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Rafale : cinq avions ont décollé ce matin en direction de la base aérienne d’Ambala, en Inde

Depuis le début du printemps, l’Inde et la Chine traversent une profonde crise militaire et diplomatique dans l’Himalaya, qui a déjà fait plusieurs dizaines de morts. Dans ce contexte particulièrement tendu, les deux grandes puissances asiatiques renforcent leurs effectifs dans la région afin de se préparer à un éventuel affrontement militaire. Comme nous l’avions déjà évoqué dans une analyse dédiée, le renforcement de la posture militaire indienne passe notamment par la commande en urgence de nouveaux avions russes mais, surtout, par la livraison accélérée d’avions de combat Rafale, produits par le groupe français Dassault Aviation.

Conformément à ce qui avait été annoncé ces dernières semaines, cinq avions Rafale de l’Indian Air Force ont donc bel et bien décollé ce matin du site de Dassault Aviation à Mérignac afin de se rendre sur leur nouvelle base d’Ambala, dans le Nord de l’Inde. Ces cinq appareils intègreront très rapidement le No 17 Squadron « Golden Arraows », où ils pourraient être opérationnels dans quelques jours à peine. Ainsi, si le convoyage actuel ne porte que sur une poignée d’avions à peine, il constitue un véritable évènement pour l’Indian Air Force, mais également pour Dassault Aviation qui a encore de grands espoirs commerciaux en Inde.

DA Rafale IAF Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Au moins deux Rafale EH monoplaces font parti du convoie actuellement en escale technique aux Emirats Arabes Unis. Pour le moment, l’IAF a réceptionné (en France) moins d’une douzaine de Rafale, dont un Rafale DH dédié aux essais en vol et sept autres biplaces destinés à être livrés en escadrons.

Ce lundi matin, Dassault Aviation a annoncé que le premier vol de convoyage vers l’Inde venait de débuter. D’après les images diffusées, et contrairement à ce qui était envisagé encore récemment, des Rafale EH monoplaces font bel et bien partie de ce premier convoyage, aux côtés d’au moins deux Rafale DH biplaces. Si un sixième appareil a un temps été évoqué pour faire partie de ce premier vol, il semble que l’Indian Air Force ait préféré conserver le reste de sa flotte actuelle de Rafale (environ 10 appareils) sur le sol français afin de maintenir un niveau de formation rapide pour ses pilotes et mécaniciens.

Les cinq Rafale ayant décollé de Mérignac sont équipés de la configuration de convoyage standard, avec deux réservoirs de 2000 litres sous les ailes, et un réservoir de 1250 litres sous le ventre, assurant un bon compromis entre autonomie et consommation de carburant. Pour la première partie de leur périple de 7000 km, les Rafale pilotés par des équipages de l’Indian Air Force ont été accompagné d’avions ravitailleurs de l’Armée de l’Air française, a priori des A330 MRTT Phénix, et devraient également être suivis par au moins un avion de transport lourd C-17 de l’IAF. A l’heure où nous écrivons ces lignes, l’ensemble des appareils devrait s’être posé à Al Dhafra, aux Emirats Arabes Unis, qui abrite la Base Aérienne 104 de l’Armée de l’Air française. Seul un A330 MRTT français, doté d’équipements médicaux, aurait poursuivi son vol vers l’Inde, dans le cadre d’une aide offerte par la France dans la lutte contre le Covid-19. Pour la seconde partie du voyage, les cinq Rafale devraient être ravitaillés par des appareils de l’Indian Air Force lors de leur survol de la Mer d’Arabie jusqu’à leur destination finale. Le cinq premiers Rafale indiens sont ainsi attendus le 29 juillet à Ambala, à quelques centaines de kilomètres seulement des zones de tension avec la Chine mais également avec le Pakistan.

Dassault Aviation Rafale DH Inde Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Les pilotes indiens actuellement opérationnels sur Rafale sont pour la plupart des pilotes émérites ayant fait leurs preuves sur Mirage 2000, notamment. Grâces aux équipements logistiques et aux armements déjà prépositionnés à Ambala, ces derniers pourraient réaliser leurs premières patrouilles de combat d’ici moins de dix jours.

Pour les relations franco-indiennes, cet évènement s’inscrit dans une série d’annonces récentes qui semblent de bon augure à la fois pour la diplomatie des deux pays et pour les relations commerciales de Dassault Aviation et de l’industrie aéronautique française au sens large. En effet, malgré la crise sanitaire mondiale, les industriels français ont su démontrer leur capacité à respecter leurs délais et même à les raccourcir significativement. Pour rappel, seuls quatre Rafale auraient dû être livrés en Juillet 2020, avec une mise en service opérationnel quelques mois plus tard. Néanmoins, dans le contexte de tensions actuels avec la Chine, la France a non seulement accepté de livrer plus rapidement un plus grand nombre d’avions, mais ces derniers devraient disposer dès à présent des équipements, du soutien logistique et des armements qui n’étaient pas attendus avant le mois d’octobre à l’origine.

Parmi ces équipements de mission, on note notamment que la France a accepté de livrer des missiles air-air à très longue portée METEOR ainsi que des missiles SCALP récupérés sur ces propres stocks. Plus récemment, comme nous vous l’avions indiqué, l’IAF a également effectué un achat d’urgence de munitions air-sol AASM Hammer, qui seront également prélevées sur les stocks français afin d’être expédiés en quelques jours vers Ambala. Le fait que les autorités françaises aient accepté de vendre et de livrer extrêmement rapidement ces armements, en avance de phase sur la planification initiale, montre l’implication de la diplomatie française sur ce dossier, malgré les risques que cette posture pourrait représenter pour les relations franco-chinoises.

Rafale meteor mica Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Armé de missiles MICA et surtout des nouveaux METEOR, les Rafale indiens seront dès leur arrivée en Inde les chasseurs les plus performants du pays et sans doute de la région.

Si l’excellence des relations indo-françaises dans ce dossier a été saluée à la fois par les autorités françaises et indiennes, il faut néanmoins rappeler que les enjeux à moyen terme dépassent très largement la mise en service des premiers chasseurs du No 17 Squadron. Avec leurs missiles METEOR et SCALP, les cinq premiers Rafale indiens pourront modifier légèrement l’équilibre des forces dans la région du Kashmir-Ladakh, notamment en fournissant à l’IAF une capacité de frappe directe sur les bases chinoises sans avoir à quitter l’espace aérien indien. Enfin, avec les munitions AASM Hammer, les Rafale indiens devraient être en mesure de réaliser des frappes conventionnelles même dans un contexte de brouillage intense, notamment des émissions GPS. Mais ce petit nombre d’appareils ne permettra pas de renverser complètement la situation en faveur de New Delhi. Toutefois, si le ressenti des pilotes indiens sur le terrain s’avère aussi bon que prévu, la débauche de communication autour du convoyage actuel pourrait permettre à Dassault Aviation de vendre des appareils supplémentaires.

Pour le moment, seuls 36 Rafale ont été vendus à l’IAF, et ces derniers devraient être intégralement livrés d’ici la fin de l’année 2021, pour une mise en service complète des deux escadrons concernés dès l’année suivante. Aussi efficaces que puissent être les Rafale face aux armées chinoises et pakistanaises, deux escadrons resteront insuffisants dans le cadre d’un conflit ouvert. Certes, l’IAF pourrait les réserver aux seules missions de frappe dans la profondeur et de dissuasion nucléaire, mais cela ne collerait pas avec la récente commande d’AASM Hammer. Alors que les équipements au sol inclus dans le contrat avec la France doivent permettre d’assurer le soutien de quatre escadrons, il serait donc logique que l’IAF procède rapidement à une commande en urgence opérationnelle d’au moins deux escadrons supplémentaires, indépendamment de l’appel d’offre en cours pour la livraison d’une centaine de nouveaux avions de combat.

A2SM a guidage laser Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
La commande récente de munitions AASM Hammer montre que l’IAF n’a pas l’intention de cantonner ses nouveaux appareils aux seules missions de « décapitation ». Un élargissement du spectre opérationnel des Rafale indiens sera un argument supplémentaire pour l’acquisition rapide d’une quarantaine de chasseurs supplémentaires.

Du point de vue de l’Indian Air Force, qui a toujours désiré acquérir le Rafale en grand nombre, il est d’ailleurs possible que le déluge d’annonces autour d’une livraison anticipée d’une petite demi-douzaine d’avions de combat fasse partie intégrante d’une stratégie déclaratoire visant le grand public indien. Alors que le Rafale a été au cœur de la dernière campagne présidentielle en Inde, il est aujourd’hui primordial pour l’Indian Air Force de montrer non seulement que le chasseur français est un excellent appareil qui vaut largement son prix, mais aussi que ce dernier est indispensable à la conduite des futures opérations aériennes face à des ennemis bien réels et bien équipés. Reste à voir si cette opération de communication et les excellentes relations diplomatiques franco-indiennes suffiront à assurer de nouvelles commandes de Rafale dans un contexte économique particulièrement tendu.

La Corée du Sud opte pour le F35B et confirme ses ambitions aéronavales

Alors que certains pays s’interrogent sur l’intérêt des porte-avions dans un conflit moderne, notamment aux Etats-Unis et en France, plusieurs pays font, eux, d’importants efforts pour se doter d’une telle capacité. C’est le cas du Japon qui a commandé une quarantaine de F35B pour armer ses deux destroyers porte-aéronefs de la classe Izumo, de l’Inde qui poursuit ses efforts pour renforcer sa flotte aéronavale, ou de la Chine, dont le troisième porte-avions, équipés cette fois de catapultes électromagnétiques et capables de mettre en oeuvre des aéronefs lourds et des drones de combat. La Corée du Sud, dont les ambitions navales ont plusieurs fois été abordées dans nos colonnes, n’y déroge pas. En effet, Séoul a annoncé, en juillet 2019, le developpement de deux porte-aéronefs d’assaut de 30.000 tonnes capables de mettre en oeuvre jusqu’à 16 avions de combat F35B, que le pays ne possède pas.

Ce sera bientôt le cas, puisque la presse sud-coréenne s’est faite l’écho de la décision prise par les autorités du pays, et contraire à ce qui fut dit en novembre 2019, de remplacer les derniers 20 F35A de la commande initiale qui devait porter sur 60 appareils pour remplacer les F4 et F5 encore en service au sein des forces aériennes coréennes, par 20 F35B, version à décollage et atterrissage court ou vertical du chasseur américain, en service notamment dans le corps des Marines des Etats-Unis, dans la Royal Air Force, et commandée par Tokyo, pour servir à bord de leurs porte-aéronefs respectifs. Avec ces appareils, Séoul disposera de capacités de projection de puissance certes limitées, mais réelles, tant dans le cadre de coalition que dans La Défense de son territoire face à Pyongyang ou Pékin, le cas échéant.

F35B de lUS Marines Corps au decollage dun LHD Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Grâce à sa tuyère orientable, et à sa soufflante d’équilibrage située derrière le cockpit, le F35B peut effectuer des décollages courts et des atterrissages verticaux, à l’instar des Harrier qu’il remplace au sein de Marines Corps ou de la Royal Air Force.

Peut-être en raison des conséquences économiques de la crise Covid-19, On note toutefois que cette commande reste modeste, aux vues des capacités annoncées des 2 porte-aéronefs à venir. Avec une flotte de 20 appareils en parc, la Marine sud-coréenne ne pourra guère espérer garantir une disponibilité permanente de plus de 10 à 12 appareils, à peine assez pour équiper un porte-aéronefs, et assurer sa protection ainsi que des capacités de frappes limitées. A titre de comparaison, la Marine nationale française dispose d’une quarantaine de Rafale Marine, un appareil réputé pour sa fiabilité et sa disponibilité (contrairement au F35B), pour armer à hauteur de 24 appareils l’unique porte-avions nucléaire Charles de Gaulle. Même en admettant que Seoul n’envisage pas de mettre en oeuvre simultanément ses deux porte-aéronefs, il manquerait toujours une autre vingtaine d’appareils pour garantir une certaine permanence des capacités aéronavales pour un porte-aéronef et 16 appareils. On peut donc s’attendre à une ultime commande d’au moins 20 autres F35B de la part de Seoul, d’ici 2 à 4 ans, de sorte à mettre en parallèle l’entrée en service du second porte-aéronefs et du second escadron de chasse embarqué.

En revanche, cette décision nous éclaire sur deux autres aspects de la politique de défense de Séoul. En premier lieu, il est probable que le pays ne commandera plus d’autres F35A, et qu’il donnera la priorité à son programme K-FX pour le remplacement des F4, F5 et F16 de ses forces aériennes. En effet, si Seoul avait eu pour intention d’augmenter son parc de F35A, il eut été probable qu’il l’eut fait dans le cadre du programme en cours, plutôt que de diviser en deux ses acquisitions. En outre, il est également probable que la décision de construire une classe de porte-avions sud-coréens de 40.000 ou 70.000 tonnes, comme envisagé en octobre 2019, ait été, sinon abandonnée, en tout cas reportée. Si Seoul avait l’ambition de construire de tels bâtiments, équipés de F35C, version lourde opérant à partir de porte-avions et nécessitant des catapultes et brins d’arrêts contrairement au F35B, les autorités sud-coréennes auraient eu tout intérêt à intégrer cette commande (au moins 40 à 50 appareils) à la commande en cours, de sorte à obtenir des compensations industrielles et opérationnelles plus significatives de la part de Washington, comme le fit Tokyo.

Doko Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
La Corée du Sud dispose de deux porte-hélicoptères d’assaut légers de la classe Doko, ne permettant pas de mettre en oeuvre des F35B aujourd’hui

Quoiqu’il en soit, cette annonce, qui doit encore faire l’objet d’une confirmation officielle de la part des autorités sud-coréennes et américaines, confirme la volonté de Séoul de se doter d’une puissance navale de haute mer significative, capable de s’intégrer dans un dispositif inter-allié sous commandement américain, dans le but évident de faire contre-poids aux ambitions navales chinoises. Cette course aux armements, qui touche tous les pays de la ceinture indo-pacifique, semblent toutefois ne pas émouvoir outre-mesure les européens, même la France qui, portant, a plus de 1,8 millions de ses ressortissants nationaux dans la zone, entre la Réunion, Mayotte, les iles polynésiennes, Wallis et Futuna et la Nouvelle Calédonie, par ailleurs des sites de portée stratégique dans le Pacifique et l’océan Indien.

Un décret présidentiel facilitant l’exportation de drones de combat divise la classe politique américaine

Jusqu’à présent, les exportations par les Etats-Unis de systèmes de drones de catégorie 1, c’est à dire affichant une capacité d’emport inférieure à 500 kg à plus de 300 km, comme le MQ-1 Predator, le MQ-9 Reaper ou le RQ-4 Global Hawk, étaient conditionnée à un accord préalable explicite des autorités américaines, selon la règle de la « présomption de refus », étant assimilés à des missiles dans la législation Missile Technology Control Régime, ou MTCR. Le pays acquéreur devait justifier, par des circonstances exceptionnelles, sa demande, ce qui engendrait une procédure longue, et sensiblement plus lourde que pour d’autres équipements. Selon les déclarations de plusieurs industriels américains, cette difficulté avait entrainé des conséquences néfastes sur les exportations américaines de ce type d’équipement, notamment vis-à-vis de son principal concurrent la Chine qui, depuis 2015, a dépassé les Etats-Unis dans ce domaine sur la scène internationale.

Vendredi 25 juillet, le secretaire adjoint au bureau des affaires politico-miliaires, R. Clarke Cooper, a annoncé le retrait de cette spécificité pour ces drones, jugeant le risque de fuite technologique et la menace potentielle que représente ces drones pour la sécurité des Etats-Unis et de ses alliés comparable à ceux d’autres équipements de défense non contraints par cette législation spécifique. Cette annonce a naturellement satisfait les industriels, mais a également engendré de nombreuses oppositions et réserves, venant aussi bien de la classe politique que des industriels eux-mêmes.

Le drone chinois MALE Wing Loong 2 et les divers armements quil peut mettre en oeuvre Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Depuis 2014, la Chine a dépassé les Etats-Unis dans la vente de drones militaires sur la scène internationale, notamment grâce au drone MALE Wing Long II

La charge initiale est venue du sénateur démocrate de New-York Bob Menendez, membre de la commission sénatoriale des affaires étrangères, par l’intermédiaire d’une déclaration publique dans laquelle il dénonce la décision irresponsable du président Trump laissant aux industriels américains la possibilité d’exporter de tels équipements à des nations au comportement répréhensible. Dans la ligne de mire du sénateur, l’Arabie saoudite qu’il critique vertement pour ses violations des droits de l’homme, vers laquelle il milite pour la suspension des livraisons d’armes américaines.

Mais, selon le site américain defensenews.com, certains industriels se montrent également sceptiques quand à la portée réelle d’une telle décision. En premier lieu, ils craignent que ce décret soit tout simplement supprimé par Joe Biden si ce dernier venait à remporter les élections présidentielles de cet automne. Surtout, l’efficacité attendue de ce décret pourrait être, selon eux, minime. En effet, le président Trump avait déjà annoncé en avril 2018 une série de lois simplifiant l’exportation de ces drones, avec l’espoir de voir augmenter sensiblement les ventes internationales, ce qui ne fut pas le cas. D’une part la mise en oeuvre du décret fut particulièrement laborieuse, d’autre part, la majorité des acquisitions de ce type d’équipement passant par le processus Foreign Military Sales, ou FMS, l’allègement des procédures standards n’eut aucun effet sensible.

RAAF marked Predator B 200dpi Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Une majorité des utilisateurs de drones de catégorie 1 américains en ont fait l’acquisition via le système FMS.

Le dilemme moral, économique et politique auquel font face les Etats-Unis au sujet des drones de catégorie 1 pourrait bien n’être qu’un avant-goût de ceux à venir. En effet, si pendant les 30 années ayant suivi l’effondrement du bloc communiste, les Etats-Unis jouissaient d’une position quasi-monopolistique sur les systèmes d’armes à forte dimension technologique, la situation évolue désormais rapidement. D’une part, les pays européens semblent retrouver certaines ambitions en matière de developpement technologique de système d’armes, après prés de 25 années de roue libre sur la confortable certitude des bénéfices de la Paix. D’autre part, la Russie, et surtout la Chine, sont devenues des acteurs de premier ordre dans ce domaine, avec des systèmes d’armes très performants et disponibles, et la ferme intention de les vendre sur la scène internationale.

Or, si en 2015, Washington pouvait encore, sans grande crainte, refuser à Ryad, Dubaï ou New Delhi, des systèmes très performants (ou supposés comme tels) comme le F35 ou le système anti-missiles THAAD, il en ira très bientôt autrement, avec l’arrivée des Su-57, FC-31 et autres S-500 sur le marché international, avec le risque de voir lentement mais surement des pays alliés dériver vers d’autres sphères d’influence, parfois antagonistes. Les autorités américaines seront dès lors rapidement confrontées à des arbitrages ne présentant aucune bonne option, entre le soutien à un régime contestable pour garantir sa fidélité, et le risque de voir ce régime se tourner vers des sirènes plus séduisantes, et perdre ainsi des points d’appuis stratégiques dans le monde.

Un des prototype du programme PAK FA qui deviendra le Su57 Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
L’arrivée sur le marché international d’appareils de nouvelle génération comme le Su-57 russe, va contraindre les Etats-Unis à des arbitrages difficiles concernant les autorisations d’exportation des F35.

Mais contrairement aux années 70 ou 80, durant lesquelles l’information circulait beaucoup plus lentement et se diffusait peu, les nouvelles technologies, les chaines d’information en continue, et surtout les réseaux sociaux, ne permettent plus de masquer ces arbitrages moralement critiquables et politiquement justifiés. Face à des adversaires qui compartimentent chaque jour davantage l’information disponible pour leur opinion publique, ce volet constitue, sans le moindre doute, une des plus grandes faiblesses pour les Etats-Unis, comme pour leurs alliés occidentaux, dans la reconfiguration du paysage géopolitique international.

Est-il trop tard pour le NEURON ?

Le 1er décembre 2012, le premier drone de combat de facture européenne, le NEURON, prenait l’air pour la première fois de la base aérienne 125 d’Istres, dans les Bouches-du-Rhône, pour un vol qui dura 25 minutes au dessus de l’étang de Berre. Cet événement concrétisait 9 années d’efforts de la part des équipes de Dassault Aviation et de ses partenaires européens Italiens, Suédois, Espagnols, Grecs et Suisses, et offrait à l’Europe l’opportunité de se positionner en tête dans le domaine des drones de combat furtifs, appelés à devenir cruciaux dans les guerres aériennes à venir. 8 années plus tard, le programme de démonstrateur n’a donné lieu à aucune conversion opérationnelle, ni même à un programme industriel, alors que dans le même temps, les grandes nations militaires, comme les Etats-Unis (Skyborg, Stingray), la Russie (S70 Okhotnik-B) et la Chine (GJ-11 Sharp Sword) ont tous entamé la production industrielle de ce type d’équipements. Comment expliquer ce raté phénoménal français et européens ? Et surtout, est-il aujourd’hui trop tard pour faire du programme NEURON le drone de combat opérationnel indispensable au forces aériennes européennes dans les années à venir ?

Objectifs et Historique du programme NEURON

Le programme NEURON, lancé initialement en 2003 par la ministre de La Défense française Michelle Alliot-Marie, répondait à un besoin clairement identifié par l’Etat-Major de l’Armée de l’Air : à horizon 2030, la densification et les performances des systèmes anti-aériens pourront empêcher des avions de combat conventionnels, comme le Rafale, d’exécuter leurs missions, privant les forces aériennes françaises d’une capacité clé, celle « d’entrer en premier » au dessus d’un territoire contesté. Raison pour laquelle il fut décidé, sur la base des travaux menés par Dassault sur les démonstrateurs Petit-Duc et et Moyen-Duc destinés à étudier les technologies de furtivité et des drones de combat et entamés en 1999, de confier à l’avionneur français l’étude préalable du « Grand Duc », qui deviendra par la suite le programme européen Neuron.

AVE D vol Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
le démonstrateur AVE-D Petit Duc de Dassaut Aviation lors des essais. Il mesurait 2 m d’envergure et ne dépassait pas les 50 kg

En 2006, 5 pays européens avaient rejoint l’initiative, la Suède et l’Italie apportant chacun 75 m€, l’Espagne apportant 35 m€, la Suisse et la Grèce apportant 20 m€ chacun, alors que la France apportait, elle, 180 m€, pour un budget total de 405 m€. Chose remarquable, le programme respecta non seulement son agenda, mais également son budget, pourtant sans commune mesure avec les sommes investies par exemple outre-atlantique sur des programmes similaires. D’autres pays, comme l’Allemagne, la Belgique, et même la Russie, s’intéressèrent au programme. Mais l’Allemagne se retira, et décida de developper son propre programme de façon confidentiel avec Airbus DS, et la Russie fit de même, initialement avec le programme Skat de Mig, puis le programme Okhotnik de Sukhoi.

La Grande-Bretagne, pour sa part, développait le TARANIS, un démonstrateur de drone de combat conçu par BAe, avec des objectifs comparables au Neuron, à savoir déterminer les technologies nécessaires pour concevoir et mettre en oeuvre un tel aéronef, puis en évaluer les performances et les doctrines d’emploi. Les visions françaises et britanniques étaient alors proches, et les deux pays semblaient vouloir accroitre leur collaboration tant du point de opérationnel que du point de vue industriel. En 2010, à l’occasion de la signature du traité de Londres, les deux pays s’engagèrent dans un programme désigné FCAS (Futur Combat Air System) visant à concevoir conjointement un drone de combat pour 2030, France et Royaume-Uni partageant l’analyse d’un besoin pour ce type d’appareil à cette échéance. En 2016 toutefois, le gouvernement britannique décida de se retirer du programme, estimant que le F35 de Lockheed, dont la Royal Air Force devait acquérir prés de 140 exemplaires, suffisaient à ces missions.

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A l’instar du NEURON, le TARANIS britannique devait servir de base à la conception d’un drone de combat franco-britannique visant à épauler Typhoon et Rafale dans les missions en environnement contesté

Malgré ces atermoiements, le programme NEURON se poursuivit avec de nombreux vols d’essais destinés à évaluer les performances, les capacités de décollage et d’atterrissage automatique, les capacités à s’intégrer dans le trafic aérien civil, ainsi que les capacités purement opérationnelles, comme la furtivité radar et infrarouge, ou l’emploi de munitions guidées. Mais le NEURON manque encore de nombreux aspects indispensables pour en faire un véritable drone combat, comme par exemple une liaison satellite permettant de piloter le drone à distance au delà de la ligne de visée, des senseurs plus évolués, une capacité d’autodéfense (à l’image du système SPECTRA du Rafale), ainsi que la possibilité d’emporter d’autres armements, y compris des missiles air-air.

Toutefois, le retrait britannique du programme marqua la fin des ambitions françaises pour developper un UCAV à horizon 2030, abandon entériné par le président Emmanuel Macron peu après son élection, avec le lancement du programme SCAF franco-allemand, visant à concevoir et construire un avion de combat et son système d’arme de nouvelle génération pour 2040. Mais, comme nous l’avons déjà évoqué dans ces colonnes à plusieurs reprises, si le SCAF apporte effectivement une réponse aux besoins d’activité R&D des industriels, ainsi qu’une réponse opérationnelle au remplacement des Rafale et Typhoon à partir de 2040-2045, il n’en demeure pas moins que la période 2030-2045 (temps nécessaire pour que le nombre d’appareils en unité soit significatif) sera marqué par un affaiblissement sensible des capacités opérationnelles relatives des forces aériennes européennes face à leurs homologues équipées de materiels russes, chinois ou américains.

Le chainon manquant de l’industrie européenne

Si la notion de génération d’avions de combat est, en bien des points, arbitraire, on ne peut nier le fait que la logique sous-tendant la conception d’appareils comme les F22 et F35 américains, Su57 russes et J-20 chinois diffère de celle qui fut à l’origine des Gripen, Typhoon et Rafale. Même si les avions européens de la génération « eurocanard » ont tous trois montrés de réelles qualités techniques et opérationnelles, et une forte propension à l’évolution (surtout pour le Rafale qui peut évoluer à partir de la même cellule), il n’en demeure pas moins vrais que, tant du point de vue technologique que du point de vue opérationnelle, l’écart séparant les appareils de génération actuelle et les programmes SCAF et Tempest, est abyssal.

Les premiers Su57 entreront en service en 2020 dans les forces aeriennes russes Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
EN 2030, les forces aériennes russes aligneront probablement plus d’une centaine de Su-57

Or, si les industriels sont confiants dans leurs capacités à concevoir le nouvel appareil sur la période donnée, il n’en demeure pas moins vrais qu’il va se créer, comme dit précédemment, un déficit capacitaire marqué en Europe sur la période 2030-2045, lorsque les aviations européennes disposeront de Rafale, Typhoon et Gripen certes modernisés, ainsi que de F35 américains dont on connait les limites, et des pays comme la Russie ou la Chine, ainsi que leurs alliés, mettant en oeuvre des avions de génération postérieure comme le Su57 russe (et ses dérivés), le J20 et les deux autres programmes d’avions de combat furtifs en développement à Pékin, épaulés par des drones de combat lourds comme le S70 Okhotnik-B et GJ-11 Sharp Sword, tous disponibles en quantité significative à partir de 2030. Coté industriels, si l’activité des bureaux d’étude et des laboratoires est garantie par les programmes SCAF et Tempest, il est cependant probable que les lignes de production connaitront une période sensible d’inactivité, ou d’activité réduite basée uniquement sur de la commande domestique, le potentiel commercial des appareils de la génération actuelle s’étiolant avec le temps.

GJ 11 parade anniversaire 1 Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
présenté lors de la parade militaire marquant le 70ème anniversaire de la création de la République Populaire de Chine, le 1er octobre 2019, le GJ-11 Sharp Sword équipera prochainement aussi bien les forces aériennes qu’aéronavales chinoises

Au delà des capacités technologiques et opérationnelles des équipements, les armées européennes vont également perdre un de leur avantage le plus déterminant, leur experience basée sur des décennies d’entrainement et d’engagements sur des théâtres extérieurs, et d’évolution des techniques d’entrainement et d’engagement. Faute de disposer d’un drone de combat dans leur inventaire, elles auront le plus grand mal à s’en prémunir, ou à expérimenter des tactiques et des doctrines, pour prendre l’avantage sur le champs de bataille le cas échéant. En tout état de cause, un drone de combat dérivé du programme NEURON représente aujourd’hui, de toute évidence, le chainon manquant technologique, industriel et surtout opérationnel entre les avions européens de la génération euro-canard, et les programmes de nouvelle génération franco-allemand, britanniques et suédois.

Quel drone de combat pour l’Europe ?

Reste que le programme NEURON n’est, dans les faits, qu’un démonstrateur, et non un prototype. La conception d’un drone de combat français ou européen reposerait bien évidemment sur les retours d’experience et les technologies développés autour de ce programme, mais l’appareil aurait certainement de des différences marquées à son aïeul. En effet, contrairement à un démonstrateur, un UCAV opérationnel se doit de répondre à des exigences majeures, comme la capacité d’emport de munitions, la sécurité des transmissions, ou encore, de façon triviale, le rayon d’action. Il doit en outre être mis en oeuvre par des personnels militaires, et non des ingénieurs triés sur le volet, à partir de bases aériennes, et non de laboratoires technologiques. Pour satisfaire à ces besoins, un éventuel futur drone de combat européen se devra d’avoir, très certainement, des dimensions et une masse très supérieures à celle du NEURON, qui affiche aujourd’hui une masse de 4,6 tonnes à vide, et 7 tonnes en charge. A titre de comparaison, l’Okhtonik-B russe et le GJ-11 chinois affichent tous deux une masse maximum au décollage de plus de 20 tonnes, quand au MQ-25 Stingray de l’US Navy, il doit emporter 15.000 livres de carburant à 500 nautiques pour répondre à son cahier des charges.

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La soute du NEURON n’est conçu que pour emporter des bombes guidées de 250 kg.

Outre le rayon d’action et la capacité de charge, un drone de combat européen devra être en mesure de mettre en oeuvre de nombreux armements, qu’ils soient Air-Sol, Air-Surface ou Air-Air, nécessitant des soutes de grandes dimensions, et des capteurs capables d’alimenter en information ces armements. Enfin, un tel drone se devra de pouvoir s’intégrer dans le dispositif de combat des forces armées qui l’utilisent, mais également de leurs alliés, de sorte à éviter les accidents. En d’autres termes, l’effort nécessaire pour passer du démonstrateur Neuron à un Neuron opérationnel sera au moins aussi important, et probablement bien plus cher, que l’effort qui fut nécessaire pour concevoir le démonstrateur lui même.

Quel marché pour un UCAV Européen ?

Il ne suffit évidement pas de concevoir un drone pour en faire un succès, encore faut-il le vendre. Se pose alors la question du marché potentiel pour un tel équipement, nonobstant les questions de couts que nous traiteront dans le paragraphe suivant. Le marché adressable pour un drone de combat se divise en trois catégories :

  • les pays employant des appareils de la génération Typhoon, Rafale, Gripen ainsi que des F16, cherchant à se doter d’une capacité de renseignement et de suppression des défenses adverses
  • Les pays employant des appareils furtifs comme le F35, mais dont la flotte de chasse est trop limitée du fait des couts de possession exorbitants de l’appareil
  • Les pays ne disposant pas de flotte de chasse, mais qui souhaiteraient se doter de capacités d’appuis feu et de renseignement

Pour un pays comme la France, qui a vu sa flotte de chasse divisée par 2 en 20 ans, et qui ne dispose d’aucun vecteur furtif pour éliminer les défenses anti-aériennes ou pour effectuer un soutien aérien rapproché en environnement contesté, un tel appareil répondrait sans le moindre doute à plusieurs problématiques, qu’elles soient tactiques ou capacitaires.

F35B et Typhoon RAF Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Pour les Britanniques, le F35 pouvant effectuer les missions d’un drone de combat en environnement contesté, le besoin d’un drone pour épauler les Typhoon n’était plus avéré.

Or, en Europe, outre la France, l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal, la Grèce, la Suède, l’Autriche et la majorité des pays de l’est du continent répondent à cette définition. En outre, des pays comme la Belgique, le Danemark, ou les Pays-bas, qui ont fait le choix du F35A, ont été contraints de réduire à ce point leurs flottes qu’ils doivent désormais réduire leurs ambitions opérationnelles. Enfin, des pays comme les pays baltes, mais aussi les moins riches des pays européens, sont contraints de faire le choix de se passer d’une force aérienne, trop onéreuse. Dans ces deux cas, une solution à base de drones de combat, pour peu qu’elle soit conçue pour respecter un cadre budgétaire cohérent, offrirait des alternatives précieuses aux dirigeants, ainsi qu’aux forces armées. Dès lors, le marché européen adressable pour un drone de combat de facture européenne s’établirait entre 400 et 800 appareils, un nombre bien suffisant pour justifier sa conception.

Notons enfin que si un drone de combat français ou européen venait à être produit à horizon 2030, cela constituerait un excellent promontoire commercial pour un avion comme le Rafale, le Typhoon ou le Gripen, avec lesquels il coopérerait nativement, étendant sensiblement le potentiel et l’efficacité opérationnelle de ces appareils dans la durée, au delà de 2040.

Financements nationaux et européens

La question du financement est évidemment cruciale pour un programme d’une telle ampleur, que l’on peut estimer sur la base d’une comparaison avec les programmes d’avions de combat européens, à une enveloppe de 8 à 10 Md€ pour la conception, et un cout unitaire station de controle + 3 UCAV entre 150 et 200 m€ selon les capacités retenues, et la volumétrie de production. Pour des pays comme l’Allemagne ou la France, avec un besoin estimé à 70 systèmes soit 1 drone par avion de combat (Rafale, Typhoon, F18 E/F), l’enveloppe s’établirait à 15 Md€ de production et de 3 à 5 Md€ pour la conception, selon le nombre de partenaires, et leur implication.

neuron naked Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Le retour budgétaire d’un programme européen de défense peut être optimisé de sorte à ce qu’il soit supérieur à 100% des investissements pour chacun des membres

Pour peu que plusieurs pays européens se joignent au programme, le cout global du programme, hors mise en oeuvre, pour ces pays, s’établirait à moins de 20 Md€ sur 15 ans, soit entre 1 et 1,2 Md€ par an. Pour un pays comme la Grèce, en situation de tension permanente face à la Turquie (qui développe un programme d’avion de combat de 5ème génération local TFX), 20 systèmes permettant de couvrir l’ensemble de la mer Égée en patrouille mixte avec des mirage 2000-5, reviendraient à moins de 350 m€ par an. Quand à un pays comme la Lettonie, qui aujourd’hui ne dispose d’aucune force aérienne, il lui serait possible d’acquérir 4 systèmes pour 75 m€ par an d’investissement, offrant une capacité unique de renseignement et de soutien aérien rapproché à ses forces terrestres.

Rappelons qu’en Europe, le retour budgétaire moyen de l’investissement dans l’industrie de Défense est de l’ordre de 65%, signifiant que lorsqu’un pays investi 1 m€ d’euro dans sa propre industrie de défense, il récupère 650.000 € de taxes, cotisations sociales et d’économies sociales dans les 3 années à venir. Or, ce taux relativement faible est avant tout lié au fait que la majorité des pays européens n’ont pas de base industrielle Défense étendue, et sont donc dans l’obligation d’importer nombres de composants, même lorsqu’ils exigent une construction locale dans l’exécution de leurs contrats d’armement. Pour un pays comme la France, qui produit prés de 90% ses propres composants (et qui a un modèle social particulièrement généreux en comparaison de ses voisins), ce retour budgétaire atteint 140%.

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Le programme du démonstrateur NEURON a montré qu’il était possible de créer et de mener à terme un programme européen de haute technologie inclusif tout en respectant les calendriers et budgets initiaux.

De fait, en optimisant la supply chain d’un programme aussi important, il est possible d’optimiser ce retour budgétaire de sorte qu’il soit optimum pour l’ensemble des pays participants, au prorata de leur participation, et dépasser ainsi le seuil des 100% pour chacun d’eux. En d’autres termes, pour peu qu’il soit conçu en ce sens, les pays participants à un tel programme pourraient voir leurs investissements intégralement compensés par les retours budgétaires générés, et ce en dehors de toute considération d’exportation des systèmes.

Conclusion

On le voit, de nombreux arguments militent en faveur de la poursuite du programme NEURON pour rejoindre les objectifs édictés par le programme FCAS franco-britannique en son temps. Alors que l’industrie aéronautique européenne est largement affaiblie par les effets de la crise sanitaire Covid19 et ses conséquences à court, mais également à moyen terme, sur le transport aérien civil, un tel programme permettrait de préserver les emplois qualifiés, tout en renforçant de manière significative les capacités opérationnelles des forces armées européennes, alors même que les tensions internationales vont croissantes, et que la protection américaine va inexorablement se réduire sur le vieux continent.

Le succès du programme démonstrateur NEURON, comme sa dimension européenne, en font le candidat idéal pour servir de base à la conception d’une initiative à l’échelon de l’Union européenne, au travers de la Coopération Structurée Permanente. Mais même sans cela, la dynamique mise en place par Dassault, qui a développé une approche inclusive ouverte autour du programme Neuron permettant d’intégrer dynamiquement d’autres participants, permettrait à l’initiative de seulement quelques pays, voir uniquement de la France, d’amener plusieurs pays européens à les rejoindre.

Maquette du SCAF Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
L’exemple du NEURON montre que la programmation militaire industrielle européenne est encore ancrée dans une période de faibles tensions internationales qui n’existe plus, et peine à prendre en compte la réalité de l’évolution des menaces

Cette démonstration nous amène toutefois à nous interroger sur les fondements même de la planification défense en Europe, qui semble, en bien des points, davantage répondre à des considérations industrielles, économiques et surtout politiques, plutôt qu’a des considérations opérationnelles. Si cette approche a fonctionné pendant les 30 années ayant suivi l’effondrement soviétique et la fin de la guerre froide, elle expose désormais à des conséquences sécuritaires potentiellement majeures. Il est temps de considérer à nouveau la planification industrielle de défense comme un exercice relatif basé avant tout sur l’évolution dynamique de la menace, et non plus sur de simples considérations intérieures. Faut de quoi, le déclassement européen, souvent annoncé, sera effectivement inéluctable.

Le Japon contraint d’interpréter sa constitution pour renforcer ses capacités militaires face à la Chine et la Corée du Nord

Héritée de l’occupation américaine faisant suite à la défaite de l’Empire du Japon durant la Seconde Guerre mondiale, la constitution japonaise interdit au pays de disposer d’une force militaire, ainsi que d’armements susceptibles de frapper d’autres pays.

Si les raisons ayant mené le général Mc Arthur à concevoir une telle constitution avaient une certaine légitimité à la sortie de la guerre (outre l’urgence du besoin et le manque d’expérience des diplomates américains en la matière), elles perdirent rapidement de leur poids avec l’entame de la Guerre froide.

Notamment face à l’intensification des tensions entre le camp occidental dont le Japon, comme l’Allemagne Fédérale, faisait parti, et le bloc communiste, piloté par l’Union Soviétique, et rapidement rejoint par la Chine Populaire de Mao Tze Dong.

Il fut dès lors admis que le Japon pouvait disposer d’une force armée d’autodéfense, sans toutefois autoriser le pays à se doter de force de projection, et d’armements pouvant être qualifiés d’offensif, comme des missiles balistiques, des porte-avions ou des bombardiers à long rayon d’action.

Durant toute la guerre froide, ce cadre parut suffisant, d’autant que les Etats-Unis maintenaient une puissante force militaire sur le sol japonais, force militaire qui, elle, disposait des armements offensifs que ne pouvait pas posséder le Japon, entre autres choses, des porte-avions.

Mais la situation géostratégique mondiale, et en particulier celle du théâtre Pacifique, a profondément évolué depuis la fin de la Guerre froide, et Tokyo est aujourd’hui contraint à des circonvolutions de plus en plus acrobatiques pour mettre en conformité l’évolution et la modernisation de ses forces d’autodéfense, et sa constitution, dont le cadre initial apparait désormais comme un carcan plus dangereux que contraignant pour garantir la sécurité de l’archipel nippon et de ses habitants.

missile balistic north korea Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
La Corée du Nord a montré des progrès significatifs dans la technologies des missiles balistiques ces dernières années.

En effet, si la menace soviétique de la guerre froide a disparu, et que le potentiel militaire russe en Asie est loin de l’égaler, deux acteurs majeurs ont considérablement renforcer leur potentiel militaire, la Corée du Nord et, naturellement, la Chine.

Les armées nord-coréennes ne disposant pas de capacités de projection de force significatives, la menace pour Tokyo se résume à l’utilisation par Pyongyang de missiles balistiques et missiles de croisière pouvant atteindre l’archipel nippon, et susceptibles d’emporter des charges nucléaires. Les instances internationales estiment que le pays disposerait de 30 à 60 têtes nucléaires opérationnelles aujourd’hui.

En effet, outre son programme nucléaire, Pyongyang a enregistré d’importants succès ces dernières dans le développement de missiles balistiques, avec de nouveaux missiles de type ICBM (Inter-Continental Ballistic Missile) et SLBM (Sub-Lauched Ballistic Missile) capables d’atteindre des cibles à plus de 6 000 km, comme le Hwasong 12 et 14, les mettant hors de portée des systèmes AEGIS équipant les destroyers nippons, ainsi que des missiles à moyenne portée suivant une trajectoire semi-balistique qui pose de grandes difficultés aux systèmes anti-missiles actuels.

Mais la plus grande menace pour Tokyo vient aujourd’hui de Pékin, qui en seulement trois décennies, à profondément fait évoluer ses capacités militaires, passant d’une armée essentiellement défensive basée sur la force du nombre, à une puissance miliaire disposant d’importantes capacités de projection et des technologies égalant, parfois dépassant, celles en service en occident.

Ainsi, non seulement l’ensemble des iles japonaises est à portée des nombreux missiles balistiques chinois, comme les systèmes à portée intermédiaire DF-21 et DF-26.

Cependant, la Chine dispose désormais d’une force navale de haute mer technologiquement performante et dépassant numériquement la Marine japonaise, avec un écart de force qui s’accentue chaque année, ainsi qu’une d’une force aérienne et aéronavale apte à neutraliser la puissance des forces aériennes américaines et japonaises stationnées sur l’archipel.

F35A japon Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Tokyo envisage d’employer ses F35 A et B pour localiser les sites missiles adverses, et les détruire avant qu’ils ne puissent faire feu, tout en classifiant l’action comme défensive pour respecter la constitution.

Dans ce contexte, et face aux dégradations ininterrompues des relations entre la Chine et l’Occident ces dernières années, Tokyo se trouve face à un dilemme majeur : les capacités défensives susceptibles de préserver le pays et de dissuader un éventuel adversaire, ne sont plus suffisantes, ou suffisamment efficaces, pour assurer cette mission.

L’exemple le plus concret de cette dichotomie repose sur les limites des systèmes anti-missiles déployés au Japon, à partir de destroyers Aegis nippons ou de bases terrestres, aujourd’hui dans l’incapacité de garantir une protection efficiente face aux planeurs hypersoniques, et dont l’efficacité est très amoindrie face à des missiles à trajectoire semi-balistique.

Or, en l’absence d’un système défensif efficace, la seule action défensive face à de telles armes repose sur la neutralisation des lanceurs avant le départ des missiles. Ce qui, selon de nombreux aspects, relève d’une action offensive, voir d’une frappe préventive, en totale contradiction avec la constitution du pays.

Pourtant, cette approche est aujourd’hui très sérieusement étudiée par les autorités militaires nippones en employant des avions furtifs F-35A/B afin de localiser les sites missiles et de les détruire avant qu’ils ne fassent feu, notamment à l’aide de missiles hypersoniques.

Dans le registre naval, Tokyo est confronté à une problématique similaire, pour faire face aux capacités aéronavales et d’assaut amphibie dont se dote à grande vitesse l’Armée Populaire de Libération. Un porte-avions se déploie systématiquement hors de portée des systèmes défensifs adverses, comme les batteries de défense côtière, et utilise sa force aérienne pour venir à bout de l’adversaire.

Hormis le sous-marin, la meilleure réponse à une force aéronavale n’est autre qu’une autre force aéronavale. Raison pour laquelle Tokyo a entrepris de convertir ses deux destroyers porte-hélicoptères de la classe Izumo pour mettre en œuvre des avions F-35B à décollage et atterrissage court ou vertical, employés notamment par l’US Marines Corps et la Royal Air Force.

Or, là encore, même en dépit de la classification des deux navires qui évitera soigneusement le terme porte-avions ou porte-aéronefs prohibé par la constitution japonaise, Tokyo sera contraint de prendre des libertés plus qu’importantes avec celle-ci.

JS Izumo Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Les deux destroyers porte-hélicoptères classe Izumo vont subir une profonde refonte afin de mettre en œuvre des avions de combat F-35B, sans toutefois être qualifié à terme de porte-avions ou porte-aéronefs, interdis par la constitution japonaise de 1947.

Quoi qu’il en soit, les psychodrames constitutionnels qui secouent certaines sphères nippones montrent, avant toute chose, à quel point le renforcement militaire chinois constitue un cataclysme géostratégique, bien au-delà de ce qui se déroula lors de la Guerre Froide.

En effet, durant cette période, ni Tokyo, ni même Bonn, capitale de la République fédérale d’Allemagne, n’ont jamais émis le souhait de disposer de systèmes offensifs comme des porte-avions, ou des systèmes de première frappe.

Les deux nations vaincues de la 2ᵉ Guerre Mondiale avaient, en effet, une grande confiance dans l’implication des Etats-Unis, et dans leur capacité à se montrer suffisamment dissuasif pour empêcher tout emballement excessif.

L’Inde commande en procédure d’urgence des systemes de guidage A2SM Hammer de SAFRAN pour ses Rafale

Dire que les premier Rafale indiens, qui doivent arriver dans le pays pour le 29 juillet, sont attendus en Inde serait un grand euphémisme. En effet, New Delhi ne cesse de communiquer, depuis quelques semaines, sur l’entrée en service très rapide de ses appareils, à peine seront-ils arrivés. Pour cela, les autorités indiennes ont pris soin de pré-positionner sur la base d’Ambala ou seront stationnés les premiers chasseurs livrés, l’ensemble des équipements, armements et compétences nécessaires à une conversion opérationnelle la plus rapide possible. Et pour renforcer les capacités déjà plus que significatives des Rafale Indiens qui arriveront équipés de missiles air-air MICA et METEOR et de missiles de croisière furtif SCALP, New Delhi vient d’annoncer avoir sélectionné le kit de guidage et de propulsion A2SM Hammer de SAFRAN, déjà en service dans les armées françaises, dans une procédure d’acquisition en urgence.

Il faut dire que la situation sécuritaire indienne est loin d’être apaisée. Non seulement les tensions avec le Pakistan sont toujours élevées depuis la confrontation entre les chasseurs des deux pays s’étant tenue en février 2019, mais les tensions avec la Chine, dans la zone de Ladakh dans la chaine himalayenne, restent aux plus hauts, même si les deux pays sont parvenus à faire cesser les affrontements, et à revenir à une forme de statu quo. En effet, des deux cotés, les forces en présence se renforcent, avec le déploiement de nombreux blindés, hélicoptères, drones et aéronefs. Dernière annonce en date, l’aéronavale indienne a ainsi déployé à proximité de ce théâtre un escadron de MIG-29K, afin de renforcer les capacités défensives diminuées de l’armée de l’air.

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Le ministre indien de La Défense, Rajnat Singh, lors de la cérémonie marquant la livraison du premier Rafale à l’Inde, à Mérignac en Gironde le 8 octobre 2019

Dans ce contexte, les autorités indiennes présentent l’arrivée des 6 premiers Rafale comme un facteur clé pour modifier le rapport de force face à Pékin, et ce bien au delà des capacités nucléaires de l’aéronef, mission initiale des Rafale indiens. Pour New Delhi, comme pour l’Armée de l’Air indienne, l’arrivée des Rafale, même en petit nombre, va permettre de neutraliser les atouts dont disposent le Chine aujourd’hui, comme ses chasseurs modernes et ses avions de veille aérienne, notamment grâce au missile air-air à longue portée européen METEOR, au missile de croisière SCALP, et surtout aux performances globales du système d’arme Rafale. Dans ce contexte, l’acquisition de AASM pour Armement Air-Sol Modulaire, apparait comme justifié, car il complète parfaitement la panoplie d’armement nécessaire pour exploiter au mieux les Rafale indiens.

Rafale x guard Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
La Rafale peut emporter 4 à 6 ASSM Hammer, en plus de trois bidons, deux missiles MICA et deux missiles METEOR

Rappelons que l’AASM de Safran est un kit de guidage et de propulsion qui prend place sur des corps de bombes lisses, leur conférant une précision métrique grâce à un guidage inertiel couplé à un GPS, et un capteur infrarouge ou laser pour la phase finale, et permettant d’étendre considérablement la portée de l’armement, de 15 km en basse altitude, et jusqu’à 60 km en haute altitude. Les forces aériennes françaises de l’Armée de l’Air et de l’Aéronautique Navale ont largement utilisé l’A2SM en Libye et au Levant, avec des résultats opérationnels jugés très satisfaisants. Nous avions, à ce titre, consacré récemment un article aux tests portant sur la nouvelle version de l’A2SM basée cette fois sur une bombe de 1000 kg, qui viendra compléter les version de 250 ou 500 kg déjà en service. Or, là où un Rafale ne peut mettre en oeuvre « que » 2 missiles de croisière SCALP, il peut emporter jusqu’à 6 A2SM de 250 kg en configuration lourde, offrant une capacité de soutien importante aux forces terrestres tout en restant hors de portée des défenses anti-aériennes adverses.

Une chose est certaine, la communication faite par le gouvernement indien son Armée de l’Air entourant l’entrée en service des premiers Rafale présente, à l’opinion publique indienne, l’appareil sous un angle très différent de celui sous lequel il avait été dépeint par l’opposition politique au premier ministre Modi à l’occasion de la campagne pour les élections législatives de 2019. Rappelons qu’à cette occasion, l’opposition travailliste indienne avait tenté de mettre en doute l’équité du contrat portant sur la commande des 36 appareils indiens, ce qui avait profondément altéré l’image de l’appareil comme de l’industrie de défense française dans l’opinion publique, et ce en dépit du non-lieu cinglant rendu par la cours suprême indienne. Cela eut, très probablement, un impact significatif sur le report d’une nouvelle commande d’appareils malgré les suppliques de l’Etat-Major de l’Armée de l’Air, le gouvernement du premier ministre Narendra Modi, même après avoir été élu avec une confortable majorité absolue lors des dernières élections législatives, ne voulant pas alimenter la polémique en soufflant sur des braises encore chaudes.

Mais aujourd’hui, il en va tout autrement, au point que le Rafale est présenté comme la clé pour tenir à distance et neutraliser les forces chinoises, et ce même lorsque seuls 6 appareils auront été livrés. Difficile de faire plus valorisant pour Dassault et la Team Rafale, d’autant que l’Armée de l’Air ne tarie pas d’éloge sur la qualité de la formation prodiguée par la France aussi bien aux pilotes qu’aux personnels de maintenance et d’entrainement, et qui permettra, justement, une entrée en service des plus rapides des appareils.

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Rafale français dans sa configuration de frappe en profondeur, avec deux missiles SCALP, quatre missiles MICA et trois bidons, offrant un rayon d’action supérieur à 1200 km à l’appareil.

Dés lors, au delta prés des conséquences de l’épidémie de Covid-19 sur l’économie indienne, et de l’évolution des tensions avec Pékin et/ou Islamabad, il ne serait pas surprenant de voir ressurgir, à l’automne 2020 ou durant l’hiver 2021, l’hypothèse d’une seconde commande indienne de Rafale, cette fois très probablement basée sur une implication beaucoup plus importante de l’industrie aéronautique indienne, afin de répondre aux exigences du programme « Make in India » du premier ministre Modi. En effet, en application de la clause d’offset obligeant la France à investir l’équivalent de 50% des 8 Md€ du premier contrat dans l’industrie aéronautique et défense indienne, les industriels français de lima Team Rafale, comme Dassault, Safran, Thales et MBDA, ont considérablement accru leurs capacités industrielles dans le pays, et disposent désormais non seulement de capacités productives mais d’un réseau de sous-traitance local prêt à être sollicité et répondant aux exigences de qualité françaises. Reste qu’en Inde, les certitudes ont une durée de vie éphémère, et il faut donc rester prudent, et patient, avant de célébrer un quelconque succès.

Le parlement Egyptien autorise le déploiement de forces militaires combattantes en Libye

Le parlement égyptien a autorisé à l’unanimité, ce lundi 26 juillet, le déploiement de forces combattantes égyptiennes en Libye affinée de « protéger le pays et ses intérêts » face à la poussée des forces du Gouvernement d’union national (GNA en anglais) de Tripoli soutenu par les forces armées et les milices turques, contre les forces du général Khalifa Haftar, menaçant notamment la ville de Syrte et la base aérienne Al-Jufra, deux sites stratégiques pour Le Caire qui avait déjà déclaré par le passé qu’elle n’hésiterait pas à intervenir si les forces du GNA venaient à les menacer. Pour les autorités de Tripoli, seule instance reconnue par les nations unis à ce jour, il ne s’agit, ni plus ni moins que d’une déclaration de guerre, rejoint en cela par Hulusi Akar, le ministre turque de la Défense.

Les forces armées égyptienne sont, de loin, considérées comme les plus puissantes en Afrique, et l’une des plus puissantes au Moyen-Orient et en Méditerranée orientale. Avec prés de 900.000 hommes, l’Armée de terre égyptienne constitue une puissance mécanisée de premier ordre, alignant plus de 3000 chars de combat dont 1100 Abrams M1A1 construits sous licences, 2500 véhicules de combat d’infanterie, et quelques 5000 véhicules blindés de transport de troupe de différents modèles, appuyés par presque 1500 pièces d’artillerie automotrices et lance-roquettes multiples. La force aérienne aligne, elle, prés de 200 chasseurs F16, ainsi que 46 Mig-29M (comparables au Mig-35), 24 Rafale, 18 mirage 2000 et 50 mirage 5, et devrait recevoir dans les mois à venir les premiers de ses 36 Su-35 commandés auprés de Moscou. La Marine, enfin, aligne 2 porte-hélicoptères d’assaut classe Mistral, 1 frégate lourde classe Aquitaine (FREMM), 4 frégates légères O.H Perry et 2 Knox, ainsi que 2 corvettes classe Descubierta et 4 sous-marin Type 209-1400, dans l’attente de l’entrée en service de la première des 4 corvettes Gowind 2500 commandées à Naval Group, et des 2 FREMM acquises auprés de l’Italie. Outre cet inventaire digne des plus puissantes forces armées, les forces égyptiennes sont réputées bien entrainées et compétentes, notamment pour ce qui concerne les unités professionnelles.

rafale egypte dassault aviation Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Avec plus de 350 avions de combat, les forces aériennes égyptiennes sont les plus importantes en Afrique, ainsi qu’au Moyen-Orient.

L’intervention égyptienne dans le conflit Libyen marquerait incontestablement une dangereuse escalade des tensions régionales, et un bouleversement des rapports des forces en présence, comparable à celui qui avait suivi le déploiement des forces turques à Tripoli en début d’année 2020, qui mit un terme à l’offensive des troupes du général Haftar sur la capitale libyenne, et qui renversa la dynamique du conflit, amenant les forces du GNA aux portes de Syrte dans une vaste contre-offensive. Mais l’intervention turque ne s’est pas faite sans contre-partie, puisque Tripoli a signé avec Ankara un contrat lui conférant les droits d’exploiter les nombreuses réserves en hydrocarbure libyennes du Golfe de Syrte, menaçant directement, entre autre, l’approvisionnement énergétique et la politique navale du Caire dans la région.

En outre, pour le président égyptien Al-Sissi, il s’agit d’empêcher le retour des Frères Musulmans, proches du président turc Erdogan et de son allié Qatari, et soutiens affirmés du GNA, à proximité des frontières du pays, d’autant que l’organisation islamique a appelé à venir prendre les armes contre les « mercenaires », désignation faite des forces du général Haftar, en partie épaulées par des sociétés militaires privées russes notamment. En février 2020, ce dernier appelait, dans une interview donnée au magazine Paris-Match, les européens à le soutenir « dans sa lutte contre les frères musulmans », pointant directement les menaces que faisaient peser l’organisation islamiste sur la stabilité au Moyen-Orient, en Afrique ainsi qu’en Europe.

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De nombreuses forces militaires privées russes Wagner ont été observées en Libye en soutien des forces du général Haftar

L’annonce faite par le parlement égyptien ne marque toutefois pas nécessairement l’imminence d’une intervention militaire en Libye. En effet, il peut s’agir d’intensifier la pression internationale sur Ankara, notamment de la part des Etats-Unis, pour provoquer un désengagement turc dans le pays. Reste à voir si Washington prendra effectivement position, et si Ankara sera sensible aux arguments avancés par le président Trump le cas échéant, ou si l’imminence d’une intervention directe du Caire en Libye fera fléchir la détermination du président Turc. La réponse à ces interrogations risquent fort de ne guère se faire attendre longtemps ….

Raytheon va concevoir un micro-missile d’auto-defense pour les forces aériennes américaines d’ici 2023

Pour faire face à l’augmentation de la menace que font peser les missiles et roquettes anti-chars sur leurs blindés, plusieurs forces armées, dont celles d’Israel et de Russie, ont entrepris dans les années 80 et 90 de developper des systèmes d’auto-protection actifs destinés non pas à leurrer le missile, mais à l’intercepter avant qu’il ne frappe sa fable. Le premier de ces systèmes à entrer en service fut le Drozd soviétique qui, au début des années 80, fut déployé sur 250 T-55A de l’infanterie de Marine soviétique. Ces systèmes, comme le Trophy israélien ou l’Afghanit russe, sont désignés par le terme Hard-Kill. Or, l’augmentation des performances et la multiplication des systèmes anti-aériens comme des systèmes air-air, font peser une menace similaire sur les avions de combat. Raison pour laquelle, en 2015, l’US Air Force confia à Raytheon un budget de 15 m$ pour étudier la faisabilité d’un micro-missile léger destiné à intercepter non pas des appareils, mais des missiles.

Le 21 juillet 2020, à l’issu d’une compétition relativement confidentielle ayant opposée deux industriels (probablement Lockheed-Martin et Raytheon), le missilier Raytheon s’est vu désigner vainqueur par le Pentagone pour concevoir et fournir un micro-missile prés à l’usage d’ici 2023, devant assurer cette fonction de type Hard-kill aux avions de combat américains, le Miniature Self-Defense Munition ou MSDM. Pour cela, la firme américaine s’est vu allouer une premier enveloppe de 93 m$, intégrée dans une commande globale de 375 m$.

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présentation comparée du MSDM vis-à-vis des missiles AIM-9X Sidewinder et AIM-120 AMRAAM

Pour l’heure, rien n’a filtré sur les performances, les capacités et les dimensions de ce nouveau missile. Toutefois, on peut aisément imaginer que pour remplir efficacement sa fonction, il devra être sensiblement plus court et léger qu’un missile AIM-9X Sidewinder, de sorte à pouvoir être emporté par deux ou trois sur un rail dédié à cette fonction. C’est probablement la raison qui a amené la diffusion d’une image montrant un MSDM de 1 mètre de long, soit 1/3 de la longueur d’un Sidewinder. Le missile n’ayant pas pour fonction d’atteindre une cible distante, ni une cible en éloignement, la portée de ce dernier, donc la quantité de poudre nécessaire pour soutenir le vol, sera moindre que celle nécessaire par exemple à des missiles légers comme le Stinger américain (1,5 m) ou le Mistral français (1,8 m). En revanche, le MSDM se devra d’être extrêmement manoeuvrant, avec notamment la capacité de rapidement prendre une direction opposée à celle de l’aéronef porteur. Pour cela, de grandes gouvernes sont nécessaires, ceci expliquant les gouvernes quelque peu « disproportionnées » sur le visuel proposé ci-dessus.

Ce programme est à mettre en parallèle avec le programme de missile air-air léger à courte portée Peregrine, annoncé en septembre 2019 par le missilier Raytheon. Long de 1,8 m pour une masse inférieure à 25 kg, ce missile est destiné à augmenter la puissance de feu et les capacités d’engagement des chasseurs sans augmenter leur masse, donc sans dégrader leur manœuvrabilité. Il est particulièrement adapté, par ses dimensions réduites , à l’emport en soute. Autre avantage du Peregrine, outre ses dimensions réduites et ses performances (selon le constructeur), son prix serait bien inférieur à celui de missiles air-air traditionnels comme l’AIM-9X, permettant de l’utiliser contre des cibles de faible valeur, notamment contre des drones. Il est probable que l’expérience acquise par Raytheon dans le cadre du programme Peregrine aura été un facteur déterminant pour le succès de la firme dans le programme MSDM.

F22 Peregrine raytheon Actualités Défense | Aviation de chasse | Communication institutionnelle défense
Le missile léger à courte portée Peregrin a été annoncé par Raytheon en 2019

Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à s’être engagés dans cette voie du missile d’auto-défense antimissile aérien. L’européen MBDA, dans le cadre du programme britannique Tempest, a en effet dévoilé, en septembre dernier, un programme de micro-missiles destinés à cette fonction d’auto protection, et ce, conjointement à une missile léger polyvalent aux dimensions réduites permettant d’être, lui aussi, embarqué en double sur le même rail de lancement. D’autres programmes de même semblent être en cours dans plusieurs pays, notamment en Russie et en Chine, mais les informations les concernants sont très parcellaires.

Quoiqu’il en soit, il apparait que l’application de l’approche hard-Kill pour la protection des avions de combat tende à se répandre, si ce n’est à se généraliser à moyen terme. On peut espérer que contrairement à ce qui se produisit concernant les systèmes hard-kill de protection de blindés, l’Europe de sera pas, cette fois, dans le wagon de queue, d’autant que le continent va probablement voir apparaitre, autour de 2040, 3 nouveaux programmes d’avions de combat se voulant à la pointe des technologies disponibles. C’est probablement dans ce type de domaine qu’il faudra espérer une collaboration européenne efficace, plutôt que dans un très hypothétique rapprochement des programmes britanniques, franco-allemand ou suédois eux-mêmes.

Le programme Tempest est plus britannique que jamais, mais est-ce une faiblesse ?

Le 20 juillet, date qui devait initialement marquer l’ouverture du salon aéronautique de Farnborough, 7 entreprises de la base industrielle et technologique aeronautique et Défense britannique ont annoncé rejoindre le programme lancé il y a deux ans par le gouvernement britannique et les entreprises BAe, Rolls-Royce, Leonardo et MBDA. Ainsi, Bombardier, Collins Aerospace, GE aviation, GKN, Martin Baker, Qinetiq et Thales ont rejoint le programme de chasseur de nouvelle génération menée par la Grande-Bretagne. Mais ce qui est présenté comme une nouvelle étape voulant marquer l’élargissement du programme Tempest en Europe, fait avant tout la démonstration d’un programme de plus en plus isolé, et qui s’avère, au final, plus britannique que jamais. En effet, à l’exception de l’italien Leonardo au lancement du programme, aucune entreprise non britannique n’a annoncé rejoindre l’initiative britannique, et seule l’Italie a signé une lettre d’intention pour rejoindre le programme Tempest.

Par ailleurs, les espoirs de voir la Suède rejoindre le programme semblent s’étioler. Car si Saab a annoncé, à l’occasion du même événement, la création d’un centre de recherche, ce dernier sera dédié au programme FCAS, et non au programme Tempest, subtile différence qui indique que Stokholm entend bien participer à la conception des briques technologiques, mais nullement à celle du chasseur Tempest lui-même. Une position somme toute relativement attendue, la Fligvapnet ayant toujours privilégié l’utilisation de chasseurs monomoteurs relativement légers dans une posture purement défensive, plutôt que des chasseurs lourds disposant d’un long rayon d’action sans grand intérêt pour les suédois. En dépit de cela, le programme Tempest est loin de rester figé. Les autorités britanniques ont en effet débloqué une ligne de crédit de 2,5 Md £ pour entamer les travaux préparatoires à la conception d’un prototype, et 1800 personnes travaillent déjà sur le sujet, nombre qui devrait atteindre 2.500 personnes d’ici la fin de l’année 2020. Comme pour le SCAF franco-allemand, le prototype est attendu entre 2024 et 2025, avec une production industrielle prévue après 2030, et une entrée en service planifiée entre 2035 et 2040.

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Le Tempest reposera, comme le SCAF, sur un système de systèmes modulaire et évolutif, offrant une grande polyvalence et une excellente évolutivité à l’appareil

Or, contrairement à ce même programme SCAF, Londres est aujourd’hui seul maitre à bord de son programme, et le restera probablement jusqu’au bout, Rome se satisfaisant bien, visiblement, d’un rôle très secondaire dans ce dossier. De fait, si le programme britannique est moins exposé que le SCAF aux atermoiements liés à des considérations de politiques intérieures, comme ce fut déjà le cas au Bundestag il y a quelques mois, il oblige également les britanniques à porter seuls la grande majorité des coûts de developpement. Ainsi, là ou Londres à déjà mis 2,5 Md£ dans le developpement du programme, la Suède se limite à un investissement de 63 m€ consenti par Saab pour son centre de recherche dédié, et la participation de Rome n’est toujours pas définie.

Pour Londres, les couts liés à un tel developpement sont, semble-t-il, supportables par le pays, une position qui tranche avec celle avancée par les autorités françaises pour justifier de la nécessité pour la France de co-developper son nouvel avion de combat avec des partenaires européens, en l’occurence l’Allemagne, suivi peu après par l’Espagne. En effet, les autorités britanniques semblent avoir toute confiance dans les retombées économiques et budgétaires liées à l’investissement public, ceci modifiant, naturellement, grandement la perception de la soutenabilité basée sur les seuls dépenses pour l’Etat. Raison pour laquelle Londres suit très précisément le nombre d’emplois créés en relation avec le programme, et, en l’absence d’un plus grand investissement financier des partenaires étatiques, concentre l’extension du réseau d’entreprises partenaires vers des entreprises produisant en Grande-Bretagne, même si, du point de vue capitalistique, ces entreprises ne sont pas purement britanniques, comme GE ou Thales. Surtout, à l’issu du programme, la Grande-Bretagne aura retrouvé l’ensemble des savoir-faire pour concevoir et construire un avion de combat (ou un drone de combat) de manière autonome, capacité perdue depuis prés de 40 ans et le Sea Harrier, dernier avion de combat entièrement britannique à avoir vue le jour.

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Le Sea Harrier est le dernier avion de combat intégralement conçu par l’industrie aéronautique britannique.

Cette ambition contraste en tout point avec celle de Paris, qui a su maintenir cette capacité et ces savoir-faites partagés uniquement par les Etats-Unis, la Russie, et depuis peu, la Chine. En effet, même si d’autres pays ont développé ou développent leurs propres programmes d’avions de combat, comme le Japon, la Corée du Sud, ou l’Inde, aucun de ces pays n’est en mesure de developper l’ensemble des éléments constitutifs, plus particulièrement les moteurs et les systèmes d’arme. Or, si la Japon, avec le programme F-X, et la Grande-Bretagne, avec le programme Tempest, visent tous deux à retrouver cette autonomie industrielle et stratégique à moyen terme (l’Inde le souhaite également, mais ses chances d’y parvenir sont minces à moyen terme), la France apparait comme le seul pays à y renoncer, sur l’autel de la coopération européenne, même si Paris a pris certaines mesures pour s’assurer de conserver certains savoir-faire clés, comme la conception des moteurs (SAFRAN) et de l’avion de combat NGF du programme SCAF (Dassault Aviation), mais abandonnant le coeur du système de systèmes à l’Allemand Airbus DS, et la composante guerre électronique à l’espagnol Indra, au détriment de Thales.

Quoiqu’il en soit, le programme Tempest britannique semble bel et bien bénéficier d’un fort soutien de la part des autorités britanniques, et pourrait marquer le retour de l’industrie aéronautique d’outre-manche sur la scène internationale. Reste à voir si l’industrie britannique saura effectivement produire à nouveau, en totale autonomie, des avions de combat performants comme le furent, à leur époque, les Harrier, Lighting et autre Hunter. Une chose est certaine, si ce programme arrive à son terme, il consacrera un profond remaniement des rapports de force dans l’industrie aéronautique européenne.

La Chine entame-t-elle la construction d’un nouveau porte-aéronefs d’assaut ?

Alors que le premier porte-hélicoptères d’assaut chinois, ou LHD pour Landing Helicopters Dock, Type 075 vient d’effectuer son voyage inaugural le 16 juillet, la publication d’un appel d’offre par la Marine chinoise a mis en émois la sphère défense sinophile. En effet, l’APL (Armée Populaire de Libération) aurait entamé les travaux préparatoires à la construction d’une nouvelle classe de porte-aéronefs d’assaut, ou LHA pour Landing Helicopter Assault, identifié comme le Type 076. Et ce navire risque fort de bouleverser le rapport de force déjà vacillant dans la zone indo-pacifique.

Rappelons en préambule que, pour l’heure, les capacités de projection de forces chinoises sont relativement limitées, avec 6 Transports de Chaland de débarquement Type 071 de 25.000 tonnes (plus 2 en construction), et l’arrivée prochaine des deux premiers LHD Type 075 de 40.000 tonnes (plus 6 à 8 en construction et à construire). La force aéronavale l’est encore davantage, avec seulement 2 porte-avions en service, des navires Type 001 et 001A de 50.000 tonnes disposant d’un tremplin et de brins d’arrêt, emportant une trentaine d’aéronefs. Portant, Pékin a la ferme intention de faire jeu égal dans ce domaine avec l’US Navy et ses 11 porte-avions nucléaires, ses 8 LHD et sa dizaine de TCD. Pour cela, les autorités chinoises ont entrepris de construire une flotte de porte-avions équipés cette fois de catapultes, en premier lieux deux unités à propulsion conventionnelle identifiée Type 003, suivis d’un nombre pour l’heure indéterminé de porte-avions de prés de 100.000 tonnes propulsés par chaufferie nucléaire, équivalent des PA américains de la classe Nimitz ou Ford. Mais visiblement, la Marine chinoise n’a guère l’intention de simplement jouer l’équivalence en créant une flotte en miroir à l’US Navy. Et la nouvelle classe de LHA Type 076 pourrait bien représenter cette classe de porte-avions légers qui, comme nous l’avions déjà évoqué, fait aujourd’hui défaut à l’occident, et notamment à l’US Navy.

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Ce modèle 3D du type 076 n’est pas officiel – mais il offre une vision probable de ce que pourrait être le navire

Des données publiées dans l’appel d’offre chinois, on comprend en effet que les Type 076 tiendront autant du porte-avions légers que du porte-hélicoptère d’assaut, avec notamment la présence d’une catapulte électromagnétique EMALS et d’un système de brins d’arrêts avancés, destinés à mettre en oeuvre des drones de combat, en toute probabilité une version navale du GJ-11 Sharp Sword présenté officiellement en 2019 lors de la parade militaire célébrant les 70 ans de la création de la République populaire de Chine. En outre, il est fait état de 2 ascenseurs de 30 tonnes, suffisant pour manoeuvrer simultanément deux de ces drones. Ce même appel d’offre fait également état d’une propulsion électrique intégrée, disposif qui sera inauguré dans la Marine Chinoise avec les frégates Type 054B, basé sur des turbines à gaz de 21 MW.

Sur la base des données publiées, il est possible d’envisager que le Type 076 serait un navire comparable aux porte-avions britanniques de la classe Queen Elizabeth, long de 280 m et jaugeant plus de 60.000 tonnes. Il serait équipé d’une catapulte EMALS et devrait atteindre, sur la base de 4 turbines de 21 MW, une vitesse maximum de l’ordre de 27 à 28 noeuds, compatible avec les manoeuvres aériennes pour des aéronefs à voilure fixe. Un tel navire pourrait mettre en oeuvre une quarantaine d’aéronefs, dont une vingtaine de drones de combat, et autant d’hélicoptères et drones légers. En revanche, il semble peu probable qu’il dispose d’un radier, et agirait dés lors bien davantage comme un porte-aéronefs léger d’attaque et d’escorte, plutôt que comme un navire d’assaut, tels les LHD type 075 et TCD Type 071. Un représentation 3D de ce que pourrait être le Type 26 est publiée ici.

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Le drone GJ-11 lors de la parade militaire célébrant le 70ème anniversaire de la création de la République Populaire de Chine, le 1er octobre 2019

La construction d’une telle classe de navires en dirait beaucoup sur la doctrine de projection de forces chinoise, et notamment sur la volonté de fournir aux corps de Marines chinois, qui est passé de 10.000 à 30.000 hommes depuis 2017, une autonomie tactique comparable à celle offerte au Corps des Marines des Etats-Unis. Ces derniers disposent en effet de leur propre force aérienne d’appuis, via les Harrier et désormais les F35B embarqués sur les LHD, et les Super Hornet embarqués à bord des Porte-avions de l’US Navy. Toutefois, il semble que Pékin ait décidé de se passer d’un avion à décollage et atterrissage vertical et court, comme le F35B, au profit de drones de combat, certainement moins performants et polyvalents que l’avion américain, mais également, sans le moindre doute, beaucoup moins chers à acquérir comme à employer.

Le drone de combat Sharp Sword, identifié GJ-11 par l’APL, est issu du programme de recherche 601-S confié à la société AVIC. La version opérationnelle, identifiée GJ-11, est fabriquée par le constructeur Hongdu et a été officiellement présentée le 1er octobre 2019. Long de 11,65m pour 14 m d’envergure, il afficherait une masse à vide de plus de 6 tonnes, et une masse maximum au décollage de prés de 20 tonnes. Il dispose de deux soutes à munition, d’un grand rayon d’action de plus de 1500 km, et atteindrait des vitesses subsoniques élevées de 1000 km/h. Cet appareil a été conçu pour des missions de reconnaissance et de frappe air-sol ou air-surface. En revanche, rien n’indique qu’il soit apte aux missions air-air, mais rien n’indique le contraire non plus.

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Les soutes du GJ-11 permettraient d’emporter différents types d’armements Air-Sol et Air-Surface.

Cette nouvelle classe Type 076 montre que l’APL a fait le choix de disposer d’une offre aéronavale étendue, permettant notamment d’augmenter le nombre d’effecteurs sans augmenter le budget global alloué. En effet, en toute hypothèse, il est probable qu’un LHA Type 76 coutera moitié moins cher à construire qu’un porte-avions lourd, qui plus est si ce dernier est à propulsion nucléaire. Il marque également le très probable abandon du developpement d’un appareil à décollage vertical, tout du moins à moyen terme, au profit d’une généralisation de l’emploi des drones de combat, domaine dans lequel la Chine semble jouir d’un savoir-faire remarquable. A l’instar des forces aériennes russes qui ont annoncé vouloir remplacer leurs chasseurs légers Mig-29 par des drones S70 Okhotnik-B, la Chine pourrait, elle aussi, viser une force aéronavale composée uniquement de chasseurs moyens et lourds qui s’appuieraient sur une flotte de drones de combat pour les engagements rapprochés et les missions à haut risque. Quoiqu’il en soit, il est plus que temps de cesser, en occident, de considérer les forces chinoises et leur armement avec dédain, pour prendre la mesure du bouleversement des rapports de force mondiaux en cours.