mercredi, décembre 3, 2025
Accueil Blog Page 118

Les Rafale F4.2 et F5 seront de véritables Tueurs de Sam

Le Rafale F4.2, ainsi que le Rafale F5, seront tous deux dotés de capacités avancées en matière de suppression des défenses aériennes ou SEAD, selon le Chef d’État-major de l’Armée de l’Air, le général Mille.

Il y a à peine plus d’un an, en réponse à une question ouverte du député UDI J.C Lagarde, le Ministère des Armées avait jugé que les forces aériennes françaises n’avaient nullement besoin d’une version dédiée du Rafale à la Guerre Electronique et à la Suppression des Défense Aériennes Adverses, plus connue sur l’acronyme anglais SEAD.

Pour l’Hôtel de Brienne, en effet, le Rafale disposera, dans ses versions à venir, de capacités d’autoprotection et de combat collaboratif lui permettant d’évoluer dans les environnements contestés, alors que les alliés de la France disposent, quant à eux, de telles capacités.

Les choses ont de toute évidence bien changé depuis cette réponse. En effet, lors de son audition par la Commission de la Défense de l’Assemblée Nationale dans le cadre de la prochaine Loi de Programmation Militaire 2024-2030, le général Mille, chef d’Etat-major de l’Armée de l’Air et de l’Espace, a précisé que les futurs standards, à partir du Rafale F4.2 et surtout autour du futur standard Rafale F5 dont la conception a débuté cette semaine, seront dotés de capacités croissantes et avancées en matière de suppression des défenses aériennes et d’évolution en environnement contesté.

Le Rafale F4.2 sera doté de capacités de suppression des défenses aériennes SEAD

Aucune information précise sur les évolutions à venir du Rafale dans ce domaine n’a pour l’heure été donnée. Au mieux sait-on que du fait des capacités de combat infocentées de l’appareil, et de l’arrivée de nouvelles munitions comme le nouveau missile de croisière nucléaire ASN4G et des futurs missiles de croisière et anti-navires FMC/FMaN, l’appareil pourra frapper ses cibles à l’intérieur du dispositif adverse en dépit de la couverture anti-aérienne présente.

Toutefois, tout porte à croire que d’autres capacités vont venir s’ajouter à celles-ci, dont l’emport de brouilleurs de guerre électronique ainsi qu’un futur missile air-sol anti-radiation, soit l’essentiel de ce qui pouvait constituer un Rafale de Guerre Électronique.

Pour le CEMAAE, il s’agit de garder la capacité des forces aériennes et aéronavales françaises à entrer en premier et de garder un « coup d’avance» sur l’évolution des défenses anti-aériennes de l’adversaire.

Alors que le calendrier du programme SCAF tend à glisser au delà de 2040, le remplacement d’une partie des Rafale M de la Marine Nationale s’invitera rapidement dans la planification militaire française, peut-être même avant la fin de la LOP 2024-2030 qui a pris le parti de faire l’impasse sur ce sujet pour des questions de budget.

On comprend, par ces propos, que si une version dédiée à la guerre électronique du Rafale, comparable au EA-18G Growler de l’US Navy, n’est pas à l’ordre du jour sur la Loi de Programmation Militaire à venir.

Transformer le Rafale F5 et F4 en Tueur de SAM au besoin

Les forces aériennes françaises entendent bien, en revanche, permettre au Rafale de se transformer au besoin en « tueur de SAM» (SAM : Surface to Air missile), non seulement pour assurer sa propre protection, mais également celles d’autres appareils moins bien protégés d’évoluer dans cet environnement.

Il pourra s’agir des Mirage 2000D mais également les drones, Remote carrier et autres Loyal Wingmen qui ne manqueront pas de se greffer aux futurs standards de l’appareil, ainsi que les voilures tournantes (hélicoptères) que l’on sait très exposées aux défenses anti-aériennes désormais.

Ainsi parer, le Rafale sera de fait non seulement un atout pour les forces aériennes et l’aéro-combat français, mais également pour les forces alliées qui ne bénéficieront pas toutes de capacités similaires.

Rafale F4.2 remote Carrier MBDA
Les Remote carrier seront au cœur de l’évolution F5 du Rafale

Vers un Reboot du Rafale avec le standard F5 ?

L’arrivée de ces nouvelles capacités, comme des drones de type Remote Carrier déjà abordés sur ce site, va par ailleurs donner une nouvelle jeunesse au Rafale, dont la version F5 semble plus que jamais se transformer en un véritable « reboot » capacitaire, en particulier en matière d’évolutivité.

En effet, les performances opérationnelles de l’appareil viendront tangenter, et peut-être même surpasser, celles de plusieurs avions de combat dits de 5ᵉ génération, par certaines inversions de paradigmes en matière de guerre aérienne privilégiant l’autonomie, la vitesse, la capacité d’emport et la maintenabilité à la furtivité.

Reste à voir, désormais, à quel point les contraintes héritées de la conception initiale de cet appareil, dessiné à la fin des années 80, ne viendront pas de trop handicaper le plein potentiel de ces nouvelles capacités, tant au profit des forces aériennes françaises que de la compétitivité du Rafale sur la scène internationale, alors que tout porte à croire, aujourd’hui, qu’il devra encore tenir la ligne sur ce marché pendant encore une vingtaine d’années.

Les difficultés de recrutement pourraient menacer les programmes des Forces Aériennes Canadiennes

Il y a quelques jours, nous publiions une analyse sur la dimension de plus en plus critique que jouent les contraintes RH dans le fonctionnement des forces armées, en particulier en Occident. Mais si certains pays font face à une démographie très contraignante, comme le Japon, d’autres voient également leurs forces armées rencontrer d’immenses difficultés pour recruter et fidéliser les profils requis, même sans que la démographie elle-même ne soit un problème. C’est notamment le cas d’une des plus anciennes forces aériennes de la planète, la Force aérienne royale canadienne, issue du Canadian aviation Corps créé en 1914 pour soutenir les forces du Commonwealth britanniques aux cotés des français face aux allemands. Or, si les RCAF (acronyme anglais) alignent aujourd’hui 430 appareils opérationnels, elles ne disposent que de 12.000 hommes et femmes pour y parvenir. A titre de comparaison, l’Armée de l’Air et de l’Espace française est forte de 40.000 hommes, pour moins de 600 aéronefs en parc. De toute évidence, Ottawa fait face à un sérieux problème dans ce domaine, et les choses risque fort de s’aggraver dans les années à venir.

C’est en substance les inquiétudes développées dans un rapport remis en Novembre dernier à l’Etat-major canadien en novembre dernier et rendu public la semaine dernière. Selon ce rapport, les forces aériennes font effectivement face aujourd’hui à d’importantes difficultés pour recruter les profils requis, comme pour fidéliser les militaires. Mais la situation ira probablement en s’aggravant dans les années à venir, alors que la RCAF a entrepris de profondément moderniser son inventaire par l’acquisition de drones et de nouveaux appareils, dont 88 F-35A pour remplacer ses CF/A-18 Hornet. Les auteurs du rapport anticipent en effet des difficultés encore accrues dans les années à venir pour recruter les nouveaux profils qui seront nécessaires pour mettre en oeuvre ces appareils et leurs systèmes d’une complexité et d’une technicité croissante, au point de venir menacer le fonctionnement même de la force.

L’arrivée du F-35A au sein des forces aériennes canadiennes va nécessiter certaines évolutions en matière de profils de recrutement, qu’il sera difficile de satisfaire, selon un rapport de la RCAF

On peut s’attendre, comme cela a été préconisé au Japon, qu’Ottawa prenne des mesures pour accroitre l’attractivité des carrières militaires, d’autant qu’au delà de la RCAF, les forces terrestres et la Royal Canadian Navy visent, elles aussi, à d’importants efforts de modernisation et de renforcement pour contenir la menace tant face à la Russie dans le cadre de l’OTAN, que dans le Pacifique aux cotés des Etats-Unis. Toutefois, au Canada, il semble, à en croire le rapport, que les forces armées fassent face à une réelle crise des vocations, ce qui non seulement tend à réduire le nombre des candidats, mais également à dégrader le niveau moyen des candidats dans son ensemble. Or, si des mesures ciblées peuvent effectivement rendre plus attractives les carrières militaires par des hausses de soldes, des améliorations des conditions de travail ainsi qu’une meilleure prise en compte des contraintes de vie de famille et des conjoints, comme cela a notamment été le cas en France lors de la LPM 2019-2025, recréer une dynamique efficace pour engendrer davantage de vocation pour le métier des armes est autrement plus difficile, et surtout beaucoup plus long.

Le nouveau canon automoteur de 155mm russe 2S35 Koalitsiya-SV toujours bloqué lors des tests d’Etat

L’artillerie russe était considérée, en amont de l’intervention en Ukraine, comme l’une des plus puissantes de la planète. Celle-ci alignait en effet plus de 1600 canons automoteurs chenillés 2S3 Akatsiya et 2S19 Msta-s, équipés respectivement d’un tube de 152mm/27 calibres et de 152mm/37 calibres, ainsi que d’un millier d’autres systèmes automoteurs allant de l’obusier de 122mm au mortier de 240 mm. Pourtant, les artilleurs ukrainiens parvinrent, avec des systèmes identiques mais disponibles en quantité bien moindre, à faire jeu égal avec leurs homologues russes pendant les premiers mois du conflit, notamment grâce à l’utilisation intensive et bien intégrée des drones de reconnaissance et d’un système de commandement et de communication développé à la hâte sur le même algorithme de géolocalisation que celui employé par les sites de rencontre. A partir du mois de Mai 2022, et l’arrivé des premiers M777 américains, Pzh2000 allemands, Krab Polonais et Caesar français, le rapport de force s’inversa, donnant une nette prédominance à l’artillerie ukrainienne, en dépit d’un nombre réduit de systèmes occidentaux.

En effet, les systèmes occidentaux, et surtout les tubes longs de 52 calibres des Pzh2000 et CAESAR français, offrent une portée et une précision très supérieures à celles des systèmes russes, y compris du Msta-s équipé d’un tube de seulement 37 calibre inférieur aux tubes de 39 calibres équipant les AS90 britanniques ou les M109 américains. De fait, les systèmes de 39 calibres surpassaient de beaucoup en portée comme en précision les 2S3 Akatsiya russes, là ou les tubes de 52 calibres surpassaient de plus de 10 km la portée du Msta-S, donnant un net avantage aux artilleurs ukrainiens en dépit d’un faible nombre de pièces mais également de munitions. C’est pour répondre à ce déséquilibre connu depuis de nombreuses années, que les armées russes avaient entrepris, dès la fin des années 90, le développement du 2S33 Msta-SM2 doté d’un tube allongé de 60 calibres. Si le 2S33 a été déployé en Ukraine, puisque 28 d’entre eux ont été identifiés détruits ou capturés, le véritable successeur du Msta-s au sein des forces armées russes sera le nouveau 2S35 Koalitsiya-SV, qui doit permettre de recoller avec les performances des systèmes occidentaux les plus avancés.

Un 2S33 Msta-SM2 et son immense tube de 152mm et 60 calibre, capturé par les soldats ukrainiens. Nul doute que ce blindé intéressera les services de renseignement occidentaux.

Conçu pour recevoir le nouveau canon de 152mm 2A88, le 2S35 devait initialement être monté sur un châssis Armata, mais les difficultés rencontrées dans la mise au point de la plateforme amenèrent les ingénieurs russes à se tourner vers un châssis de T-90 dans l’attente. Le système d’artillerie de prés de 50 tonnes, promettait d’atteindre des cibles à 40 km avec des obus classiques, et à 80 km avec des obus à portée additionnée, avec une cadence de tir maximale de 16 obus par minute, et plus de 60 obus en magasin. A l’instar du K9 Thunder sud-coréen, un véhicule de transport de munition et de rechargement automatique rapide serait développé conjointement au 2S35. Selon les médias russes, les essais d’état débutèrent en 2020, et la production industrielle de série devait être entamée en 2022. Il n’en a rien été. En effet, à ce jour, le Koalitsiya-SV demeure bloqué dans la phase d’essais d’état, le major-général Sergei Medvedsky, chef par intérim des forces antimissiles et de l’artillerie (RVIA) des forces armées russes, ayant annoncé ce mardi qu’il visait désormais la fin des essais pour la fin d’année 2023.

Subrepticement, le général russe a également donné indications interessantes sur les raisons de ces délais à rallonge. En effet, ce délais supplémentaire serait employé pour améliorer le châssis du système, selon ses mots, ce qui permet de déduire que le châssis de T-90 employé supporterait mal les contraintes mécaniques imposées par la très imposante tourelle accueillant le canon 2A88 et la soixantaine d’obus, ou les contraintes liées au tir lui-même, surtout pour atteindre des portées ou des cadences de tir aussi importantes. Quoiqu’il en soit, si le directeur de projet en vient à reconnaitre des difficultés techniques en public, il est probable que le programme rencontre en effet des problèmes importants, et l’on peut raisonnablement douter que le 2S33 ne rejoigne les unités d’artillerie avant plusieurs années. Il convient également de rappeler que les essais effectués dans le cadre du programme ERCA ont montré que l’usure des tubes au delà de 52 calibre est très rapide, au point de poser un réel problème opérationnel en dépit de performances accrues. De fait, la réalité des promesses de portée du Koalitsiya-SV comme du Msta-SM2 devront être objectivement confirmées ou infirmées, avant que l’on puisse effectivement tirer des conclusions sur les performances de ces nouveaux systèmes.

L’US Air Force va diviser par 2 le nombre de contrôleurs aériens tactiques

Lors de l’étude des enseignements issus de la guerre en Ukraine, il est fréquent de devoir modérer les conclusions du fait des spécificités propres à ce conflit, certes de haute intensité, mais opposant deux adversaires employant en de nombreux domaines la même doctrine et les mêmes matériels, tout au moins au début du conflit. En outre, qu’il s’agisse des armées ukrainiennes comme russes, toutes deux ne mettent en oeuvre que des équipements relativement datés, là encore en particulier en début de conflit. Pour autant, les Etats-majors, y compris en occident, semblent avoir sensiblement fait évoluer leurs propres doctrines et certaines ambitions technologiques et programmatiques depuis quelques mois, précisément pour appliquer les enseignements appris par le sang des ukrainiens. C’est ainsi que toutes les armées européennes ont lancé des programmes visant à densifier leur défense anti-aérienne notamment à courte portée, mais également pour renforcer la composante blindée lourde par l’acquisition de chars et de véhicules de combat d’infanterie, ainsi que dans le domaine de l’artillerie, avec des canons de 155mm à tubes longs comme le CAESAR, l’Archer ou le Pzh2000, ainsi que des systèmes à longue portée comme l’HIMARS ou le PULS.

Un des enseignements les plus surprenants aura été l’incontestable neutralisation des forces aériennes russes, du fait de l’efficacité des systèmes anti-aériens pourtant datés employés par les armées de Kyiv, qui ont été capables d’interdir le ciel ukrainien aux nombreux et pourtant modernes appareils russes, y compris les plus récents comme les Su-30SM, Su-34 et Su-35s. Même les hélicoptères de combat Mi-24/35, Mi-28 et Ka-52 ont connu des pertes effroyables lors des premiers mois de guerre, obligeant les russes à radicalement modifier leurs doctrines pour les mettre en oeuvre, de façon bien peu efficace, à distance de la ligne d’engagement et hors de portée des missiles antiaériens d’infanterie Stinger, Grom et autre Gremlin en service dans les unités ukrainiennes. De fait, c’est l’ensemble de l’appui aérien rapproché russe qui aura été presque entièrement neutralisé par la défense anti-aérienne multicouche ukrainienne, pourtant loin d’être particulièrement moderne.

L’utilisation de munitions de précision standoff pouvant être larguée à distance de sécurité, comme la JDAM, permet de répondre à la densification de la menace anti-aérienne

Ce constat a, de toute évidence, influencé l’US Air Force, qui dans le cadre de la préparation du budget 2024 du Pentagone, aurait entreprit de presque diviser par deux, rien de moins, le nombre de ses contrôleurs aériens tactiques, également désignés par l’acronyme JTAC pour Joint Terminal Attack Controller. Ces spécialistes de l’appui aérien rapproché ont en effet pour mission de guider les frappes des moyens aériens disponibles pour obtenir l’effet voulu pour les forces déployées au sol, tout en évitant les tirs fratricides et, autant que possible, les pertes collatérales. Les JTAC américains mais également français ou britanniques ont ainsi joué un rôle déterminant en Afghanistan, en Irak, au Mali ou en Syrie, pour guider le tir des avions de combat, drones et hélicoptères dans des environnements souvent très complexes. Pour autant, l’US Air Force souhaite désormais ramener le nombre de JTAC à un peu plus de 2100 hommes d’ici 2025, contre 3700 aujourd’hui, soit une diminution de 44%.

Selon les déclarations de l’USAF, il ne s’agirait pas tant de se détourner des capacités d’appuie aérienne tactique et du rôle essentiel que jouent les JTAC dans ce domaine, que de réorganiser son fonctionnement et son efficacité, notamment pour prendre en compte les nouvelles réalités opérationnelles conditionnées par l’utilisation de drones de reconnaissance, de systèmes de communication très avancés et de munitions stand-off permettant aux aéronefs d’assurer leurs missions à distance de sécurité de la DCA adverse. Cela impose des profils plus restrictifs quant aux compétences demandées aux JTAC, alors qu’une partie de la mission, la moins complexe, pourra être effectuée directement par les unités au sol au travers de leurs propres outils de reconnaissance et de communication en application de la doctrine JADC2.

La Parti Communiste Chinois reprend la main sur l’Espace, l’intelligence Artificielle et le Quantique pour relever le défi américain

Cela a suffisamment été répété par les autorités du pays, la Chine entend fermement devenir, d’ici 2049 et le centenaire de la création de la République Populaire de Chine, la première puissance mondiale tant du point de vue économique que technologique et militaire. Cet objectif clé pour le Parti Communiste Chinois, permettra de démontrer au Monde que la victoire annoncée du système démocratique et libéral occidental face à l’Union Soviétique à la fin des années 80, avait une dimension conjoncturelle et non structurelle, comme souvent interprété depuis.

Quoiqu’il en soit, pour y parvenir, Pékin pilote d’une main de fer son développement industriel et économique d’une part, et construit, depuis une vingtaine d’années maintenant, une puissance militaire de plus en plus formidable et devenue, en quelques années seulement, l’obsession des stratégies du Pentagone et de l’ensemble de la sphère occidentale.

Et si les avancées scientifiques et technologiques chinoises ces dernières années n’avaient déjà rien à envier à celles de leur principal rival américain, il semble que le PCC entende désormais prendre en main les 3 domaines critiques de cette compétition, au travers d’un Ministère de la Science et des Technologies entièrement réorganisé et désormais sous le contrôle de la très puissante Commission Centrale de la Science et de la Technologie, sous le contrôle direct du PCC.

Si le Ministère supervise et encadre la recherche chinoise dans de très nombreux domaines, le PCC, quant à lui, a défini trois domaines stratégiques qui seront critiques dans la compétition sino-chinoise, qu’elle soit économique et politique ou militaire, pour en assurer un pilotage strict afin d’atteindre les objectifs visés. Le premier de ces domaines est l’espace, déjà très soutenu et encadré politiquement depuis de nombreuses années.

C’est ainsi que la Chine est aujourd’hui le seul pays à disposer de sa propre station spatiale, le Tiangong, qui constitue pour les scientifiques chinois une plate-forme de prédilection pour les expérimentations technologiques en vue de déployer des installations permanentes sur la Lune.

Lancée il a presque 2 ans, la station spatiale Tiangong est aujourd’hui la seule spatiale nationale en orbite

C’est ainsi que ces dernières années, la station a été dotée d’un régénérateur d’oxygène permettant de recycler 100% de l’oxygène de la station, alors que le système de captation et de régénération de l’eau permet d’en recycler 95%, réduisant considérablement les contraintes logistiques pour maintenir la station et son équipage en Orbite.

L’objectif visé ici est de permettre d’implanter des infrastructures permanentes sur la Lune, susceptible de produire à minima ces deux éléments indispensables à la vie de manière autonome. La Chine dispose également de 250 satellites d’observations mixtes civils et militaires, capables de couvrir de manière soutenu une zone, alors que la galaxie Beidou offre à la chine son propre système de géolocalisation.

Outre les aspects militaires et de conquête spatial, le programme spatial chinois comporte également un important volet de défense planétaire, pour intercepter, détruire ou dévier des astéroïdes dangereux pour la planète. Cette menace est de toute évidence prise très au sérieux par Pékin, qui expérimenta un impacter cinétique susceptible de détruire un astéroïde en 2025.

Le second domaine est lui aussi également relativement classique, puisqu’il s’agit de l’Intelligence Artificielle, présentée depuis de nombreuses années comme l’Alpha et l’Oméga de la puissance technologique dans les années à venir, probablement à juste titre. De fait, en dépit des mises en garde de nombreux spécialistes au sujet du développement incontrôlé des IA, le sujet est désormais devenu un enjeu stratégique tant en matière économique que technologique et militaire pour de nombreux pays. Les efforts chinois dans ce domaine sont déjà importants, avec un investissement estimé à 14 Md$ en 2023 pour la seule recherche, mais il est appelé à croitre considérablement dans les années à venir, pour atteindre 26 Md$ en 2026. Les sujets d’application ne manquent pas pour l’Intelligence Artificielle, mais ce sont principalement les aspects technologiques et surtout militaires qui semblent intéresser le Ministère chinois, que ce soit pour renforcer l’efficacité de ses drones et autres systèmes sans pilotes terrestres, de surface ou sous-marins, mais également pour analyser l’immense quantité de données générées par la flotte de satellites chinois, notamment pour suivre les unités navales de l’US Navy.

La Chine a développé des super-calculateurs parmi les plus puissants de la plante, comme Sunway Taihulight avec capacité de 93 petaflops

Le troisième domaine prioritaire pour Pékin est en réalité un domaine double, puisqu’il s’agit de deux applications de la physique quantique, à savoir l’informatique quantique d’une part, et la communication quantique de l’autre. Les plus-values promises par les ordinateurs quantiques sont innombrables, avec des capacités de calcul démultipliées à consommation électrique identique vis-à-vis des systèmes actuels. De fait, l’informatique quantique constitue aujourd’hui une étape critique pour l’évolution des Intelligences Artificielles, et de leur application. La communication quantique, qui repose sur le phénomène d’intrication quantique, offre quant à elle des possibilités très importantes en matière de transfert d’informations, surtout du fait qu’elle est sensée aller au delà des limites de la vitesse de propagation des ondes électromagnétiques, représentant de fait un enjeu majeur tant dans le domaine de la conquête spatiale que des communications militaires, mais également pour d’autres domaines, notamment en matière de détection. La Chine entend se donner, dans ce domaine, une quinzaine d’années pour atteindre la pleine application de ces deux applications quantiques.

Reste que si ces 3 domaines de recherche sont déjà, pris individuellement, des enjeux stratégiques pour les grandes puissances mondiales, c’est dans leur interdépendance et interopérabiltié que Pékin entend construire sa suprématie technologique, raison pour laquelle ils sont tous trois encapsulé dans un objectif stratégique majeur piloté par la Commission Centrale de la Science et de la technologie, et donc par la PCC. Une chose est certaine, si certaines publications et déclarations chinoises ces dernières années, notamment dans les domaines de l’IA et du quantique, pouvaient susciter la méfiance des spécialistes par manque de preuves autour des succès annoncés, il ne fait aucun doute, en revanche, que les chercheurs et ingénieurs chinois sont aujourd’hui dans une dynamique de progrès rapide, soutenus en cela par le Parti Communiste Chinois qui a parfaitement identifié non seulement les enjeux technologiques, économiques et même militaires qui y sont attachés, mais également les enjeux politiques pour tailler en brèche le modèle occidental sur la scène internationale.

Après le drone TB2, l’avion d’entrainement et d’attaque turc Hürjet sera-t-il le prochain succès à l’export d’Ankara ?

Comme nous l’avions déjà évoqué, les annonces se succèdent à un rythme effréné ces dernières semaines, au sujet des programmes d’équipements militaires turcs. Après le premier vol du drone supersonique Kizilelma en fin d’année dernière, et la présentation du drone furtif ANCA-3 il y a un mois, ce fut au tour du porte-hélicoptères et porte-drones TCG Anadolu de rejoindre la Marine turque le 10 Avril, puis aux deux premiers chars Altay équipés d’un moteur et d’une transmission sud-coréens, d’être présenté au public il y a quelques jours. Il est évident que d’importantes considérations électorales sous-tendent cette accélération des annonces, l’industrie de défense ayant été l’un des principaux succès du Président Erdogan ces dernières années, contrairement par exemple à l’économie, alors que l’échéance des élections présidentielles du 14 Mai se rapprochent rapidement, et que le principal opposant à Erdogan, M Kiliçdaroglu, est au coude à coude avec ce dernier selon les sondages.

C’est dans ce contexte que le premier avion de combat supersonique turc a fait son premier vol ce 23 Avril. Le Hürjet, que l’on peut traduire pas « Jet de facture locale », a en effet pris l’air pour la première fois ce dimanche, pour un vol de 26 minutes train sorti (ce qui est classique pour un premier vol). Selon son constructeur TAI, l’appareil aurait atteint une altitude de 14.000 pieds et une vitesse de 250 noeuds. Il s’agit incontestablement d’un succès pour l’industrie aéronautique et militaire turque, qui est parvenue à concevoir et faire voler son premier appareil à réaction de conception nationale en seulement 7 ans, le programme ayant débuté en 2017. Et même si l’appareil intègre encore certains composants clés importés, dont le turboréacteur F404 qui équipe le F/A 18 Hornet mais également le Gripen suédois ou le FA-50 sud-coréen, TAI entre désormais dans la cours très fermée des constructeurs ayant effectivement conçu un avion de combat moderne.

Selon le planning annoncé par TAI, l’avionneur prévoit de produire dès 2026, 2 appareils par mois, en particulier pour remplacer les T-38 Talon et F-5 biplaces encore employés par les forces aériennes turques pour former et entrainer ses pilotes de chasse. Mais c’est avant tout l’immense marché à l’exportation défriché par le succès des drones de TAI et de Baykar ces dernières années, qui constitue aujourd’hui la cible principale de ce programme, qui vise à produire un appareil ayant les capacités d’un chasseur léger très moderne, au prix d’un appareil d’entrainement. Pour de nombreux pays, notamment pour beaucoup de forces aériennes en Afrique et dans la Caucase ayant déjà pu apprécier les performances et la fiabilité du TB2, il est très probable que le Hürjet apparaitra comme une alternative des plus attractives pour moderniser leurs forces aériennes.

Il faut dire que les performances promises par TAI autour du Hürjet ont de quoi séduire, même si elles restent encore à être démontrées lors des essais. Compact avec une longueur de seulement 13 mètres pour une envergure de 9,8 m, soit des dimensions proches de celle de l’Alpha Jet, le Hürjet est très également léger, avec une masse à vide de seulement 1.2 tonnes (hors moteur), presque 3 fois plus léger que le gadget de Dassault et Dornier qui a formé tant de pilotes de chasse en Europe ces 4 dernières décennies. la configuration du Hürjet avec ses Apex et son profil d’aile, lui offre également une surface alaire très importante de 25m2, contre à peine plus de 17m2 pour l’Alpha Jet. Surtout, l’avion turc propulsé par le F404 de General Electric, a une poussée sèche de prés de 5 tonnes deux fois plus importantes que celle produite par les 2 Lazarc de l’avion école franco-allemand, et dispose d’une post-combustion portant cette poussée à 7,5 tonnes.

Le Glass Cockpit du Hürjet n’a guère à envier aux plus modernes des chasseurs occidentaux.

De fait, il n’y a rien de surprenant dans les performances annoncées par TAI au sujet de son nouveau chasseur léger, notamment sa vitesse de pointe annoncée pour atteindre Mach 1.4, mais surtout son très important rayon d’action de plus de 2000 km, et une capacité d’emport exceptionnelle de prés de 4 tonnes, presque 2 fois la masse à vide de l’appareil. Ces valeurs ne manqueront pas d’être modérées lors des essais, un Hürjet à 6,5 tonnes étant très probablement exposé à d’importantes contraintes structurelles. Pour autant, les choix de TAI en matière de structure, de composants comme de propulsion et d’aérodynamique, promettent effectivement un appareil très capable évoluant bien davantage dans la catégorie des chasseurs légers tel le FA-50 sud-coréen, le Tejas indien ou le JF-17 sino-pakistanais, que des avions d’entraînement et d’attaque moderne comme le M346 italien, le L-15 chinois ou le T-7A américain.

Ce d’autant qu’en matière d’avionique, le Hürjet sera également bien doté, tant en matière de senseurs que d’avionique grâce à un glass cockpit comparable à ceux des chasseurs les plus évolués. L’appareil avait d’ailleurs été conçu, dès le départ, comme destiné à la formation des futurs avions de 5ème génération F-35 et TFX. Mais il pourra également mettre en oeuvre une vaste panoplie de munitions, en particuliers celles développées pour les familles de drones de TAI et Baykar par l’industrie turque, ainsi que les missiles et bombes qui équipent ou équiperont les F-16 et TFX de la flotte de chasse turque. A ce titre, on peut s’attendre à ce que le Hûrjet remplace bien davantage que les seuls T-38 et F-5 biplaces d’entrainement au sein des forces aériennes turques, et que l’appareil sera également employé pour remplacer une partie des F-5 monoplaces et F-16 pour densifier la flotte de chasse du pays, à l’instar de ce que firent les forces sud-coréennes et polonaises avec le FA-50.

Le principal concurrent en occident du Hürjet dans la gamme des chasseurs légers sera sans conteste le FA-50 sud-coréen, qui offre des performances similaires et qui, d’ailleurs, est propulsé par le même turboréacteur GE F404

Reste une grande inconnue autour de ce programme : son prix. Lors de la compétition malaysienne, le Hürjet avait été proposé par Ankara comme une alternative au Tejas, L-15, JF-17 et FA-50. Si Manille s’est finalement prononcé en faveur du Golden Eagle sud-coréen à la fin du mois de février, il semblerait que l’offre turque ait été considérée avec attention par les autorités, avec un prix entrant parfaitement dans l’enveloppe initiale de 900 m$ pour 18 appareils, soit 50m$ par appareil, pièces, spares et service inclus. Or, si pénétrer le marché asiatique face à la Corée du Sud, l’Inde ou la Chine était probablement hors de portée en 2019 pour le Hürjet encore en projet, l’appareil sera sans le moindre doute considéré comme particulièrement attractif par de nombreuses forces aériennes, notamment en Afrique, pour qui l’acquisition et la mise en oeuvre d’un avion de combat moderne comme les appareils américains, européens et même russes, est hors de portée. Or, à ce jour, ce sont pas moins de 11 forces aériennes africaines qui se sont déjà tournées vers le fameux TB2 Bayraktar (Libye, Ethiopie, Maroc, Somalie, Djibouti, Burkina Faso, Rwanda, Togo, Tunisie, Niger, Nigeria et Mali) ainsi que 3 pays du Caucase (Azerbaïdjan, Turkmenistan et Kyrgyzstan), constituant une excellente entrée en matière pour proposer le Hürjet et probablement le TFX après cela, tout au moins aux plus fortunés d’entre eux.

Pour autant, et comme l’ont montré les récents déboires du T-7A Redhawk de Boeing et Saab, les vrais problèmes, dans ce type de programme, interviennent souvent au delà du premier vol, et le chemin est encore long avant que le Hürjet ne vienne équiper les forces aériennes turques et au delà. Il n’en demeure pas moins vrai que les ingénieurs turcs ont su démontrer qu’ils étaient capables, sur des délais relativement courts, de concevoir et faire voler un chasseur léger ayant de grandes promesses en terme de performances et de capacités opérationnelles. Au delà des aspects purement liés à la politique interne du pays expliquant cette débauche d’annonces ces dernières semaines, on ne peut enlever les immenses progrès réalisés par la BITD aéronautique et défense du pays, avec la promesse, à relativement court terme, d’atteindre une réelle autonomie stratégique. Reste à savoir ce qu’Ankara fera d’un tel statut, tant les recettes déclarations et menaces de l’exécutif turc peuvent effectivement inquiéter ses voisins et mêmes ses alliés de l’OTAN.

La char T-14 Armata est-il vraiment présent en Ukraine comme le soutient la presse russe ?

Depuis le début du conflit en Ukraine, les forces russes auraient perdu, de manière documentée, plus de 1900 chars de combat, dont plus de 120 T-62/64, plus de 1000 T-72, 460 T-80 ainsi que 60 T-90 et plus de 220 chars non identifiés car trop endommagés. En dépit de la reprise de la production industrielle russe, notamment sur le site Uralvagonzavod qui produirait une cinquantaine de blindés T-90M, T-80BVM, T-72B3M et BMP-3M chaque mois, ces pertes ont durement éprouvé les capacités des armées russes, représentant plus de 65% du parc de chars dont elles disposaient au début du conflit. Si de nouveaux chars russes comme des T-90M parviennent à rejoindre le front chaque mois, ces pertes ont obligé les autorités du pays à sortir des stocks 800 T-64M pour renforcer les forces déployées sur 1200 km de front, ces blindés ayant commencé à être remis en état après 40 années de mise en réserve. De fait, il n’y a rien de surprenant à ce que l’Etat-major russe mette en avant certaines nouvelles armes, sensées apporter la promesse d’une prochaine victoire.

Ce fut notamment le cas du T-90M, l’ultime évolution du plus moderne des chars russes opérationnels, qui fut engagé à grand renfort de communication dès le mois de Mai 2022 en Ukraine. Malheureusement, quelques jours après cette présentation, le premier T-90M était rapporté détruit par les forces ukrainiennes, de quoi porter un coup sévère à l’image du char le plus évolué de l’inventaire russe. Depuis, les annoncent de ce type, vérifiables ou non, se sont répétées avec la une certaine régularité. Ce fut d’abord le cas du véhicule d’engagement de l’infanterie BMPT Terminator, puis de nouvelles versions du lance-flamme TOS, des nouveaux lance-roquettes multiples Tornado S et G, et bien entendu du fameux missile hypersonique Kinzhal, employé ici en dehors de toute justification opérationnelle simplement pour faire la une des actualités russes et occidentales. A plusieurs reprises, de la même manière, le nouveau chasseur furtif Su-57 a été annoncé comme opérant en Ukraine, sans que cela ait pu jamais être confirmé, ni infirmé. Et c’est désormais le tour du célèbre char de nouvelle génération, le T-14 Armata.

Le BMPT Terminator est arrivé en Ukraine en Mai 2022. Un premier exemplaire aurait été détruit en février 2023.

En effet, selon le site izvestia.ru, le T-14 Armata aurait été engagé « avec succès » en zone de combat en Ukraine, plus spécifiquement dans le Donbass. Il est précisé que le char n’aurait pas, jusqu’ici, participé à des actions offensives, mais qu’il aurait été employé pour tirer sur des positions ukrainiennes. En outre, selon l’article, le char aurait reçu des plaques de blindage supplémentaires pour en accroitre la protection. Selon les informations vérifiées disponibles en occident, seuls une petite quinzaine, peut-être moins, de T-14 ont été assemblés à ce jour, y compris les prototypes. Annoncée devant débuter en 2022, la production de masse du char n’a probablement pas était lancée, tant du fait des restrictions auxquelles font face les industriels russes, que de problèmes de fiabilité importants constatés lors des essais. Il est donc possible que quelques Armata aient été déployés en position défensive dans le Donbass, mais il semble très peu probable que le char soit employé au delà de cette mission dans les mois à venir.

De manière interessante, le site russe met l’accent sur les capacités de communication et de commandement du T-14, plus que, par exemple, sur son blindage actif Afghanit sensé lui conférer une survivabilité accrue. On peut dès lors penser que quelques T-14 pourraient effectivement avoir été déployés précisément pour coordonner les défenses, et designer des cibles à ses alliés au delà des capacités de détection des optiques et des systèmes optroniques des T-72 et T-64 qui représentent aujourd’hui le gros du corps de bataille des armées russes. Cette approche sera probablement efficace sur le moral des troupes, qui risquent de devoir bientôt faire face à une offensive ukrainienne s’appuyant potentiellement sur des blindés occidentaux aux performances plus avancées que les T-64 ukrainiens. En revanche, au delà de cette dimension, il est peu probable qu’un unique T-14, ou tout au moins un nombre très réduit de ces chars, puissent jouer un rôle déterminant dans les combats. Dans ce contexte, il est effectivement probablement préférable de s’appuyer sur les capacités de commandement et de détection de l’Armata pour coordonner les défenses russes.

Les capacités de détection et de commandement de l’Armata seraient employées pour coordonner les défenses russes, selon le site Izvestia.

L’US Navy veut vendre 6 de ses nouveaux Littoral Combat Ships d’ici 2 ans

Dire que le programme LCS n’a plus les faveurs de l’US Navy tiendrait de l’euphémisme. En effet, chaque nouvel exercice budgétaire annuel est l’occasion pour elle de tenter de retirer ces navires du service, alors même qu’ils ne sont en service depuis seulement quelques années. C’est ainsi qu’à l’occasion de la présentation au Congrès la semaine dernière du nouveau document encadrant la planification des construction navales américaines et les évolutions du format de la flotte, les militaires américains ont une nouvelle fois intégré au document une procédure visant à sortir dans les 2 années à venir, 4 LCS de la classe Freedom et 2 LCS de la classe Indépendance des inventaires, ceux après que 3 navires, les USS Freedom, Independance et Coronado, entrés respectivement en service en 2008, 2012 et 2014, ont d’ores et déjà été retirés du service en 2021 et 2022.

Conçus initialement pour remplacer les frégates de la classe O.H Perry ainsi que les chasseurs de mine de la classe Avenger, et ainsi offrir à l’US Navy des capacités modulaires permettant de répondre à différents scénario d’utilisation de faible à moyenne intensité, les Littoral Combat Ship ont rencontré de nombreux problèmes depuis leur arrivée, avec l’abandon de l’architecture modulaire au coeur du programme en 2014, ainsi que de nombreux problèmes techniques ayant sévèrement handicapé les deux classes de navire. Mais c’est surtout l’évolution radicale des besoins de l’US Army, en grande partie du fait des tensions croissantes avec la Chine qui développe une flotte de premier rang, qui amenèrent l’US Navy à tout faire pour tenter de réduire le nombre de LCS prévu. Toutefois, le Congrès américain, en grande partie sur la base de considérations économiques, fit barrage au changement de posture de la Navy, n’autorisant qu’une réduction à 36 navires pour le programme, 18 par classe, contre 52 initialement prévus, alors que l’US Navy réclamait la fin de la production avec la 20ème unité.

Conçues pour la vitesse, les LCS de la classe Indépendance manquent d’espace pour éventuellement accueillir de nouveaux systèmes. En outre, comme les Freedom, elles souffrent d’importants problèmes de fiabilité les rendant peu à même d’être déployées à grande distance, comme était leur mission initiale.

C’est probablement pour réduire l’ire des parlementaires américains, mais également les pertes abyssales de ce programme avec des navires flirtant avec les 700m$ l’unité, soit le prix d’une frégate comme la FREMM pour des capacités infiniment moindres, que l’US Navy a proposé, cette année, de vendre les 6 navires visés plutôt que de simplement les retirer du service. Il est vrai que même insuffisamment armées, les LCS conservent certaines capacités opérationnelles interessantes sur des théâtres de moindre intensité, alors que plusieurs des alliés des Etats-Unis peinent à financer une Marine côtière efficace. On peut notamment penser aux Pays baltes, qui pourraient faire bon usage des LCS en Mer Baltique, mais également des Philippines qui doivent assurer la sécurité d’une Zone Economique Exclusive de 2,2 millions de km2 avec seulement 2 frégates, 2 corvettes et quelques OPV. Enfin, et c’est loin d’être négligeable pour l’US Navy, la vente de ces bâtiments permettrait d’économiser les importants couts de modernisation prévus pour tenter de les doter des capacités requises pour évoluer en son sein, tout en libérant une cinquantaine de membres d’équipage par navire.

Reste que le programme LCS demeurera comme un des plus grands fiasco technologique et budgétaire des armées américaines ces dernières décennies, des domaines qui pourtant ne manquent pas concurrence outre-Atlantique avec les destroyers Zumwalt, les hélicoptères Comanche ou encore le remplacement avorté des M2 Bradley. A chaque fois, ce furent des ambitions technologiques excessives et un important défaut d’évaluation des risques qui ont été au coeurs de ces échecs qui, de manière cumulée, auront privé les armées US de presque 100 Md$ d’investissements en équipements modernes. De quoi financer la construction des 50 grands bâtiments qui aujourd’hui font défaut à l’US Navy pour neutraliser la montée en puissance de la Marine chinoise dans le Pacifique…

Le Congrès US met ses parlementaires autour d’un Wargame pour comprendre les enjeux d’une guerre avec la Chine

Les wargames, ou jeux de guerre, sont fréquemment employé par les militaires et les états-majors pour mieux comprendre les enjeux d’un conflit potentiel, ou d’une éventuelle situation tactique. Ils sont en revanche bien moins souvent employés pour faire passer un message aux parlementaires et politiques. C’est pourtant la démarche entreprise il y a quelques jours, le 19 avril, au Congrès des Etats-Unis, qui rassembla une partie des membres de la commission Défense de la Chambre des Représentants, autour d’un wargame simulant une hypothèque crise majeure entre les Etats-Unis et la Chine autour de la question Taïwanaise. Pour l’occasion, les parlementaires américains jouaient l’équipe bleue, les forces américaines, alors que plusieurs experts du think tank Center of New American Security jouaient les forces rouges chinoises.

Visiblement, le message est bien passé, à en juger par les commentaires des Représentants américains à l’issue d’une nuit de simulation. Selon l’Associated Press autorisée à couvrir l’événement, les traits des parlementaires étaient tirés et la mine sombre à la sortie de l’exercice. Il faut dire que pour l’occasion, les organisateurs ont probablement durci le trait, avec une option diplomatique réduite face à l’intransigeance du président chinois, des alliés peu fiables pour éviter le courroux de Pékin, et des frappes préventives chinoises massives sur Taïwan mais également sur Guam et les bases américaines au Japon, faisant rapidement croitre les pertes simulées. Ainsi, pour Mike Gallagher, représentant républicain du Wisconsin, l’exercice a permis de montrer l’urgence des mesures à prendre pour empêcher qu’un tel scénario ne se développe, mais également d’accroître la perception des responsabilités qui incombent aux parlementaires américains dans ce domaine. Pour Raja Krishnamoorthi, représentant de l’Illinois et chef de file des Démocrates dans ce comité, il est indispensable d’empêcher par la dissuasion que les évènements simulés lors de cette soirée ne se produisent.

Les visites souvent aseptisées organisées par les Armées pour les autorités politiques et parlementaires suffisent-elles à donner une perception suffisante des enjeux de défense à ceux qui decident des moyens donnés à la Défense ?

De toute évidence, cette simulation a fait, pour beaucoup des parlementaires y aillant participé, l’effet d’un électrochoc, en prenant soudainement pleinement conscience des conséquences potentielles de certaines de leurs décisions et certains de leurs arbitrages, parfois menés davantage sur des considérations électoralistes locales que géopolitiques et militaires. Il est vrai qu’aux Etats-Unis comme dans la plupart des démocraties occidentales, les parlementaires ou politiques ayant une expérience militaire sont rares, alors que ceux ayant eut un cursus leur conférant une véritable vision stratégique cohérente avec leurs fonctions le sont encore davantage. De fait, l’utilisation de wargame, bien davantage que des démonstrations capacitaires lors d’exercices chorégraphiés, peut constituer un excellent outil pour developper cette compréhension et, d’une certaine manière, atténuer le poids des calculs politiques dans des arbitrages critiques pour la sécurité du pays et l’efficacité des forces.

La Pologne veut faire payer les européens pour son effort de défense exceptionnel …

Depuis quelques années, et encore davantage depuis le début de l’offensive russe en Ukraine, les autorités polonaises ont multiplié les acquisitions d’équipements majeurs pour leurs armées. Si 3 frégates Arrowhead britanniques, là un millier de chars de combat K2 Black Panther sud-coréens, ou encore des F-35A, Himars et Patriot américains. Dans le même temps, Varsovie a annoncé son intention d’étendre le format de ses armées pour atteindre 6 divisions opérationnelles, ce qui est cohérent avec les volumes de matériels commandés, mais également d’augmenter son effort de défense à un niveau inégalé en Europe de 4% de son Produit Intérieur Brut. Pour de nombreux européens, l’effort polonais est admirable et même parfois envié, et contribue même à influencer l’orientation des programmations militaires en Europe de l’Ouest. Après tout, si la Pologne aligne 1250 chars et plus de 1100 systèmes d’artillerie mobile modernes, il est probablement préférable que britanniques, français ou italiens développent d’autres capacités comme dans le domaine naval ou de la guerre aérienne.

Pourtant, l’effort annoncé par le PiS, le parti Droit et Justice du président Andrzej Duda et surtout de son fondateur, l’obscure Jarosław Kaczyński, n’est pas sans soulever de nombreuses inquiétudes et objections, notamment de la part de l’opposition polonaise, qui avance depuis de nombreux mois qu’un tel effort est incompatible avec les finances publiques du pays, et qu’il engendrera soit un creusement rapide de la dette souveraine, soit devra-t-être compensé par d’importantes hausses d’impôts. Il ne faisait aucun doute, pour un observateur un tant soit peu objectif, que ces annoncent à répétition concernant l’acquisition de matériels militaires modernes reposaient autant sur la menace que fait à nouveau peser la Russie sur l’Europe de l’Est, que sur un calcul purement électoraliste en flattant la fibre nationaliste d’un grand nombre d’électeurs polonais. Mais il semble bien que les inquiétudes des opposants au PiS s’avéraient parfaitement fondées.

En effet, dans un article du Financial Times publié hier, le Secrétaire d’Etat Marcin Prydacz, a donné les pistes retenues par les autorités polonaises pour financer cet investissement colossale qui dépasse aujourd’hui les 50 Md€. D’une part, il serait question de se tourner vers les marchés, c’est à dire, de manière plus triviale, de faire de la dette. Il est vrai qu’avec une dette souveraine à peine supérieure à 50% du PIB, et une croissance soutenue, la Pologne a certaines marges de manoeuvre en la matière, et il serait probablement mal venu pour les pays d’Europe occidentale de critiquer cette décision, eux qui ont une dette souvent supérieure à leur propre PIB. Mais il ne s’agirait là que d’une partie de la stratégie poursuivie par le président Duda. En effet, celui-ci entend également mettre à contribution les européens eux-mêmes.

Selon le secrétaire d’Etat polonais, « Nous n’avons pas d’autres choix que de le faire (augmenter les investissements) », et surtout d’ajouter « nous pensons que tant l’Union Européenne que l’OTAN devraient nous aider davantage à le faire ». Pour les autorités polonaises, il serait donc naturel que les Européens qui profitent de la protection fournie par le renforcement des capacités militaires polonaises, participent au financement de celles-ci. Pour l’heure, le Secrétaire d’Etat Polonais n’a pas détaillé de quelle manière entendait-il que l’UE et/ou l’OTAN participent au renforcement militaire polonais. Mais l’observation des postures des autorités polonaises ces derniers mois, en particulier au sein de l’UE, laisse présager qu’il s’agira, là, d’un nouvel argument employer pour flatter l’électorat nationaliste polonais et avec lui l’ensemble des pays d’Europe de l’Est et du Nord, au détriment des européens de l’ouest, devenus désormais la cible favorite des autorités polonaises sur la scène internationale.

Il ne fait guère de doute que les Européens n’accueilleront pas favorablement toute demande de financement qui sortirait du cadre classique, au prétexte que Varsovie veut constituer une armée de terre de premier plan. Rappelons que déjà, les arbitrages polonais en faveur de matériels américains, en particulier lors de la compétition ayant opposée le Mirage 2000-9 français au F-16 Block 60 américain, avaient été très mal accueillis en France, alors que Varsovie est un bénéficiaire net important des aides européennes. Cela t’empêcha pas Varsovie de récidiver à plusieurs reprises, au point que l’on pouvait clairement s’interroger, depuis plusieurs années, sur une certaine forme de black-listage des industriels européens lors des compétitions d’armement. Surtout, donner un passe-droit à la Pologne dans ce domaine, ouvrirait une boite de Pandore budgétaire à l’échelle européenne, de nombreux pays, dont la France avec sa dissuasion et ses capacités de projection de puissance, pouvant se revendiquer de jouer un rôle critique dans la sécurité collective du contient européen.

De fait, le refus prévisible des européens face aux exigences polonaises, n’est en rien difficile à imaginer, et il ne fait aucun doute que le président Duda et son équipe dirigeante en sont parfaitement conscients. Dès lors, la seule autre explication, quant à la sortie de Marcin Prydacz, n’est autre qu’une nouvelle provocation destinée à radicaliser encore davantage l’opposition entre européens de l’Est et de l’Ouest, et surtout à mobiliser l’électorat polonais alors que l’échéance des élections législatives devant se tenir à la fin de l’automne se rapproche, et que les sondages sont loins d’être confortables pour le PiS, qui ne parvient plus qu’à federer 35% des voix aujourd’hui, contre 26 à 28% pour la Coalition Civic d’opposition.

En effet, l’un des points d’opposition les plus importants entre ces deux formations politiques, n’est autre que la politique européenne, le KO (Koalicja Obywatelska) ayant une ligne beaucoup plus modérée et pro-européenne que le PiS. Dans ce contexte, il faut s’attendre, dans les mois à venir, à ce que les autorités polonaises multiplient les provocations visant à présenter les Européens et les institutions européennes de manière défavorable, en particulier dans le domaine hautement sensible de la Défense et de l’aide militaire à l’Ukraine, mais également par des attaques ad hominem directes contre les dirigeants européens, comme cela a déjà été le cas à plusieurs reprises contre Olaf Scholz et Emmanuel Macron ces derniers mois.

Toutefois, si la position polonaise est très sans le moindre doute à visée électoraliste, il n’en demeure pas moins vrai que L’Union Européenne pourrait jouer un rôle bien plus important qu’elle ne le fait aujourd’hui, face à l’immense défi sécuritaire qui se dessine à relativement court terme. Comme nous l’avons déjà évoqué, les capacités industrielles et sociales russes, une fois le conflit en Ukraine achevé, et ce quelque soit sa conclusion, offrent à Moscou la possibilité de reconstruire très rapidement l’outil militaire perdu en Ukraine. Dans le même temps, les risques d’alternance politique outre-atlantique font, eux aussi, peser une réelle menace sur le soutien américain à l’Ukraine, ainsi que sur l’effectivité de la protection US de l’Europe dans le cadre de l’OTAN. Même sans tenir compte de ce facteur, il ne fait guère de doute que les Etats-Unis vont devoir, à courte échéance, concentrer l’essentiel de leurs moyens militaires dans le Pacifique pour contenir la menace chinoise. Dans ce contexte, et eu égard au manque de l’attitude budgétaire des pays européens du fait du Pacte de Stabilité, il ne fait aucun doute que c’est l’Union Européenne qui aujourd’hui détient les clés d’une réponse adaptée à court terme de l’ensemble des états européens à l’évolution de la menace mondiale. En d’autres termes, cette question est loin de ne concerner que la Pologne.