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On en sait désormais plus sur les nouveaux F-15X Advanced Eagle de l’US Air Force

L’acquisition de F-15 dans un nouveau standard pour le compte de l’USAF a franchi cette semaine une nouvelle étape décisive. En effet, les centrales d’achat gouvernementales US viennent de publier des sollicitations auprès de Boeing et du motoriste General Electric pour l’acquisition de « quantités indéfinies » de chasseurs F-15EX et de réacteurs F110. S’il ne s’agit pas d’un contrat à proprement parlé, cette démarche permet aux industriels de se préparer à ces derniers afin d’accélérer les futures livraisons.

Pour rappel, le financement du Département de la Défense pour l’année 2020 accorde à l’USAF près d’un milliard de dollars pour l’acquisition de 8 F-15X, dont deux avions de tests qui détermineront la pertinence de futures livraisons. Cette acquisition relève ainsi initialement d’une décision politique, poussée par le Sénat, et non d’une demande de l’USAF qui reste en priorité attachée à ses livraisons de F-35. Pour le législateur, l’achat de F-15X parallèlement à celui de F-35, et au rétrofit de certains F-15C, est la seule solution permettant à l’USAF de palier au vieillissement de sa flotte et de permettre l’introduction de 72 nouveaux appareils chaque année.

F 15EX Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Contrairement au projet Silent Eagle, l’Advanced Eagle ne devrait pas voir sa furtivité améliorée, mais il reprend l’augmentation spectaculaire de la charge utile proposée par Boeing.

La route n’est ainsi pas encore complétement pavée pour le F-15X au cœur de l’USAF. Néanmoins, les déboires et surcoûts du F-35A aidant, et malgré les affirmations politiques maintenant une prévision de plus de 1700 F-35A pour la seule USAF, la nouvelle mouture du F-15 Eagle de Boeing va sans doute rester pendant quelques années une véritable épée de Damoclès au-dessus du F-35 de Lockheed Martin. D’après les notices d’intentions publiées par le gouvernement américain, il serait ainsi envisagé de pouvoir acheter « jusqu’à 480 réacteurs F110 », de quoi motoriser ainsi plus 220 F-15X, moteurs de rechange inclus. Même si le F-15X doit encore passer sa phase de test et prouver son intérêt opérationnel par rapport aux F-15C et F-15E actuels, notamment, de tels chiffres montrent que le Département de la Défense est prêt à remplacer intégralement la flotte de F-15C Eagle ou de F-15E Strike Eagle par le nouveau F-15X s’il s’avérait que la pleine capacité de production de la chaîne du F-35, récemment décalée de mi-2019 à début-2021, devait subir de nouveaux retards.

L’arrivée prochaine d’un petit nombre de F-15X élargit également l’horizon opérationnel de l’USAF, même si le F-35A finissait par tenir toutes ses promesses. En effet, les documents dévoilés cette semaine semblent lever les doutes sur les capacités opérationnelles des nouveaux F-15. Ainsi, le F-15X est proposé par Boeing sous deux versions disposant globalement des mêmes capacités militaires : le F-15CX monoplace et le F-15EX biplace. Comme c’était pressenti depuis quelques mois déjà, il semblerait que tous les F-15X à recevoir par l’USAF soient en version EX biplace, qui apparaît mieux adaptée pour les missions longues en environnement contesté, qui pourraient rapidement devenir la spécialité de ce nouvel appareil.

1200px USAF F 15C fires AIM 7 Sparrow Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
L’acquisition de F-15EX viendra s’ajouter à la modernisation des F-15C de l’USAF, qui se verront dotés d’un radar AESA et de réservoirs conformes afin d’éteindre leur champ d’action.

Techniquement, le F-15EX Advanced Eagle reprend ainsi la forme générale du F-15SA vendu à l’Arabie Saoudite, avec quelques fioritures au niveau des équipements de guerre électronique ou de fusion de données. L’appareil disposera d’un nouveau cockpit articulé autour d’écrans tactiles de grande dimension, d’un radar AESA APG-82 multirôle, et pourra embarquer des pods de désignation laser Sniper mais aussi un FLIR/IRST Legion lui conférant une capacité de détection passive à longue distance.

Mais l’énorme avantage de cet appareil, à la fois sur le F-35 et sur les anciens Eagle, reposera dans son extraordinaire capacité d’emport. Grâce à l’introduction de commandes de vol électroniques et d’une nouvelle structure de voilure, deux points d’emports supplémentaires ont été ouverts sous voilure, permettant l’emport de deux missiles air-air chacun. L’emport maximum « simple » en configuration air-air est donc porté à 12 missiles AMRAAM et AIM-9X, avec trois réservoirs externes et deux réservoirs conformes contre 8 missiles pour le F-15C. Si les emports doubles proposés par Boeing sont sélectionnés par l’USAF, la capacité serait alors portée à 16 missiles, voire 22 nonobstant le débarquement de deux réservoirs pendulaires sous voilure. Pour les missions air-sol, le F-15EX verra sa dotation en armements largement étendues, avec la capacité d’emporter des missiles anti-radars HARM/AARGM ou encore des missiles de croisière JSOW ou SLAM-ER. L’avion pourra également mener des assauts en mer avec l’emport de missiles Harpoon. Dans les faits, un unique F-15EX serait ainsi capable d’embarquer la charge utile combinée d’un F-15E et d’un F-15C !

Concrètement, le double avantage opérationnel du F-15EX réside dans sa capacité d’emport et son allonge, largement supérieure à celle du F-35A qui reste actuellement incapable d’embarquer des réservoirs externes. Les F-15EX pourront alors servir de « réservoirs » à munitions en combat air-air au profit des F-22, qui se contenteraient de désigner discrètement les cibles, ou tout simplement réaliser des missions d’interdiction lourdes avec une empreinte logistique plus faible comparativement au F-35, notamment en matière de ravitaillement en vol. Le F-15EX permettrait ainsi à l’USAF de compenser en partie son trop faible nombre de F-22 et d’élargir le champs d’action de ses appareils tactiques. Les F-22 se chargeraient des missions furtives à long rayon d’action, les F-15EX des opérations moins exigeantes sur le plan de la discrétion, toujours à grande distance, tandis que les F-35A resteraient le cheval de bataille à moyenne portée. De quoi réitérer, sur les prochaines décennies, le trio actuel F-15C/F-15E/F-16C, la furtivité et la capacité d’emport en plus.

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Afin de réduire les coûts du F-15EX, ce dernier reprendra en grande partie la conception du F-15SA saoudien, ici dans un vol de test avec 12 missiles AMRAAM et une suite complète de capteurs

L’avenir nous dira cependant de quoi le mix capacitaire de l’USAF sera fait. On l’a déjà vu avec le A-10C, sauvé par le Congrès de la retraite anticipée depuis plus de 10 ans, les plans de l’USAF ne sont pas écris dans le marbre, et les législateurs peuvent très bien décider de pousser la force aérienne à conserver une double chaîne d’approvisionnement pour ses chasseurs. De quoi s’assurer que l’USAF ne sera pas dépourvue en cas de catastrophe industrielle sur le F-35, mais aussi de quoi compenser les faiblesses opérationnelles du F-35A (rayon d’action) et du F-22 (emport de charges).

Au-delà d’être une sorte d’assurance vie en cas d’échec du F-35, à l’instar du Super Hornet qui continue à alimenter les escadrons de l’US Navy, l’arrivée de l’Advanced Eagle marque aussi le début du questionnement sur le remplacement des F-15 américains. Avec l’arrêt brutal et anticipé de la production de F-22 après seulement 187 exemplaires, le gros de la flotte d’interception et de supériorité aérienne de l’USAF reste assurée par les diverses variantes du F-15. Or, avec plus de 1700 F-35A prévus, soit plus que l’ensemble de la flotte tactique actuelle de l’USAF, tous appareils confondus, il apparaît pour le moins complexe d’envisager un remplacement des F-15C –puis des F-22– par un quelconque appareil, F-15EX ou avion de sixième génération, sans réduire les commandes de F-35. Dans les deux décennies à venir, l’USAF pourrait ainsi payer très cher les décisions prises au début des années 2000 lorsque le combat asymétrique semblait être la nouvelle norme et que les avions de hautes performances s’apparentaient à des reliques du passé.


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Le président turc R.T Erdogan menace la Russie d’une intervention contre la ville d’Idlib

Depuis plus d’une semaine, les forces syriennes fidèles à Bashar Al Assad, soutenues par les forces aériennes russes, ont entamé une offensive en direction de la ville d’Idlib, dans le but de reprendre le contrôle de cette ville encore aux mains des forces paramilitaires islamiques pro-turques. Mais cette offensive n’est pas du gout du président Turc R.T Erdogan, qui redoute un nouvel afflux de réfugiés. C’est la raison pour laquelle ce dernier menace désormais la Syrie et son allié russe d’une nouvelle intervention dans le nord de la Syrie, visant à mettre fin à l’offensive de Damas.

L’entente cordiale entre Ankara et Moscou semble de plus en plus difficile à maintenir en Syrie. En effet, les alliés des deux camps, les milices islamiques pro-turques d’un coté, et les forces régulières du régime de Damas, de l’autre, risquent de se retrouver en contact alors que les troupes syriennes ont entamé, depuis plus d’une semaine, une offensive vers le nord visant à récupérer la ville d’Idlib, principale ville syrienne du nord-ouest syrien, et noeud de communication stratégique pour le contrôle de tout le nord du pays. Surtout, Ankara, par la voix de son président, a prévenu Damas et Moscou d’une possible nouvelle opération militaire dans le nord de la Syrie si l’offensive syrienne ne cessait pas rapidement. En effet, les autorités turques craignent de voir une nouvelle vague de réfugiés se diriger vers son territoire, alors qu’elle accueille déjà plus de 3,6 millions d’entre eux depuis le début des conflits.

Le Su25 Frogfoot a ete largement employe par les forces aeriennes russes en Syrie Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Les forces aériennes russes maintiennent plus d’une vingtaine d’avions de combat sur la base de Hmeimim pour soutenir les opérations des forces de Damas

Mais au delà de l’argument des réfugiés, Ankara et Moscou se livrent en réalité un bras de fer pour le contrôle du nord de la Syrie, après l’accord ayant valeur de statu quo signé entre les deux présidents en 2017 à Sochi. Les autorités turques accusent Moscou de ne pas respecter les termes de l’accord passé, alors que de son coté, Moscou justifie les actions militaires pour stopper les attaques menées à partir du nord de la Syrie, et ayant visé les forces syriennes comme les forces russes déployées sur la base aérienne de Hmeimim. Dans les deux cas, il y a un évident effort de faire coller la narrative avec les objectifs géopolitiques de chacun, tous deux visant à mettre la main sur le nord de la Syrie. Les points de frictions entre Moscou et Ankara ne cessent de se révéler ces dernières semaines, que ce soit sur le dossier Syrien, ou le dossier Libyen, ou les deux capitales soutiennent des camps opposés. A ce titre, l’escale de la frégate russe Admiral Essen, appartenant à la flotte de la Mer Noire, dans le port chypriote de Limassol, pourtant à seulement quelques encablures du port syrien de Lattaquié, n’est certainement pas passée inaperçue dans la capitale turque.

Ankara se retrouve en réalité piégée par les conséquences de son offensive précédente, qu’elle mena à l’automne 2019 contre les Kurdes du YPG dans le nord de la Syrie. En provoquant le retrait des forces kurdes, et le désengagement de leurs alliés européens, Ankara a permis aux forces paramilitaires pro-turques de conserver le contrôle de la région autour d’Idlib. Or, alors que les Kurdes prenaient garde de ne pas provoquer Moscou, ces forces, en partie contrôlée d’Ankara, mènent régulièrement des opérations contre les forces du régime Syrien, et, semble-t-il, contre les forces russes. Dès lors, il n’y a plus de « force tampon » susceptible d’engager une désescalade dans la région, et l’intervention de Damas, et de son allié russe, était dès lors, plus que prévisible.

ADmiral Essen Limassol Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
La frégate russe Admiral Essen a fait escale dans le port chypriote de Limassol le 30 janvier 2020

Reste à voir, désormais, comment les deux dirigeants décideront d’agir dans les jours à venir. Il semblerait étonnant que les forces Syriennes suspendent leur offensive en vue de récupérer Idlib, tant la ville joue un rôle stratégique dans la région. Dès lors, après les déclarations que le président Erdogan vient de tenir, il est probable que, de son coté, Ankara déclenche également une opération militaire, ayant la même destination. Ceci dit, par deux fois déjà, les président russes et trucs ont su négocier des clauses de désescalades suivant des tensions sévères, notamment lorsqu’en 2015, des F16 turcs avait abattu un Su-24 russe. Quoiqu’il en soit, il apparait de plus en plus évident que l’apparente entente russo-turque est avant tout une entente de circonstance, qui n’est probablement pas appelée à perdurer.


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Et si la Belgique s’équipait d’une flottille de Rafale M plutôt que de F35A supplémentaires ?

Dans un précédent article, nous évoquions la réflexion entamée par les autorités belges concernant l’extension de la flotte de 34 F35A commandée en 2018 par 14 nouveaux appareils. Il semblerait que comme les Pays-Bas ou la Norvège avant elle, la Belgique doivent revoir le format de sa flotte de chasse pour répondre à la pression opérationnelle. Après avoir pesé de tout son poids pour amener la Belgique à choisir le F35, l’OTAN serait également à l’origine de cette réflexion, l’Alliance estimant qu’avec seulement 34 appareils, les forces aériennes belges ne seront pas en mesure de soutenir ses demandes opérationnelles. Mais cette réflexion pourrait être l’occasion de renforcer simultanément les capacités opérationnelles au profit de l’OTAN, de la protection du ciel national et des opérations Européennes, en remplaçant, à budget égal, ces 14 nouveaux F34A par 16 à 18 Rafale Marine.

L’appel d’offre pour le remplacement des F16 des forces aériennes belges avait, en son temps, fait couler beaucoup d’encre, la majorité des industriels occidentaux le jugeant biaisé en faveur du F35A de Lockheed-Martin. Des informations publiées après le choix de l’avion américain accréditèrent cette perception, puisque l’OTAN avait, pour ainsi dire, mis la Belgique dans une situation de « non-décision », en exigeant qu’elle s’équipe d’avions spécialisés dans la suppression des défenses anti-aériennes, et en considérant que seul le F35A serait capable de telles missions aujourd’hui. L’offre française, en dehors du cadre de l’appel d’offre, n’a fait qu’ajouter à la confusion, d’autant que Dassault, l’avionneur français, était très défavorable à cette offre politique. Au delà du choix de l’appareil, le format prévisionnel de la force aérienne, avec seulement 34 appareils en parc, avait été largement commenté, et critiqué, sachant qu’il était impossible que 34 F35A puissent soutenir la même pression opérationnelle que la cinquantaine de F16 actuellement en service, et pourtant déjà en saturation.

Rafale Francais et F35A Americain au point dattente Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Le Rafale F4 n’aura rien à envier au F35 concernant les capacités de détection, de communication et de traitement des données. En revanche, il conservera ses performances aéronautiques supérieures à l’avion américain.

Si l’offre française manquait clairement de consistance, n’ayant pas même été à même de fournir une offre détaillée au gouvernement Michel, elle permit d’ouvrir quelques opportunités concernant les possibles axes de coopération opérationnelle entre les forces aériennes belges et françaises, sur le modèle de la coopération entamée avec le programme CAMO portant sur l’acquisition des véhicules blindés VBMR Griffon et EBRC Jaguar par les armées belges et françaises. Parmi elles, figurait l’idée, par ailleurs intégrée à l’offre officielle française transmise par Florence Parly en 2018, d’embarquer une force aéronavale belge sur le porte-avions français Charles de Gaulle, et son successeur, si le pays venait à intégrer des Rafale Marine dans son parc. En procédant ainsi, le groupe aéronaval français, par ailleurs régulièrement escorté de frégates belges, deviendrait un groupe aéronaval de stature européenne, portant une symbolique, mais également une puissance de feu, très significative.

Le besoin d’appareils supplémentaires exprimé aujourd’hui doit permettre aux forces aériennes belges d’assurer simultanément les missions nationales comme la police du ciel, la maintenance, l’entraînement et les missions exterieures, dont une partie seulement concerne l’OTAN. De fait, il n’est pas nécessaire que les nouveaux appareils soient des F35A, du moment qu’ils permettent de libérer le potentiel opérationnel nécessaire en faveur de l’OTAN nécessitant spécifiquement cet appareil. En outre, un appareil comme le Rafale Marine est réputé pour avoir une maintenance simplifiée, une grande disponibilité, des performances élevées notamment en matière de rayon d’action, de capacité d’emport et vitesse, et dans sa prochaine version F4, il aura des capacités de détection/contre-détection et traitement des données similaires à celles du F35A. En d’autres termes, la seule différence effective entre le F35A et le Rafale M F4 sera la furtivité passive du premier, que l’on sait de plus en plus contestée par les nouveaux systèmes de détection comme les radars basse fréquence ou passifs.

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Le Rafale offre des capacités propres, comme la pénétration à très basse altitude et à haute vitesse, pour mener des missions de frappe en profondeur dans le dispositif adverse.

En outre, en rejoignant le programme Rafale, la Belgique pourra également rejoindre le programme SCAF, comme elle souhaite le faire depuis 2 ans maintenant. La coopération industrielle franco-belge pourra être étendue, même si elle ne pourra atteindre le volume de l’offre proposée par la ministre des Armées Florence Parly lors de l’appel d’offre initial. Alors que les industriels belges commencent à douter des compensations effectives liées au programme F35, un basculement d’une partie de cette industrie vers le programme Rafale constituerait, à n’en point douter, une alternative bienvenue.

Evidemment, mettre en oeuvre un second type d’appareils au sein d’une force aérienne réduite entraine des contraintes, en premier lieux desquels l’obligation de disposer de deux systèmes de maintenance et de gestion de stock de pièces détachées, et de deux cursus de formations pour les pilotes et personnels de maintenance. Mais dans le cas précis de la Belgique, ces éléments peuvent être très atténués par la proximité directe de la France, capable aussi bien de former les personnels que de mutualiser les infrastructures et procédures de maintenance afin d’en réduire l’empreinte budgétaire et humaine. Idéalement, si la France souhaite soutenir une telle initiative, il serait possible de mettre en oeuvre une flottille mixte composée d’une escadrille navale française, et d’une escadrille navale belge, et mutualisant, comme c’est le cas dans la Marine Nationale, les échelons de maintenance et de soutien. En d’autres termes, avec un minimum d’ingénierie, il serait possible de neutraliser les surcouts potentiels liés à l’exploitation d’un second type d’appareils pour les forces aériennes belges. Quand à la Belgique, elle disposerait non seulement d’une escadrille capable de répondre à l’ensemble des besoins de temps de paix, mais aussi à l’immense majorité des missions de temps de Guerre (selon les critères de l’OTAN) tout en libérant la disponibilité des F35 pour les missions spécifiques pour lequel il est requis. Cela ouvrirait également des capacités opérationnelles nouvelles pour la Belgique, au profit de l’OTAN et surtout des initiatives européennes. Enfin, et ce n’est pas à négliger, disposer de deux modèles d’appareils différents procure un regain de résilience face à de possibles attaques cyber que l’on sait menacer le F35, ou à certaines malfunctions obligeants un type d’appareil à rester au sol.

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En embarquant une flottille de Rafale M belges sur le porte-avions Charles de Gaulle, Paris et Bruxelles offriraient un symbole fort pour la construction européenne et pour l’Europe de La Défense.

Reste qu’une telle initiative ne va pas d’elle-même. Sans une implication forte des autorités françaises, mais également des armées et des industriels, elle n’aurait que peu de chances d’aboutir. Il sera par ailleurs nécessaire d’expliquer avec pédagogie et méthode les points forts d’une telle coopération à l’opinion publique belge, wallonne comme flamande, afin de s’attacher le soutien des premiers, et de diminuer l’opposition des seconds. Avec le Brexit, la Belgique reste le seul pays européen avec une tradition militaire d’opérations extérieures avec la France. Elle fut ainsi le seul pays européen à déployer des unités opérationnelles lors du lancement de l’opération Serval au Mali en 2013, en l’occurence 2 hélicoptères de recherche et sauvetage qui furent intensément employés tout au cours de l’opération. En 1978, les parachutistes belges sautèrent également sur Kolwezi, et rejoignirent les parachutistes français du 2ème Régiment Etranger de Parachutistes pour sécuriser la zone. La construction européenne étant en mal de symboles forts, et l’Europe de La Défense peinant à émerger, une telle initiative agirait, sans le moindre doute, en leur faveur, sans pour autant nuire à l’OTAN, au contraire.


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Northrop-Grumman développe un missile pour intercepter les armes hypersoniques

La DARPA, l’agence de R&D du Pentagone, a choisi il y a quelques jour l’avionneur Northrop Grumman pour réaliser la phase d’études et de démonstration technologique de son concept de défense contre les menaces hypersoniques Glide Breaker. Lancé en 2018, Glide Breaker s’inscrit dans un effort plus large de défense contre les missiles hypersoniques. Ce volet en particulier s’intéresse avant tout à la destruction des planeurs hypersoniques (Hypersonic Glide Vehicles en Anglais), tels que le missile Avangard russe ou le DF-17 chinois.

Les HGV développés ces dernières années viennent révolutionner la guerre stratégique en remplaçant les anciennes charges inertes des missiles balistiques. Les planeurs hypersoniques sont initialement propulsés par une fusée conventionnelle, à l’instar des véhicules de réentrée rencontrés sur les missiles balistiques. Contrairement à ces derniers, toutefois, les HGV n’ont pas un comportement en vol prévisible, ou balistique. Au contraire, leur forme et leur système de guidage leur permet de rebondir sur les hautes couches de l’atmosphère et même d’y évoluer librement, dans une certaine mesure. Il en découle un comportement imprévisible pour les systèmes de défense traditionnels, qui visaient jusqu’ici à placer un intercepteur cinétique sur le chemin calculé à l’avance des têtes nucléaires.

Avangard camion Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Le missile russe Avangard permet de lancer un planeur hypersonique capable de contrer la plupart des systèmes anti-missile de l’OTAN.

A noter également que la manoeuvrabilité des HGV et la possibilité de leur adjoindre un système de guidage ouvre désormais la possibilité de voir des missiles stratégiques à longue portée dotés d’ogives conventionnelles, et non plus seulement nucléaire. De quoi permettre la destruction de sites militaires, de navires mais aussi de silos de lancement stratégiques sans pour autant recourir soi-même à l’arme nucléaire. De tels systèmes viennent ainsi bouleverser l’équilibre des forces actuelles, en rendant caduque une partie des systèmes de lutte anti-balistique mis en place ces dernières années, notamment par les États-Unis. De plus, ils ont également le pouvoir de modifier la perception politique et diplomatique d’une première frappe, en pouvant décapiter les outils de dissuasion adverse –ce qui traditionnellement entraine en réaction une destruction mutuelle par armes nucléaires– sans pour autant recourir en premier au nucléaire. De quoi ouvrir des perspectives inquiétantes pour les analystes du Pentagone.

Au-delà de leur manœuvrabilité, l’alitude opérationnelle des planeurs hypersoniques pose également problème. Ces derniers opèrent trop haut pour pouvoir être interceptés par la plupart des systèmes anti-missiles atmosphériques, et trop bas pour pouvoir être détectés à temps par les systèmes d’alerte anti-balistique. Concrètement, les HGV volent en-dessous de la zone d’interception des systèmes GBMD ou SM-3, qui se situe plutôt au niveau de l’orbite basse. La démarche de la DARPA vise donc à développer un intercepteur innovant contre de telles menaces, tandis d’autres programmes de la DARPA, de l’USAF ou de l’agence spatiale de développement se chargent de développer de nouvelles méthodes pour repérer et cibler les menaces hypersoniques.

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Le système antimissile THAAD disposerait de capacités anti-HGV. Il s’agit cependant d’un système de protection ponctuel, incapable de protéger tout le territoire américain.

L’appel à propositions de la DARPA a été émis en 2018, et stipulait les objectifs du Glide Breaker : le système doit être en mesure d’intercepter des cibles hypersoniques manœuvrantes sans que les détails du projet ne soient révélés. Ainsi, seuls les véhicules hypersoniques planants seraient concernés, et pas les missiles de croisière hypersoniques opérant à des altitudes moins élevées. De même, tous les planeurs hypersoniques ne seraient pas concernés. La plage d’utilisation du Glide Breaker, en matière d’altitude et de vitesse, ne permettrait pas d’en faire un intercepteur hypersonique universel. Une telle approche devrait permettre un développement beaucoup plus rapide et surtout nettement moins coûteux. 

L’efficacité globale du système résiderait alors dans sa dimension dissuasive offerte par le secret qui entoure les performances exactes de l’engin. La DARPA précise explicitement que « la capacité à créer de l’incertitude au sein des projections de l’adversaire sur sa capacité à réussir ses frappes et sur le dimensionnement de ses salves » est une des clés du programme Glide Breaker. En somme, on en reviendrait alors aux fondamentaux de la dissuasion : sans se ruiner en cherchant à détruire toutes les menaces adverses, on laisse comprendre qu’au moins une partie des missiles adverses seront interceptés. Toute première frappe, nucléaire ou conventionnelle, sur les outils de dissuasion américains serait ainsi vouée à l’échec et entrainerait une riposte immédiate –et nucléaire– à partir des silos de lancement que le Glide Breaker aura pu protéger.

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Le X-51A est un démonstrateur de missile hypersonique américain. Si les missiles hypersoniques ont principalement une vocation tactique, les planeurs hypersoniques sont pour l’instant surtout des engins stratégiques.

Sur le plan technique, la DARPA et Northrop Grumman pourrait bien innover par la simplicité avec le Glide Breaker. Si l’interception d’un engin hypersonique est nettement plus complexe à réaliser sur le plan dynamique que celle d’une ogive classique, la destruction du véhicule est en réalité beaucoup plus simple. L’interception d’un missile balistique demande ainsi un contact direct et frontal pour détruire le véhicule de réentré, dont le profil de vol est particulièrement stable. L’aérodynamique d’un engin volant à Mach 20 est, au contraire, particulièrement sensible. A de telles vitesse, le simple fait d’endommager le véhicule ou même de modifier légèrement mais brusquement sa trajectoire va entrainer des contraintes mécaniques sur le planeur qui vont purement et simplement le disloquer.

Ainsi, le Glide Breaker pourrait ne pas avoir besoin de rentrer en contact direct avec sa cible hypersonique manoeuvrante. Il lui « suffirait » de s’approcher suffisamment pour en perturber le vol. Cela pourrait se faire par le biais d’une explosion qui détruirait alors le véhicule par le biais d’éclats ou, tout simplement, par son onde de choc. Un Glide Breaker pourrait également larguer des particules métalliques –minuscules mais mortelles à de telles vitesses– sur le trajet de l’assaillant, ou encore perturber son trajet par la propre onde de choc de son déplacement.

Les options restent ouvertes, et Northrop Grumman pourrait aussi choisir de baser son Glide Breaker sur un design plus conventionnel, comme son IBCS, mais à la portée étendue pour couvrir ces nouvelles menaces. En attendant, le contrat de 13 millions $ de la DARPA ne couvrira que la phase d’étude et une partie des démonstrations, qui pourraient avoir lieu d’ici la fin de l’année. Ce programme va donc s’inscrire parmi d’autres initiatives américaines, européennes ou asiatiques visant à développer des missiles hypersoniques pour des utilisations tactiques aussi bien que stratégiques, mais aussi des systèmes permettant de contrer de telles menaces. Si la Russie et la Chine ont su s’imposer en quelques années comme des leaders dans ce domaine, force est de reconnaître que les États-Unis ou encore la France disposent encore d’excellentes connaissances scientifiques et techniques en matière de vitesses hypersoniques, qu’il convient désormais de transformer en systèmes opérationnels, avec tout l’investissement que cela implique.


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Le F35A ne tire pas droit selon le Pentagone

Décidément, quand ça ne veut pas… Selon le site Bloomberg.com, les tests concernant la précision du canon de 25mm embarqué sur les F35A, la version destinée à l’US Air Force et à la majorité des pays acquéreurs de l’appareil de Lockheed-Martin, auraient donné des résultats « inacceptables », notamment lors de tirs air-sol. Et comme si cela ne suffisait pas, le support du canon présenterait des fissures, également appelées crics en aéronautique, suite à l’utilisation du canon. A noter que les versions F35B à décollage vertical et F35C embarquées sur porte-avions ne présentent pas ce défaut.

Cette nouvelle défaillance, que Lockheed-Martin aurait probablement préféré ne pas voir sortir dans la presse, s’ajoute aux nombreuses défaillances toujours sans solutions concernant l’appareil, qui ne parvient pas à atteindre un seuil de fiabilité acceptable. En Novembre 2019, il restait encore 13 défaillances critiques à corriger, alors que le système informatique de l’appareil avait lui 873 défaillances logicielles, à peine un peu moins que les 917 révélées une année auparavant. La correction des défaillances critiques, qui devait avoir lieu avant 2020, n’est pas attendue avant le mois d’octobre, si tout va bien.

F35 norge Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Malgré ses nombreuses défaillances, le F35A continu de séduire la majorité des forces aériennes occidentales, que ce soit en Europe ou dans le Pacifique

Outre les défaillances physiques et logicielles, des analyses récentes mettent en lumière la vulnérabilité de l’appareil aux attaques cyber. L’avion américain étant avant tout un système d’information interconnecté volant, il dispose de nombreux protocoles d’échange, et d’un écosystème logique entourant sa mise en oeuvre. L’interconnexion de ces systèmes ouvre évidemment des risques face aux tentatives d’intrusion, qu’elles soient externes ou internes, volontaires ou non. Dans un domaine similaire, le Think Tank britannique Chatham House avait publié, l’année dernière, un rapport selon lequel il convenait de considérer que la galaxie de satellites militaires et civils occidentaux avait d’ores et déjà été infiltrée par des services étrangers.

Malgré les très nombreux handicapes qui touche l’avion américain, les clients semblent pourtant se presser pour en faire l’acquisition. Récemment, c’est la Pologne qui s’alignait pour en commander 32 exemplaires, alors que la Belgique envisage d’en acquérir 14 exemplaires supplémentaires, la flotte de 34 appareils initialement prévues étant insuffisante pour répondre aux besoins de l’OTAN. Cette uniformisation des forces aériennes occidentales sur la base d’un appareil par ailleurs vulnérable en bien des domaines, et ne parvenant pas à atteindre un statut opérationnel suffisant, ne constitue-t-elle pas aujourd’hui la plus grande vulnérabilité occidentale, alors que 80% de la puissance de feu de l’OTAN repose sur la force aérienne ? D’autant que l’année dernière, à la même date, un rapport parfaitement identique avait déjà alerté sur ces différents points sans, visiblement, qu’aucune solution n’ait été apportée depuis …


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Regain de tensions entre Paris et Ankara au sujet de la Libye et de Chypre

Les relations entre le président français E.Macron et son homologue R.T Erdogan étaient déjà bien peu diplomatiques ces derniers mois, tant au sujet de l’intervention turque dans le nord de la Syrie que de la politique de fait accompli que tente de mettre en oeuvre les autorités ottomanes autour de l’immense gisement gazier découvert à proximité de Chypre, et qui dépend de la partie indépendante de l’Ile membre de l’Union européenne. Mais ces derniers jours, les tensions ont franchit une nouvelle étape, lorsque le président français a ouvertement accusé R.T Erdogan de ne pas respecter ses engagements en Libye, en alimentant le conflit en mercenaires prélevés des effectifs des milices pro-turques en Syrie.

Au cours des derniers mois, Paris et Ankara se sont confrontées sur plusieurs dossiers. Déjà en mars 2018, la France s’opposant à une intervention turque dans le nord de la Syrie afin de protéger ses alliés Kurdes du YPG, les autorités turques avaient publiées les positions des forces spéciales françaises déployées dans la zone, faisant peser un regain de risques sur ces forces et provoquant la colère des autorités françaises. Mais c’est l’intervention des forces armées turques contre ces mêmes alliés des français du YPG dans le nord de la Syrie, consécutive du retrait des forces américaines annoncé par D.Trump, qui mit réellement le feu aux poudres, même si plusieurs déclarations du président Turc avaient déjà suscité l’agacement des autorités françaises. Lors du sommet de l’OTAN de décembre 2019, E.Macron critiqua ouvertement l’alliance pour ne pas prendre des mesures contre la Turquie alors que celle-ci avait acquis des systèmes S-400 de défense antiaérienne de facture russe. Ce à quoi le président Erdogan répliqua par des attaques Ad Hominem contre le président français et son épouse, ce qui entraina la convocation de l’ambassadeur turc à Paris.

Un navire de forage turc escorte par une fregate de la classe Gabya Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Un navire de forage turc escorté par une frégate turque en juillet 2019, dans la zone revendiquée par Ankara

Au delà du dossier Syrien, Paris et Ankara sont opposées dans deux dossiers bien plus problématiques. En Libye, d’abord, ou Ankara apporte un soutien militaire de plus en plus appuyé aux forces du Gouvernement d’Union Nationale ou GNA de Fayez el-Sarraj à Tripoli , avec envois de blindés et d’hommes, notamment depuis le quitus donné par le parlement pour déployer des troupes régulières turques en début d’année 2020. Ce gouvernement est soutenu par la communauté internationale, et est reconnu par les Nations Unis. Mais l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis et l’Egypte soutiennent, pour leur part, les forces du maréchal Haftar commandant les Forces Nationales Libyennes. Le conflit sous forme de guerre civile entre ces deux factions dure depuis deux ans, avec un avantage militaire du coté des FNL.

Le soutien turc n’est évidemment pas dénué d’intérêts, le GNA ayant accordé à la Turquie des concessions extraterritoriales en Méditerranée sur des zones contestées par la Grèce et Chypre. Or, cette zone est également riche en hydrocarbure, alors même qu’à plusieurs reprises, des navires de forage turcs escortés de bâtiments de combat effectuèrent des forages ces derniers mois dans la zone economique exclusive chypriote. Ankara estime en effet que les réserves d’hydrocarbures découvertes à proximité de l’ile appartiennent conjointement à la partie indépendante de Chypre, et à la Turquie.

FDI grecque Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Paris et Athènes négocient pour la commande de 2+2 frégates de défense et d’intervention FDI pour la Marine Hellénique

Le Président E. Macron a visiblement décidé de mettre fin à tout cela. Conjointement à la condamnation publique de l’envoi de 1500 à 2000 mercenaires turco-syriens et de materiels militaires lourds en Libye par la Marine Turque, le président français a également annoncé le déploiement de forces navales françaises en Mediterranée orientale, pour s’opposer si besoin à la politique de fait accompli d’Ankara, et apporter un soutien bien visible à Athènes dans la confrontation en cours. Dans le même registre, Paris a annoncé le renforcement de la coopération militaire avec Athènes, dans le domaine naval comme terrestre. Ces déclarations auront évidemment satisfait le premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis en visite à Paris lors de la prise de parole du président. La position de fermeté française vis-à-vis d’Ankara en Méditerranée Orientale et en Libye sera également probablement bien reçu au Caire, le président Al-Sissi ayant récemment ordonné la tenu d’un vaste exercice militaire « Qadir 2020 » à proximité de la frontière Libyenne, une démonstration de force destinée évidemment à envoyer un message à Ankara.

Reste que le dossier turco-libyen est un véritable imbroglio diplomatique. Ainsi, le Qatar soutien ouvertement le GNA, de même que l’Italie, qui garde une importante emprunte autour de Tripoli. La Russie, portant proche de la Turquie en Syrie, soutiendrait l’ANL du maréchal Haftar, même si officiellement, sa position est sensée être neutre. Quand à la position de la France, elle reste ambiguë. Officiellement, Paris soutien le GNA reconnu par la communauté internationale. Mais les autorités françaises craignent que ce gouvernement ne servent des intérêts internationaux, notamment ceux de la Turquie, avec à terme un risque pour la stabilité en Méditerranée et en zone sud-saharienne ou elle reste massivement engagée pour lutter contre le terrorisme islamique. En outre, elle maintiendrait des canaux de communication étroits avec le maréchal Haftar, laissant penser à certains observateurs qu’officieusement, la France soutiendrait bien davantage ce dernier que sa position officielle ne le laisse croire.

Un E2 C Hawkeye pret a etre catapulter sur le pont du Porte avions nucleaire francais Charles de Gaulle Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Le Porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle effectuera une halte dans le port chypriote de Limassol en février 2020 pour marquer le rapprochement franco-grec

Quoiqu’il en soit, le rapprochement militaire entre Paris et Athènes va bénéficier d’un symbole de poids en février, le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle devant effectuer une halte au port de Limassol, à Chypre, dans le cadre de la Mission Foch. Ce sera l’occasion pour la France d’afficher sa détermination envers l’intégrité territoriale de l’Ile, et de mettre en avant le rapprochement en cours entre la France et la Grèce. Les autorités grecques et françaises sont, par ailleurs, engagées dans une importante négociation portant sur l’acquisition de 2 Frégates françaises FDI, avec 2 unités supplémentaires en option, dans un standard identique à celui de la Marine Nationale.


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L’US Navy met à jour le Tomahawk mais prévoit d’en diminuer drastiquement les stocks

Avec le mythique B-52 et le bombardier aux lignes futuristes B-2, le missile de croisière Tomahawk TLAM est sans aucun doute l’engin le plus symbolique de la puissance de frappe américaine. Entré en service au milieu des années 1980, ce missile a été de tous les conflits depuis lors sous différentes variantes régulièrement mises à jour. Alors que l’US Navy n’a jamais disposé d’autant de plateformes de lancement pour ce missile –10000 tubes compatibles dispersés sur 89 destroyers et 58 sous-marins– et qu’elle dispose toujours de près de 4000 Tomahawk en stock, l’US Naval Institute annonce que la marine américaine s’apprête à débuter une nouvelle mise à jour majeur du missile, le Block V.

Mais si le Block V promet d’apporter des capacités révolutionnaires au Tomahawk, le programme de modernisation devrait également conduire à une réduction drastique du nombre de missiles en stock. Si les nouveaux programmes ne manquent pas pour compenser à terme cette perte capacitaire, l’US Navy pourrait tout de même connaître quelques années de vaches maigres en matière de moyens de frappe en profondeur. Or, plus que jamais, les opérations extérieures américaines se reposent fondamentalement sur les stocks de missiles de croisière destinés à décapiter les défenses adverses avant toute intervention terrestre ou aérienne.

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L’US Navy dispose de plusieurs milliers de tubes de lancement verticaux Mk41. La plupart sont compatibles avec le lancement du Tomahawk, mais aussi des missiles anti-aériens et du LRASM antinavire.

Ainsi, plus 2000 Tomahawk ont été tirés ces trente dernières années, principalement contre des ennemis de second ou troisième rang bien incapables de déployer des réseaux de déni d’accès (A2/AD) aujourd’hui déployés et commercialisés par la Russie ou la Chine. Le programme de modernisation Block V vise ainsi à prolonger de 15 ans la durée de vie du Tomahawk et à le doter de nouvelles capacités lui permettant de mieux contourner les défenses intégrées de dernières générations. Malheureusement, le programme ne vise qu’à mettre à jour les Tomahawk Block IV existant parallèlement à un retrait opérationnel des Block III, qui constituent plus de la moitié du stock actuel.

Au-delà du traitement des obsolescences, le Block V modernisera toute la suite de navigation et de communication du Block IV, notamment sa liaison de données radio et satellite et son système de guidage inertiel/GPS. Le choix a cependant été fait de ne pas intégrer de telles capacités, jugées critiques, sur les Block III, principalement pour des raisons budgétaires, conduisant à la démilitarisation et au démantellement de ces derniers.

La division par deux, au moins, du nombre de Tomahawk dans la décennie à venir sera d’autant plus critique que le Block V va permettre de multiplier les missions dévolues aux Tomahawk, avec le retour très attendu d’une variante antinavire du missile, désignée Block Va Maritime Strike. Il s’agira techniquement d’un Block V standard, avec le même système de navigation et les mêmes améliorations de communications, à qui on ajoutera un kit autodirecteur multimodes pour lui permettre de cibler des navires en mouvement. Une telle variante est très attendue par les marins et sous-mariniers américains, qui ont toujours regretté le retrait de l’UGM-109B TASM antinavires en 1994.

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Les 4 SSGN de la classe Ohio ont été spécifiquement modifier pour l’emport massif de Tomahawk, jusqu’à 154 missiles de croisières pouvant être emportés à bord de ces sous-marins.

Une variante Block Vb devrait également apparaître afin d’offrir de nouvelles capacités à la version Land Attack. Le Block Vb sera équipé d’une nouvelle charge militaire nommée JMEWS (Joint Multiple Effects Warhead System) capable de moduler son effet létal selon la nature de la cible. Le Block Vb serait ainsi adapté à la destruction de cibles enterrées, de systèmes de défense anti-aérienne intégrés, ou encore de sites de production ou de stockage d’armes de destruction massive.

Ces deux évolutions majeures du Block V visent ainsi expressément à contrer les capacités A2/AD, terrestres et navales, mises en œuvre depuis quelques années par la Russie et la Chine, mais également de plus en plus exportées de par le monde. Or, en matière de frappe de saturation, la quantité est une qualité en soi, et certains observateurs s’interrogent sur le risque engendré par un stock de Tomahawk réduit à moins de 1400 unités d’ici 10 ans. Pour rappel, la seule première vague de missiles envoyés en 2011 sur la Libye comportait 110 missiles, soit l’équivalent de 8% du stock actuel de Tomahawk Block IV, et 228 TLAM avaient été tirés par les Britanniques et les Américains lors de la campagne du Kosovo.

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L’arrivée prochaine du Tomahawk Block Va redonnera à l’US Navy une capacité de frappe antinavire à très longue portée, perdue en 1994. Les Block Va devraient conserver une capacité de frappe contre la terre.

Face à des cibles bien défendues par des systèmes intégrés modernes, l’US Navy semble ainsi changer son fusil d’épaule, et privilégier les capacités de pénétration à la saturation brute. Si un tel choix peut être discuté, notamment puisqu’il réduit les contraintes sur les stocks de missiles de défense antiaérienne adverses, il semble surtout économiquement pragmatique, permettant de finaliser le développement et de consacrer des fonds à la production en série de nouveaux missiles de croisière hypersoniques. De plus, l’US Navy commence depuis quelques années à rendre plus polyvalents ses missiles, le SM-6 et l’ESSM antiaériens ayant été qualifiés pour l’attaque de cibles navales, tandis que le missile de croisière antinavire furtif AGM-158 LRASM remplaçant du Harpoon devrait également être apte à la frappe de cibles à terre, malgré leur portée d’environ 500km contre plus de 1700km pour le Tomahawk.

Les questionnements actuels de l’US Navy en matière de missiles de croisière sont loin d’être isolés. En Europe, de plus en plus d’acteurs s’interrogent ainsi sur la pertinence de disposer de tels vecteurs sur leurs sous-marins (Pologne, Espagne, Pays-Bas, etc.) et frégates (Grèce), ou bien de multiplier les plateformes navales aptes à les mettre en œuvre. Ainsi, les Tomahawk britanniques devraient passer au Block V, mais pour l’instant seuls leurs sous-marins sont en mesure de les employer, pas leurs frégates.

FREMM MdCN Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Avec le MDCN, la France entre dans le club extrêmement fermé des marines mettant en oeuvre des missiles de croisière navals. Les faibles stocks risque cependant de limiter leur usage dans des conflits armés majeurs.

En France, après plus de 15 ans d’hésitations et plus d’une décennie de développement, le MDCN (missile de croisière naval) de MBDA est enfin en service sur les FREMM et devrait constituer un des armements principaux des sous-marins Barracuda. Plateforme de dernière génération, le MDCN intègre dès la conception un système de guidage extrêmement précis et robuste ainsi que certaines propriétés furtives optimisant ses capacités de pénétration. Malheureusement, leur stock actuel et futur est particulièrement bas, 200 missiles uniquement ayant été achetés pour équiper les navires et sous-marins français. Une faiblesse des commandes qui inquiète en plus haut lieu, le chef d’état-major de la Marine, l’amiral Prazuck, n’ayant pas manqué de le rappeler lors de son audition récente au Sénat. D’autant plus que les plateformes aptes à embarquer ces missiles pourraient bien se multiplier à l’avenir.

Les chaînes d’assemblage étant encore capables de fournir de nouveaux MDCN, en cas d’extension des commandes, les seules limitations à l’état des stocks français semblent donc être, comme souvent, financier. On peut cependant comprendre l’hésitation à commander de nouveaux MDCN alors même que le programme franco-britannique FMAN/FMC pourrait conduire à la création d’un missile de croisière de moindre portée mais doté d’une discrétion accrue et/ou de capacités de frappe à très grande vitesse. A l’instar de ce qui est envisagé dans l’US Navy, ce programme franco-britannique permettrait ainsi de diversifier les options d’attaque par missiles de croisière, mais la survie effective de ce programme aux années post-Brexit est encore loin très d’être assurée, risquant de conduire la France à faire cavalier seul pour le remplacement de ses SCALP et Exocet et, qui sait, le renforcement de sa capacité de frappe navale à longue distance.


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Le projet d’avion suborbital XSP de la DARPA est abandonné après le retrait de Boeing

Le 22 janvier, Boeing a annoncé sa décision de stopper sa participation au programme Experimental Spaceplane (XSP ou XS-1) mené par la DARPA, l’agence de R&D de la défense américaine. Un retrait qui signe purement et simplement la fin de ce programme, puisque Boeing y était le maître d’œuvre. Si l’annonce paraît presque anecdotique au milieu des déboires que connaît actuellement l’avionneur américain, il s’agit cependant d’un nouveau coup dur pour le secteur spatial américain qui peine définitivement à donner vie à des navettes spatiales automatisées, particulièrement dans le secteur militaire.

Il faut dire que le programme XS-1, par la suite redésigné XSP, n’était pas le premier essai du Pentagone et de la DARPA. On se rappelle notamment du Rockwell X-30 mené dans les années 1980 et abandonné en 1993 avant le premier vol du prototype. Plus emblématique encore, le X-33 VentureStar et le X-34 d’Orbital Sciences mobilisèrent de nombreux efforts de la part des industriels, de la DARPA et de la Nasa jusqu’à l’arrêt des financements en 2001. Dans la foulée, la DARPA a alors tenté de lancer le RASCAL, un appareil hypersonique destiné à lancer une mini-fusée transportant des satellites.

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Le Phantom Express de Boeing aurait du transporter un lanceur léger sur son dos, permettant la mise en oeuvre rapide et à bas coût d’un satellite léger en orbite basse

L’idée générale derrière le concept RASCAL finira ainsi par donner vie à l’Experimental Spaceplane. La DARPA a ainsi sélectionné Boeing et le motoriste Aerojet Rocketdyne pour construire un démonstrateur de navette suborbitale à moteur fusée, le XS-1. Le concept autour de l’Experimental Spaceplane est simple : un avion-fusée décolle verticalement jusqu’aux portes de l’espace. Là, un second étage non-réutilisable emporté sur le dos de l’avion est mis à feu pour emporter en orbite basse un ou plusieurs satellites, pour une masse totale d’environ 1300kg. La navette automatisée reviendrait alors se poser de manière conventionnelle en planant.

Une telle solution avait l’avantage d’être simple –avec un moteur fusée et un emport de charge externe– et économique. Le coût de chaque mission devait être de 5 millions $, et le XSP devait être en mesure d’effectuer 10 missions sur une période de 10 jours. Sur le plan opérationnel, l’idée était donc de disposer d’un engin rapide à déployer depuis des infrastructures légères afin de compléter ou de remplacer rapidement des satellites qui auraient été détruits ou mis hors service par l’ennemi. Dénommé Phantom Express, l’avion suborbital de Boeing devait reprendre une partie des technologies développées par la firme pour le X-37B, et une dizaine de vols de démonstration étaient attendus pour cette année.

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Deux drones spatiaux X-37B de Boeing sont en service actif dans l’USAF, réalisant des missions hautement classifiées. Leur mise en orbite s’effectue cependant par le biais d’un lanceur conventionnel

Malgré l’intérêt porté par la DARPA sur le programme, Boeing a préféré se retirer et réaffecter les ressources humaines sur d’autres programmes militaires et spatiaux. Aucun détail n’a été donné sur ces réaffectations, même si on peut penser que le X-37B ou encore la capsule CST-100, qui accuse quelques retards, sont considérés comme plus stratégiques et donc plus prioritaires pour la firme. Globalement, ce retrait du XSP s’inscrit malheureusement dans la longue liste des échecs récents de Boeing, après le fiasco du 737 Max, la redéfinition en profondeur du futur 797 ou le semi-échec du CST-100 Starliner qui n’a pu atteindre la Station Spatiale Internationale en décembre dernier. L’annulation de l’ensemble du programme par la DARPA marque également un nouvel échec dans le développement d’un avion spatial américain.

Pour autant, sur le plan opérationnel, l’annulation du XSP Phantom Express ne devrait pas avoir trop d’incidence sur le spatial militaire américain. D’une part, en matière de pure maîtrise technologique, le succès du X-37B permet aux États-Unis de conserver le leadership en matière de drones spatiaux. D’autre part, si le XSP restait un programme de recherche et de développement intéressant en soi, les récents bouleversements dans le domaine spatial civil et militaire auraient diminuer peu à peu l’intérêt pour un tel lanceur, aussi souple d’emploi soit-il.

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Le XSP est l’héritier du concept RASCAL, beaucoup plus complexe et coûteux à mettre en oeuvre.

Ainsi, les futures architectures spatiales envisagées par Space Development Agency pour le compte de l’US Space Force devraient s’appuyer sur de véritables constellations de satellites légers, pouvant être mis en orbite par grappe avec des coûts au lancement particulièrement faible. Mieux encore, les constellations militaires, à l’instar des futures constellations civiles mises en avant par les acteurs du NewSpace, devraient assurer une résilience intrinsèque pour les capacités militaires spatiales. De quoi réduire l’intérêt pour un avion suborbital conçu avant tout pour compenser des pertes de satellites.

Enfin, tout porte à croire également que le concept même d’avion suborbital, s’il n’est pas à proprement parlé obsolète, ne présente plus vraiment d’avantage compétitif par rapport à d’autres solutions réutilisables plus conventionnelles. Entre les fusées légères réutilisables, la réduction des coûts par l’impression 3D ou le déploiement de fusées légères à partir d’avions atmosphériques, les industriels du NewSpace ne manquent pas de projets permettant d’offrir un accès à l’orbite basse rapide, flexible et à bas coût. Et les acteurs étatiques ne semblent d’ailleurs pas en reste, puisque l’ONERA travaille également, en France, sur un programme de lanceur léger réutilisable pour répondre à un besoin opérationnel urgent similaire à celui couvert jusqu’aujourd’hui par le XSP de la DARPA


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L’achat de 14 F-35 supplémentaires serait à l’étude en Belgique

D’après le quotidien belge Le Soir, la Défense belge envisagerait la possibilité d’acquérir jusqu’à 14 F-35A en plus des 34 appareils déjà commandés. Cette hypothèse, qui reste relativisée par les autorités politiques, s’appuierait avant tout sur une demande de l’OTAN estimant que 48 chasseurs modernes sont nécessaires pour permettre à Bruxelles de respecter ses engagements au sein de l’Alliance, alors que les tensions vont grandissantes avec la Russie.

Dans son analyse de la situation, Laurent Lagneau du site Opex360 évoquait également ce matin un rapport édifiant de la Cour des comptes belge pointant la baisse continue du niveau d’ambition de composante Air alors même qu’il constate une « évolution défavorable de l’environnement sécuritaire global ». Dans le détail, ce document traite avant tout des difficultés rencontrées aujourd’hui par la force aérienne belge, qui peine à respecter son contrat opérationnel (32 chasseurs disponibles en permanence) alors même qu’elle aligne une flotte de 54 F-16.

F35 netherlands Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Deux F-35A néerlandais en essais aux USA. Initialement, 85 appareils étaient prévus, avant que l’explosion des coûts du programme ne réduise la commande à 37 puis 46 unités.

Nul doute, dans de telles conditions, qu’un format réduit à 34 F-35 ne fera que dégrader cette situation. D’autant plus que la maintenance de l’appareil sera en grande partie externalisée, alors que celle du F-16 était gérée principalement en interne. Or, l’externalisation, outre des dépenses fluctuantes et difficilement prévisibles, peut avoir un impact négatif et incontrôlé sur la disponibilité des appareils, aucune amende infligée à un sous-traitant en retard ne permettant de mettre en vol un avion cloué au sol, quelle que soit la bonne volonté de ses techniciens.

Initialement, la composante Air devait compenser partiellement la diminution de sa flotte de chasseurs en procédant à une intégration encore plus poussée avec l’armée de l’air royale néerlandaise (KLu). Cette dernière avait d’ailleurs initialement commandé 37 F-35A, soit sensiblement autant d’appareils que sa partenaire belge. En octobre dernier, toutefois, ministère de la défense néerlandais a annoncé vouloir procéder à l’achat de 9 chasseurs supplémentaires, un chiffre qui pourrait être porté à 15 si les Pays-Bas suivent les recommandations de l’OTAN. Si le souhait de l’état-major de la KLu est de disposer, in fine, de 67 F-35, cela ne pourra se faire que de manière très progressive.

F16 Belgique Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
La Belgique a longtemps opéré 160 F-16 aux côtés de plusieurs dizaines de Mirage 5. Aujourd’hui, la composant Air peine à déployer des contingents ponctuels de 6 appareils…

En effet, étant donné le prix à l’achat et à l’entretien du F-35, de telles augmentations de commandes ont fatalement un impact sur le reste de l’effort de défense des pays concernés. Aux Pays-Bas, la commande des F-35 supplémentaires a entrainé le report de plusieurs programmes majeurs, notamment sur le plan naval, tandis que le financement d’une Défense améliorée en Belgique ne pourrait passer que par une élévation des efforts budgétaires qui pourrait ainsi atteindre 1,28% du PIB –ce qui reste bien loin des recommandations de l’OTAN– en cas d’effort politique réel.

Si cet achat de 14 F-35A supplémentaires est bel et bien à l’étude, rien ne dit pour autant que la Défense belge pourra se le permettre avant la fin des livraisons des 34 appareils déjà commandés. De manière générale, les débats autour du nombre de F-35 acquis en Belgique, aux Pays-Bas mais aussi en Norvège, au Royaume-Uni ou au Canada laisse tout de même transparaître le principal problème du programme JSF F-35 : son prix excessif et sa mauvaise disponibilité. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le coût des avions de chasse ne cesse d’augmenter, chaque nouvelle génération ne permettant pas de remplacer nombre pour nombre les anciens appareils. Malheureusement, depuis la chute du mur de Berlin et les fameux Dividendes de la paix, nombre d’armées de l’air occidentales ont atteint un point critique en matière de réduction d’effectifs. S’il pouvait encore être acceptable de réduire par deux le nombre d’appareils commandés lorsque l’on aligne plusieurs centaines de chasseurs de types différents, les choses changent lorsque l’on passe sous la barre des 100 voire 50 appareils en parc.

Entre les appareils en réparation courante, ceux destinés à l’entrainement des équipages et à la permanence opérationnelle, qui demandent un nombre relativement stable d’avions, la masse minimale ne peut plus être atteinte pour répondre à des déploiements à l’étranger, participer à des exercices majeurs ou répondre à une crise ponctuelle. Aussi furtif et interconnecté soit-il, le F-35 ne dispose pas du don d’ubiquité. On en arrive ainsi à une situation particulièrement ironique. La furtivité et les capacités de combat en réseau du F-35 sont jugées essentielles pour permettre aux petites forces aériennes d’intégrer les coalitions alliées. Mais ces capacités augmentent considérablement le prix des appareils, réduisant le nombre de chasseurs en dotation. Les flottes diminuées peinent alors à accomplir leurs seules missions de permanence opérationnelles –où la furtivité est loin d’être essentielle– et ne sont alors plus en mesure de déployer des contingents réguliers au sein des coalitions…

Vue dartiste chasseur de mines naval group belgique Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Si la commande de 14 F-35 supplémentaires est évoquée dans les hautes sphères de l’armée, rien ne garantit qu’elle puisse être financée, à l’heure où la Belgique renouvelle également ses forces terrestres et navales.

Au-delà des critiques, désormais communes, autour du F-35 lui-même, la situation en Belgique et dans l’OTAN au sens large interroge tout de même sur la validité, ou du moins la pertinence, des modèles appliqués sur les appels d’offre conduisant à l’achat d’avions de combat. En effet, l’appel d’offre belge portait précisément sur 34 appareils, censés correspondre à une enveloppe budgétaire permettant –fort justement– l’achat de F-35. Or, pour le même prix, d’autres compétiteurs tels que le Gripen de SAAB ou le Super Hornet de Boeing auraient pu être en mesure de proposer un nombre bien plus élevé d’appareils, compensant par le nombre certains de leurs désavantages techniques tout en permettant à la composante Air de mettre en ligne plus d’escadrons et donc d’être mieux à même de remplir son contrat opérationnel.

On peut d’ailleurs préciser que la Belgique est loin d’être la seule concernée par cette approche, qui reste encore aujourd’hui très standard. Pourtant, une approche basée sur les capacités globales à iso budget serait bien plus pertinente étant donné les avancées apportées en matière d’avionique, d’armement et de liaisons de données. D’ailleurs, le Gripen suédois a été le premier appareil conçu selon cette optique, ce chasseur léger devant succéder au Viggen nettement plus lourd en misant sur sa capacité à être produit en plus grand nombre et dispersé sur le territoire suédois.

Gripen E et GlobalEye de Saab Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Le Gripen, couplé au GlobalEye, est proposé à la Finlande dans le cadre d’un appel d’offre basé sur les capacités opérationnelles globales des compétiteurs plus que sur les performances individuelles de chaque chasseur.

Peu à peu, certaines armées de l’air tendent ainsi à demander dans leurs appels d’offre une capacité opérationnelle globale, afin de répondre à un cahier des charges plus opérationnel que technique. La compétition HX en Finlande est ainsi un exemple à suivre dans ce domaine, permettant aux constructeurs de proposer des équipements annexes (avions de reconnaissance, de guerre électronique, etc.) pour peu qu’ils respectent l’enveloppe budgétaire. De même, alors que le précédent appel d’offre suisse, annulé depuis, portait sur la fourniture de 22 chasseurs uniquement, la compétition actuellement en cours va étudier plusieurs formats possibles, considérant le coût, le nombre d’appareils et leurs capacités opérationnelles respectives comme autant de variables différentes.

Cependant, ces deux exemples pourraient bien rester des exceptions encore un moment, notamment en Europe. Si la Finlande et la Suisse insistent sur la transparence de leurs appels d’offre, de nombreuses forces aériennes de l’OTAN restent doctrinalement attachées au matériel américain, les nombreux achats de F-16 et de F-35, notamment en Europe de l’Est, n’ayant même pas fait l’objet de réels appels d’offre.


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Les réductions budgétaires handicapent la modernisation de la Marine Indienne face à la Chine

Pour faire face à la montée en puissance très rapide de la marine de l’Armée Populaire de Libération chinoise, qui passera de 330 bâtiments de surface et 67 sous-marins aujourd’hui, à 450 navires de surface et 100 sous-marins en 2030, la Marine Indienne s’était engagée, des 2012, dans un vaste plan de modernisation et d’extension, devant l’amener des 130 navires actuellement en service à 200 bâtiments en ligne en 2030, dont 2 groupes aéronavales autours des porte-avions IAC-1 INS Vikrant et INS Vikramaditya. Mais la baisse des recettes budgétaires de l’Etat indien, liée au ralentissement de la croissance du pays qui est passée de 8,5% en 2015 à 5% en 2019, a des conséquences importantes sur l’exécution de ce plan.

Pendant plusieurs années, et jusqu’en 2015, le budget consacré à La Défense par New Delhi resta stable autour des 51 Md$, et ce malgré la croissance souvent très importante de l’économie nationale. En 2015, face à l’évidente transformation de la puissance militaire chinoise et du renforcement Pakistanais sur la base d’une alliance de plus en plus solide avec Pékin, le premier ministre N.Modi entama un plan pour moderniser rapidement ses forces armées, concomitamment à son industrie de défense. Entre 2015 et 2019, le budget de La Défense indien passa de 55 à 66 Md$. Mais dans le même temps, la part des dépenses attribuées à la Marine indienne passèrent de 18% à 12%, entrainant une baisse effective des crédits de prés de 2 Md$ par an.

INS Kalvari Scorpene Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
L’INS Kalvari, premier des 6 sous-marins de type Scorpene du programme P75

Or, dans le même temps, les ambitions navales indiennes, aiguillonnées par la croissance de la Marine Chinoise mais également de la modernisation de la Marine Pakistanaise, ne cessaient de croitre, avec de nombreux programmes lancés comme les sous-marins P75 Kalvari, les destroyers de la classe Visakhapatnam du project 15B, les frégates de la classe Nilgiri du projet 17, ou le programme IAC-1 visant à concevoir un porte-avions indigène de 65.000 tonnes.

De fait, lorsque le budget annuel de la Marine fut ramené, en janvier 2020, de 64,307 à 41,259 Crore (1 crore = 127 k€), l’Etat-major fut mis dans une situation dramatique, incapable non seulement de lancer de nouveaux programmes, mais également de répondre aux échéances des programmes en cours. En effet, selon les autorités navales indiennes, il manquera 2 Md$ en 2020 pour simplement financer les programmes en cours de fabrication. Quand au format de la flotte en 2030, il ne dépassera pas les 175 navires, avec la diminution de prés de 40% des admissions au service des bâtiments neufs, et probablement le prolongement de plusieurs navires obsolètes.

INS Nilgiri Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
l’INS Nilgiri, première de classe éponyme de 7 frégates furtives, a été lancée le 28 septembre 2019

Les premiers effets n’ont pas tardé à se faire ressentir. Ainsi, l’Indian Navy a d’ores et déjà réduit le nombre de navires du programme de chasseurs de mines en cours de 12 à 8 unités, alors que le nombre d’hélicoptères de surveillance radar avancée Ka-31 est passé de 10 à 6 unités. Quand aux 41 navires appartenant aux programmes en cours, ils seront étalés dans le temps, ou obtiendront des facilités de paiement pour maintenir la production.

Cette annonce contraste avec le discours très ambitieux tenu par les autorités indiennes, et la Direction de l’Armement (DRDO). Ainsi, il y a quelques semaines, cette dernière annonçait renoncer à la navalisation du chasseur léger Tejas Mk1 au profit d’un nouvel appareil bimoteur devant effectuer son premier vol d’ici 2026. Peu de temps après, le programme P75i portant sur 6 sous-marins d’attaque munis d’une propulsion anaérobies qui devait faire l’actualité, en présentant les entreprises sélectionnées pour y participer. Or, si la Marine indienne peine déjà à financer les programmes actuels, on voit mal comment elle pourra financer, dans les délais prévus, la conception d’un nouveau chasseur ou la construction de sous-marins AIP supplémentaires.

Destroyer chinois Type 052D Luyang III Hefei 174 a Actualités Défense | Aviation de chasse | Contrats et Appels d'offre Défense
Les destroyers Type 052D représentent le bras armé de la marine de l’Armée Populaire de Libération, avec plus de 16 unités en service aujourd’hui.

Reste que, dans le contexte actuel, une Marine indienne à minima n’est évidemment pas une bonne nouvelle. De part sa démographie, et son constitution démocratique, l’Inde constitue, pour l’occident, l’allié idéal pour contenir la montée en puissance chinoise, et l’extension de son réseau d’alliances autour du projet Belt and Road, très mal traduit en français par le romantique « Nouvelles routes de la Soie ». Ainsi, si l’Inde venait à être militairement neutralisée par le couple sino-pakistanais, sans même parler de défaite militaire, la Chine s’imposerait dans le Pacifique occidental et dans l’Ocean Indien. Dans la grande compétition géopolitique qui se dessine dans les décennies à venir, une Inde affaiblit constituerait probablement un des scénario les plus inquiétants.


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