L’Inde serait en négociation avec la France et le motoriste Safran afin de co-developper le turboréacteur qui équipera le futur avion de combat de nouvelle génération Advanced Medium Combat Aircraft (AMCA) de facture locale, prévu pour voler au début de la prochaine décennie.
Si, ces dernières années, de nombreuses bases industrielles et technologiques aéronautiques nationales ont entrepris de concevoir un avion de combat de nouvelle génération, comme le KF-21 Boramae sud-coréen, le T-FX turc, ou le F-X japonais, bien peu de pays disposent du savoir faire nécessaire pour concevoir un turboréacteur militaire capable de propulser ces appareils. En réalité, à ce jour, seuls 5 pays disposent de cette compétence, les Etats-Unis avec General Electric et Pratt&Whitney, la France avec Safran, la Grande-Bretagne avec Rolls-Royce, la Russie avec NPO Saturn, et la Chine avec Xi’an. Même dans cette liste restreinte, une hiérarchie certaine existe, puisque les réacteurs chinois sont encore loin d’égaler les performances et la fiabilité des moteurs occidentaux et russes, et que les réacteurs russes affichent toujours une durée de vie 3 fois plus courte que celle des réacteurs américains, britanniques ou français. Malgré d’importants efforts en vue de developper un national au travers du programme Kivari, l’Inde peine toujours à intégrer ce club très fermé.
Malgré le soutien de Safran, le turboréacteur Kevari indien est encore loin d’offrir des performances et une fiabilité suffisante pour en équiper un avion d’arme
Pour autant, New Delhi entend renforcer à tout prix son autonomie stratégique, et ne prévoit pas d’équiper son futur avion de combat AMCA, destiné à remplacer les Su-30 de l’Indien Air Force, d’un moteur importé, comme c’est par exemple le cas avec le programme LCA Tejas propulsé par un turboréacteur F-404 ou F-414 de l’américain General Electric. Toutefois, conscient de la difficulté que représente un tel bond technologique, prenant en cela l’exemple de la Chine qui a investi des dizaines de Md$ sur plusieurs décennies pour n’y parvenir que récemment, les autorités indiennes ont pris la décision de s’appuyer sur un partenaire industriel et technologique fiable dans ce domaine. Et selon le site indien Theprint.in, les regards de New Delhi se seraient tournés vers le français Safran, en dépit des nombreux appels du pieds du britannique Rolls Royce et des motoristes américains dans ce domaine, alors que des négociations seraient en cours entre Paris et New Delhi précisément pour co-developper un turboréacteur de nouvelle génération qui pourrait, selon le site, aussi bien équiper les avions indiens que français.
Le M88 qui propulse le Rafale présente des performances très élevées et parfaitement adaptées au Rafale, notamment en terme de consommation et de fiabilité, malgré une poussée nette reste plus réduite que celles des moteurs américains ou britanniques
Que New Delhi privilégie Safran dans ce dossier n’est pas en soit une surprise, la France étant un partenaire de longue date de l’industrie de défense et des armées indiennes, et l’Indian Air Force met en oeuvre depuis de nombreuses décennies des avions de combat français propulsés par les turboréacteurs de Snecma devenu Safran. De telles négociations sembleraient également être de bonne augure concernant les futurs arbitrages concernant le flotte de chasse embarquée et la compétition MMRCA 2 actuellement en cours dans le pays, auxquels le Rafale français participe. Toutefois, l’allusion faite par le site indien concernant une possible utilisation du turboréacteur ainsi co-développé sur les appareils de nouvelle génération français représente en soit une déclaration troublante, puisque le futur avion de combat français n’est, à ce jour, autre que le SCAF co-développé avec l’Allemagne et l’Espagne, et que celui-ci est sensé embarquer un turboréacteur de nouvelle génération développé par Safran et l’allemand MTU. De là à penser que la BITD française prépare d’ores et déjà le fameux « Plan B » évoqué par Eric Trappier, CEO de Dassault Aviation, face aux nombreuses difficultés rencontrées par le programme européen ….
Après plusieurs années de négociations, Le Caire serait proche de concrétiser le plus important contrat de défense de son histoire, en commandant à Rome 24 avions de combat Typhoon, 4 frégates FREMM, 20 patrouilleurs armés, 20 avions d’entrainement M-346 et un satellite d’observation, pour un montant dépassant les 12 Md€.
Au printemps 2020, l’Italie était parvenu à prendre une position de négociation prédominante en Egypte en matière de contrat d’armement, sur les ruines laissées par Paris après qu’Emmanuel Macron ait, à l’occasion d’une visite officielle dans la capitale égyptienne, mis en cause les questions de droits de l’homme dans le pays. Rome était sur le point de signer le plus important contrat de défense de son histoire, avec deux escadrons de chasseurs Eurofighter Typhoon pour remplacer les Mirage 2000 égyptiens, 20 avions d’entrainement M-346 pour remplacer les alpha-jet, ainsi que 20 patrouilleurs armés et surtout 4 frégates FREMM supplémentaires construites par Fincantieri, alors que Le Caire négociait déjà l’acquisition de 2 FREMM prélevées sur la flotte de la Marine Italienne. Malheureusement pour l’industrie italienne, le soutien de Rome au gouvernement d’Union nationale Libyen de Tripoli dans la guerre qui l’opposait aux forces du général Haftar de Benghazi soutenu par Le Caire, fit dérailler cette signature annoncée, et les autorités Egyptiennes se tournèrent à nouveau vers la France pour commander de nouveaux avions de combat Rafale.
En octobre 2020, Le Caire confirmait la commande de 2 frégates FREMM prélevée sur la flotte italiennes
Pour autant, les négociations continuèrent, et quelques mois plus tard, en Octobre 2020, l’Egypte confirma l’acquisition des deux frégates FREMM italiennes, ainsi que de 24 hélicoptères navals A149 et 8 AW189. De toute évidence, Le Caire ne semble pas devoir choisir entre Paris et Rome, et étend s’appuyer sur ces deux pays européens pour soutenir l’extraordinaire de modernisation des armées égyptiennes entamé il y a quelques années par le maréchal Al Sissi, d’autant que les relations entre les autorités égyptiennes et Washington sont loins d’être au beau fixe, et que le partenaire russe risque vite d’être infréquentable sur ce marché. De fait, il n’est guère surprenant que le contrat majeur toujours en négociation face à nouveau l’actualité. Reste que, comme à chaque fois que l’Egypte annonce un contrat d’armement majeur, se pose la question du financement de ces contrats, mais également de la justification pour concevoir une telle puissance militaire aux portes de l’Afrique et du Moyen-Orient. En effet, malgré une puissante démographie de plus de 100 millions d’habitants, le PIB égyptien reste faible, à moins de 400 Md$, un contrat comme celui-ci représentant à lui seul 3,75% de ce PIB.
Surtout, Le Caire se dote actuellement d’une impressionnante force militaire, avec 50 avions Rafale, autant de MIg-29K, 24 Su-35 et probablement 26 Typhoon, aux cotés des plus de 200 F-16, soit une puissance aérienne équivalente à celle de la France et de l’Allemagne réunis, pour un PIB prés de 12 fois inférieurs. Le constat est le même dans le domaine des armements terrestres, avec plus de 1.100 M1A1 Abrams en service, 500 T-90MS russes et 200 canons automoteurs K-19 sud-coréens en Commande, ou dans la Marine avec une flotte de haute mer en devenir composée de 2 PHA Mistral, 7 frégates FREMM, 4 frégates légères Meko 200EN, 4 corvettes lourdes Gowind 2500 et 4 sous-marins Type 214. La question est donc de savoir à quel finalité cette puissante force militaire est destinée, au delà de flatter l’égo de ses dirigeants.
Annoncé en 2017 par Emmanuel Macron et Angela Merkel, le programme SCAF pour Système de Combat Aérien du Futur vise à developper, à horizon 2040, un avion de combat de nouvelle génération (la 6ème au dernier décompte), le Next Generation Fighter, ainsi qu’un ensemble de systèmes destinés à offrir à l’appareil des capacités opérationnelles inégalées. Depuis son lancement, le programme s’est retrouvé à plusieurs reprises face à d’importantes difficultés, qu’elles soient liées aux arbitrages politiques et notamment aux exigences du Bundestag allemand, au difficile partage industriel entre les 3 pays participants (Allemagne, France et Espagne) et aux divergences conceptuelles et doctrinales entre les forces armées des 3 pays. Pour autant, jamais le SCAF ne s’était retrouvé face à une impasse telle que celle qui le frappe aujourd’hui, alors que le CEO de Dassault Aviation a annoncé qu’il n’entendait plus négocier avec Airbus DS au sujet du premier pilier du programme portant sur le NGF, et qu’il attendait désormais un arbitrage politique pour poursuivre le programme, sachant que les difficultés déjà rencontrées avaient d’ores et déjà repoussé l’entrée en service de l’appareil de 5 à 10 ans.
En choisissant cette posture, Dassault Aviation signifie clairement qu’il revient désormais à Emmanuel Macron, initiateur du programme, d’amener Berlin, le Bundestag et Airbus DS à renoncer à leurs exigences de co-pilotage du premier pilier, faute de quoi Dassault Aviation se retirerait du programme, sachant qu’avec son carnet de commande bien remplit après les récents succès internationaux du Rafale, et son autonomie capitalistique vis-à-vis de l’Etat, le groupe aéronautique français a largement plus le temps d’attendre qu’Emmanuel Macron, que l’Armée de l’Air et que l’Aéronautique Navale françaises. Pour autant, ce bras de fer féroce qui s’engage n’est que la conséquence finale d’un programme marqué par d’importantes divergences, en particulier entre Paris et Berlin, à l’origine d’un climat de suspicion réciproque entre les deux partenaires, et de postures de plus en plus fermes et incompatibles promettant le SCAF à une sombre destiné ; encore un serions-nous tentés de dire tant la liste des programmes de coopération européens de défense avortés ou mort-nés est longue.
Le succès à l’exportation du Rafale met Dassault Aviation en position de force dans les négociations avec l’Elysée et avec l’Allemagne
Dans ces conditions, il semble difficile d’imaginer un avenir à ce programme. Il est vrai que sur la simple analyse des divergences profondes et des antagonismes qui ont émergé ces dernières années autour de celui-ci, les solutions qui permettraient de refonder le SCAF sur des bases plus saines sont loin d’être évidentes. Pour autant, dès lors que l’on étudie les causes mêmes de ces impasses, une solution pourrait émerger. En effet, plutôt que de tenter de forcer la coopération entre industriels sur des bases instables et mal définies, il serait bien plus efficace de porter l’attention sur leurs causes, en l’occurence les profondes divergences qui opposent les attentes de Berlin et de sa Luftwaffe, et de Paris, de son Armée de l’Air et de l’Espace, et de son Aéronavale, à savoir que l’Allemagne entend avant tout developper un successeur au Typhoon, un chasseur de supériorité aérienne à hautes performances capable de voler haut et vite, alors que pour la France, il s’agit de remplacer le Rafale, un chasseur polyvalent embarqué capable de mener des frappes nucléaires en profondeur. Une lecture superficielle de ces deux cahiers des charges pourrait conclure qu’ils sont incompatibles. Ce serait toutefois rapidement oublier qu’un avion de combat n’est pas qu’une cellule, mais un système de systèmes, et que ces deux besoins peuvent s’appuyer sur de nombreux systèmes communs. En d’autres termes, pour sauver SCAF, il conviendrait de passer d’un programme basé sur un système de systèmes, à un Programme de programmes partageant un système de systèmes commun.
Dit autrement, l’avenir du SCAF pourrait reposer sur non pas un unique, mais deux premiers piliers, l’un développé par Dassault Aviation en vue de concevoir un appareil répondant aux besoins des forces aériennes et aéronavales françaises, et l’autre conçu par Airbus DS, pour répondre aux besoins de la Luftwaffe. En revanche, les 6 autres piliers du programme, les piliers propulseur, système de systèmes, détection, guerre électronique, armement et simulation, peuvent eux être communs, même s’ils bénéficieraient eux aussi d’une certaine déclinaison spécialisée selon qu’ils doivent équiper le premier pilier français ou allemand. De fait, le SCAF deviendrait non pas un appareil, mais une famille d’appareils et de systèmes, de sorte à proposer à ses utilisateurs un écosystème technologique et opérationnel à la foi souple et évolué, susceptible de répondre à de nombreux besoins, tout en gardant sous controle les couts de conception, d’évolution, de fabrication et de maintenance, grâce à un volume d’appareils important.
Le SCAF est basé sur un système de systèmes, et le premier pilier, le NGF, ne représente qu’une partie de ses capacités et des technologies qu’il mettra en oeuvre.
Le concept pourrait, d’ailleurs, être étendu, de sorte à accueillir d’autres acteurs européens, notamment des pays qui souhaiteraient developper non pas un chasseur moyen embarqué ou un chasseur lourd de supériorité aérienne, mais un chasseur monomoteur de nouvelle génération économique, susceptible de constituer un successeur aux nombreux F-16 Block 52/60 et 70 et autres Mirage 2000 et Gripen C/D qui équipent les forces aériennes européennes aujourd’hui. Ainsi, une fois l’hypothèse d’une dissociation du premier pilier admise, il est tout à fait possible d’imaginer inviter d’autres BITD aéronautique (Base Industrielle Technologique Défense), comme la Grèce, le Portugal, la République tchèque, mais également la Suède (qui quitterait Tempest), ainsi que certains pays déjà clients du F-35 mais en quantité réduite (Belgique, Danemark), pour concevoir un troisième premier pilier, sur les mêmes paradigmes que les deux premiers, mais visant à concevoir un chasseur monomoteur de 5ème génération +, ou de 6ème génération -, à l’instar de l’hypothèse émise par Will Roper concernant la division du programme NGAD de l’US Air Force.
Une fois cette hypothèse posée, qu’elles en seraient les conséquences ? La plus évidente serait qu’il n’existerait plus de tension entre Dassault Aviation et Airbus DS, ni entre la Luftwaffe et les forces aériennes françaises, puisque le programme développerait deux appareils différents, permettant à chaque industriel de developper et étendre ses savoir-faire propres, tout en mutualisant les développements technologiques critiques, comme la nouvelle génération de turboréacteur, la technologie de cloud de combat, les nouvelles munitions ou encore les nouvelles capacités de guerre électronique et de détection, qui pourtant représentent à elles seules les 2/3 des couts de developpement d’un avion de combat. En outre, les appareils partageant grands nombres de technologies et de systèmes, il serait possible pour l’armée de l’Air et de l’espace d’acquérir et de mettre en oeuvre quelques escadrons du modèle allemand pour les missions de supériorité aérienne, voire de suppression des défenses anti-aériennes (l’Allemagne ayant plus d’expériences dans ce domaine que la France avec le Tornado ECR et le futur Typhoon ECR), alors que la Luftwaffe pourrait en retour acquérir un nombre équivalent d’escadrons de chasseurs polyvalents français pour les missions d’attaque et de pénétration, sans alourdir la chaine logistique de chacune des forces aériennes.
Avec le Typhoon ECR et précédemment le Tornado ECR, l’Allemagne dispose d’un savoir-faire en matière de suppression des défenses anti-aériennes adverses supérieures à celles de l’industrie française
D’autre part, le programme SCAF se parerait d’une souplesse et d’une évolutivité sans équivalent, étant à la fois capable de developper dynamiquement d’autres appareils spécialisés à la demande sur une même base technologique, que de faire évoluer globalement l’ensemble du parc pour répondre à une évolution de la menace ou des besoins, avec un partage des couts et une diminution des délais par une meilleure répartition des taches industrielles. Enfin, A l’échelle européenne, le programme serait bien plus inclusif qu’il ne l’est aujourd’hui alors que les tensions sont déjà à leur paroxysme concernant le partage industriel avec seulement 3 participants, en particulier en permettant le developpement d’un troisième premier pilier basé sur un chasseur monomoteur economique à la portée des bourses de la plupart des forces aériennes européennes.
Certes, une telle approche engendrerait des surcouts de prime abord, puisqu’il sera nécessaire de developper 2 voire 3 appareils différents, tout au moins pour ce qui concerne la cellule et les commandes de vol. Toutefois, comme l’avait montré Will Roper dans le cadre du programme NGAD, la recherche absolue de compromis et de polyvalence pour permettre à des besoins antagonistes de cohabiter génère en soit de nombreux surcouts, potentiellement supérieurs à ceux consécutifs de la conception de plusieurs cellules différenciées voire spécialisées. En outre, l’alternative à ce changement de paradigme est loin d’être évidente, puisqu’en dehors d’un profond changement en ce sens, il est probable que le programme SCAF périclitera, obligeant la France à assumer seule l’ensemble des couts concernant les 7 piliers du programme, ou à réduire ses ambitions technologiques. Dans ce domaine, il est utile de se rappeler le vieil adage selon lequel le mieux est l’ennemi du bien.
Le developpement d’un troisième premier pilier pour concevoir un chasseur monomoteur permettrait d’attirer la Suède mais également la Grèce dans le programme SCAF
Reste que changer de paradigme ne sera pas simple, tant pour les autorités des 3 pays, que pour les industriels déjà engagés dans le programme. En outre, si les premiers piliers venaient à être scindés, il serait également nécessaire de réorganiser le partage industriel des autres piliers, aujourd’hui largement à ‘l’avantage de l’industrie allemande qui pilote 4 des 7 piliers, et copilote deux d’entres eux, là ou la France ne devait piloter que l’unique premier pilier. En outre, un tel basculement devrait, pour être efficace, s’effectuer sur des délais courts, de sorte à tenter de recoller à l’indispensable objectif d’une entrée en service pour 2040. Malheureusement, souplesse intellectuelle et réactivité sont loins d’avoir les qualités démontrées par les autorités et les industriels des trois pays ces dernières années autour de ce programme. Espérons que sa probable funeste destinée engendrera un changement de posture salutaire tant en France qu’en Allemagne et en Espagne.
Afin de protéger son ministre de la Justice d’une motion de censure, la première ministre suédoise Magdalena Andersson a négocié un accord avec la député Amineh Kakabaveh suédoise d’origine Kurde et ancienne Peshmerga, lui garantissant de ne pas céder aux exigences turques concernant l’adhésion de la Suède à l’OTAN.
Depuis l’annonce des candidatures finlandaise et suédoise pour intégrer l’Alliance Atlantique, le président turc R.T Erdogan s’est montré très hostile à cette possibilité, reprochant aux deux pays scandinaves non seulement l’embargo sur les armes prononcé par Stockholm contre Ankara, mais également une politique complaisante envers les réfugiés kurdes, et en particulier des membres de l’YPG et des Peshmerga. Pour le président turc, comme pour une grande partie de son opinion publique, il est inconcevable que la Suède et la Finlande puissent rejoindre l’alliance sans renoncer à ces deux politiques, et extrader vers Ankara certains des leaders kurdes ayant trouvé refuge dans ces deux pays. En Suède, cette question est politiquement critique, dans la mesure ou la député Amineh Kakabaveh d’origine Kurde, détient le vote susceptible de mettre en minorité l’actuellement gouvernement de coalition de la première ministre Magdalena Andersson.
Les combattants kurdes syriens avaient combattu aux cotés des FS occidentales contre l’Etat Islamique, avant d’être repoussées par une offensive des armées turques dans le nord du pays.
Ayant du faire face à une motion contre le ministre de la justice Morgan Johansson accusé par les parlementaires suédois d’avoir manipulé des informations pour masquer la réalité de la hausse des crimes par arme à feu dans le pays, Me Andersson a donc du négocier avec Amineh Kakabaveh pour protéger son ministre, et aurait assuré à cette ancienne Pershmerga que Stockholm ne céderait en rien aux exigences d’Ankara pour lever le veto turc, compromettant sévèrement les chances suédoises de rejoindre l’Alliance Atlantique. Pour autant, il eut probablement été tout aussi difficile politiquement parlant de céder à Erdogan sur ces questions vis-à-vis de l’opinion publique suédoise, pour qui de telles exigences seraient contraires à la politique historique du pays. Dans le même temps, il serait très difficile pour R.T Erdogan, qui plus est à un an des prochaines élections, de passer outre ces exigences vis-à-vis de son électorat déjà distendu, même en obtenant certaines compensations de la part des Etats-Unis et des Européens, comme la levée de certaines sanctions .
Le britannique Rolls-Royce a annoncé la reprise des négociations avec Ankara en vue de motoriser le programme de chasseur TFX
Les autorités chinoises ont annoncé avoir mené avec succès la première campagne d’essais en mer concernant un démonstrateur de drone naval de surface trimaran de surface le 7 juin 2022, après une mission opérationnelle autonome à la mer de 3 heures, ayant permis de collecter de nombreuses données.
En septembre 2020, un photo publiée sur les reseaux sociaux fit sensation en montrant un prototype de drone de surface chinois sur le fleuve Yantze, dans une configuration en tout point comparable à celle du drone de surface Sea Hunter de l’US Navy. Dans ces dimensions comme dans son tonnage, le navire chinois semblait effectivement directement inspiré du démonstrateur américain, comme ce fut précédemment le cas d’autres équipements navals, dont le destroyer Type 052D. Pour autant, les informations étaient très parcellaires quant à l’utilisation faite de ce navire. On en sait désormais plus à ce sujet, les autorités chinoises ayant annoncé que le drone naval de 200 tonnes et de 45 mètres de long avait mené avec succès une première campagne d’essais opérationnels à la mer lors d’une sortie de 3 heures à proximité de l’ile Panzhi, sur la cote orientale chinoise.
Premier cliché du drone de surface chinois sur le fleuve Yantze apparue en septembre 2019
Selon le site d’état GlobalTime.cn, les essais auraient permis de récolter de précieuses informations sur les qualités nautiques et la conduite autonome du navire, affirmant que ce dernier était en mesure de soutenir une activité opérationnelle jusqu’à une mer 5, c’est à dire des creux jusqu’à 4 mètres, et de naviguer en sécurité dans une mer 6, c’est à dire avec des creux de 4 à 6 mètres. Selon ce même site, le navire peut atteindre une vitesse de 20 noeuds, et disposerait de capacités de détection, de conduite de mission et de furtivité très avancées, sans pour autant que l’on puisse juger de la véracité de ces allégations. Cette premier sortie opérationnelle est intervenue aprés que le drone ait été testé en matière de navigabilité et de conduite navale au cours d’une trentaine de missions sur le lac Boyang intervenues entre son lancement en 2019 et et son arrivée à Zhoushan en 2021.
Les démonstrateurs Sea Hunter et SeaHanwk de l’US Navy ont participé à de nombreux essais et des exercices opérationnels ayant mis en évidence leurs capacités de combat
Bien que le prototype chinois soit encore loin d’avoir la même maturité que les deux démonstrateurs Sea Hunter et Seahawk de l’US Navy, ces derniers ayant parcouru de manière autonome plus de 10.000 miles nautiques et participé à des exercices opérationnels avancés, Pékin a annoncé le 2 juin le developpement d’un drone de surface plus imposant, à des fins visiblement opérationnelles, dont le developpement a été confié au No.716 Research Institute of China State Shipbuilding Corporation Limited (CSSC). Alors que l’occident, et plus particulièrement l’US Navy, entend compenser l’avantage numérique de la flotte chinoise dans la décennie à venir en mettant en oeuvre un grand nombre de drones, qu’ils soient de surface, sous-marins ou aériens, il semble évident que Pékin entend également se doter de ce type d’équipements, ce qui pourrait mettre largement à mal la stratégie américaine pour contenir la menace chinoise, notamment contre Taïwan, ce d’autant que rien ne permet de considérer que dans ce domaine, les drones américains disposeront d’un avantage technologique suffisamment marqué sur les modèles chinois dans les années à venir.
Les autorités japonaises ont annoncé le lancement d’un programme visant à concevoir et produire d’ici 2026 un drone de combat capable d’accompagner ses avions de combat pour en étendre les capacités de détection et d’emport de munition, dans la droite ligne du concept de « Loyal Wingman », afin de compenser sa faiblesse numérique face à la Chine.
Après les Etats-Unis, la Russie, la Grande-Bretagne et l’Australie, le Japon a annoncé entreprendre la conception d’un drone de combat destiné à évoluer autour de ses avions de combat pour en étendre les capacités de détection, tout en considérant la possibilité de pouvoir armer de tels drones dans une approche comparable à celle des programmes Loyal Wingman. Selon le site Nikkei.com, le premier vol du prototype est attendu pour 2025, et celui d’un modèle de pré-série en 2026, dans le but de compenser l’avantage numérique marqué dont disposeront les forces aériennes et aéronavales chinoises lors de la prochaine décennie. L’entrée en service du drone de combat est, quant à elle, prévue pour 2035, soit conjointement celle du nouveau chasseur nippon du programme F-X destiné à remplacer les Mitsubishi F-2.
Le Su-57 est sensé pouvoir contrôler simultanément 4 drones de combat S-70 Okhotnik-B
Les programmes de drones de combat évoluant de manière autonome en coordination avec des avions pilotés, communément désignés par le terme Loyal Wingman ou ailier loyal, se sont multipliés ces dernières années. Aux Etats-Unis, l’Us Air Force développé le programme Skyborg visant à concevoir une Intelligence Artificielle capable de piloter efficacement des drones de différents types lors de ce type de mission. En Russie, cette mission est confiée au drone de combat S-70 Okhtonik-B, sensé être en mesure d’évoluer de manière indépendante ou en coopération avec le chasseur Su-57 à raison de 4 drones par chasseur piloté. A noter que dans la doctrine aérienne russe, l’Okhtonik-B est sensé remplacer à l’avenir les avions de combat légers Mig-29 et Su-25 et doivent entrer en service d’ici le milieu de la présente décennie. La Grande-Bretagne a entrepris de developper, conjointement aux Remote Carrier du programme Tempest, un programme de type Loyal Wingman désigné Mosquito. L’Australie, en partenariat avec l’américain Boeing, développe également un programme désigné Loyal Wingman(en illustration principale) pour évoluer aux cotés des F-35A de la Royal Australian Air Force. La Chine, mais également la Turquie et l’Inde, ont annoncé des programmes similaires.
Le programme SCAF a privilégié le concept de Remote Carrier, plus économique et plus versatile, à celui de Loyal Wingman. Ici, deux des modèles de Remote Carrier développés par MBDA et Airbus dans le cadre de ce programme lors du Salon du Bourget de 2019
En Europe, toutefois, les deux grands programmes d’avions de combat de nouvelle génération, le Tempest rassemblant Grande-Bretagne, Italie et Suède, et le SCAF développé par la France, l’Allemagne et l’Espagne, se sont tournés vers une approche relativement différente reposant non pas sur des drones autonomes évoluant aux cotés des chasseurs pilotés sur l’ensemble de la mission, mais sur des drones de combat aéroportés, déployés à proximité de la zone d’engagement par un avion porteur, pour assurer des missions comparables. Ces drones sont désignés sous le terme Remote Carrier, ou Vecteur Déporté, devraient être en mesure d’entrer en service au début de la prochaine décennie aux cotés des avions Rafale et Typhoon, avant d’épauler les NGF et Tempest une décennie plus tard.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’optimisme n’était pas de rigueur au sujet du programme d’avion de combat de nouvelle génération SCAF lors du Paris Air Forum. De toute évidence, les deux principaux acteurs du programme, le français Dassault Aviation et l’Allemand Airbus Defense&Space, ne sont pas pas parvenus à s’entendre sur la répartition des rôles autour du pilier Next Generation Fighter, le plus imposant du programme qui doit concevoir l’avion de combat au coeur du Système de Combat Aérien du Futur, ou SCAF. Et pour Eric Trappier, président de Dassault Aviation, il est désormais nécessaire que la décision soit prise au niveau politique, pour espérer sortir de l’impasse dans laquelle se trouve le programme qui, selon lui, a déjà pris plusieurs années de retard, et ne devrait pas être en mesure de produire un avion de combat pleinement opérationnel avant 2050.
Pour Dassault Aviation, il n’est pas question de partager la direction du pilier NGF avec Airbus DS, comme ce dernier le réclame. Le groupe aéronautique français estime en effet avoir une expertise bien plus riche dans ce domaine, avec l’experience acquise autour du programme Rafale mais également des autres avions légendaires conçus par Dassault Aviation comme le Mirage 2000, le Mirage F1, le Super Etendard, le Mirage III/5 et le Mirage IV, alors que Airbus DS ne peut s’appuyer que sur une experience partielle concernant le programme Eurofighter Typhoon et Panavia Tornado, deux appareils conçus en grande partie conçus par l’industrie aéronautique britannique. En outre, Eric Trappier a rappelé que pour s’assurer la direction du pilier NGF, la France a accepté de céder le controle de 5 des 7 autres piliers du programme SCAF, de partager la direction du pilier propulseur avec l’Allemand MTU, et de confier à Berlin le pilotage du programme Eurodrone, avec les conséquences que cela implique. Bien que ce ne soit pas évoqué par le dirigeant français, il est également utile de rappeler que les entreprises allemandes ont obtenu 6 des 9 piliers du programme de char de combat MGCS franco-allemand, là encore dans le but d’équilibrer le partage industriel entre la France et l’Allemagne.
la decision d’Airbus DS de se tourner vers un moteur américain pour l’Eurodrone a encore renforcé la défiance de la BITD française vis-à-vis de la coopération franco-allemande
Pour Airbus DS et son PDG Guillaume Faury, la perception est toute autre. En effet, l’avionneur européen ne se considère en aucune manière en état d’infériorité technologique ou de savoir-faire vis-à-vis de son homologue français, d’autant que le groupe a développé ces dernières années des capacités avancées dans certains domaines clés, comme en matière de furtivité. En outre, relayant en cela les positions du Bundestag et de la Luftwaffe, il n’est pas question pour l’Allemagne de financer une programme dont elle n’aurait pas un controle complet, même si celui-ci devait être partagé avec Paris, y compris pour ce qui concerne les technologies embarquées. Enfin, même si cela n’est jamais ouvertement abordé, Berlin redoute qu’en cédant le controle du NGF à Dassault Aviation, le SCAF évolue vers un appareil répondant avant tout aux attentes et besoins des forces aériennes et aéronavales françaises, en minimisant les besoins exprimés par la Luftwaffe.
Il s’agit là, en réalité, du point le plus problématique, puisque les forces aériennes des deux pays ont des doctrines opérationnelles et des besoins relativement éloignés les uns des autres. Ainsi, pour Paris, il est nécessaire que le SCAF demeure un appareil relativement compact, en particulier du fait de sa version aéronavale destinée à armer le fur porte-avions à propulsion nucléaire qui remplacera le Charles de Gaulle en 2038. En outre, l’appareil devra disposer d’une grande allonge opérationnelle, et probablement de capacités de pénétration à très basse altitude et à haute vitesse, pour remplacer les Rafale de la composante aérienne de la dissuasion nucléaire. Pour Berlin, en revanche, l’objectif principal de ce programme sera de remplacer les Typhoon de supériorité aérienne, ceci impliquant un appareil lourd, capable de voler très haut et très vite, et disposant d’un puissant radar et de nombreux missiles air-air. Rappelons à ce titre que le Rafale est 1,5 tonnes plus léger que le Typhoon à vide, et s’il offre des performances supérieures à l’avion français à haute altitude, le Typhoon est défavorisés à moyenne et basse altitude. Non pas que l’un soit meilleur que l’autre, ils ont simplement été conçus sur des cahiers de charges différents.
Le NGF devra armer le futur PANG de la Marine Nationale, ceci engendrant des contraintes de conception significative concernant le futur chasseur franco-allemand
De fait, les négociations imposées par Paris et Berlin entre Airbus DS et Dassault Aviation ont, de manière fort prévisible, rapidement tourné court, chacun des deux industriels ayant des impératifs et des agendas trop divergents pour parvenir à un quelconque compromis autour du NGF. En appelant à un arbitrage politique, Eric Trappier, dans les faits, ne fait que rendre à l’Elysée et à l’Hotel de Brienne la bombe à retardement qui lui avait été confié par Emmanuel Macron et Angela Merkel il y a deux ans. En effet, il ne fait guère de doute que la présente impasse qui entrave les négociations entre les deux industriels, s’appliquera de la même manière à Emmanuel Macron et Olaf Scholz, d’autant que contrairement à Safran, Thales ou MBDA, Eric Trappier sait que l’Etat Français ne dispose pas d’un bras de levier suffisant pour le faire plier, qui plus est maintenant que le Rafale est un extraordinaire succès commercial sur la scène internationale. En réalité, le rapport de force serait même en la faveur de Dassault Aviation, l’Etat français ayant encore une dette de plusieurs Md€ chez l’avionneur.
Alors, le SCAF est-il condamné ? On peut raisonnablement se poser la question, d’autant qu’Eric Trappier ne cesse, depuis quelques mois, de faire référence au fameux « Plan B », à savoir un programme visant à remplacer le SCAF mais qui serait entièrement français, ou tout au moins indépendant des arbitrages de Berlin. En outre, avec le standard F4.2, le Rafale s’est ouvert une seconde vie, avec la possibilité d’évoluer encore pendant plusieurs décennies et d’intégrer les technologies nécessaires pour maintenir l’appareil sur le podium des appareils de combat mondiaux. Là encore, Eric Trappier aime à répéter que le Rafale est encore loin de la retraite, et qu’il volera jusqu’en 2070. Enfin, il ne fait aucun doute que les autres membres de la Team Rafale, dont le motoriste Safran, l’électronicien Thales et l’armurier MBDA france, verraient eux aussi d’un bon oeil la conversion du programme SCAF vers une solution purement nationale, tous ayant du concéder des pans entiers de savoir-faire sur l’autel de la coopération européenne dans ce dossier.
Selon Eric Trappier, le Rafale est appelé à voler encore de nombreuses années, jusqu’en 2070
Par ailleurs, le fait que le programme n’ait presque pas avancé en 5 années de temps, alors même que dans le même temps, les programmes équivalents américains, russes, chinois, et britanniques ne se sont pas heurtés à ces murs de négociations impossibles à franchir, ne fait que réduire la fenêtre d’opportunités pour pouvoir répondre aux besoins qui ne manqueront pas d’émerger d’ici 2035, qu’un appareil comme le Rafale, malgré ses immenses qualités, ne sera pas en mesure de traiter. A ce titre, il est bon de rappeler, comme l’a très bien fait le député Jean-Louis Thiériot dans une tribune publiée aujourd’hui, que le but de la coopération européenne est avant tout de permettre de diminuer les prix d’acquisition et de réduire les délais de production et de conception, et non l’inverse. Notons enfin que les difficultés qui entravent aujourd’hui la poursuite du programme SCAF, sont proches de celles qui handicapent le programme MGCS, et sont identiques à celles qui furent à l’origine de l’arrêt des programmes MAWS et CIFS (divergence des besoins et des doctrines, partage industriel), ces deux derniers ayant, de toute évidence, déjà rejoint la longue liste des programmes européens avortés aux cotés du porte-avions et dru drone furtif franco-britannique, de l’airbus naval franco-italien ou du sous-marin franco-espagnol.
Une chose est certaine, il est désormais urgent d’arbitrer définitivement concernant la poursuite ou l’abandon du programme SCAF, et le cas échant, sur la réorganisation des partages industriels, comme il l’est d’ailleurs indispensable et urgent de faire de même concernant le programme MGCS, lui aussi exposé à des contraintes de calendrier de plus en plus pressantes. Pour autant, il semble très difficile d’imaginer qu’une solution, fut-elle politique, pourrait émerger dans les semaines ou mois à venir. D’autant que dans ce domaine et avec un planning de production remplit pour les 10 années à venir, Dassault Aviation a largement plus le temps d’attendre que l’Armée de l’Air et l’Aéronautique Navale, et que, de son coté, Berlin ne semble pas fermé aux appels du pieds en provenance de Londres concernant le programme Tempest, par ailleurs bien plus en adéquation avec ses besoins que ne pourra l’être le SCAF, et que la Luftwaffe aura toujours la possibilité d’augmenter le nombre de F-35A commandés outre-atlantique si les délais venaient à encore glisser.
Si pendant les deux premiers mois de guerre, les armées russes semblaient ne pas parvenir à s’imposer dans le domaine de la guerre électronique, de récent rapports concernant les combats dans le Donbass indiquent que Moscou aurait tiré les leçons de ces échecs passés et s’appuie désormais sur un très intense brouillage électromagnétique sur ce théâtre.
Redoutées en amont de la guerre en Ukraine, les capacités des armées russes en matière de Guerre électronique furent étonnamment peu efficaces durant les premières semaines du conflit, permettant aux forces ukrainiennes de mener des actions coordonnées de nombreux petites groupes de combat, soutenus par un grand nombre de drones et par une artillerie très efficace. On pouvait alors penser que les capacités anticipées des armées russes dans ce domaine avaient été, comme ce fut le cas dans d’autres, surestimées. Pourtant, depuis quelques semaines, alors que les combats font rage dans la region du Donbass, les forces russes font montre d’une bien meilleure efficacité dans ce domaine, en mettant en oeuvre un puissant brouillage entravant les communication et l’utilisation des drones ukrainiens, ainsi que d’importantes capacités d’écoute et de géolocalisation dans le spectre électromagnétique, handicapant de fait l’efficacité de la stratégie qui fit le succès des armées ukrainiennes en début du conflit.
Très efficaces en début de conflit, les drones de combat TB2 semblent désormais neutralisés par le brouillage et La Défense anti-aérienne russe dans le Donbass, obligeant les forces aériennes ukrainiennes à mener de très dangereuses missions pilotées sur ce théâtre
Il est probable que les armées russes ont appris de leurs erreurs lors de l’entame du conflit, notamment en ayant sous-estimé les capacités de coordination et d’adaptation des forces ukrainiennes pour compenser leur infériorité numérique et en matière de puissance de feu. Toutefois, ce seul facteur ne suffit pas à expliquer que désormais, les drones ukrainiens peinent à opérer à proximité des lignes d’engagement, et que les communications ukrainiennes soient systématiquement brouillées ou géolocalisées dans cette espace. Il est en revanche très probable que la ligne de front s’étant considérablement réduite, et les lignes logistiques russes étant beaucoup plus réduites, la densité de systèmes de guerre électronique dans la region du Donbass, et en particulier autour des zones d’engagement majeures autour de Severodontesk, aient permis aux armées russes d’atteindre la masse critique nécessaire pour atteindre une efficacité opérationnelle significative en matière de guerre électronique. A ce titre, on notera qu’aucun rapport ne fait état d’une telle activité électromagnétique sur le front Sud autour de la ville de Kherson, ceci accréditant l’hypothèse selon laquelle les armées russes auraient concentré leurs moyens de guerre électronique en soutien de l’offensive dans le Donbass.
Toutefois, le déploiement de puissants brouilleurs n’est pas une stratégie soutenable dans la durée pour Moscou. En effet, avec l’arrivée des systèmes d’artillerie occidentaux, comme les M109A6 Paladin, les canons Caesar ou les canons automoteurs Zuzana, tous disposant d’une meilleure allonge, d’une plus grande précision et d’une plus grande mobilité que les systèmes Akatcya et Msta-s en service dans les armées russes et ukrainiennes, il est probable que ces systèmes de brouillage, par ailleurs aisément localisables sur le spectre électromagnétique, seront des cibles privilégiées de ces nouveaux systèmes d’artillerie. La situation sera encore plus difficile lorsque les Lance-Roquettes Multiples HIMARS et M270 promis par les Etats-Unis et la grande-Bretagne arriveront en Ukraine. En outre, le fait que seules le théâtre du Donbass fasse l’objet d’une concentration de moyens dans ce domaine par les armées russes tend à indiquer que celles-ci ne disposent que d’un nombre limité de systèmes, rendant toute attrition critique dans ce domaine. Il s’agit donc, selon toute probabilité, d’un avantage certes significatif mais transitoire dont disposent aujourd’hui les forces russes.
Les parlementaires du Seapower Panel de la Chambre des Représentants du Congrès Américain ont obtenu un consensus pour rejeter la demande de retrait du service de 5 des 24 navires demandée par l’US Navy dans le cadre du budget 2023, alors que l’avenir des 19 navires restants sera discuté par le Armed Services Committee le 22 juin
Après plusieurs années d’errements et de décisions contradictoires, l’US Navy a décidé, en début d’année, de profondément changer de stratégie en matière de programmation navale, y compris dans sa façon de négocier avec le Congrès américain qui, dans ce domaine, a plus de capacités de décision que la Maison Blanche. Ainsi, dans le cadre de la préparation du budget 2023, la Marine américaine réclama le retrait du service de 24 de ses navires, dont 9 des nouvelles corvettes LCS, mais également de 5 croiseurs de la classe Ticonderoga et de 4 navires d’assaut, alors que 16 des 24 bâtiments disposent encore d’un potentiel à la mer, et que seuls 8 nouveaux navires entreront en service en 2023. Pour l’Amirauté US, il s’agit de libérer les ressources humaines et budgétaires nécessaires pour préparer sa transformation en vue de relever le défi posé par la montée en puissance de la Marine de Pékin. Il était dès lors plus que probable que le Congrès américain, réputé conservateur dans ce domaine quel que soit sa majorité politique, réagirait avec hostilité à une telle demande, et le refus concernant le retrait des 4 navires d’assaut et du croiseur Vicksburg publié par le House Seapower Panel du Comité des forces armées de la Chambre des Représentants (à majorité démocrate) n’est en rien une surprise.
Le navire d’assaut USS Germantown de la classe Whidbey Island fait parti des 4 LSD sauvé par la décision du House Seapower Panel
D’une part, le retrait de 4 des 7 LSD de la classe Whidbey Island encore en service avait provoqué une levée de bouclier de la part du Commandement du Corps des Marines, très influant au Capitole, pour lequel il est impératif de conserver une flotte d’assaut de 31 navires en ligne, alors que le retrait des 4 navires aurait amené ce format à seulement 27 navires. D’autre part, les parlementaires américains s’étaient déjà à plusieurs reprises inquiétés de la diminution du format de la flotte de surface de l’US Navy, et en particulier de la forte diminution du nombre de silos verticaux disponibles qu’engendrera le retrait du service de la flotte de croiseurs de la classe Ticonderoga, non compensée par l’arrivée des nouveaux destroyers Arleigh Burke Flight III. Il est d’ailleurs probable que la liste des retraits du service demandée par l’US Navy sera encore entamée par les arbitrages du Armed Services Committee le 22 juin, en particulier concernant les 9 LCS de la classe Freedom qui n’ont que quelques années de service, mais qui souffrent de graves problèmes pour ce qui concerne l’appareil propulsif.
De toute évidence, la stratégie choisit par l’US Navy pour amener la Maison Blanche et le Congrès à augmenter ses crédits d’équipements dans les années à venir afin de moderniser sa flotte rencontrera une résistance féroce de la part des parlementaires américains. Il est vrai que celle-ci est pour le moins évidente, même si elle s’appuie sur une certaine approche « négociée », et ce alors que que la Marine Américaine éponge aujourd’hui en grande partie les conséquences de ses mauvais arbitrages technologiques ces 30 dernières années, au même titre, ceci dit, que l’US Army et que l’US Air Force. Reste que même si le bras de fer est déséquilibré entre l’US navy et le Congrès, il est plus que probable qu’à terme il soit tout de même indispensable pour les parlementaires américains de concéder une hausse significative des crédits d’équipements et de construction navale, seule solution pour soutenir la compétition avec la programmation navale de Pékin qui suit une trajectoire d’une grande efficacité, en admettant au service chaque année 3 fois plus de navires que l’US Navy.
La Marine russe a déployé des systèmes antiaériens TOR M2 à bord de ses corvettes navigant en mer Noire afin de les protéger des missiles et des drones ukrainiens, à la suite de la perte du croiseur Moskva.
Un cliché publié sur les réseaux sociaux montre la corvette Vasily Bykov du projet 22160 le long des côtes de Crimée, naviguant avec un système anti-aérien modulaire terrestre Tor M2KM installé sur sa plate-forme hélicoptère, probablement pour renforcer ses capacités de défense antiaérienne et anti-missile.
Depuis la perte du croiseur Moskva le 14 avril 2022, coulé par deux missiles anti-navires P360 Neptune ukrainiens, la flotte russe de la mer Noire, qui jusqu’ici s’estimait invulnérable dans ces eaux, a profondément changé de doctrine, ses navires n’évoluant plus selon des trajectoires prédéfinies et répétitives, et surtout en se tenant à bonne distance des côtes sous contrôle ukrainien.
Avec l’arrivée probable de missiles anti-navires fournis par les alliés occidentaux de Kyiv, la défense anti-missile est devenue une priorité pour l’amirauté russe, en particulier pour ce qui concerne les corvettes de type Bykov et Buyan-M, qui disposent de capacités très limitées pour se prémunir contre une telle menace.
Le cliché publié hier sur les réseaux sociaux montrant la corvette Vasily Bykov de la classe Buyan emportant, sur sa plate-forme aviation, un système anti-aérien terrestre Tor M2KM modulaire, répond très probablement à ce besoin.
Toutefois, cette solution est loin d’être idéale, même si elle conférera à la corvette des capacités supplémentaires pour se prémunir contre d’éventuelles attaques de missiles anti-navires ukrainiens.
En effet, par sa position, le système Tor ne pourra pas protéger le navire en secteur avant, sur un arc de 45 à 60°, du fait du masquage provoqué par les infrastructures du navire. Surtout, le système TOR M2 n’a pas été conçu pour cette mission.
S’il peut effectuer une protection dynamique des forces terrestres en détectant les cibles aériennes tout en restant en mouvement, le Tor, dont la conduite de tir n’est pas gyrostabilisée, doit s’arrêter pour diriger ses missiles anti-aériens radiocommandés contre les cibles.
Or, pour un navire du tonnage du Vasily Bykov (1500 tonnes), une mer au-delà de Mer 2 (creux au de plus delà de 0,5 m) entrainera nécessaire un léger tangage et un roulis de quelques degrés, que le système n’a pas été conçu pour compenser.
Ainsi, un roulis de seulement 2° entraine un écart de 250 m à 7 km de distance, bien au-delà des capacités de destruction de la charge militaire du missile 9M338 du Tor M2.
L’hypothèse d’un transfert du système Tor sur l’ile au Serpent au large d’Odessa a également été évoquée, pour autant une corvette n’est certainement pas le moyen de transport le plus approprié pour ce type de transfert.
La démonstration de force des missiles antinavires P360 ukrainiens face au Moskva oblige la Marine russe à rapidement adapter ses tactiques comme ses moyens en mer Noire
Reste que sur mer calme, ou à quai (par exemple, sur l’ile aux serpents), le Tor M2 offrira sans aucun doute un surcroit de protection à la corvette qui ne dispose à ce jour que d’un système anti-aérien Gybka armé de 4 missiles à guidage infrarouge Igla-M peu adaptés pour la lutte anti-missiles.
Il est donc probable que les navires de ce type évoluant en zone contestée en mer Noire, emporteront, eux aussi, un système Tor, voire un système Pantsir pour renforcer leurs survivabilité, d’autant que le dispositif avait déjà été testé par la Marine Russe.