lundi, décembre 1, 2025
Accueil Blog Page 63

La frégate Iver Huitfeldt danoise aurait frôlé le drame en mer Rouge, face aux drones Houthis

Il y a quelques jours, la Marine Royale Danoise publiait un communiqué concernant l’intervention de la frégate Iver Huitfeldt, pour détruire quatre drones Houthis lancés contre elle et contre les navires escortés. Le 9 mars, vers 04h00 du matin, le navire danois détectait plusieurs drones Houthis, et les avait détruits, avec l’armement de bord, avant qu’ils n’atteignent leurs cibles.

Ce succès avait été largement mis en avant par la presse danoise. Peut-être hâtivement. En effet, selon le site danois Olfi, spécialisé dans les questions de défense, la frégate aurait rencontré plusieurs problèmes successifs, à ce moment-là, dans la mise en œuvre de ses armements, ayant mis en danger le navire et la mission.

La frégate Iver Huitfeldt de la Marine danoise quitte précipitamment la mer Rouge

Le site danois cite, à ce sujet, un message envoyé par le commandant du navire quelques jours plus tard à l’OTAN, en communication restreinte, exposant les différents mauvais fonctionnements auxquels le navire a été exposé durant cette mission, et qui n’ont pas, au moment de la rédaction du message, de solution.

frégate iver huitfeldt classe
La classe Iver Huitfeldt se compose de 3 frégates de défense anti-aériennes, entrées en service entre janvier et novembre 2011.

Sans que l’on sache, en l’absence de communication officielle de la part de la Marine danoise, si c’est lié, ou pas, la frégate Iver Huitfeldt a, peu de temps après ce message, quitté la zone d’engagement, pour prendre le chemin de son port danois, alors qu’elle devait rester sur place encore jusqu’à la mi-avril.

Quant aux révélations du site Olfi, elles ont rapidement provoqué l’émoi et la colère dans la classe politique danoise, et un grand embarras de la part du ministre de la Défense, qui a assuré ne pas avoir été informé du sujet, et avoir diligenté des investigations en ce sens.

Impossible de lancer les missiles ESSM contre les drones Houthis

Il faut admettre que les problèmes rencontrés par la frégate Iver Huitfeldt, ce 9 mars, selon cette communication citée par le site danois, ont de quoi inquiéter. Ainsi, une fois les drones Houthis détectés par les radars de la frégate antiaérienne, celle-ci entrepris d’employer l’un des 24 missiles antiaériens à courte et moyenne portée ESSM, embarqués dans les 12 silos de son système VLS Mk56.

Plus économique que les 32 missiles antiaériens SM-2 embarqués dans le système Mk41 du navire, l’ESSM est un missile d’une portée d’une portée pouvant atteindre 50 km, et suffit tout à fait pour traiter de type de cible. Pour peu qu’il parte effectivement…

missile ESSM
Le missile ESSM est un missile antiaérien à courte et moyenne portée américain, employé par de nombreuses marines occidentale.

En effet, pendant 30 minutes, la frégate danoise a été incapable de lancer ses missiles. Selon les informations disponibles, il semblerait que le radar APAR, employé pour la surveillance à courte portée et le guidage des ESSM, et le système de combat C-FLEX du navire, ne sont pas parvenus à communiquer, empêchant le tir des missiles.

Conçu par Thales Netherland, le radar APAR est employé sur de nombreux navires occidentaux. Le Combat Management System (CMS) C-FLEX, a été conçu par le Danemark pour ses propres navires. Le missile ESSM, lui, est conçu par Raytheon. Si ces trois systèmes ont montré leurs performances indépendamment, il semble, qu’à bord de l’Iver Huitfeldt, ceux-ci ne sont pas parvenus à communiquer, bloquant le système à un moment des plus critiques.

Si, en lieu et place de drones, la menace Houthis avait été composée de missiles antinavires, un tel dysfonctionnement aurait certainement pu engendrer des conséquences dramatiques, pour la frégate, et/ou pour les navires escortés.

Vieux de 30 ans, les obus antiaériens de 76 mm explosent bien avant la cible

Fort heureusement, il s’agissait de drones. Et contre de telles cibles, relativement lentes et peu évolutives, d’autres navires occidentaux avaient déjà démontré toute l’efficacité du canon de 76 mm OTO-Melara. Le Iver Huitfeldt, dispose de deux de ces canons.

Une fois à portée de tir, le navire danois entrepris donc de traiter les cibles avec cette artillerie navale. Elle y parvint, mais pas sans se faire une grosse frayeur. En effet, les obus tirés par les deux canons, ont commencé à exploser à des distances incohérentes, parfois même à peine étaient-ils sortis du tube, fort heureusement, sans faire de blessé, ni infliger de dégâts au navire.

guided missile frigate hdms iver huitfeldt f361 photo in publ Flotte de surface | Actualités Défense | Conflit Yemen
La frégate iver Huiltfeldt (F361) dispose de deux canons de 76 mm OTO-Melara.

De toute évidence, les fusées de proximité d’un grand nombre des obus employés, ont été défaillantes, pour provoquer ce comportement hiératique. Il semblerait, toujours selon Ofi, que ces munitions étaient vieilles de plus de 30 ans, et avaient été réarmées en 2005 de nouvelles fusées de proximité, qui ne conviennent pas à une utilisation au combat.

Des problèmes qui mettent en danger le navire et ceux qu’il escorte

Ces deux défaillances critiques consécutives, n’ont pas entrainé de conséquences dramatiques. Les canons OTO-Melara de 76 mm couplés au radar de conduite de tir CEROS 200 de Saab, étant particulièrement efficaces, les quatre drones Houthis ont pu être abattus.

Toutefois, si, en lieu et place de drone volant à 200 km/h, la frégate danoise avait dû faire face à des missiles de croisière, voire à une attaque combinée, il est très possible que la conclusion aurait été très différente, et bien plus dramatique. On comprend, dès lors, la colère de la classe politique danoise, d’autant que, semble-t-il, l’un de ces problèmes n’a rien de nouveau.

En effet, l’inadéquation des obus de 76 mm pour une utilisation en zone de combat, avait été documentée depuis de nombreuses années, sans qu’aucune action ait été entreprise pour la corriger.

MK41 Iver Huitfeldt
Les frégates Iver Huitfeldt emportent 4 systèmes VLS Mk41 emportant chacun 8 missiles anti-aérien à longue portée Standard SM-2 BlockIIIa.

Pire encore, malgré les investigations et tentatives de correction menées par l’équipage, la communication entre le radar APAR et le CMS C-FLEX, n’a pas été rétablie, un problème de jetons, semble-t-il, bloquant le système.

De fait, le navire se trouvait à devoir utiliser ses conduites de tir CEROS plutôt que le radar APAR, limitant considérablement ses capacités défensives, en particulier pour suivre et engager simultanément plusieurs cibles. Sans que cela ait été officialisé, ces raisons sont très probablement à l’origine du départ précipité de la frégate danoise de mer Rouge, pour retourner à son port d’attache dans les jours à venir.

De nouvelles conséquences des « bénéfices de la paix » en Europe

Si ces révélations pourront en faire sourire certains, elles seront prises au sérieux par de nombreux marins, au Danemark et partout en Europe. En effet, les dysfonctionnements critiques expérimentés par la frégate Iver Huitfeldt, montrent des défaillances sévères en matière de maintenance, d’entrainement et de modernisation, au sein des forces navales danoises.

Or, comme de nombreux autres pays européens, le Danemark s’était pleinement engagé dans la baisse des crédits de défense dans les années 2000 et 2010, en application des Bénéfices de la Paix, pour atteindre un plancher à 1,1 % de son PIB entre 2014 et 2017. Il ne dépassera pas 1,6 % du PIB en 2024, même si les autorités ont promis un important effort pour atteindre les 2 % demandés par l’OTAN en 2030.

Marine royale danoise
Bien que forte de seulement 3 500 hommes et femmes, la marine danoise dispose d’une flotte de surface imposante et homogène. Elle ne dispose en revanche d’aucun sous-marin, ni de grand navire amphibie.

En dépit de cette trajectoire, il faudra de très nombreuses années pour que ces hausses (promises), finissent d’apurer les conséquences de 20 années de sous-investissements, d’autant qu’il est souvent tenant, pour les autorités politiques, d’attacher à ces hausses de crédits, des hausses de format ou de nouvelles acquisitions, très ostentatoires, mais venant amputer les budgets consacrés à la simple reconstruction des capacités perdues.

Conclusion

Nul doute que l’équipage de la frégate Iver Huitfeldt a dû vivre des moments particulièrement désagréables ce 9 mars au matin. Qu’un système tombe en panne au pire moment, c’est extrêmement stressant, mais cela arrive. Qu’un second système montre, au même moment, des signes de mauvais fonctionnement flagrants, peut gravement remettre en question sa confiance dans le navire, voire dans la chaine de commandement et dans la Marine, elle-même.

Sortir la frégate du théâtre d’engagement, était très certainement la seule chose à faire, à court terme, pour éviter qu’un drame n’arrive. Toutefois, il faudra produire des explications très crédibles, et des processus de corrections globaux allant bien au-delà des seuls systèmes concernés, pour éviter que cet épisode ne créé des effets délétères à moyen termes, sur les militaires eux-mêmes, alors que les ressources humaines sont, au Danemark comme ailleurs, au cœur des préoccupations des armées.

ATMOS canon
La sélection du canon porté Atmos isralien, pour remplacer les Caesar 8×8 offerts par Copenhague à l’Ukraine, il y a un an, aurait été largement favorisée par des manoeuvres au sein du Ministère de la Défense danois.

Quant au ministre de la Défense danois, Troels Lund Poulsen, il va certainement passer au travers de moment difficile dans les semaines et mois à venir, autour de ce scandale sous couveuse.

S’il n’est en poste que depuis aout 2023, il pourrait lui être reproché le jeu de chaises musicales, joué avec son prédécesseur, Jakob Ellemann-Jensen, avec qui il a interverti le portefeuille des affaires économiques, après que ce dernier a été mis en cause autour de l’appel d’offres pour le remplacement des CAESAR 8×8 donnés par Copenhague à Kyiv, ayant très largement privilégié l’Atmos israélien, bien au-delà du raisonnable, peut-être du légal.

Les petites ententes politiques danoises, alors que l’équipage de la frégate Iver Huitfeldt s’est retrouvé dans un contexte extrêmement dégradé, dont les responsabilités remonteront, tôt ou tard, au ministère, auront certainement du mal à passer, dans les armées, la classe politique, et peut-être dans l’opinion publique du pays.

L’US Navy s’inquiète du trop faible nombre de missiles à bord de ses destroyers…

L’US Navy met en œuvre, aujourd’hui, la plus importante flotte de croiseurs et destroyers de la planète, et la mieux armée. Elle aligne, ainsi, 84 croiseurs et destroyers, des navires de 9 000 à 10 000 tonnes armés de 90 à 96 silos de lancement verticaux, soit plus de la moitié de l’ensemble des silos verticaux dans le monde.

Alors que les spécialistes européens se plaignent régulièrement de voir leurs navires armés de seulement 16 ou 32 silos, on pouvait penser que l’US Navy était relativement confiante, dans la puissance de feu disponible de ses navires d’escorte.

Pourtant, c’est bien elle qui vient d’accélérer le développement d’un canon à micro-onde conçu pour protéger ses destroyers à l’avenir, craignant que ses navires soient sous-armés pour répondre à ce type de menace, face à l’arrivée des drones d’attaque navals, et des missiles balistiques antinavires, comme ceux mis en œuvre par les Houthis en mer Rouge.

96 silos verticaux à bord des destroyers Arleigh Burke de l’US Navy

Bien souvent, l’US Navy a été en avance sur ses homologues européennes, dans le domaine des technologies de combat naval. Ce fut notamment le cas dans le domaine de la défense antiaérienne, avec l’arrivée simultanée du radar SPY-1, du missile SM-2 et du système AEGIS, conçus pour répondre aux attaques de saturation pouvant être lancées par l’aviation navale soviétique contre les flottes de l’OTAN, durant la guerre froide.

US Navy SM-2 Arleigh Burke destroyer
Les destroyers Arleigh Burke dispose de 90 à 96 silos verticaux

Pour la première fois, un croiseur, la classe Ticonderoga, plus tard un destroyer, la classe Arleigh Burke, étaient en capacité de traiter simultanément de nombreuses cibles aériennes, sans devoir dédier un radar de pointage à une cible unique.

Au fil des années, cette technologie s’est répandue, en Europe et ailleurs. Toutefois, l’US Navy a longtemps conservé les navires les plus performants dans le domaine antiaérien, associant des coques imposantes, des technologies efficaces, et une « profondeur de magasin », le nombre de missiles embarqués, inégalée, à l’exception des Kirov russes dotés de systèmes plus nombreux, mais antiques.

Tout au moins, jusqu’à l’arrivée des destroyers lourds des classes Kongo japonaises, Sejong the Great sud-coréennes et Type 055 chinoises, qui font aujourd’hui jeu égal, avec ses navires.

Ainsi, aujourd’hui, les nouveaux destroyers de la classe Arleigh Burke Flight III de l’US Navy, un navire de 155 mètres et d’un tonnage de presque 10 000 tonnes, emportent 96 silos verticaux chargés de missiles antiaériens à longue portée SM-2, de missiles antibalistiques SM-3, de missiles antiaériens à courte et moyenne portée ESSM (par quatre par silo), de missiles polyvalents SM-6 et de missiles de croisière Tomahawk.

À cela s’ajoutent un canon de 127 mm, un système CIWS SeaRAM et un Phalanx, ainsi que deux tubes lance-torpilles triples, en faisant incontestablement l’un des navires les mieux armés du moment, même s’il ne trône plus seul, au sommet de la hiérarchie. Pourtant, l’expérience Houthis en mer Rouge, tend à bousculer cette certitude, au sein de l’US Navy.

La consommation des missiles contre les drones et missiles Houthis inquiète l’US Navy

En dépit de cet arsenal qui fait pâlir d’envie tous les navires européens, l’US Navy estime, désormais, qu’elle pourrait rapidement faire face à de sérieux problèmes, mis en évidence par les retours d’expérience des engagements en mer Rouge et dans le golfe d’Aden, face aux missiles et drones Houthis. Ses derniers pourraient ne pas avoir assez de munitions.

drone Houthis
Les drones Houthis ne sont pas des cibles difficiles à intercepter. Mais ils font concommer beaucoup de munitions aux escorteurs occidentaux.

En effet, celle-ci produit d’importants efforts, pour pallier ce qu’elle considère comme une profondeur de magasin trop limitée de ses destroyers, face à une menace qui évolue rapidement, d’un côté, vers les drones d’attaque, et de l’autre, vers les missiles antinavires balistiques.

Ses destroyers, comme les escorteurs alliés déployés en mer Rouge pour protéger le trafic naval commercial, doivent, en effet, très souvent employer leurs précieux missiles SM-2 ou ESSM, pour intercepter ces drones et missiles Houthis.

Or, si le taux d’échange économique reste positif ou neutre, lorsqu’il s’agit d’intercepter un missile de croisière ou un missile balistique antinavire, limitant de fait, dans la durée, la menace adverse, ce n’est pas le cas des drones, beaucoup plus économiques à produire.

De fait, malgré des moyens beaucoup plus faibles, les Houthis parviennent, avec l’aide de l’Iran, à produire beaucoup de ces drones, qui vident autant le magasin de ses destroyers, que les missiles plus onéreux, au point qu’ils doivent réduire la durée de leur mission, pour recharger leurs silos, tout en engendrant des surcouts importants au budget de l’US Navy, comme pour les marines alliées, sans que cela épuise, au même niveau, les moyens Houthis.

SM-6
L’US Navy a communiqué sur l’interception reussie de missiles balstiques antinavires Houthis à l’aide de missiles Sm-6

Surtout, ce constat implique qu’arrivera probablement un moment, où l’adversaire sera en mesure d’envoyer simultanément un grand nombre de ces drones, pour saturer les défenses et vider le magasin du destroyer.

Même si cette tentative échouait, le navire serait alors à la merci d’une attaque employant des moyens plus lourds, plus onéreux, et beaucoup plus destructeurs, comme les missiles de croisière et missiles balistique antinavires, pour en venir à bout.

Un canon à micro-onde pour 2026 pour traiter la menace des drones

La solution la plus simple, et la plus rapide, pour répondre à ce type de menace, serait de renforcer l’artillerie navale des navires. Toutefois, la Marine américaine n’est pas très efficace dans la simplicité. Elle s’est donc engagée dans le développement de plusieurs armes à énergie dirigée, des laser à haute énergie, d’une part, des canons à micro-onde, de l’autre.

Bien plus complexes, et infiniment plus onéreux à concevoir, ces systèmes ont, toutefois, des atouts exclusifs. Ainsi, l’un comme l’autre, ne nécessitent aucune notion de munition : tant que le navire peut produire de l’énergie électrique en quantité suffisante, il est en mesure d’alimenter ces systèmes, et donc, théoriquement, de faire feu.

canon à micro-onde Leonidas Epirus
La société Leonidas avait proposé à l’US Navy une version de son canon à micro-ondes Leonidas à bord de ses unités navales.

Ils constituent, également, une solution face aux attaques de saturation. Le laser peut ainsi traiter rapidement de nombreuses cibles, alors que le canon à micro-onde, pour sa part, peut éliminer tous les systèmes électroniques présents dans un espace aérien visé.

Si le programme visant à équiper les navires de l’US Navy d’un laser à haute énergie est bien connu, celui visant à y placer un canon à micro-onde est, pour sa part, plus confidentiel. Pourtant, dans son budget 2025 en cours de négociation, l’US Navy prévoit précisément de financer le développement d’une solution de ce type, qui doit entamer une campagne d’essai dès 2026.

Les missiles balistiques antinavires, une menace difficile à maitriser, qui va rapidement se globaliser

Comme rapporté par le site américain The War Zone, l’effort produit par l’US Navy dans ces deux domaines, vise avant tout à traiter la menace posée par la prolifération des drones, et plus spécialement, des drones d’attaque et munitions rôdeuses, employés massivement au Yémen.

Toutefois, une nouvelle inquiétude est venue s’ajouter, ces dernières semaines, dans sa planification technologique. En effet, l’utilisation régulière de missiles balistiques antinavires, par les rebelles Houthis, constitue un enjeu de taille pour les navires d’escorte occidentaux, dont seul un petit nombre est en mesure d’assurer une protection face à cette nouvelle menace.

frégate alsace Aster 30 missiles balstiques Houthis
Il y a quelques jours, la frégate antiaérienne française Alsace a intercepté simultanément 3 mssiles balistiques antinavires Houthis à l’aide de missiles Aster 30.

En outre, si les drones d’attaque et les missiles antinavires, y compris balistiques, ont atteint le Yémen, un pays pourtant particulièrement pauvre, grâce au soutien de l’Iran, on peut s’attendre à ce que ces technologies et doctrines se répandent rapidement, comme ce sera le cas, incontestablement, des drones d’attaque de surface mis en œuvre en Ukraine.

En effet, l’Iran, mais aussi la Russie et la Corée du Nord, ont certainement tout intérêt à multiplier les points de contestation similaires, en particulier contre les marines occidentales, pour accroitre leur dispersion, leurs risques et leur consommation de munitions, de sorte à faire baisser la pression qu’elles font peser contre ces pays.

Conclusion

De toute évidence, l’US Navy anticipe, à sa manière, une rapide évolution dans le domaine du combat naval, engendrée par l’arrivée massive des drones d’attaque aériens et de surface, mais aussi, par la globalisation de la technologie des missiles balistiques antinavires.

Comme souvent, elle a mis la barre très haut, en visant directement à se doter d’armes à énergie dirigée, laser à haute énergie et canon à micro-onde, dans le but de leur déléguer en grande partie la destruction de ces drones au potentiel de saturation élevé, pour concentrer l’usage son magasin de missiles difficilement extensible, contre des cibles à plus haut potentiel, comme les missiles de croisière et balistiques antinavires.

FDI amiral Ronarc'h
Plus que jamais, le retex en mer Rouge interroge sur la pertinence d’armer les frégates de la classe Amiral Ronarch françaises de seulement 2 VLS Sylver 50 pour 16 mssiles Aster 15/30.

Si le choix des armées à énergie dirigée par l’US Navy, plutôt que de l’artillerie navale, peut être soumis à débat, le constat de la transformation de la menace, nécessitant une transformation radicale des capacités d’interception des navires d’escorte, est difficilement contestable, tout comme son calendrier, mis en évidence par l’urgence des programmes américains.

Il sera certainement indispensable aux marines européennes de suivre la même voie, si pas technologique, en tout cas doctrinale, pour ne pas se retrouver, tout simplement, exclues de nombreux théâtres d’intervention navale, par manque de puissance de feu adaptée, en systèmes lowcosts contre les drones, mais aussi en missiles à hautes performances contre les missiles balistiques, pour répondre à la réalité de la menace.

L’Indonésie commande 2 sous-marins Scorpene Evolved à Naval Group et PT PAL

Ça, c’est fait ! L’Indonésie a commandé, ce 28 mars, 2 sous-marins Scorpene Evolved auprès de Naval Group et de son partenaire local PT PAL, qui construira les navires. Le correspondant Indonésien du site spécialisé Navalnews, Fauzan Malufti, avait vu juste en annonçant cela en fin de semaine dernière.

Cette commande, dont le calendrier et l’enveloppe n’ont pas encore été divulgués, renforcera la coopération industrielle et technologique entre Jakarta et l’industrie de défense française, après la commande de 42 avions Rafale en 2022, ainsi que de 55 canons Caesar en 2012 et 2017.

Elle permettra, particulièrement, de renforcer les compétences technologiques de l’industrie navale militaire indonésienne, et pourrait, à ce titre, appeler à d’autres commandes ultérieures, pour atteindre une flotte de six sous-marins Scorpene Evolved.

2 nouveaux sous-marins Scorpene Evolved pour la Marine indonésienne

Après plusieurs années de négociation, Jakarta vient donc d’officialiser la commande, par ailleurs très attendue, des deux sous-marins Scorpene Evolved proposés par le français Naval Group.

2 sous-marins scorpene Evolved pour l'Indonésie
Signature de la commande de 2 sous-marins Scorpene Evolved ce 28 mars par l’Indoénsie

Les sous-marins seront entièrement construits par les chantiers navals PT PAL indonésiens, qui construisent la plupart des grandes unités navales du pays, et qui avaient, auparavant, construit les trois sous-marins de la classe Nagapasa de conception sud-coréenne.

Le modèle définitif de sous-marin retenu par Jakarta, lui non plus, n’a pas encore été divulgué. Les sous-marins de la famille Scorpene sont, en effet, proposés en plusieurs modèles, allant de 60 à 76 mètres, et de 1 600 à 2 000 tonnes.

À la différence des Scorpène initiaux, exportés à 14 exemplaires auprès de 4 Marines dans le monde, les Scorpene Evolved seront dotés d’une propulsion reposant sur les nouvelles batteries Lithium-ion développées par Naval group, conférant aux navires une autonomie largement accrue en plongée, des délais de rechargement raccourcis, et une puissance disponible très supérieure.

Ainsi, alors que le Scorpene Evolved est donné pour avoir une autonomie de patrouille de 80 jours, le sous-marin pourra rester en plongée plus de 78 jours, ne cédant, en termes de discrétion dans ce domaine, qu’aux sous-marins à propulsion nucléaire.

Les sous-marins indonésiens recevront, en outre, le nouveau système de combat SUBTICS, et pourront emporter 18 torpilles lourdes, missiles antinavires et missiles de croisière, tout en garantissant une disponibilité opérationnelle de 240 jours par an par navire, en faisant un système d’arme parfaitement adapté aux exigences complexes de la Marine indonésienne.

Un important transfert de technologies à la clé pour PT PAL

Celle-ci attendra, sans le moindre doute, et avec impatience, ses deux nouveaux sous-marins, en particulier pour contenir, en mer de Chine du Sud, la menace croissante de la Marine chinoise, notamment de ses nombreux et performants sous-marins Type 039C de la classe Yuan.

Scorpene classe Kalvari Mazagon
La groupe naval français a démontré ses compétences en matière de transfert de technologies et de coopération en Inde avec les chantiers navals Mazagon, pour la construction des 6 sous-marins classe Kalvari.

Au-delà de cet aspect opérationnel, la coopération franco-indonésienne dans ce dossier porte également sur un important volet de transfert de technologies et de savoir-faire, plus spécifiquement vers les chantiers navals PT PAL, et au-delà.

Ainsi, selon les échos concernant les thèmes abordés lors des négociations ces derniers mois, Naval Group a intégré, dans son offre, un important volet technologique dans le domaine des batteries Lithium-ion, pouvant largement dépasser le seul cadre naval.

Dans son communiqué de presse à ce sujet, l’industriel français a ainsi indiqué qu’il avait signé, ces derniers mois, de nombreux accords de partenariats avec des entreprises locales, qui constitueront le réseau de sous-traitance de cette commande, et peut-être d’autres.

Une commande indonésienne qui pourrait faire des petits pour Naval Group

En effet, si la commande effectivement signée entre Jakarta et Naval Group porte sur deux sous-marins français, le besoin exprimé par la Marine indonésienne, est de six navires.

Pour des raisons budgétaires et de réglementation de la commande publique, l’Indonésie décompose très souvent ses commandes en lots. Cela a notamment le cas pour les 42 avions Rafale à destination des forces aériennes indonésiennes, qui auront été commandés en trois lots : 6 appareils à la commande, 18 un an plus tard, en aout 2023, et les 18 derniers, en janvier 2024.

rechargement armement Scorpene
Les nouveaux sous-marins indonésiens emporteront 18 Torpilles, missiles antinavires et, peut-être, missiles de croisière.

Il est toutefois probable que Jakarta, comme la Marine indonésienne et PT PAL, attendront la livraison du premier navire, avant de s’engager pour de nouveaux lots. En effet, l’Indonésie a, semble-t-il, eu des expériences décevantes dans un passé récent, aussi bien dans le domaine industriel qu’opérationnel.

Ce fut, particulièrement, le cas concernant les trois sous-marins sud-coréens de la classe Nagapasa, construits par ce même industriel, qui aurait rencontré de nombreuses difficultés lors de la phase industrielle, alors que la Marine indonésienne s’est, à plusieurs reprises, montrée peu enthousiaste à l’encontre de ses nouveaux sous-marins.

Pour autant, Naval group a montré, ces dernières années, particulièrement efficace dans le domaine du partage industriel et de la construction locale, en Inde, qui négocie d’ailleurs la commande de 3 Scorpene supplémentaires en plus des six déjà construits, ou encore le Brésil, dont le troisième Scorpene vient d’être inauguré, en présence d’Emmanuel Macron.

Première commande pour le Scorpene Evolved et record battu pour le Scorpene

La commande indonésienne représentait un enjeu stratégique pour la stratégie commerciale de Naval Group. Il s’agit, en effet, de la première commande de son nouveau Scorpene Evolved, cette nouvelle version du Scorpene équipé, notamment, de batteries Lithium-ion.

classe Daphnée
Le record d’exportation des sous-marins français était jusqu’à présent par la classe Daphnée.

Comme ce fut le cas de la commande des deux premiers Scorpene par la Marine chilienne, celle-ci permettra à l’industriel de disposer d’une première référence justifiant des performances annoncées du navire. Ceci va, très certainement, constituer un atout de poids dans les futures démarches commerciales du groupe français, comme c’est le cas de la commande des quatre sous-marins BlackSword Barracuda, par les Pays-Bas.

À ce titre, avec deux commandes (dont une à confirmer), venant de deux marines, pour six sous-marins, Naval group s’impose, aujourd’hui, comme le leader international dans le domaine des exportations de sous-marins équipés de batteries Lithium-ion. Une position de très bon augure, dans la mesure où cette technologie promet de devenir la référence dans les deux décennies à venir, surement plus.

Enfin, avec cette commande indonésienne, le Scorpene dépasse désormais le record d’exportation de sous-marins de conception française, détenu jusqu’à présent par la Daphnée, un sous-marin diesel-électrique conçu au milieu des années 50, et exporté à 14 exemplaires auprès de quatre marines, de 1967 à 1975.

Ce nouveau record de 16 navires, pourrait bien ne pas tenir longtemps. En effet, comme écrit plus haut, l’Inde est toujours en négociation pour la construction de trois navires supplémentaires, alors que le sous-marin reste engagé dans d’autres compétitions, notamment aux Philippines et en Roumanie, et que la Malaisie a lancé une nouvelle consultation pour deux sous-marins supplémentaires, pour renforcer les deux scorpene déjà en service.

L’annonce d’une commande de 2 Scorpene Evolved par l’Indonésie serait imminente

Cela fait maintenant plusieurs années que Paris et Jakarta négocient la possible acquisition de deux à six sous-marins Scorpene ou Scorpene Evolved, conçus par Naval Group. Comme souvent avec l’Indonésie, ces négociations sont longues et complexes, d’autant que les offres concurrentes, notamment sud-coréennes, sont aussi attractives qu’agressives.

Ces derniers mois, toutefois, l’horizon semblait se dégager dans ce dossier, soutenu par le déroulement exemplaire du programme d’acquisition de 42 Rafale pour les forces aériennes indonésiennes, renforçant la confiance et les échanges, entre les deux pays.

En octobre dernier, l’industriel français franchissait une dernière étape, en proposant à Jakarta, non pas le Scorpene classique, déjà acquis à 14 exemplaires par 4 Marines dans le monde, mais le Scorpene Evolved, un sous-marin modernisé, équipé des nouvelles batteries lithium-ion lui conférant des performances étendues.

Ces derniers jours, apparemment, ce dossier a accéléré, laissant penser à Fauzan Malufti, correspondant local du site spécialisé Navalnews.com, que sa conclusion serait très proche, et positive !

Une conjonction d’indices pointe une possible annonce prochaine de la commande de 2 Scorpene Evolved pour la Marine indonésienne

En effet, selon le journaliste, plusieurs annonces et plusieurs événements récents, semblent pointer vers une prochaine annonce, à relativement court terme, de ce contrat estimé à 2,1 Md$, alors qu’un MoU avait été signé en février 2022, par Florence Parly et Prabowo Subianto, les ministres de la Défense des deux pays.

Prabowo Subianto et Florence Parly
Prabowo Subianto et Florence Parly lors de la visite de la ministre des Armées frnaçaises à Jakarta en février 2022.

Ainsi, il y a une semaine seulement, les chantiers navals PT PAL, qui avaient construit notamment les trois sous-marins de conception sud-coréenne de la classe Nagapasa, a annoncé que 93 % de ses infrastructures étaient adaptées, et prêtes, pour entamer la construction des Scorpene Evolved pour la Marine indonésienne, et qu’il s’attendait à une annonce, en ce sens, très prochaine.

Il y a trois jours, à l’occasion d’un séminaire en ligne, un représentant de la Marine indonésienne, a présenté le Scorpene Evolved comme appartenant à la flotte du pays, tout en précisant que les négociations à ce sujet n’étaient pas terminées.

Il y a deux jours, PT PAL et le Comité politique de l’industrie de défense indonésienne, ou KKIP, ont tenu une réunion pour discuter de la construction locale de Scorpene par l’industriel, avec le soutien de Naval group. Enfin, selon le journaliste, une délégation de hauts dirigeants de l’industriel français se serait rendue à Jakarta cette semaine, pour ce dossier.

Sans représenter des preuves directes incontournables, force est de constater que le correspondant de Naval News en Indonésie, a présenté, ici, une conjonction de facteurs accréditant, comme il le soutient, l’hypothèse d’une très prochaine commande des deux sous-marins français, pour la Marine indonésienne.

Un premier client clé pour le nouveau Scorpene Evolved et ses batteries Lithium-ion

Une telle commande serait d’excellent augure pour Naval Group. Si l’industriel français a un carnet de commande relativement confortable, grâce au succès du sous-marin Scorpene, de la corvette Gowind, et plus récemment, de la frégate FDI, sur la scène internationale, son carnet de commande ne s’est pas apprécié en 2023, ou de manière marginale.

Scorpene Brésil
Le Scorpene a déjà été vendu à 4 Marines étrangères pour 14 exemplaires, se rapprochant du record de l’indsutriel de 15 sous-marins d’un meme modèle exporté, avec la classe Daphnée.

Surtout, cela permettrait de créer une première référence client, concernant le Scorpene Evolved, et son système de propulsion bâti sur les nouvelles batteries Lithium-ion. Contrairement à l’allemand TKMS, au suédois Kockums, ou au sud-coréen Hanwha Ocean (ex DSME), le français n’a pas pleinement pris le virage de la propulsion anaérobie, ou AIP.

Si celle-ci offre une autonomie accrue en plongée aux sous-marins conventionnels, elle ne vient pas, cependant, sans d’importantes contraintes, particulièrement pour recharger les piles à combustible. Qui plus est, ce type de propulsion oblige à conserver une vitesse très réduite.

Bien qu’ayant développé une technologie AIP propre, le groupe naval ne l’a jamais mise en avant commercialement parlant, préférant s’en tenir, jusqu’ici, aux batteries acide-plomb classiques, plus souples d’utilisation.

Les batteries Lithium-ion, qui équiperont les Scorpene Evolved, ainsi que les futurs Blacksword Barracuda néerlandais, conserveront cette souplesse, tout en apportant une capacité de stockage considérablement accrue, des délais de rechargement sur propulsion diesel particulièrement réduits, et la possibilité de libérer de grandes quantités d’énergie électrique au besoin, par exemple, pour se sortir d’une situation périlleuse.

Blacksword barracuda
Le Blacksword Barracuda a été retenu par les auorités néeralndaises pour remplacer les 4 sous-marins de la classe Walrus actuellement en service.

La future probable commande indonésienne revêt dès lors un caractère stratégique pour Naval Group, permettant de créer une première référence commerciale et opérationnelle, aussi bien concernant la solution de propulsion sur batteries lithium-ion, que pour le nouveau Scorpene Evolved, un modèle de 2000 tonnes qui complète la gamme de l’industriel, avec les Blacksword (3000 tonnes) et Shortfin Barracuda (4000 tonnes).

Il sera alors le seul industriel à disposer d’une offre aussi globale en matière de sous-marins d’attaque, qui plus est, avec des références clés pour chaque famille.

Une commande potentielle de 2 sous-marins, qui pourrait se transformer en 6 à l’avenir

Si la commande des deux sous-marins par Jakarta marquerait un immense succès pour Naval group, elle constituait, dans le même temps, un formidable camouflé pour le très ambitieux sud-coréen Hanwha Ocean.

En effet, initialement, la Marine indonésienne devait s’équiper de 6 sous-marins de la classe Nagapasa, variation export des Jang Bogo de la Marine sud-coréenne, eux-mêmes dérivé du Type 209/1400 allemand.

Cette commande, incluant une construction locale par PT PAL, était décomposée en deux lots de trois sous-marins. Toutefois, la construction du premier lot fut pour le moins difficile, et entraina de nombreuses frictions entre PT PAL et DSME. Qui plus est, une fois livrés, les navires ont connu de nombreuses malfonctions, entrainant le couru de la Marine indonésienne, et la recherche, pour Jakarta, d’un nouveau partenaire potentiel dans ce dossier.

PPA Thaon di Revel
L’indonésie a officialisée avec Finactieri la commande de 2 frégates PPA Thaon di Revel, alors que l’annonce initiale portait du 6 FREMM.

À ce titre, cette commande de sous-marins français pourrait bien, à l’avenir, se transformer en une commande de six navires, comme c’est le cas, d’ailleurs, de la commande de deux frégates PPA de l’italien Fincantieri, annoncée par l’Indonésie cette semaine, qui pourrait, à l’avenir, atteindre une flotte de six navires.

De toute évidence, Jakarta se donne le temps d’évaluer la qualité de la coopération industrielle, avant de s’engager plus avant, comme ce fut le cas avec la Corée du Sud.

Pays-Bas, Indonésie, Inde… : Les sous-marins de Naval Group ont le vent en poupe sur la scène internationale

Si 2023 a été une année de transition commerciale pour Naval Group, elle ne fut pas une année blanche. Ainsi, l’industriel français s’est fermement positionné sur plusieurs compétitions ou opportunités internationales, prenant une position dominante, mais non transformée à ce jour, dans plusieurs d’entre elles.

En Inde, d’abord, le premier ministre Narendra Modi ayant confirmé la prochaine commande de trois nouveaux sous-marins Scorpene, pour compléter les six exemplaires de la classe Kalvari construits par les chantiers navals Mazagon de Mumbai. Le contrat, qui pourrait également porter sur certains transferts de technologies à destination du programme de sous-marins nucléaires d’attaque indien, est toujours en cours de négociation exclusive.

sous-marin classe Nagapasa
la construction des trois sous-marins indonésiens de la classe nagapasa, de conception sud-coréenne, aurait rencontré de nombreuses difficultés, selon PT PAL.

Aux Pays-Bas, ensuite, ou Naval Group et son Blacksword Barracuda, se sont imposés face à une offre commune entre le suédois Kockums et les chantiers navals néerlandais Dames. Bien qu’étant entré en négociation exclusive dans ce dossier avec La Haye, l’industriel français demeure prudent, le Parlement néerlandais, à majorité nationaliste, ayant le dernier mot sur ce type de sujet aux Pays-Bas, et Damen ayant déjà annoncé qu’il n’acceptait l’arbitrage du gouvernement en faveur du Français.

Le Scorpene Evolved, comme la famille Barracuda, sont engagés dans d’autres compétitions et consultations, notamment aux Philippines, en Roumanie, et en Pologne. Concernant cette dernière, le récent succès du Blacksword aux Pays-Bas, ainsi que l’évident rapprochement entre Varsovie et Paris sur les questions de défense, ces derniers mois, remettent certainement l’offre française en position favorable, dans ce dossier.

Reste, enfin, la compétition canadienne, très ambitieuse dans ses déclarations, mais plus obscure dans ses objectifs et ses moyens, pour lequel la famille Barracuda, à vocation océanique, semble correspondre.

Quoi qu’il en soit, au-delà de ces prospects prometteurs, la signature prochaine de la première commande indonésienne, pour deux Scorpene Evolved, parait effectivement bien engagée. Reste à voir, désormais, si elle se concrétisera effectivement.

Le missile 3M22 Tzirkon russe à la portée de l’Aster 30 français et des Patriot américains ?

Parmi les nouvelles armes mises en œuvre par les armées russes ces dernières années, le missile 3M22 Tzirkon hypersonique, était, avec le planeur hypersonique Avangard, la plus préoccupante pour le camp occidental.

Ce missile, d’une portée de 1000 km, avait, en effet, le potentiel de profondément transformer la géométrie du combat aéronaval, en réduisant considérablement les délais de réaction des navires visés, tout en étant presque invulnérable aux défenses antiaériennes et antimissiles existantes aujourd’hui, comme le SM-6 américain, ou l’Aster 30 français.

Au point que de nombreuses voix se sont élevées pour mettre en cause la pérennité des grandes unités de surface aéronavales et amphibies, comme les porte-avions ou les porte-hélicoptères d’assaut, qualifiés de cibles de prédilection pour ce type de missile.

Les performances de l’autre missile hypersonique, ou présenté comme tel par Moscou, le Kinzhal, en Ukraine, auraient probablement dû appeler à davantage de prudence dans ce domaine, celui-ci s’avérant ni hypersonique, et pas davantage invulnérable face aux défenses antimissiles modernes ukrainiennes.

Moscou lance des missiles hypersoniques Tzirkon contre l’Ukraine

Si le Kinzhal demeure une arme balistique redoutable, qui nécessite, pour être intercepté, que la batterie antimissile soit positionnée à proximité de la cible visée, celui-ci perdit, en Ukraine, l’aura d’invincibilité qui avait été construite par la communication à son sujet.

missile 3M22 Tzirkon
Tir d’un missile 3M22 Tzirkon à partir de la frégate Admiral Gorshkov, lors des essais.

C’est peut-être ce qui a incité Moscou à employer, cette semaine, sa seconde Wunderwaffen (arme miracle), contre Kyiv, le missile 3M22 Tzirkon, bien que celui-ci ait été conçu, initialement, comme un missile antinavire à capacités de frappes vers la terre, et non comme un missile de croisière sol-sol.

Contrairement au Kinzhal, le Tzirkon dispose d’un super-stato-réacteur, et de capacités de manœuvre, en faisant une véritable arme hypersonique, capable d’évoluer à plus de Mach 5, pour déjouer les défenses antiaériennes adverses les plus modernes, comme le Patriot PAC-3 américain, ou l’Aster 30 du système SAMP/T Mamba franco-italien.

La vitesse du Tzirkon fonctionna comme attendue. En effet, là où les habitants de Kyiv avaient, jusqu’ici, plusieurs dizaines de minutes pour rejoindre les abris après qu’une alerte était lancée, ceux-ci furent surpris de constater que les explosions de la DCA ukrainienne, puis des missiles eux-mêmes, arrivaient quelques minutes seulement après que l’alerte fut donnée.

Des performances moindres qu’escompter du missile 3M22 Tzirkon, selon la presse spécialisée ukrainienne

Il semble, cependant, que d’autres surprises attendaient les Ukrainiens, concernant ces frappes, mais pas des mauvaises, cette fois. En effet, selon la presse spécialisée Ukrainienne, si le Tzirkon avait bel et bien une vitesse de transit hypersonique, celui-ci aurait ralenti autour de Mach 4,5, pour sa phase de plongée finale.

Frégate Admiral Gorshkov de la Marine Russe
Frégate Admiral Gorshkov lors des essais du missile hypersonique 3M22 Tzirkon

Il s’agit, certainement, simultanément de réduire les phénomènes de dégagements de chaleur autour du missile, lorsque celui-ci rejoint les couches basses de l’atmosphère, ainsi que, possiblement, de permettre au système de guidage de se recaler, voire d’acquérir sa cible pour venir la frapper.

Ce faisant, le Tzirkon, en dépit de sa grande vitesse, et de ses capacités de manœuvre, entreraient dans l’enveloppe d’interception des Patriot PAC-3 et des Aster 30 ukrainiens, pour peu qu’ils soient positionnés à proximité de la cible visée.

À ce titre, la presse et les autorités ukrainiennes, ont revendiqué l’interception réussie d’un ou plusieurs missiles Tzirkon, lors des récentes frappes sur Kyiv. Il est cependant très difficile d’attester de ces affirmations, de manière certaine.

L’analyse des débris donne de nouvelles informations sur le Tzirkon, et ses limites

La presse spécialisée ukrainienne a, par ailleurs, obtenu et publié, certains éléments d’un rapport portant sur l’analyse des débris supposés de ces missiles ayant été lancés contre Kyiv.

Là encore, il convient de garder certaines réserves concernant ces annonces, l’Ukraine ayant un intérêt évident à niveler la perception de la menace que font peser ces munitions russes contre la population et les infrastructures civiles du pays. Pour autant, l’analyse, telle qu’elle a été présentée, semble cohérente, bien qu’elle mérite, évidemment, d’être confirmée ou infirmée par des analyses plus indépendantes.

Débris 3M22 Tzirkon
Un des débris présentés par les analystes ukrainiens comme provenant du 3M22 Tzirkon.

Ainsi, les spécialistes ukrainiens seraient parvenus à reconstituer le profil de vol du missile, en particulier le fait qu’il doive passer sous le seuil hypersonique en phase finale. Ceci permettrait aux systèmes antiaériens et antibalistiques modernes, particulièrement l’Aster 30 français et le SM-6 américain, d’intercepter le missile, comme c’est le cas pour les missiles antinavires balistiques classiques.

Plus étonnant, il apparaitrait que l’ogive du missile soit particulièrement légère, 100 à 150 kg, et qu’elle ne comprendrait que 40 kg de charge explosive. Selon les ukrainiens, cette contrainte fut rendue indispensable par l’objectif annoncé d’une portée de 1000 km pour ce missile, ceci expliquant, d’ailleurs, que la portée du missile n’a cessé de croitre lors des essais, à mesure que l’ogive était allégée.

Une telle ogive, si avérée, réduirait sensiblement le potentiel destructif d’un missile 3M22. Même en tenant compte d’une masse de l’ogive de 150 kg, et d’une vitesse d’impact de 1870 m/s, soit Mach 4.5, le dégagement d’énergie attendrait à peine celui de 110 kg de TNT, soit 150 kg, au mieux, avec la charge militaire.

Si cette charge peut venir à bout d’un navire de moins de 5 000 tonnes, comme une corvette ou une frégate moyenne, elle est insuffisante, au-delà, contre une frégate lourde, un destroyer, et encore moins contre un grand navire amphibie de 20 ou 30 000 tonnes, ou sur un porte-avions de 50 000 tonnes ou plus.

Séquence de tir du 3M22 Tzirkon
Après éjection, le Tzirlon est propulsé par un booster à poudre, pour lui donner la vitesse et l’altitude suffisante pour lancer son Super-stato-réacteur, ou Scramjet.

Ces affirmations, si elles venaient à être confirmées, viendraient considérablement altérer la perception de la menace que ferait peser le 3M22 Tzirkon sur les marines occidentales, pas très différentes, dans ce cas, de celle du missile antinavire supersonique P800 Onyx, entré en service il y a plus de 20 ans.

Le missile Aster 30 du français MBDA paré d’une nouvelle aura après ses succès en mer Rouge

Ces affirmations interviennent concomitamment à une démonstration d’efficacité remarquable du missile Aster 30 en mer Rouge. Comme évoqué dans cet article, la frégate française Alsace, est, en effet, parvenue à intercepter, aux larges des cotes du Yémen, trois missiles balistiques antinavires Houthis lancés presque simultanément contre elle et les navires civils qu’elle escortait.

Tir Aster alsace
La frégate Alsace est parvenue a intercepter trois missiles balistiques antinavires Houthis, à l’aide de seulement 3 missiles Aster 30, démontrant les exceptionelles performances de ce missile, du navire, et de son équipage.

Cette démonstration d’efficacité de l’Aster 30, a fait grand bruit, en particulier en occident. Longtemps, en effet, les état-majors et amirautés avaient douté des performances annoncées par MBDA, concernant son missile Aster 15/30, en particulier, dans le domaine antibalistique, lui préférant des solutions américaines comme le Patriot PAC-3 ou le SM-6, en dépit des performances démontrées du missile, lors des essais et des entraînements.

Si MBDA n’a pas croulé sous les nouvelles commandes depuis l’exploit de l’Alsace et de son missile, celui-ci jouit, désormais, de manière évidente, d’une nouvelle aura, que ce soit auprès des militaires et commentaires spécialisés.

Le SAMP/T Mamba est désormais au cœur des demandes ukrainiennes, comme le Patriot PAC-3

Cette aura a, également, atteint l’Ukraine. Jusqu’à présent, les autorités, mais aussi la presse spécialisée ukrainienne, n’avaient d’yeux que pour le Patriot, demandant, avec insistance, aux États-Unis et alliés, davantage de systèmes, et davantage de missiles.

Bien plus distribué que le Mamba, dont les 26 batteries livrées à ce jour n’équipement que 3 forces armées (France, Italie et Singapour), le Patriot était surtout paré de qualités supérieures au système européen, tout du moins, dans la perception publique et politique.

Le Mamba, dès lors, apparaissait bien moins souvent dans le discours officiel ukrainien, même si la batterie livrée par Paris et Rome, était déployée en protection de zone, à l’instar des quatre batteries Patriot dont dispose l’Ukraine.

Il n’est pas clair si la batterie Mamba ukrainienne a, ou pas, participé à l’interception des Tzirkon russes envoyés contre Kyiv. Toutefois, force est de constater, désormais, qu’il est systématiquement évoqué simultanément au Patriot, dans le discours des autorités ukrainiennes, comme dans la presse spécialisée du pays.

Batterie SAMP/T Mamba
Le système SAMP/T Mamba met en oeuvre des missiles Aster 15 et Aster 30.

Les succès avérés de l’Aster 30 en mer Rouge dans le domaine antibalistique, ainsi que les incertitudes sur l’aide militaire américaine, ont certainement influencé ce changement de posture, alors qu’à présent, Kyiv réclame non davantage « de batteries Patriot« , mais des « batteries antiaériennes à longue portée Mamba ou Patriot » supplémentaires.

Message probablement bien reçu par la France, le ministre Sébastien Lecornu ayant annoncé un possible durcissement de l’action de l’état contre les industriels, en particulier le réseau de sous-traitant, si la production de ce missile ne venait pas à sensiblement augmenter dans les semaines et mois à venir.

Conclusion

S’il convient de conserver une certaine prudence, face aux annonces ukrainiennes, il semble bien que le super missile hypersonique 3M22 Tzirkon russe, ne constitue pas la menace inarrêtable et absolue contre les grandes unités navales de l’OTAN, tel qu’il était présenté jusqu’à présent par la communication russe.

Non seulement sa capacité de destruction apparait limitée, mais le missile aurait un profil de vol, le mettant à la portée des systèmes antimissiles occidentaux les plus évolués, comme le SM-6 de l’US Navy, et surtout l’Aster 30 français.

SM-6 lancement
L’US Navy, mais aussi les marines japonaises et sud-coréennes, se dotent de missiles SM-6, pour répondre à la menace des missiles antinavires hypersoniques comme le Tzirkon.

Il est intéressant de remarquer que l’image de ces deux missiles se sont croisées ces derniers jours, voyant l’image d’invulnérabilité du 3M22 Tzirkon s’effriter suite aux frappes contre Kyiv, alors que, dans le même temps, le missile Aster 30 faisait l’éclatante démonstration de son efficacité, en mer Rouge, peut-être aussi en Ukraine.

Reste à voir, maintenant, si les affirmations et conclusions, émanant des services ukrainiens, sont ou pas confirmées, soit par des analyses indépendantes, soit par des preuves factuelles.

Si tel était le cas, cela constituerait, sans le moindre doute, un coup dur à l’image de puissance de la Russie, en particulier dans le domaine naval, mais aussi à celle de Vladimir Poutine, qui avait fait de ses nouvelles armes hypersoniques, l’un des piliers de la puissance militaire retrouvée de la Russie, par son action politique.

Rafale contre sous-marin nucléaire : au Brésil, E.Macron lie les deux sujets

En septembre 2009, à l’occasion d’une visite officielle au Brésil, le Président français, Nicolas Sarkozy, annonça la commande de 36 chasseurs Rafale pour les forces aériennes du pays, provoquant la stupeur, puis la fureur, du Président Lula. En effet, si des discussions étaient bien en cours à ce sujet, la commande était encore loin d’être acquise pour le nouveau chasseur de Dassault Aviation.

Loin de forcer la main des brésiliens, cette manœuvre condamna les chances du Rafale au Brésil. Trois ans plus tard, Brasília annonçait d’ailleurs se tourner vers le nouveau JAS 39 Gripen E/F du suédois Saab, pour moderniser ses forces aériennes, avec une première commande de 36 appareils, avec une fabrication locale et d’importants transferts de technologie.

Depuis, les chances de voir le Rafale voler sous cocarde brésilienne, semblaient nulles. Pourtant, lors de sa visite officielle à Brasília cette semaine, le Président Macron, fit à nouveau référence à une possible coopération franco-brésilienne autour du fleuron de l’aéronautique française.

Et pour cause, dans un autre dossier, la construction de son premier sous-marin nucléaire d’attaque, le Brésil se trouverait dans une impasse technologique, qui nécessiterait l’aide de la France, mettant Paris en position privilégiée, pour tenter une nouvelle négociation, concernant le chasseur français.

Le sous-marin nucléaire d’attaque brésilien, l’Alvaro Alberto, dans l’impasse ?

Brasília a entrepris, en effet, de concevoir et construire son premier sous-marin nucléaire d’attaque, l’Alvaro Alberto. Pour ce faire, le Brésil s’est tourné vers le savoir-faire français, en commandant pour l’occasion quatre sous-marins conventionnels de type Scorpène.

sous-marin Tonelero Brésil
Le Président français a participé à l’inauguration du Tonelero, le troisème sous-marin de type Scorpene construit au Brésil avec l’aide de Naval Group.

C’est d’ailleurs pour participer à l’inauguration de la quatrième unité de cette classe, le sous-marin Tonelero, que le président Macron s’est rendu au Brésil cette semaine, lui permettant, également, de rencontrer le président Lula.

Mais la visite d’Emmanuel Macron semble ne pas s’être limitée à des considérations protocolaires et diplomatiques. En effet, le président français a déclaré, à cette occasion, que la France se trouverait « aux côtés », du brésil, pour la construction de ses sous-marins, alors que le Président Lula, lui, a plusieurs fois fait référence, ces dernières semaines, au besoin d’accompagnement du Brésil, concernant le savoir-faire de la partie nucléaire, de son sous-marin.

Car si la France, et Naval Group, sont déjà pleinement engagés pleinement dans la construction du Alvaro Alberto, qui a débuté en octobre dernier, ceux-ci devaient, jusqu’à présent, se limiter à la conception et l’assistance à la construction locale, du sous-marin lui-même. La chaufferie nucléaire, elle, devait être conçue par les ingénieurs et l’industrie brésilienne.

Le soutien de la France ouvert par l’initiative américaine et britannique AUKUS

Ce découpage répondait, lorsque négocié, aux règles internationales tacites, concernant la technologie des sous-marins nucléaires. En effet, aucun des cinq pays maitrisant cette technologie de pointe, les membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unis, n’avait, jusqu’à présent, accepté de vendre des sous-marins à propulsion nucléaire, et encore moins de transférer les technologies nécessaires, à un autre pays, même si l’Union Soviétique, puis la Russie après elle, avaient accepté de louer un SSGN à l’Inde pendant dix ans.

AUKUS SSN
Le programme SSN AUKUS rassemblant Etats-Unis, Royaume-Uni et Australie, a fait voler en éclat l’accord tacite concernant l’interdiction d’exporter la technologie des sou-marins à propulsion nucléaire qui faisait référence entre les 5 membres permanents du Conseil de Sécurité des Nations Unis.

Il semble, précisément, que l’industrie brésilienne rencontre certaines difficultés, pour concevoir et construire la mini-centrale nucléaire qui doit fournir l’énergie du sous-marin, tout en restant discret et sûr. L’aide de la France apparait comme la plus appropriée, le pays et son industrie ayant déjà largement participé à la conception du navire, et disposant d’un savoir-faire reconnu dans ce domaine.

Si l’hypothèse était envisageable en 2015, elle l’est beaucoup plus aujourd’hui. Entre-temps, en effet, les États-Unis et le Royaume-Uni, ont taillé en brèche l’accord tacite international dans ce domaine, en s’engageant, avec l’Australie, dans le programme SSN Aukus, prévoyant la vente de trois à cinq sous-marins nucléaires d’attaque classe Virginia à la Royal Australian Navy, et la participation de Canberra et de son industrie, à la construction du nouveau sous-marin SSN Aukus, qui équipera les marines britanniques et australiennes.

De fait, par sa déclaration, Emmanuel Macron assure le Brésil que la France est désormais disposée à épauler le pays, sans la construction de son premier SNA, y compris pour ce qui concerne sa chaufferie nucléaire, et probablement avec certains transferts de technologies critiques.

Difficile, dans ces conditions, aux britanniques et américains de s’en offusquer, alors que les tensions avec la Russie, comme la bienveillante neutralité exprimée par le Président Lula envers Moscou, rendent toute interférence russe improbable.

La petite phrase d’Emmanuel Macron au Président Lula au sujet du Rafale au Brésil

Toutefois, si la France se déclare prête à épauler Brasília sur ce sujet hautement stratégique, il semble qu’elle entende bien obtenir certaines compensations étendues de sa part, en particulier dans le domaine de la coopération industrielle militaire.

Emmanuel Macron Lula
Les Présidents français et brésiliens ont capitalisé sur leurs convergences, et masqué leurs divergences, dans le cadre de la visite d’E. Macron au Brésil.

C’est dans ce contexte qu’intervient la petite phrase d’Emmanuel Macron adressé à son interlocuteur, le président Lula. Tout en habillant cela sous le couvert d’aspirations pour un renforcement des coopérations industrielles militaires entre les deux pays, le président français a évoqué son espoir de voir des Rafale célébrer l’entrée en service du SNA brésilien.

Le retour du Rafale dans les discussions franco-brésiliennes a surpris l’auditoire, y compris les mieux informés des spécialistes du sujet. Toutefois, la « vision » évoquée par Emmanuel Macron, ne laisse guère de doute sur le fait que Paris entend, dorénavant, lier l’assistance française dans le domaine de la chaufferie nucléaire de l’Alvaro Alberto, à d’autres coopérations franco-brésiliennes industrielles en matière de défense, et plus spécifiquement, à une éventuelle coproduction de Rafale au Brésil, à destination de ses forces aériennes.

Non seulement l’approche d’Emmanuel Macron est-elle beaucoup plus policée et subtile que celle de Nicolas Sarkozy, il y a quinze ans, mais le Rafale est, depuis, devenu un véritable succès sur la scène internationale, commandé par sept forces aériennes en plus de la France. Il est, désormais, le champion européen des avions de combat sur la scène internationale, et peut s’enorgueillir de la confiance de plusieurs forces aériennes de premier plan.

De fait, dans ce dossier, la France est certainement en position de force, pour amener le Brésil à se tourner à nouveau vars le chasseur de Dassault Aviation.

La seconde commande de JAS 39 Gripen E/F brésiliens cruciale pour Saab

Si le basculement du Brésil vers le Rafale, constituerait une excellente nouvelle pour Paris et la Team Rafale, cela constituerait, en revanche, un véritable cataclysme pour le suédois Saab. Sans remettre en question la livraison des 36 Gripen E/F commandés en 2016, et dont les premiers exemplaires sont entrés en service au sein des forces aériennes brésiliennes, il viendrait menacer les négociations entreprises depuis plusieurs années par l’avionneur suédois, pour une nouvelle commande de son chasseur.

GRIPEN E Brésil
La Brésil a commandé 36 Gripen E/F auprès de Saab, pour la modernisation de ses forces aériennes.

Or, à ce jour, en dehors de la Flygvapnet, l’Armée de l’air suédoise, les forces aériennes brésiliennes demeurent le seul client international du JAS 39 Gripen E/F, une évolution majeure du Gripen C/D ayant nécessité des investissements considérables pour son développement.

En outre, si Stockholm a retrouvé, ces derniers mois, des couleurs, après une longue période de vaches maigres en matière de prise de commande pour son industrie aéronautique, avec la commande de 6 appareils par la Hongrie, et des discussions avancées aux Philippines et en Thaïlande, il s’agit, le plus souvent, de Gripen C/D, la précédente version, sensiblement moins onéreuse que la version E/F, dont le prix s’est considérablement rapproché de celui, par exemple, du Rafale.

La perte de ce contrat potentiel, qui doit amener les forces aériennes brésiliennes à 72 puis 96 chasseurs, constituerait non seulement un coup dur pour Saab, mais pourrait jouer un rôle déterminant dans les arbitrages de Stockholm concernant l’éventuelle conception d’un successeur au Gripen, qui doivent intervenir dans les deux ans à venir.

Conclusion

Tout porte à croire, par sa portée et par son histoire, que l’évocation, par le président français à l’occasion de sa visite au Brésil, du Rafale, n’avait rien de fortuit. Le contexte qui entoure ce dossier, mais aussi celui de la conception et de la construction de sous-marin nucléaire d’attaque Alvaro Alberto, ne se prête guère aux envolées lyriques et poétiques.

Rafale B/D Quatar
Le Rafale a connu un important succès commercial international depuis son echec en 2009 au Brésil.

Dès lors, il est légitime de penser que Paris a mis sur la table des négociations, concernant l’implication de l’industrie de défense française dans la conception de la chaufferie nucléaire du sous-marin brésilien, bien davantage que ce seul périmètre, et plus spécifiquement, la possibilité d’une coopération industrielle et technologique franco-brésilienne, autour du Rafale.

Reste qu’au Brésil, comme dans de nombreux grands pays émergents, les négociations sont souvent longues et complexes, et portent leurs lots de revirements et de surprises. Tout dépendra, donc, de l’urgence avec laquelle les autorités brésiliennes entendent résoudre leur problème de chaufferie nucléaire, et de l’habileté des négociateurs français.

La Marine nationale étend l’équipage des frégates FREMM de presque 20 %

La Marine nationale vient d’annoncer son intention d’augmenter le format des équipages de ses FREMM, de sorte à renforcer la résilience des navires. Chaque frégate verra son équipage renforcé de 20 membres, une hausse de presque 20 %, en dehors du détachement de l’aéronautique navale.

Nul doute que les déploiements de la frégate Languedoc, de la classe Aquitaine, puis de l’Alsace, de la classe éponyme, en mer Rouge, pour escorter et protéger les navires civils des drones et missiles Houthis, auront été riches d’enseignements sur la fatigue cumulée des équipages au bout de quelques semaines de tensions élevées.

Cette décision prend à revers, en revanche, une tendance à la réduction du format des équipages militaires, et plus particulièrement des frégates, au sein des marines occidentales, tant du fait des avancées technologiques en matière d’automatisation et de numérisation des navires, que pour répondre aux tensions, parfois sévères, qui touchent ces marines, en matière d’effectifs.

La tentation de réduire le format des équipages des navires militaires, face à la crise RH des Armées

Il y a quelques semaines, le directeur des affaires internes du groupe britannique Babcock, John Howie, dévoila l’objectif poursuivi concernant la conception de la nouvelle frégate Type 32 de la Royal Navy, de ramener l’équipage du navire à une cinquantaine de membres.

Frégate Type 32 Royal navy babcock
La Frégate Type 32 reposera sur la même coque que la Type 31, mais emportera des capacités supplémentaires, notamment en matière de lutte anti-sous-marine.

Selon lui, cette trajectoire était logique, s’inscrivant dans la décroissance constatée précédemment, en passant de 185 membres d’équipage pour les frégates Type 23 de la classe Duke, à 105 pour les nouvelles Type 31 qui doivent entrer en service durant la seconde moitié de la décennie, puis de 50, pour les Type 32 qui leur succèderont.

Le groupe naval britannique parie sur l’évolution des technologies d’automatisation, de robotisation, et de présence virtuelle, pour y parvenir, et ainsi apporter une réponse inespérée à la Royal Navy, qui rencontre d’immenses problèmes concernant ses effectifs.

Comme souvent, les réactions à cette annonce furent clivées, avec d’un côté ses partisans la jugeant audacieuse, mais réaliste, et de l’autre, ceux qui la considéraient avec stupéfaction, estimant que la charge de travail à bord d’une frégate, ne se satisferait d’un équipage si réduit.

Améliorer la résilience au combat de l’équipage des frégates FREMM de la Marine nationale

Dans ce domaine, la récente annonce faite par la Marine nationale, apportera certainement du grain à moudre au débat. En effet, celle-ci vient d’annoncer qu’elle allait, dans les mois à venir, augmenter le format de l’équipage de ses FREMM des classes Aquitaine et Alsace, de 20 membres, pour atteindre 140 personnes, détachement aérien compris.

Pour la Marine française, il s’agit de répondre aux récents retours d’expérience, comme ceux concernant les frégates Languedoc et Alsace, lors de leur déploiement en mer Rouge, pour escorter les navires commerciaux et les protéger des missiles et drones Houthis.

Marine nationale Frégate FREMM Languedoc
La frégate Languedoc a assuré la protection du trafic naval commercial en mer Rouge pendant plus de deux mois, durant lesquels l’équipage a dû rester à un haut niveau de vigilance.

Pendant plusieurs semaines, les équipages ont dû, ainsi, assurer une veille permanente renforcée, sachant que la menace pouvait surgir à tout moment, et que les délais et la précision des réponses apportées, pouvaient conditionner la sécurité du navire, comme de ceux sous sa protection.

De toute évidence, le format optimisé des équipages des FREMM françaises, n’était pas suffisant pour absorber les contraintes et imprévus de tels déploiements en zone de forte tensions.

Si les équipages ont fait plus que bonne figure, et démontrant l’excellence de leur entrainement et des équipements mis en œuvre à bord des deux frégates, nul doute que la fatigue est rapidement venue s’installer à son bord, ceci venant menacer son efficacité, donc sa sécurité, ainsi que sa résilience au combat.

Ce n’est pas la première fois que le format de l’équipage des FREMM est revu à la hausse. Initialement, celle-ci devait n’avoir que 96 officiers, officiers mariniers et marins, à son bord, précisément grâce aux avancées intégrées en termes d’automatisation et de numérisation du bâtiment.

Marine nationale FDI classe Amiral Ronarc'h
Les frégates FDI classe Amiral Ronarc’h, de la Marine nationale, conserveront un équipage de 110 membres, autant ques FREMM, hors détachement aérien, bien que le navire soit 20 metres plus court, et 1 500 tonnes plus léger.

Rapidement, toutefois, il devint évident que ce format entrainait une fatigue excessive de l’équipage, et celui-ci fut alors porté à 108 membres, hors dispositif aviation (15 membres).

En outre, la Marine nationale mit en place, à partir de 2018, le principe du double équipage sur quatre de ses FREMM, deux par façade maritime. Ceci permit de réduire sensiblement la fatigue des équipages, plus particulièrement la fatigue sociale en réduisant sensiblement le nombre de découchées par an, tout en augmentant le nombre de jours à la mer par navire, passant de 123 à 162 jours par an en moyenne, soit une hausse de presque 33 % de la disponibilité opérationnelle par navire.

Les Marines occidentales redécouvrent la haute intensité navale

Si le double équipage et un format revu à la hausse permirent, en effet, aux FREMM de mieux répondre à la pression opérationnelle ces dernières années, démontrant au passage, lors des exercices, des qualités accrues, il semble cependant que ce ne soit pas encore suffisant, pour répondre efficacement, à un engagement de haute intensité navale.

Les déploiements en mer Rouge des frégates Languedoc, puis Alsace, en revanche, s’apparentent à ce type d’environnement. En effet, pendant plus de deux mois, l’équipage de la Languedoc, et après celui de l’Alsace, ont dû évoluer dans un environnement de menaces directes et constantes, obligeant à une vigilance de tous les instants.

Tis Aster 30 Alsace
La frégate Alsace a fait usage de tous ses armements pour abattres les drones et missiles Houthis, y compris ses Aster 30 en capacités antibalistiques.

Il est probable que les risques pris par les deux navires français, pour répondre aux tirs de missiles et de drones Houthis, n’étaient pas les mêmes, que s’ils avaient dû se confronter à une Marine et une force aérienne adverses de premier rang, dotées de munitions plus performantes.

Toutefois, la tension était suffisante, pour que l’Amirauté décide de modifier le format de ces équipages, même si la mesure était en préparation depuis plusieurs mois. Elle profite, pour en fournir les effectifs, de la dissolution des Groupements de Transformation et de Renfort, qui assuraient la formation et la transformation des équipages vers les nouvelles frégates FREMM, lorsque celles-ci ont été livrées par Naval Group.

Conclusion

Reste à voir, dorénavant, comment les deux trajectoires opposées, l’une allant vers la réduction drastique des équipages sous couvert d’une automatisation accrue, et l’autre, vers leur renforcement pour soutenir la pression opération sur des théâtres de haute intensité, vont se négocier l’un l’autre.

Une chose est certaine, cependant. Dans ce domaine, la Marine nationale, avec les FREMM, a déjà fait l’expérience des conséquences d’un équipage trop réduit, en temps de paix, mais aussi en conditions opérationnelles d’intensité variable.

Royal Navy classe Duke Type 23
Les frégates Type 23 de la classe Duke sont aujourd’hui les unités de surface combattante de la Royal navy ayant l’équipage le plus réduit, avec 186 membres.

La Royal Navy, elle, si elle partage les mêmes théâtres d’opération, et les mêmes menaces, que son homologue française, emploie jusqu’à aujourd’hui des destroyers Type 45 de la classe Daring, avec 190 membres d’équipage, et des frégates Type 23 classe Duke, et leurs 185 membres.

Quant à l’US Navy, qui partage beaucoup avec la Marine britannique, elle se limite à déployer, en zone d’intensité moyenne à forte, ses destroyers A.Burke (323 membres d’équipage), les LCS et leurs équipages à 65 personnes, en étant exclues.

Dans ce contexte, on peut se demander si la Royal Navy, comme Babcock, ne font pas preuve d’un excès d’enthousiasme, et peut-être, aussi, d’un évident manque de recul et d’expériences en la matière, en visant un équipage aussi réduit pour ses Type 32 ?

L’artillerie tractée vie ses derniers instants, selon l’US Army

« Nous avons assisté à la fin de l’efficacité de l’artillerie tractée ». C’est en ces termes que le Général James Rainey, chef du Commandement des contrats à terme de l’armée américaine, s’est exprimé lors du symposium Global Force de l’Association of the US Army.

Selon le général américain, en dépit de l’abandon récemment annoncé du super-canon du programme Extended Range Cannon Artillery (ERCA), l’US Army se prépare à des transformations majeures en matière d’artillerie, mais se détourne désormais de l’artillerie tractée, jugée, non sans raisons objectives, trop vulnérable.

La guerre en Ukraine a remis l’artillerie au centre du combat aéroterrestre

Comme ce fut le cas des chars et de l’infanterie mécanisée, l’artillerie a été négligée par de nombreuses armées, en particulier en occident, ces 30 dernières années. Ainsi, la majorité des armées de l’OTAN, y compris l’US Army, utilisent aujourd’hui encore, des systèmes d’artillerie conçus durant la guerre froide, comme le M109 américain, l’AS 90 britannique, ou les 2S3 et 2S19 soviétiques en Europe de l’Est.

2S39 Koalitsiya-SV
L’US Army doit répondre à l’entrée en service de nouveaux systèmes d’artillerie, comme le PCl-181 chinois, ou le 2S35 Koalitsiya-SV, aux performances supérieures à celles de son M109.

Engagées sur des théâtres dissymétriques, face à des adversaires ne disposant que de peu d’artillerie et d’aucune aviation, ces armées ont évolué d’un appui feu procuré par l’artillerie, vers celui apporté par l’aviation ou les hélicoptères de combat. Même sur des théâtres relativement intenses, comme en Irak ou en Syrie, la suprématie aérienne occidentale, tout comme russe en Syrie, n’a jamais été remise en question.

La guerre en Ukraine a profondément bouleversé ces paradigmes. Bien que disposant d’une force aérienne très inférieure en nombre, Kyiv est, en effet, parvenu à contenir, pendant plus de deux ans, la puissance aérienne russe et son millier d’avions de combat et d’attaque, à l’aide d’un réseau de défense aérienne dense et efficace.

Il en fut de même, d’ailleurs, concernant les forces aériennes ukrainiennes par la DCA russe. Les deux forces aériennes ont été contraintes, par ces défenses antiaériennes, d’opérer à distance de la ligne d’engagement, qu’il s’agisse des avions de combat ou des hélicoptères d’attaque, rendant beaucoup plus difficile le support aérien rapproché.

Cette fonction revint alors pleinement à l’artillerie, comme le veut, d’ailleurs, la doctrine soviétique. Elle devint, très vite, le pivot du rapport de force dans la guerre en Ukraine, avec comme mètre étalon, le nombre de tubes disponibles, ainsi que les stocks d’obus de 152 et de 155 mm.

L’artillerie tractée trop vulnérable face à la contrebatterie et aux drones

Si l’artillerie a retrouvé son rôle décisif sur le champ de bataille en Ukraine, elle a également payé un lourd tribut à son utilisation intensive depuis deux ans. Ainsi, selon le site Oryx, 350 systèmes d’artillerie tractés, 700 systèmes automoteurs et plus de 360 lance-roquettes multiples russes auraient été détruits, endommagés ou abandonnés depuis février 2022, soit la moitié de l’inventaire théorique des armées de Moscou, en début de conflit.

Artillerie tractée M777
Plus économique, l’artillerie tractée est également beaucoup plus vulnérable. En Ukraine, presque la moitié des 186 M777 livrés par les Etats-Unis ont déjà été détruits ou endommagés.

L’Ukraine, pour sa part, aurait perdu, selon le même site et avec la même méthodologie, 190 systèmes tractés, 310 systèmes autotractés et une soixantaine de lance-roquettes multiples.

Si ces chiffres semblent montrer une plus grande attrition des canons automoteurs, ils masquent, en réalité, la grande vulnérabilité de l’artillerie tractée, bien moins nombreuse sur le champ de bataille, mais subissant des taux de pertes beaucoup plus élevés que l’artillerie mobile.

Ainsi, les armées ukrainiennes auraient perdu 82 des 186 canons tractés M777 de facture américaine, livrés entre mai 2022 et l’été 2023, soit un taux d’attrition de presque 42 %. Le canon porté sur camion Caesar français, livré à 49 exemplaires sur la même calendrier, n’a enregistré que 8 pertes, soit un taux d’attrition de 16 %, plus de deux fois et demi inférieur à celui du canon américain, et sensiblement égal à celui du Pzh 2000 allemand.

Le canon de 52 calibres du Caesar explique, en partie, cette plus grande résilience, le Pzh 2000 allemand et l’archer suédois enregistrant, eux aussi, une attrition moindre et comparable au canon français. Sa grande mobilité participe tout autant à celle-ci.

CAESAR Ukraine
Le CAESAR représente davantage une évolution de l’artillerie tractée, dont il reprend la souplesse et les faibles couts, tout en gommant ses faiblesses, qu’une alternative à l’artillerie automotrice blindée.

Ainsi, il ne faut que trois minutes aux Caesar ukrainiens, pour se mettre en batterie, tirer six obus, et quitter le poste de tir, un délai trop court pour l’artillerie de contrebatterie russe. Il faut, à l’inverse, plus de cinq minutes au M777 pour faire de même, avec un équipage très entrainé, laissant le temps aux radars de contrebatterie, voire aux drones russes, de localiser l’origine du tir, de l’engager, et de le détruire.

Même le tir sous casemate, ou à partir d’emplacements préparés et protégés, ne suffisent plus à compenser le manque de mobilité de l’artillerie tractée, alors que les munitions rôdeuses et les obus guidés peuvent, désormais, frapper des cibles avec une précision de quelques mètres, voire moins.

Mobilité, allonge et précision : les trois clés de l’efficacité de l’artillerie moderne

Il n’y a donc rien de surprenant à ce que le général Riley, dans son allocution lors du symposium Global Force, ait fait de la mobilité, de l’allonge et de la précision, les trois clés de l’efficacité de l’artillerie aujourd’hui, et pour les années à venir.

L’allonge permet non seulement de frapper des cibles dans la profondeur du dispositif adverse, mais elle permet de le faire tout en restant hors de portée des systèmes d’artillerie adverses, censément moins évolués. Ainsi, les systèmes européens Caesar, Pzh2000 et Archer, et leur canon de 52 calibres, peuvent atteindre des cibles à 40 km avec des obus classiques, contre 25 km pour le M109, le 2S19 Mstas-s, ou le M777.

M109 Ukraine
Les M109 envoyés en Ukraine par les Etats-Unis et ses alliés, ont eux aussi, soufferts de taux d’attrition élevés, sans atteindre ceux du M777 cependant.

La précision assure d’obtenir un résultat identique, avec un nombre d’obus plus réduit. Outre une consommation plus réduite du nombre d’obus, que l’on sait stratégique, ces systèmes peuvent évacuer plus rapidement la zone de tir, pour éviter le tir de contrebatterie. Enfin, un nombre plus réduit de systèmes d’artillerie, suffit à atteindre un résultat similaire, produisant, de fait, un effet multiplicateur de forces.

La mobilité, enfin, offre une grande souplesse opérationnelle aux artilleurs, tout en réduisant le temps d’exposition des systèmes face au risque de contrebatterie. À ce titre, une majorité des Caesar détruits ou endommagés en Ukraine, l’ont été, non par des tirs d’artillerie, mais par des munitions rôdeuses Lancet. Là encore, la mobilité agit comme un multiplicateur de forces, en permettant à une pièce, d’opérer efficacement sur un périmètre plus élargi.

Reste que si l’artillerie tractée est beaucoup plus vulnérable que l’artillerie automotrice, elle subsistait dans les inventaires des armées, en raison de certaines qualités propres, comme sa capacité à être aisément projetée, y compris par avion, et surtout, du fait de son prix, bien plus accessible.

En effet, le M777 coute 4 fois moins cher que le M109 Paladin, et presque 6 fois moins cher qu’un Pzh 2000. Lorsque la masse est un enjeu décisif, comme en Ukraine, cet aspect économique ne peut pas être ignoré.

Le canon porté, successeur désigné de l’artillerie tractée

C’est pour répondre à cette double contradiction, que le français GIAT Industrie, devenu depuis Nexter, puis KNDS-France, a conçu le CAmion Équipé d’un Système d’ARtillerie, le CAESAR, qui aujourd’hui montre toute son efficacité aux mains des artilleurs ukrainiens.

CAESAR
La mobilité du canon porté, s’étend à sa capacité de projection, y compris par aéronef. Ainsi, un M109 pese dix tonnes de plus qu’un Caesar, un PZH 2000, 20 tonnes.

Celui-ci devait permettre de remplacer le canon tracté TR-F1 de l’Armée de terre, conservant sa souplesse d’emploi et ses couts réduits, tout en gommant ses faiblesses, avec une mobilité largement accrue, une plus grande allonge grâce à son tube de 52 calibres, et une précision exceptionnelle, avec un nouveau calculateur balistique inertiel recalé par GPS.

Le succès commercial et opérationnel du CAESAR, y compris en Ukraine, démontre que les ingénieurs français sont parvenus à relever ce défi, y compris dans le domaine des couts, un CAESAR coutant de 4 à 5 m€, un peu plus qu’un M777, et toujours 4 fois moins cher qu’un M109 et cinq fois plus économique qu’un PZH 2000.

Le concept du canon porté a, depuis, été repris par de nombreux industriels, en suède avec L’Archer, en Allemagne avec le RCH-155, en Israël avec l’Atmos, en Chine avec le PCL-181, et même en Russie, avec le 2S43 Malva. Les États-Unis ont, pour leur part, développé le Brutus, une référence directe au Caesar français, sans pour autant en avoir les qualités.

Quel avenir pour l’Artillerie de l’US Army ?

À l’occasion de ce symposium, le général Riley a donné les axes poursuivis par l’US Army en matière de modernisation de son artillerie, après l’arrêt du programme de super-canon ERCA.

M109-52
Le M109-52 de BAE systems, equipé du canon L52 de Rheinmetall, est certainement l’hypothèse privilégiée, aujourd’hui, pour faire évoluer son M109.

Comme on pouvait s’y attendre, la piste privilégiée, aujourd’hui, repose sur le développement de nouvelles munitions de précision à propulsion additionnée, permettant d’accroitre la portée et la précision de chaque tir, ainsi que le remplacement du tube de 39 calibres du M109, par un tube de 52 calibres.

Les industriels sont déjà prêts à répondre à cette demande. Ainsi, BAe, associé à Rheinmetall, propose une version du M109A7, baptisée M109-52, équipé du canon L52 de Rheinmetall qui équipe déjà le Pzh2000.

Apparemment, celui-ci s’est montré particulièrement résistant en Ukraine, supportant plus du triple du nombre de tirs prévus, sans altération importante de la portée, de la précision ou de la sécurité. La Corée du Sud, mais aussi Israël et l’allemand KNDS Deutschland (Krauss-Maffei Wegmann-, seraient également dans les rangs, pour proposer des solutions sur étagère, à l’US Army.

Toutefois, dans le même temps, le général Riley a laissé entendre que l’US Army pourrait aussi se tourner vers une solution plus légère et mobile que son M109, destinée à évoluer aux côtés des Stryker 8×8 au sein des brigades d’infanterie, ou des unités d’assaut.

Ce cahier des charges pourrait correspondre à l’ATMOS israélien, mais aussi, et surtout, au CAESAR français, qui a fait de la mobilité son ADN, en tant qu’alternative, non aux canons automoteurs, mais à l’artillerie tractée. À suivre donc…

Les Armées françaises peuvent-elles faire l’économie d’une conscription choisie ?

Alors que les tensions internationales ne cessent de croitre, les armées françaises font face à des difficultés croissantes pour simplement maintenir leurs effectifs, face à la baisse du nombre de candidats, et à la hausse des non-reconductions de contrats des militaires.

Si des mesures palliatives ont été annoncées dans le cadre de la LPM 2024-2030, rien ne garantit qu’elles puissent inverser cette tendance, alors que, dans le même temps, les armées ont plus que jamais besoin de retrouver de la masse.

Un nouveau modèle de conscription, la conscription choisie, mis en œuvre dans les pays scandinaves depuis plusieurs années, pourrait apporter une solution efficace, applicable et progressive, à ces enjeux de ressources humaines.

Le besoin de masse devient critique pour les armées françaises face aux menaces

« La guerre en Ukraine ouvre une nouvelle forme de guerre froide« . C’est en ces termes que Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, a entamé la conférence de presse donnée ce 26 mars, pour faire un état des lieux des efforts et attentes de son ministère, des Armées françaises et des industries de défense nationales, face aux évolutions des menaces en Ukraine, en mer Rouge et ailleurs.

Armées françaises au Mali
Les armées françaises ont été tranformées à la fin des années 90, pour disposer d’une importante capacité de projection de forces, faisant reposer la sécurité de la nation sur sa seule dissuasion.

Ce retour, désormais accepté, à une forme de Guerre Froide, va nécessairement influencer le modèle même des armées françaises, construites, depuis la fin des années 1990, sur un diptyque constitué de la dissuasion, d’une part, et d’un corps expéditionnaire projetable, réactif, mais limité en masse, de l’autre.

Ce modèle n’est pas, comme souvent évoqué, la seule conséquence des restrictions budgétaires liées aux bénéfices de la Paix post guerre froide. Si l’effondrement perçu de la menace russe a évidemment eu un poids déterminant dans ce dossier, les difficultés rencontrées par les Armées françaises pour déployer une force homogène et efficace en Arabie Saoudite, face à l’Irak, en amont de l’opération Desert Storm, jouèrent au moins autant.

La France touchait là du doigt les contraintes de ses armées de conscription, conçues pour faire face à la menace soviétique, mais structurellement inadaptées à la projection de puissance en volume, même si le nombre de militaires d’active était alors 50 % plus élevé à aujourd’hui.

En se professionnalisant, les armées françaises ont donc gagné en souplesse et réactivité. Cependant, elles ont, dans le même temps, considérablement perdu en masse, au point qu’aujourd’hui, celles-ci ne sont plus en mesure de permettre au chef d’État de « choisir ses guerres, et les gagner« , selon la maxime de Charles de Gaulle, sans s’intégrer pour cela dans une vaste coalition.

Ce retour à la guerre froide, annoncé par Sébastien Lecornu, aura donc, pour corollaire nécessaire, une refonte du modèle et du format, des armées françaises, dans les années à venir, pour retrouver cette crédibilité conventionnelle indispensable à sa dissuasion.

Le défi des ressources humaines qui handicape les armées françaises

Si le constat est relativement trivial à poser, y répondre s’avère, en revanche, des plus compliqués. En effet, au-delà des questions budgétaires, cruciales, mais traitées par ailleurs dans d’autres articles, le présent modèle des armées n’est pas adapté à une prise de masse significative.

Maistrance défile
Les armées peinent de plus en plus à recruter des personnels qualifiés répondant à leurs attentes

D’abord, parce que les militaires d’active coutent cher, pour une menace qui est, certes, très élevée en termes de conséquences, mais dont le risque demeure faible ou modéré, à l’opposée, par exemple, de la menace terroriste.

Surtout, les armées françaises rencontrent d’immenses difficultés simplement pour maintenir leurs effectifs, que l’on sait pourtant insuffisants. Ainsi, le nombre de candidats est aujourd’hui à ce point faible, que l’Armée de terre ne parvient pas à renouveler l’ensemble des postes, par ailleurs laissés vacants par une fidélisation amoindrie des militaires sous contrat.

Pour répondre à ce défi des ressources humaines, deux catégories de mesures ont été intégrées à la Loi de Programmation Militaires 2024-2030. La première concerne l’attractivité de la fonction militaire, en améliorant la condition, la vie de famille, ou encore les soldes et éléments de retraite.

Cette solution engendre toutefois une hausse des couts induits par militaire, ne permettant pas, dans le contexte budgétaire, d’envisager une hausse sensible des effectifs, donc de la masse.

La seconde mesure clé de la LPM 2024-2030, repose sur le doublement de la Réserve, passant de 40 000 à 80 000 hommes sur la période. Celle-ci répond aux besoins de prise de masse, un réserviste coutant beaucoup moins cher qu’un militaire d’active, tout en étant mobilisable en cas de besoin. Néanmoins, avec le faible niveau d’interaction entre la société civile et les armées, rien ne garantit que cet objectif puisse être atteint, surtout sur une période aussi limitée.

Le modèle de conscription traditionnel, plébiscité par les français, mais inapplicable aujourd’hui

De fait, le retour à la conscription pourrait représenter la réponse de prédilection pour faire face à une nouvelle guerre froide, fut-elle de forme différente. Cette solution est d’autant plus séduisante, qu’elle peut s’appuyer sur un important soutien populaire, à en croire les sondages récents comme plus anciens.

recrutement armées de terre
Les armées françaises, comme toutes les amées occidentales, rencontrent d’importantes difficultés de recrutement et de fidélisation de leurs personnels.

Cependant, appliquer le modèle traditionnel de la conscription universelle, aujourd’hui, est tout simplement impossible, pour de nombreuses raisons.

Ainsi, les Armées ne disposent plus des capacités suffisantes pour encadrer une classe d’âge, soit plusieurs centaines de milliers de jeunes français chaque année. Une telle mesure viendrait profondément déstructurer, pour de nombreuses années, l’outil défense français, alors même que la situation sécuritaire est très dégradée.

D’autre part, ces mêmes armées ont cédé une grande partie de leur patrimoine immobilier ces 30 dernières années, en partie pour alimenter leur budget de fonctionnement. Elles ne disposent plus des moyens d’accueil pour autant de jeunes gens. Enfin, elles ne disposent pas de réserves d’équipements pour armer, entrainer et employer efficacement ces conscrits.

En d’autres termes, imposer un retour à la conscription, comme celle qui était appliquée dans les années 70 et 80, nécessiterait des crédits considérablement augmentés pour les Armées, sans qu’aucun résultat significatif pour la mission de défense, puisse être envisagé avant de nombreuses années.

Alors, la conscription est-elle une voie sans issue pour les armées françaises ? Pas nécessairement…

La conscription choisie, un modèle venu du nord plein de promesses

Un second modèle de conscription est, en effet, appliqué, en particulier par les armées scandinaves, mais aussi par l’Armée Populaire de Libération, et montre d’évidents atouts potentiels pour les Armées françaises.

Conscirption norvège
La conscription choisie appliquée en Norvège, est un modèle d’efficacité.

La conscription choisie, tel est son nom, repose sur un service militaire (et/ou civil, selon les pays), obligatoire pour toute une classe d’âge, parfois hommes et femmes confondus. En revanche, seule une partie de cette classe d’âge est effectivement retenue pour rejoindre les Armées.

Cette approche permet d’adapter l’apport de la conscription aux effectifs des Armées, à leurs capacités d’accueil, de formation, et d’équipement, mais aussi à leurs besoins. Ainsi, en Norvège, seuls 10 % de chaque classe d’âge, est effectivement appelée à servir sous les drapeaux pendant un an.

Outre cet atout déjà considérable, puisqu’il permet de contourner un des principaux griefs faits au modèle de conscription, s’ajoute la sélection des candidats faite par les armées. Les conscrits sont, en effet, choisis par les Armées, en fonction de leurs parcours et compétences, ainsi que des besoins des armées.

Pas question, ici, de tirage au sort. Rejoindre les armées, pour une année de conscription, est lié aux qualités observées des jeunes conscrits, lors d’une courte évaluation, obligatoire et universelle, ainsi que sur les éléments du dossier scolaire et périscolaire.

Suède armées
la Suède applique, depuis 2017, le même modèle de conscription choisie que la Norvège.

Cette sélection par les armées, loin de représenter un sujet de discorde et de contestation chez les jeunes, est rapidement devenue un sésame recherché dans le Curriculum Vitae des jeunes norvégiens, pour qui faire son service militaire, implique d’appartenir à une certaine élite.

Et de fait, les Armées norvégiennes ont aujourd’hui plus de candidats volontaires pour faire leur service militaire d’un an, que de places disponibles, transformant en un atout, ce que l’on aurait pu considérer comme une faiblesse, à savoir son caractère non universel. En outre, les jeunes volontaires à la conscription, sont très certainement bien moins problématiques à encadrer par les militaires d’active norvégiens, que s’ils avaient été conscrits d’office.

Des effets induits bénéfiques aux armées comme à la mission défense

Les atouts de ce modèle de conscription, ne se réduisent pas à ces effets directs. En effet, ses effets induits, tendent à en faire un outil particulièrement efficace, pour les Armées comme pour la mission Défense.

Ainsi, le taux d’enrôlement des jeunes conscrits, dans les Armées elles-mêmes, ou dans la Réserve Opérationnelle, est sensiblement supérieur au taux d’enrôlement dans les armées constaté dans la population civile. Dans le même temps, les jeunes enrôlés, après être passés par le service militaire, présentent un taux de démission bien plus faible lors de la formation initiale.

recrutement armée de terre
Les Armées françaises peuvent-elles faire l'économie d'une conscription choisie ? 52

De fait, si la conscription choisie peut permettre d’augmenter la masse des armées, mais avec les contraintes de non-projection que l’on connait, concernant le statut de conscrit, elle pourrait également soutenir le recrutement des Armées, pour les militaires d’active ou de la garde nationale, qui eux, sont projetables.

Le modèle de la conscription choisie offre, par ailleurs, une grande souplesse dans la progression des effectifs des armées, calquée sur leurs besoins ainsi que sur ses moyens budgétaires effectivement disponibles, et non sur la base de données démographiques non maitrisables.

Enfin, ce modèle permet d’accroitre sensiblement la représentativité des armées dans la société civile, tout en améliorant son image par son caractère sélectif, et ainsi d’améliorer la compréhension et la sensibilisation de l’opinion publique à la mission défense.

Conclusion

On le voit, face aux menaces qui sont dorénavant parfaitement perçues par une grande majorité de l’opinion publique, si pas de la classe politique, et à un retour à une forme de guerre froide, pour reprendre les mots de Sébastien Lecornu, la conscription choisie pourrait représenter un modèle efficace et applicable, pour renforcer raisonnablement et progressivement, la masse des Armées françaises.

Armée de terre
les armées françaises vont devoir éoluer et prendre en masse, si Paris entend toujours jouer un rôle significatif dans les decennies à venir.

Elle permet, en effet, de lever une grande partie des objections, fondées, au sujet d’un retour à la conscription en France, tout en permettant, très certainement, de fluidifier les recrutements des militaires d’active et de réserve, que l’on sait difficiles.

Reste à voir si ce modèle performant pourra trouver sa voie dans une Loi de Programmation Militaire déjà en tension, alors que les marges de manœuvre budgétaires sont très limitées.

Il est probable, d’ailleurs, qu’un tel modèle ne pourra être considéré, qu’une fois l’équation budgétaire transformée, pour cesser de considérer l’investissement de défense en France comme une simple dépense, sans y intégrer les retours considérables générés par ces investissements, dans le budget de l’État.

D’une manière ou d’une autre, si la France veut effectivement continuer à peser dans le débat international dans les décennies à venir, elle devra profondément faire évoluer ses propres paradigmes, confortables évidemment, mais inefficaces, pour se doter de l’outil militaire requis.

La construction des 2 derniers SNLE Boreï de la Marine russe débutera cette année.

Alors qu’elle vient d’annonce la prochaine entame des travaux pour ses deux derniers SNLE Boreï, la Russie est, aujourd’hui, le seul pays qui parvient à lancer et livrer, chaque année, plus de sous-marins que de destroyers et de frégates.

Mieux encore, la Marine russe ne recevra, dans les six années à venir, que six frégates de la classe Admiral Gorshkov, un navire de seulement 5 400 tonnes, qui est, pourtant, la plus importante unité de surface combattante produite par l’industrie navale russe post-soviétique.

Elle va admettre au service, sur la même période, cinq, peut-être sept, SSGN de la classe Iassen, de 8 600 tonnes en surface, ainsi que six SNLE des classes Boreï-A et Boreï-AM, de 15 000 tonnes chacun en surface, soit au moins 11 grands sous-marins à propulsion nucléaire.

La construction des deux derniers SNLE Boreï-AM débutera en 2024 pour la Marine russe

C’est précisément la construction des deux derniers SNLE de la classe Boreï, qui débutera en 2024, selon l’agence Tass, citant une source au ministère de la Défense russe.

Ces navires seront les troisièmes et quatrièmes unités, du troisième lot de SNLE russes de la classe Boreï. Le premier lot de trois navires de la classe Boreï, a été livré à la flotte du Nord (un navire) et à la flotte du Pacifique (deux navires), de 2012 à 2014, à raison d’un sous-marin chaque année.

SSBN Borei
La classe Borei aura été divisée en trois lots, et autant de sous-classes : Boreï, Boreï-A et Boreï-AM.

Le second lot porta sur 5 sous-marins d’une version évoluée, baptisée Boreï-A, disposant d’équipements de communication et de détection plus modernes, ainsi que d’une hydrodynamique redessinée, pour leur conférer une vitesse supérieure, une plus grande manœuvrabilité et une discrétion renforcée.

Comme les premiers Boreï, les Boreï-A emportent 16 missiles balistiques SLBM RSM-56 Bulava, d’une portée estimée supérieure à 10 000 km, pouvant emporter jusqu’à 10 têtes nucléaires à trajectoire indépendante MIRV. Le premier des Boreï-A, le Knyaz Vladimir, est entré en service en 2020, alors que la dernière unité du second lot, le Knyaz Pozharskiy, doit l’être en 2024, deux pour la flotte du Nord, les trois autres pour celle du Pacifique.

Le troisième, et pour l’heure, dernier lot de SNLE Boreï, porte sur quatre navires. La construction des deux premiers, le Knyaz Potemkin et le Dmitry Donskoy, a débuté en 2021. Les deux navires doivent rejoindre la flotte du Nord en 2026 et 2028.

Les troisièmes et quatrièmes Boreï de ce lot, et derniers navires de la classe, selon la planification actuelle, devraient être livrés, selon la source citée par Tass, en 2029 et 2030, à raison d’un navire par flotte.

6 SNLE pour la flotte du Nord, et 6 pour la flotte du Pacifique en 2030

De fait, selon cette source, les deux flottes principales de la Marine russe, la Flotte du Nord, basée à Mourmansk, et la Flotte du Pacifique, à Vladivostok, disposeront chacune de 6 SNLE Boreï en 2030.

SNLE Borei
Sur la GPV actuelle, chacune des deux grandes flottes russes alignera à la fin de la decennie, 6 SNLE de la classe Borei, soit autant que l’US Navy ne prevoit d’avoir de SSBN de la classe Columbia.

Ce format doit leur permettre, chacune, de conserver deux navires en patrouille en permanence, ainsi qu’un navire en alerte, conférant à Moscou un potentiel de 6 SNLE à la mer en temps de crise, peut-être davantage, autant que les États-Unis, et 50 % plus importante que la flotte de SNLE européenne.

La Marine russe disposera également de 576 à 960 têtes nucléaires prêtes au tir, au travers de cette flotte, soit bien plus qu’il n’en faut pour participer au dialogue stratégique mondial, en dépit d’un PIB 30 % inférieur à celui de la France, et d’une flotte de surface de haute mer en décrépitude.

Les quatre derniers sous-marins appartiendront à une nouvelle version Boreï-AM

L’Agence Tass fait référence, dans son article, non pas à des sous-marins de la classe Boreï-A, comme les 5 navires formant le second lot, mais d’une nouvelle sous-classe, baptisée Boreï-AM. Le M fait référence à une version Modernisée (модернизированный) de l’équipement, et apparait aussi dans la nomenclature du programme, le Projet 955AM.

La nature des modernisations apportées à ces nouveaux navires, n’est pas encore dévoilée. On peut penser, en application de la logique employée jusqu’ici dans ce programme par l’Amirauté russe, comme des chantiers navals Sevmash, qui construiront les navires, que les deux navires les précédant, appartiendront, eux aussi, à cette sous-classe.

Davantage de SNLE russes au-delà de 2030 ?

Les deux derniers SNLE dont la construction vient d’être annoncée, devraient, selon la planification russe actuelle, être les derniers navires de ce type à entrer en service. Pour autant, il se pourrait bien que Moscou table sur une flotte de SNLE plus imposante, dépassant celle des États-Unis, avec 12 SSBN classe Columbia planifiés.

SSGN Iassen
Le dernier des SSGN classe Iassen devrait être livré au debut de la prochaine decennie.

En effet, la fin annoncée du programme P955-A-AM Boreï d’une part d’ici à 2030, mais aussi du programme P885-M Iassen, va laisser l’outil productif russe dans le domaine des sous-marins nucléaires, sans activité suffisante pendant près de deux décennies, ce après avoir fourni un effort colossal pour retrouver ses compétences et moderniser la flotte sous-marine russe, en 20 ans seulement.

Pour l’heure, aucun programme de sous-marins à propulsion nucléaire n’a été annoncé par Moscou pour cette période, ni de SSN pour remplacer les Akula et renforcer les SSGN Iassen et Anteï, ni pour étendre la flotte de SNLE.

Il est probable, cependant, que de nouvelles annonces interviendront lors de la préparation de la prochaine loi de programmation militaire pluriannuelle, ou GPV, celle actuelle se terminant en 2027.

Cette hypothèse est d’autant plus probable que, dans une interview donnée à RIA Novosti, igor Vilnit, le PDG de Rubin, a indiqué que si la classe Arktur, qui doit succéder aux Anteï et Iassen, n’entrera pas en service avant 2050, le « remplacement des Boreï », en revanche, devrait débuter à partir de 2037.

Sachant qu’à ce moment-là, le plus ancien des Boreï, le Yury Dolgorukiy, n’aura que 25 ans, et que les Delta IV russes qui l’ont précédé, ont navigué pendant plus de 40 ans, on peut supposer que Moscou prévoit d’accroitre sa flotte de SNLE au début de la prochaine décennie, peut-être jusqu’à 16 navires, pour maximiser son ascendant stratégique dans ce domaine, face aux États-Unis, mais également face à la Chine, et ainsi garantir sa position dans le concert des super-puissances militaires mondiales, si pas économiques.