences en cas de conflit majeur : la Russie avec la Biélorussie, le Kazakhstan, la Syrie ou l’Algérie, et la Chine avec le Pakistan ou le Bengladesh. En outre, les deux pays accroissent leurs rapprochements avec l’Iran, comme avec la Turquie, ainsi qu’avec de nombreux pays africains, offrant autant de point d’appuis et de défense. 

Or, les programmes actuels, comme le SCAF, le MGCS, le Tempest britannique, ou les missiles FMAN/FMC, ont un calendrier et une structure visant l’évolution générationnelle des forces européennes au delà de 2035, donc, de toute évidence, au delà de la période de risques maximum. En ajoutant des étapes intermédiaires à ces programmes, de sorte à disposer d’une offre aérienne européenne bénéficiant des dernières évolutions technologiques en 2030, serait dès lors de nature à rééquilibrer les potentiels militaires en Europe, et donc de réduire les risques de conflit. 

En outre, ces étapes intermédiaires ne nécessiteraient pas la remise en question des objectifs de ces programmes. Ainsi, dans le cadre du MGCS, disposer à partir de 2025 d’un E-MBT pour potentialiser les unités blindées françaises, allemandes, voir d’autres pays européens, serait de nature modérer la supériorité des forces terrestres russes, qui resteront massivement équipées de T72B3M et de T90M. Pour le SCAF, le développement d’une version du Rafale, et peut-être du Typhoon, spécialisé dans la guerre électronique, ainsi que d’un UCAV comparable aux objectifs du FCAS, à horizon 2025/2030, permettraient aux forces aériennes européennes de conserver une capacité d’action dans la profondeur face aux systèmes de Défense anti-aérienne russe, et donc d’en équilibrer le potentiel militaire global.

Les pays européens, ou tout du moins le couple franco-allemand, seraient avisés de mener une étude objective pour la conception d’un Livre Blanc commun, dont l’objectif serait précisément de préparer la période 2025-2035…

4 nouvelles nacelles de ravitaillement pour les Rafale Marine

La Direction Général de l’Armement a indiqué qu’elle avait commandé 4 nacelles de ravitaillement supplémentaires, en plus des 12 initialement commandées, destinées à équiper les Rafale M pour les missions de ravitaillement. Cette capacité, héritée des Super-Etendard Modernisés, permet à un Rafale de transférer 2 tonnes de carburant à un appareil (un autre Rafale), à 700 km du porte-avions, étendant ainsi le rayon d’action et/ou le temps sur objectif de l’appareil ravitaillé.

Cette capacité est de plus en plus critique aujourd’hui, avec le développement de la portée et de la précision des missiles antinavires en batterie côtière, obligeant le porte-avions à opérer de plus en plus loin de la zone de conflit. C’est ce même constat qui mena l’US Navy a développé le drone de ravitaillement MQ-25 Stingray.

Un nouveau dispositif Soft-kill pour protéger les blindés russes des missiles guidés

L’industrie russe développerait, selon l’agence TASS, un nouveau système de protection des véhicules blindés contre les munitions de précision. Il s’agirait d’un système de détection laser et IR pour identifier les menaces, couplé à un lanceur de capsule générant un nuage aérosol perturbant les rayonnements de la lumière visible, infrarouge, et électromagnétique.

Les blindés russes comme le T-14 Armata disposent déjà d’un système de protection actif/passif Afganit, mêlant des contre mesures et des projectiles détruisant les menaces. Ce nouveau système, qui sera monté initialement sur le nouveau canon automoteur de 120 mm Lotos destiné aux forces aéroportées, est un système plus léger, et probablement beaucoup moins cher, destiné à équiper la masse des blindés russes ne disposant pas de ce type de protection actuellement, et donc particulièrement vulnérables aux armes de précision, comme les missiles antichars ou les bombes et obus guidés.

L’élimination du F35 par l’Allemagne passe mal à l’OTAN

Visiblement, la décision de l’Allemagne de ne pas retenir le F35 comme candidat pour remplacer ses 90 Tornado, ne convient pas du tout à l’OTAN. C’est en tout cas le sens de nombreuses déclarations et publications plus ou moins officielles, en relation avec l’alliance.

Parmi les reproches adressés au gouvernement Allemand, celui d’affaiblir l’alliance en choisissant un appareil qui sera « obsolète » d’ici une dizaine d’année, la « différence de performance entre Typhoon et F35 », et le possible abandon de la capacité à transporter la bombe nucléaire B61. On peut se faire, dès lors, une idée des pressions qu’ont subit les officiels belges pour le choix de l’appareil en remplacement de ses F16, et l’on n’est pas surpris que le gouvernement allemand soit pointé du doigt pour privilégier son industrie (à l’industrie US ?), comme l’est le gouvernement français, soupçonné d’être à l’origine de cette décision. Il est vrai que la France a toujours eu une immense influence sur l’Allemagne en terme de Défense …

D’autant que chacun de ces arguments est largement contestable. Ainsi, le Typhoon disposera, comme le Rafale, d’un plan de modernisation intégré au programme SCAF, de sorte à maintenir ses capacités opérationnelles. Il est d’ailleurs intéressant de constater qu’il semble que l’Allemagne envisage de doter certains de ses Typhoon de capacités de brouillage et de guerre électronique avancées. Du point de vu des performances, le Typhoon n’a absolument rien à envier au F35, avec une vitesse, un plafond, une manœuvrabilité, un rayon d’action et une capacité d’emport supérieure à l’avion américain. Reste la capacité nucléaire, qui reste à traiter. Mais l’on peut penser que le récent accord de Défense entre la France et l’Allemagne ouvre des possibilités en ce sens.

Enfin, et ce n’est pas neutre, mais en commandant des Typhoon et non des F35, l’Allemagne bénéficiera d’un retour budgétaire dépassant les 75% des sommes investis. Un paramètre important alors que la croissance allemande, prévue en 2019 à 1,1%, semble donner des signes de faiblesse.

Les premiers S-400 turques seront livrés cette année

Selon le vice président du sous-secrétariat d’Etat à l’Industrie de Défense turque, Celal Sami Tufecki, cité par l’agence TASS, les premiers éléments des systèmes S-400 commandés par la Turquie à la Russie seront livrés cette année.

Il semble, en revanche, que l’accord concernant l’achat de systèmes Patriot PAC américain soit remis en question, contrairement à ce que laissait entendre la presse outre-Atlantique. En effet, dans ces propos, M Tufecki oppose clairement le choix du Système S-400 à celui du système Patriot, et de déclarer que la Turquie n’était pas parvenue à obtenir un accord satisfaisant avec les Etats-Unis, ni en terme de prix, de fabrication locale et de transferts de technologies. Mais selon la chaine turque NTV, les Etats-Unis auraient à nouveau décidé de suspendre l’offre concernant le Patriot si la Turquie persistait à vouloir acquérir le S-400.

En 20 ans, la Défense turque est passée d’un budget de 6 Md$ à 20 Md$, et sa dépendance aux technologies extérieures est passées de 80% à 35%. Ce chiffre est encore appelé à baisser, avec les programmes TFX de chasseur de 5eme génération, MILGEM de construction de destroyers, frégates et corvettes, ainsi que de nombreux programmes en matière de blindés, de missiles, d’hélicoptères …

Les premiers Rail Gun chinoise entreront en service en 2025

Selon un rapport des services de renseignement américains, révélé par le site CNBC, les unités navales chinoises disposeront de leur premier Canon électrique des 2025. D’après le site, les travaux menés en par la Chine dans ce domaine ont été constatés dès 2011, et les premiers tests sont intervenus en 2014. Il semble que la phase de test, notamment sur les unités navales, prendra fin en 2023.

Selon toutes vraisemblances, sur la base de ce calendrier, la prochaine série de destroyers lourds Type055 sera donc sur la base d’une version modifiée de celui-ci (type 055A ?), capable de produire l’énergie électrique suffisante pour mettre en œuvre ce Rail Gun.

Selon le rapport, le Rail Gun chinois atteindrait une vitesse en sortie de bouche supérieure à mach 8, et une portée de 200 km. Aucune information n’est cependant donnée concernant la précision du tir, et un éventuel système de guidage, pourtant indispensable lorsque l’on tir à de telle distance. En revanche, les services américains estiment que les obus utilisés par ce canon, couteraient entre 25.000 et 50.000 $. A titre de comparaison, un missile Exocet MM40 Block3 est estimé avoir une prix unitaire de plus de 1 m€, pour une portée et une capacité de destruction sensiblement comparable.

Si Européens et américains ont eux aussi développé des programmes de canon électrique, il apparaît que la Chine dispose d’une avance très marquée dans ce domaine, comparable à l’avance russe en matière d’armes hypersoniques, deux technologies clés pour la maitrise future du champ de bataille. La supériorité technologique occidentale, sur laquelle repose toute la stratégie défensive de l’OTAN, semble belle-et-bien taillée en brèche 

Mais que veut l’Allemagne en matière de Défense ?

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’Allemagne envoie des signaux très contradictoires en matière de coopération et d’engagements de Défense ces derniers mois. 

D’un coté, Me Merkel et sa dauphine, la ministre de la Défense Ursula von der Leyen, font le tour des capitales pour signer des accords et des engagements de Défense, promettant la montée en puissance du rôle de l’Allemagne dans l’Europe de la Défense comme dans l’OTAN. Les deux dirigeantes allemandes ne cachent pas, d’ailleurs, l’ambition du pays de devenir le pivot de cette défense européenne, et de nombreux pays en Europe du Nord et de l’Est, sont sensibles à ce discours. Parallèlement, elles s’engagent dans des coopérations bilatérales en série, que ce soit avec la France, mais également avec les Pays-Bas, et plusieurs pays de l’Europe de l’Est.

Mais ce discours extérieur officiel volontariste est largement mis à mal par la réalité des actions et des discours intérieurs dans le pays. Ainsi, alors que la chancelière avait accepté de respecter les volontés d’exportations de la France dans le cadre des programmes SCAF et MGCS, les autorités allemandes ne cessent de poser des entraves vis-à-vis des exportations européennes vers des pays jugés négativement par son opinion publique, comme l’Arabie Saoudite, l’Egypte, ou l’Indonésie. Un article de la Tribune révèle que le Français Arquus a de grandes difficultés à obtenir les licences d’exportationspour des pièces détachées mécaniques de la part des autorités allemandes, dans le cadre du contrat DONASS avec l’Arabie Saoudite. De même, les britanniques de MBDA se sont vus refuser ces mêmes licences d’exportation pour les éléments du missile européen METEORdevant équiper les Typhoon saoudiens.

Les engagements opérationnels de l’Allemagne font également face à la dure réalité de l’état de délabrement des forces allemandes. Ainsi, selon le quotidien die Welt, les unités allemandes sont contraintes de se vampiriser entre elles pour parvenir à atteindre les formats minimum pour la force d’intervention européenne rapide, dont l’Allemagne assure cette année le commandement. D’autres rapports, en 2018, pointaient la très faible disponibilité des unités navales, sous-marinesou aériennes allemandes

Enfin, l’engagement pris par la chancelière Merkel, d’amener le budget de la Défense du pays à 1,5% du PIB en 2025, est également largement remis en cause par le ministre des finances, alors que la croissance allemande s’est révélée décevante et que les anticipations pour les années à venir le sont tout autant.

Il y a donc une dichotomie profonde entre les discours des autorités allemandes sur la scène internationale, et la réalité de ses propres capacités à respecter ces engagements. 

Celle-ci s’explique par plusieurs facteurs concomitants, comme l’affaiblissement de la CDU d’Angela Merkel lors des dernières élections, ayant amené la Chancelière a annoncer qu’elle ne briguerait pas de nouveau mandat à l’issu de celui-ci. En outre, en Allemagne comme partout en Europe, les tensions sociales entraine une certaine forme de radicalisation du discours politique, même au sein de l’Alliance gouvernant le pays. Enfin, l’Allemagne considère avant tout l’Europe de la Défense comme une formidable opportunité pour développer et consolider sa propre industrie de Défense, alors même que les nouvelles normes européennes risquent d’affaiblir ses positions sur le marché automobile. Au grands discours internationaux se substituent, dès lors, des intérêts économiques très concrets, et bien plus pragmatiques. On peut remarquer que si l’Allemagne rechigne à donner des licences d’exportation vers l’Egypte, elle ne rechigne pas à y vendre ses corvettes, pas davantage qu’elle ne rechigne à vendre 6 sous-marins Type 214 AIP à la Turquie, alors même qu’elle déclare refuser de moderniser les Leopard 2 A4 turcs.

Il est très hasardeux de spéculer sur quelle sera la position de l’Allemagne sur les questions de Défense lors de la prochaine décennie, et encore plus sur celle d’après. Mais on ne peut toutefois pas ignorer que l’Allemagne sera le point critique d’une éventuelle initiative européenne de Défense efficace.  

Il est donc indispensable d’envisager la collaboration, notamment franco-allemande, en envisageant les possibles, et même probables, revirements de Berlin au cours des années à venir. Surtout, ce sera à la France de constituer ce pilier capable de soutenir ces variations, et maintenir le projet sur les rails. De fait, plus la France sera militairement et industriellement puissante en Europe, moins les atermoiements allemands n’auront de conséquences sur la construction de l’Europe de la Défense. Il est même probable que ceux-ci soient moins nombreux, et moins puissants, puisque l’efficacité attendue, du point de vu politique comme industriel, sera atténuée.

L’Europe de la Défense se fera autour du couple franco-allemand, mais ne doit pas se faire sur la force de couple, faute de quoi, et en dépit des aspirations profondes des dirigeants actuels des deux pays, elle sera extrêmement fragile dans la durée.