samedi, décembre 6, 2025
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La première unité de BMPT Terminator russes est opérationnelle

Depuis sa première apparition publique en 2002, le véhicule d’engagement de l’infanterie BMPT Terminator a suscité un vif intérêt médiatique. Il est vrai que ce blindé conçu sur un châssis de T-72, et transportant un impressionnant arsenal composé de 2 auto canons de 30mm, de 4 missiles anti-chars 9M120 ATAKA-T, de 2 lance-grenades de 30mm et d’une mitrailleuse de 7,62mm servis par un équipage de 5 hommes, était une approche pour le moins innovante héritée des vulnérabilités constatées des véhicules de combat d’infanterie et de transport de troupe blindés lors des conflits en Afghanistan, ainsi que lors de la désastreuse campagne de Tchétchénie de 1994. Ainsi armé, le BMPT a pour mission d’escorter les blindés en détruisant les poches de résistance d’infanterie, notamment en milieu urbain, tout en engageant les blindés adverses avec ses missiles et ses canons de 30mm. En outre, il peut assurer une protection rapprochée contre les aéronefs et autres drones à courte distance.

En dépit de ces promesses alléchantes, le Terminator, et sa version export allégée Terminator 2, n’ont guère réussi à convaincre, avec des commandes exports confirmées venues uniquement du Kazakstan et d’Algérie, et surtout avec une franche défiance des militaires russes. Pour ces derniers, en effet, l’utilisation et les capacités particulières du BMPT peinent à convaincre face au couple char de combat / véhicule de combat d’infanterie, et ce d’autant que les nouveaux VCI russes, qu’il s’agisse du T-15 Armata, du K-25 Kurganet ou du K-16 Bumerang, seront équipés d’une puissance de feu très supérieure à celle des BMP-2 actuels, en particulier avec le tourelle Epoch et/ou d’un canon de 57mm qui offrent des capacités globales comparables à celle du Terminator, tout en transportant effectivement 8 soldats d’infanterie jugés indispensables pour accompagner les blindés au combat, en particulier en zone urbaine.

Tourelle 57mm T15 Armata Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les nouveaux VCI russes comme le T-15 recevront une tourelle armée d’un canon de 57 mm à haute cadence de tir, et de missiles antichars Ataka ou Hermes, leur conférant une puissance de feu similaire voire supérieure à celle du BMPT

Pour autant, l’Armée Russe a accepté d’acquérir un certain nombre de BMPT Terminator, et la première compagnie entièrement équipée de ce blindé, appartenant à la 90ème division blindée de la Garde, a été déclarée opérationnelle, après une année d’evaluation et de prise en main par ses équipages. Celle-ci sera notamment engagée, selon les dires des officiels russes, dans un vaste exercice en juin prochain, pour en évaluer les atouts et la plus-value opérationnelle, ceci conditionnant très certainement l’avenir du Terminator dans les armées russes elles-mêmes, et ce d’autant qu’il sera vraisemblablement évalué comparativement aux dernières versions des véhicules de combat d’infanterie, qui eux aussi terminent leurs tests d’état en ce moment.

Pour autant, le Terminator pourrait connaitre un test grandeur nature bien plus tôt qu’annoncé. En effet, selon certaines observations, la 90ème division blindée de la Garde aurait entamé, en ce moment même, le déploiement de certains de ses bataillons renforcés le long de la frontière ukrainienne. Reste que le concept même de BMPT risque fort de se heurter rapidement à l’augmentation très sensible de la puissance de feu des Véhicules de Combat d’Infanterie russes comme internationaux, ou comme les nouveaux véhicules de reconnaissance blindés comme l’EBRC jaguar autrement plus mobile et moderne, sans pour autant offrir la versatilité de ces blindés. On peut donc penser, en dépit de l’attrait théorique de ce modèle, que sa présence au sein des forces armées russes restera limitée, si pas anecdotique.

Prototype de lEBRC Jaguar lors de sa presentation publique Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Avec son canon de 40mm et ses missiles antichars MMP de nouvelle génération, l’Engin Blindé de Reconnaissance et de Combat EBRC Jaguar français dispose lui aussi d’une puissance de feu comparable à celle du Terminator, tout en offrant une mobilité plus importante, et une empreinte logistique plus réduite.

Quelles sont les forces et faiblesses de l’industrie de défense française ?

L’industrie de défense française est aujourd’hui reconnue sur la scène internationale comme l’une des plus performantes et des plus exhaustives de la planète. Du sous-marin à propulsion nucléaire à l’avion de combat, en passant par les satellites de reconnaissance, les blindés et les missiles, les grandes entreprises de défense françaises sont présentes sur tous les créneaux, et s’arrogent à ce titre la 3ème place des pays exportateurs de technologie de défense après les Etats-Unis et la Russie, mais devant la Chine, l’Allemagne et la Grande-Bretagne. Elle représente, à ce titre, non seulement le pilier de l’autonomie stratégique française, mais une des industries exportatrices clés du pays, tant dans le domaine du commerce extérieur que des relations internationales, et emploie, à ce jour, prés de 200.000 collaborateurs, pour un chiffre d’affaire moyen annuel de 20 Md$, dont 40% proviennent des contrats d’exportation.

Pourtant, l’industrie de défense française revient de loin. Presque anéantie par l’occupation allemande lors de la seconde guerre mondiale, elle a pu se reconstruire dès les années 50 et 60 avec de grands succès internationaux comme les avions Mirage de Dassault Aviation, mais également les sous-marins Daphné puis Agosta de DCN, et les blindés AMX. Plus tard, vinrent d’autres équipements majeurs, dans le domaine des missiles (Magic, Exocet, Milan), des hélicoptères (Alouette, Gazelle, Dauphin..), ainsi que bien d’autres technologies défense. Et de fait, à la fin des années 80, elle disposait de compétences technologiques très avancées, parfois même face aux Etats-Unis, avec l’arrivée des Frégates Légères Furtives, du missile balistique Hades, des hélicoptères Tigre, du Rafale ou encore du char Leclerc. Après les difficiles années post-guerre froide, elle doit, à nouveau, démontrer ses capacités et performances pour répondre aux enjeux sécuritaires en évolution rapide, dans un marché mondial en pleine restructuration. Dans ces conditions, quelles sont, aujourd’hui, les forces, mais également les faiblesses de cette industrie stratégique pour le pays, pour sa défense, son économie, et pour sa posture internationale ?

Innovation et rapport performances/prix

S’il fallait résumer en phrase la qualité première de l’industrie de défense française, ce serait incontestablement « faire beaucoup avec très peu ». En effet, pour répondre aux besoins des armées françaises, et à la volonté politique de ne pas dépendre, en matière de défense, de l’allier américain, les industries de défense françaises ont toujours dû réussir le tour de force de faire au moins aussi bien que leurs concurrents, avec des moyens souvent très inférieurs à ceux-ci. On retrouve cet aspect dans de nombreux programmes modernes, comme le Rafale dont le developpement aura couté 45 Md€, la moitié de celui du Typhoon, et 10 fois moins cher que le programme F-35. De même, les nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque de la classe Suffren sont vendus par Naval Group 1,2 Md€ à la Marine Nationale, 40% moins chers que les Astute britanniques, et 65% moins chers que les Virginia américains. Dans le domaine des blindés, le VBMR Griffon a, quant à lui, été conçu pour que son prix unitaire ne dépasse pas le million d’euro, là ou le Stryker américain, à fonction identique, est vendu 4,9 M$.

Suffren Submarine SSN SNA Marine Nationale 1 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les SNA de la classe Suffren sont 35 à 65% plus économiques à l’acquisition que leurs homologues britanniques de la classe Astute ou américaines de la classe Virginia

En outre, ces équipements étant avant tout destinés à équiper les 3 Armées françaises, qui en font un usage intensif sur les différents théâtres d’opération sur lesquelles elles sont déployées, s’avèrent particulièrement performants, au point de venir à inspirer les alliés de la France. Ce fut notamment le cas du système CAESAR de Nexter, reconnu comme un des systèmes d’artillerie mobile les plus précis et performant en occident, et qui a largement inspiré la conception de modèles similaires dans de nombreux pays, y compris aux Etats-Unis, en Chine, ou en Inde. Même dans certains domaines de prédilection de l’industrie US, les capacités des ingénieurs français ont permis de developper des systèmes aussi performants, et parfois même davantage, que les materiels venus d’outre-atlantique, comme ce fut le cas du missile air-air Magic vis-à-vis du Sidewinder AIM-9B, puis du Magic 2 face à l’IAM-9J/L, et enfin du MICA face à l’AIM120 AMRAAM.

Pour y parvenir, l’industrie de défense française s’est faite une spécialité de l’innovation active, avec une réelle capacité à prendre de vitesse dans certains domaines l’ensemble des industriels de la planète. Ce fut le cas en particulier à la fin des années 80 lorsqu’arrivèrent simultanément le char Leclerc, premier char capable de faire feu en mouvement tout terrain en maintenant sa précision et sa cadence de tir, ou la frégate légère furtive, à ce point innovante qu’elle fut l’un des personnages principaux d’un James Bond. Cette capacité à innover perdure aujourd’hui, avec des programmes comme le drone de combat furtif Neuron, le sous-marin nucléaire Suffren, ou les blindés du programme SCORPION.

Un pilotage chaotique des programmes

Malheureusement, cette industrie pourtant stratégique pour la France, souffre de nombreuses faiblesses, la première étant liée à un pilotage souvent chaotique des programmes, et à un manque de pertinence dans les arbitrages politiques menés par les autorités du pays, quel qu’elles furent. De nombreux programmes ont en effet été proprement sabordés par décision politique, amenant à des aberrations budgétaires couplées à des déficits opérationnels qui parfois ont entrainé des morts au combat. Ce fut ainsi le cas de l’hélicoptère Tigre, destiné à remplacer les Gazelle antichar de l’Aviation Légères de l’Armée de terre. Initialement, la France prévoyait d’acquérir 225 unités pour un prix unitaire de 18 m€, mais au fil des réductions de volume, elle n’en acquis que 67 exemplaires, à 35 m€ pièce. Au final donc, le pays est parvenu à diviser par 3 la flotte prévue, obligeant l’ALAT à prolonger bien au delà du raisonnable ses gazelle, pour un prix équivalent aux deux tiers du prix initial, et ce sans compter les surcouts liés aux contraintes de prolongation des gazelle, et à ceux liés à l’utilisation intensive d’un parc de Tigre trop restreint pour le besoin opérationnel existant.

Tigre HAD face MinDef Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le Tigre a vu son prix unitaire plus que doubler alors que le volume de commande français comme allemand était divisé par 3 après l »effondrement du bloc soviétique

Il en fut exactement de même avec le programme de frégate FREMM, initialement prévu à 17 unités pour remplacer à la fois les frégates T70 et T67, ainsi que les avisons A69 dans une dynamique de montée en puissance de la Marine Nationale, qui devait alors aligner 17 FREMM, 4 FDA Horizon et 5 FLF La Fayette. Malheureusement, le programme FDA fut ramené à 2 unités, faisant au passage augmenter le prix unitaire de chaque navire de 35%, et le programme FREMM fut, quant à lui, ramené à 8 unités, rompant avec le programme industriel qui prévoyait une livraison tous les 7 mois, pour un frégate dont le prix unitaire serait de l’ordre de 450 m€, et non 750 m€ comme aujourd’hui. Non seulement la réduction et l’étalement du programme, qui dut finalement être complété par 5 FDI pour un budget supplémentaire de 4 Md€, finit par couter aux contribuables aussi cher pour 8 frégates que pour les 17 initialement prévues, et le format de la Marine Nationale en fut largement handicapé.

FREMM et Tigre ne sont que deux exemples parmi tant d’autres de ces arbitrages chaotiques liés au pilotage des programmes de défense. Il en fut, par exemple, de même avec les programmes Rafale (330->225 unités), FLF (8->5 unités), SNA Rubis (8->6 unités) ou encore Leclerc (1500 -> 650-> 406 chars), tous ayant vu de part ces arbitrages les couts unitaires de chacun des materiels augmenter de 30% à parfois plus de 100%. Certes, ceux-ci s’inscrivaient dans une période particulière liée à la fin de la guerre froide, mais de tels arbitrages n’eurent pas tous eut lieu dans ce contexte (Rafale, FREMM..), et cette méthode de pilotage reste aujourd’hui lourdement implantée dans les organes politiques du pays. En outre, l’impact sur les couts unitaires entrava lourdement les chances de ces materiels lors des compétitions à l’exportation.

Une dépendance marquée aux exportations

Or, les exportations, si elles constituent un point fort économique de l’activité industrielle de défense en France, représentent également une de ses plus grandes faiblesses. En effet, aujourd’hui, les 40% de chiffre d’affaire que constituent en moyenne les exportations d’équipements de défense chaque année pour la France, sont indispensables au maintien du format global de cette industrie. En d’autres termes, sans les exportations à ce niveau, l’industrie de défense française aurait toutes les peines du monde à maintenir une offre de services et d’équipements globales. Mais comme nous avons pu le constater cette année, entre le basculement Suisse en faveur du F-35A et du Patriot alors que tous annonçaient le Rafale et le Mamba français vainqueurs, ou l’annulation unilatérale du contrat de sous-marins australiens, le marché des exportations est particulièrement versatile, et cette dépendance à l’exportation peut également représenter un danger réel quant à la pérennité de cette industrie. On a pu, ainsi, constater ces dernières années des basculements profonds d’un coté comme de l’autre de clients stratégiques pour la France, comme l’Arabie saoudite, les Emirats Arabes Unis ou encore l’Egypte.

IMG 3537 2 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Si le Rafale avait été commandé à 330 exemplaire comme initialement prévu, son prix unitaire serait 25% moins élevé, le mettant au niveau d’un F-16 ou d’un Gripen. Quels auraient été les conséquences sur les compétitions internationales auxquels l’avion français a participé, notamment face au F-35 ?

En outre, cette dépendance sera de plus en plus mise à mal par la posture de plus en plus agressive des Etats-Unis dans ce domaine, mais également par l’arrivée de nouveaux acteurs sur ce marché, comme c’est le cas de la Chine, mais également de la Corée du Sud, du Japon, de l’Inde, d’Israël ou de la Turquie, ainsi qu’avec le retour en puissance de la Russie. A cela, il convient d’ajouter qu’au sein de l’Union européenne, la compétition est elle aussi féroce, avec des acteurs comme l’Italie, l’Espagne aux cotés des traditionnels allemands et britanniques, entrainant parfois de sévères désillusions comme dans le cas des frégates FREMM en Indonésie et au Maroc. En d’autres termes, même si le marché mondial va croissant, le nombre d’acteurs déterminés à s’imposer sur ces marchés, avec l’appui politique mais également financier de leurs états de tutelle, rendra les compétitions de plus en plus difficiles dans les années à venir, surtout si la France ne parvient pas à s’imposer avec ses forces traditionnelles, à savoir des équipements innovants, performants et bons marchés.

Des impasses de plus en plus significatives

Mais la plus grande faiblesse qui menace aujourd’hui l’industrie de défense française, n’est autre que la résignation des politiques, mais également d’une partie des industriels eux-mêmes, à ne plus pouvoir rester un acteur global capable de produire l’ensemble des équipements de défense indispensables à une armée moderne. Le phénomène n’est en rien récent, puisque déjà dans les années 90, la filière des armes et munitions de petit calibre étaient moribonde en France, et l’Etat arbitra en faveur de solutions européennes importées. C’est ainsi que le fameux Famas français, premier fusil d’assaut compact au monde, fut abandonné au profit du très performant, mais très classique HK-416 allemand il y a quelques années, alors que les forces spéciales se tournaient, pour leur part, vers l’excellent SCAR du belge FN Herstal (voilà, ça c’est dit, le SCAR est le meilleur FA du moment!). Plus tard, ce fut le cas des corps de bombe de ne plus être produits en France, ceci provoquant à plusieurs reprises des pénuries opérationnelles sévères en opération exterieures.

A400M piste sommaire Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Si certains programmes européens se justifient, comme l’A400M, ils ne doivent pas représenter l’unique alternative des dirigeants politiques, sur la base de paradigmes économiques erronés.

Avec l’arrivée des grands programmes européens, comme A400M, NH90, et plus récemment SCAF et MGCS, ce phénomène ira nécessairement croissant, et bien au delà de capacités qui, au demeurant, pourraient être rapidement re-acquises par l’industrie de défense nationale. En effet, pour satisfaire au partage industriel inhérent à ces programmes en coopération européenne, des pans entiers de savoir-faire industriels nationaux vont être handicapés, parfois même irrémédiablement perdus, et ce d’autant qu’il n’existe aucun programme alternatif vers lesquels ces industriels pourraient se tourner pour maintenir leurs compétences. Ce phénomène est particulièrement sensible dans le domaine de l’électronique embarqué à bord des avions de combat, domaine de prédilection de Thales, la plus grande entreprise de défense nationale, et pourtant la plus handicapée par les arbitrages dans le domaine du SCAF. Il en va de même dans d’autres domaines, comme celui de la motorisation des blindés mais aussi des navires de guerre confiée de préférence à l’allemand MTU. Au final, il est fort probable qu’à échéance 10 ou 20 ans, si ces programmes européens venaient à perdurer dans leur forme actuel, l’industrie de défense française aura perdu cette capacité globale qui est aujourd’hui au coeur de l’autonomie stratégique du pays, et sera dépendante, y compris pour ses programmes futurs, de capacités industrielles et technologiques détenues par des entreprises allemandes, italiennes ou espagnoles, et donc du bon vouloir des dirigeants de chacun de ces pays, tant pour l’exportation que pour des missions critiques et stratégiques, comme la dissuasion.

Une mauvaise perception politique des couts

L’ensemble de ces arbitrages défavorables au bon developpement de l’industrie de défense, sont liés à une conviction, et une seule, par ailleurs largement partagée par l’ensemble de la classe politique nationale : « l’investissement de défense a un cout très élevé qu’il convient de minimiser au mieux pour être budgétairement soutenable« . En d’autres termes, moins l’état dépense dans l’industrie de défense, à promesse de performances égales (ce qui n’est jamais le cas), mieux c’est pour le budget de l’Etat, et les déficits publics. Cette approche amène même de nombreux dirigeants politiques à considérer que l’investissement de défense est un facteur d’endettement de l’Etat, et que donc limiter ces investissements, par exemple en rejoignant des programmes européens permettant de partager les couts, permettrait de préserver les finances publiques, et donc de ne pas creuser la dette de l’Etat.

Atelier Rafale 1 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
L’efficacité budgétaire et sociale de l’investissement de l’Etat dans l’industrie de défense nationale est particulièrement élevée, avec un retour budgétaire supérieur à 100% et 25 emplois par million d’euro investis.

Ce paradigme ayant souvent valeur de dogme budgétaire absolu, a été au coeur de tous les arbitrages négatifs ces dernières années. Il est pourtant faux ! En effet, dans une démonstration maintes fois entreprise dans les articles de Meta-Défense relatifs à la doctrine « Defense à Valorisation Positive », nous avons montré que pour chaque million d’euro investis par l’Etat dans cette industrie, 25 emplois étaient créés ou maintenus en France pendant une année, eux-mêmes générant 650 K€ de recettes fiscales et sociales (ces derniers s’imputant au budget de l’Etat par le biais des déficits sociaux compensés par l’Etat), mais également 355 K€ d’économies sociales, soit les couts supportés par l’Etat pour compenser ces 25 emplois si le million d’euro n’avait pas été investi. A cela s’ajoute, les recettes sociales et fiscales, ainsi que les économies sociales, liées aux exportation à hauteur de 40% de l’activité. Soit un retour budgétaire pour les caisses de l’état, par voie de recettes ou d’économies, de 1,05 m€, et même de 1,55 m€ si l’on prend en compte les exportations.

De fait, les arbitrages qui ont à ce point handicapé l’industrie de défense nationale, mais également les armées, et qui continuent de le faire aujourd’hui au travers des programmes européens, sont menés sur une perception erronée des réalités budgétaires qui entourent l’investissement dans l’industrie de défense. La prise en compte de cette démonstration permettrait, au contraire, d’équilibrer les investissements non seulement afin de répondre en temps, en heure, en qualité et quantité, aux besoins des armées françaises, mais pourraient également permettre, en tenant compte du surplus budgétaire généré par les exportations, de compenser les surcouts liés à une progression du format des armées elles-mêmes, de sorte à répondre aux enjeux sécuritaires présents et à venir. En outre, s’il n’y a pas de contre-indication pour mener des programmes en coopération européenne, il n’existe plus d’argument permettant de justifier la création de dépendance stratégique arbitraire avec nos voisins et alliés.

Conclusion

De nombreux autres aspects, forces comme faiblesses, auraient pu être traités dans cet article de synthèse, comme le ruissellement technologique lié aux investissements de R&D de défense, ou comme l’absence d’un super-champion en France capable de se porter au niveau d’un BAe sur la scène internationale, le manque de volonté des industriels français pour investir dans des infrastructures industrielles hors du pays, ou la captation systématique des marchés par les grandes entreprises ne laissant que peu de chance à un nouvel acteur innovant d’émerger (notamment dans le domaine cyber ou des drones). Mais ces sujets, bien que d’importance, apparaissent comme secondaires à la vue des thèmes abordés dans cette analyse.

Quoi qu’il en soit, il apparait aujourd’hui que l’industrie de défense française est à la croisée des chemins. Si elle a su préserver, même lors de la difficile période post-guerre froide marquée par l’illusion des bénéfices de la paix, ses capacités et ses savoir-faire, elle ne pourra plus y parvenir dans les années à venir, si la trajectoire des programmes en coopération est maintenue en l’état. Il existe plusieurs alternatives efficaces pour traiter ce risque, que ce soit en développant des programmes parallèles complémentaires comme dans le cas d’un char moyen complémentaire au MGCS, ou d’un remplaçant au mirage 2000 complémentaire du SCAF, ou en étendant les programmes eux-mêmes de sorte à les transformer en programme de programmes, à l’instar du programme NGAD américain. Mais de toute évidence, il semble déterminant qu’un dialogue constructif s’établisse entre industriels et autorités politiques, non pas dans un rapport hiérarchique ou clients-fournisseurs comme c’est le cas aujourd’hui, mais dans une volonté commune de préserver et d’employer au mieux cet outil industriel remarquable, au profit de la sécurité du pays, de son autonomie stratégique, de son rayonnement international comme de son économie.

Croiseur Type 055, LHD Type 075 : l’expansion effrénée de la flotte chinoise se poursuit

Depuis le black-out imposé par les autorités chinoises concernant la diffusion d’information relatives à l’Armée Populaire de Libération, et à l’industrie de défense chinoise, la collecte d’informations sur l’expansion de la flotte chinoise est devenue bien plus ardue dans le domaine civil. Dans le domaine naval, les informations collectées reposent essentiellement sur des clichés pris par des passionnés chinois lors de vol civil à proximité des grands chantiers navals du pays, sur les quelques clichés satellites qui atteignent le domaine public, et sur les rares annonces officielles publiées par la presse chinoise elle-même. C’est ainsi que l’on a appris aujourd’hui par un article du site lié au PCC Globaltimes.cn, que la troisième unité de la classe de porte-hélicoptères d’assaut Type 075, avait quitté cette semaine le chantier naval de Hudong Zhonghua pour effectuer ses premiers essais à la mer, respectant ainsi le rythme suivi depuis trois ans avec la première unité, chaque navire suivant le précédant de quelques 300 jours dans son évolution.

Les porte-hélicoptères d’assaut, souvent appelés LHD pour Landing Helicopter Dock dans la taxonomie de l’US Navy, de Type 075 sont les plus imposants navires militaires en construction dans les chantiers navals chinois, exception faite du porte-avions Type 003 qui, selon le derniers clichés, seraient en cours de recevoir ses catapultes électromagnétiques, et devrait être lancé dans les quelques mois qui viennent. Long de 237 mètres, les Type 075 affichent un tonnage en charge estimé à 40.000 tonnes, l’équivalent des navires américains d’assaut des classes Wasp et America, et presque deux fois plus imposants que les Mistral français. Destinés à conférer aux forces d’assaut amphibie chinoises des capacités similaires à celles des Groupements d’Assaut Amphibie du Corps des US Marines, chaque navire peut mettre en oeuvre jusqu’à 30 hélicoptères, et projeter un bataillon de Marines chinois complet avec son équipement à l’aide de ses hélicoptères embarqués, ainsi que de ses barges et aéroglisseurs. Au total, la Marine chinoise prévoit de disposer de 8 de ces navires, qui viendront renforcer les 8 navires d’assaut LHD Type 071 déjà en service, et qui seront, selon toute probabilité, épaulés par autant de porte-drones d’assaut Type 076 dérivés des Type 075 eux-mêmes.

Type 055 Anshan Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les croiseurs Type 055 de la classe Renhai figurent parmi les plus puissantes unités de surface combattantes modernes, avec 112 silos verticaux et un radar AESA plaque de dernière génération

Dans le même temps, on apprenait qu’un 4ème destroyer lourd Type 055, désigné par l’OTAN comme croiseur de la classe Renhai, avait été admis au service, et avait reçu le nom de baptêmes Anshan, alors même que la 5ème unité de la classe, le croiseur Yan’an, doit lui aussi entrer en service avant la fin de l’année 2021, amenant à 4 le nombre de navires de cette classe à être entrer en service au cours de la seule année 2021, après l’arrivée du Lhasa en mars et du Dalian en Avril. Deux autres navires sont attendus en 2022, alors que la dernière unité de la classe entrera en service en 2023. Ces navires de 180 mètres de long et de 13.000 tonnes en charge, sont l’équivalent des plus grandes unités de surface combattantes occidentales, comme les destroyers américains Arleigh Burke Flight III ou les Sejong the Great sud-coréens. Très lourdement armés, ils emportent 112 silos verticaux pour différents types de missiles anti-navires, anti-aériens et anti-sous-marins, ainsi que de puissants systèmes de détection, en faisant des adversaires redoutables et redoutés des marines occidentales y compris de l’US Navy. Il est probable qu’une nouvelle classe de croiseur sera prochainement lancée, une fois la construction des 8 unités Type 055 terminée.

La production des unités de plus petit tonnage est, quant à elle, plus difficile à suivre. Selon les observations faites dans les chantiers navals chinois, au moins 4 voire 5 nouveaux destroyers anti-aériens Type 052DL ont eux aussi été lancés cette année, ainsi qu’au moins 3 frégates Type 54A. Une nouvelle classe de sous-marins, désignée pour l’heure sous la référence Type 039C, et arborant un kiosque furtif comparable à celui des nouveaux A26 suédois, a également été observé, laissant supposer qu’au moins une unité de ce type est à l’essai, si pas davantage. De toute évidence, les chantiers navals chinois continuent de produire à un rythme soutenu des unités navales majeures, avec en moyenne 7 croiseurs et destroyers, au moins 3 frégates, 2 sous-marins et 1 navire majeur (LHD ou PA) par an, soit un rythme supérieur à celui de l’industrie navale US et de ses alliés de la zone Pacifique, hormis dans le domaine des sous-marins.

Type 052DL Zibo Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les destroyers anti-aériens Type 052DL ont un hangar allongé pour accueillir les nouveaux hélicoptères de lutte anti-sous-marine Z-20 et un radar basse fréquence (au centre) pour détecter les avions furtifs

F-35 suisses : Prix en hausse et compensations industrielles en baisse

A peine 5 mois après la sélection du F-35A de Lockheed-Martin pour remplacer les F-5 et F/A 18 des forces aériennes helvétiques, les annonces et les désillusions s’accumulent pour les industriels, mais également pour les contribuables suisses, qui vont devoir largement plus mettre la main au porte-feuille qu’annoncé initialement pour acquérir les 36 avions de combat américains. En effet, à l’occasion de la publication des données contractuelles proposées par les Etats-Unis à Berne dans le cadre de ce contrat, les premiers dérapages sont d’ores et déjà apparents, et vont très probablement lourdement peser dans la votation citoyenne qui se dessine, ainsi que sur l’enquête parlementaire diligentée il y a quelques jours.

En premier lieu, il est apparu que l’enveloppe budgétaire consacrée à l’acquisition des 36 appareils avait connu une hausse sensible entre juin et novembre, de prés de 20%, amenant le prix demandé par Lockheed-Martin à 6 milliards de francs suisses, officiellement attribuées aux perspectives d’inflation d’ici 2031. Etonnement, cependant, le contrat portant sur l’acquisition des batteries de missiles anti-aériens Patriot, lui, est resté identique à 1,9 Md FS. De toute évidence, le risque inflationniste est très sectoriel outre-atlantique. En outre, une clause contractuelle assassine est apparue dans le contrat proposé par Washington, selon lequel les surcouts d’exploitation éventuels, qui devaient initialement être pris en charge par le vendeur américain, ne le seront que jusqu’en 2031. Sachant que la flotte acquise par Berne est sensée être en service durant les 50 prochaines années, et que la livraison des appareils ne débutera qu’à partir de 2026, le risque budgétaire est minime pour les Etats-Unis, et le piège évident pour les suisses eux-mêmes.

Atterrissage premier F35 norvegien Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Pour la Norvège, les prix annoncés par Lockheed-Martin lors des récentes négociations commerciales en Suisse ou en Belgique ne représentent pas la réalité des couts auxquelles elle est elle-même confrontée

Outre le milliard de FS supplémentaires que couteront les 36 F-35A, les industriels suisses ont eu la mauvaise surprise de constater que les compensations industrielles liées au contrat, qui devaient initialement représenter 3,6 Md FS dont 1,1 Md FS en Suisse Romande, s’était vu ramené à seulement 2,9 Md FS. Alors qu’elles devaient, contractuellement, représenter 60% de la valeur du contrat final, elles ne représentent désormais plus que 48% de ce montant, sans tenir compte des couts de maintenance, soit un manque à gagner de 700 millions de FS. Non seulement celui-ci entrainera un déficit social en matière d’emploi et d’activité industrielle pour l’économie helvétique, mais avec un taux de prélèvement moyen de 43%, le manque à gagner pour les finances publiques helvétiques s’élèvera quant à lui à 300 millions de FS, auxquels devront s’ajouter les 1 Md FS supplémentaires du contrat. Rapportée aux quelques 2,2 millions de foyers fiscaux helvétiques, cette hausse représentera un surcout de presque 600 FS par foyer. Mais celle-ci ne concerne, malheureusement, que le volet acquisition, et d’autres mauvaises surprises attendent les contribuables suisses dans les mois à venir.

Ces annonces mettent également à mal la crédibilité des évaluations menées par Armasuisse dans la compétition qui vit le succès du F-35. En effet, selon le groupe chargé de cette sélection, le choix du F-35 permettait à la Suisse d’économiser 2 Md FS sur les 30 années de mise en service des appareils, en comparaison du second mieux disant. Or, en 5 mois de temps, ce sont déjà 1,3 Md FS qui se sont évaporés, et ce sur le seul dossier des acquisitions. Sachant que Lockheed et Washington ne compenseront plus les surcouts d’exploitation au delà de 2031, une fois la flotte intégralement livrées et opérationnelles, il ne fait aucun doute, désormais, que le volet budgétaire du contrat a été sciemment manipulé par les négociateurs américains. En outre, il fait peu de doute que ceci n’ait pu se faire sans la complicité, au mieux passive, des autorités suisses, de sorte à presenter des chiffres accréditant le choix recherché.

Patrouille de F18 des forces aeriennes helvetiques dans les montagnes des Alpes Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le remplacement des F/A 18 et F-5 des forces aériennes helvétiques pourrait être à nouveau reporté si la votation prévue venait à casser le contrat passé avec Lockheed-Martin

On comprend, dès lors, les avis exprimés dans ce dossier, selon lesquels es autorités suisses comme Armasuisse n’auraient pas tant menti aux autres participants de la compétition, qu’ils auraient sciemment mentis aux suisses eux-mêmes. Et les éléments qui aujourd’hui ressortent, à peine quelques mois après l’arbitrage, accréditent clairement cette thèse. Une étude objective publiée sur la base des valeurs constatées par la Norvège sur sa flotte de F-35A, estime d’ailleurs que les chiffres annoncés dans le contrat Suisse sont « fantaisistes », et surtout que le contrat lui-même n’est pas du tout révélateur des couts réels d’acquisition comme de maintenance des appareils. En particulier, le package de services, munitions et pièces détachées nécessaires à la mise en oeuvre opérationnelle des appareils aurait été largement sous-évalué en Suisse, mais aussi en Belgique et aux EAU, de sorte à presenter un prix « facial public » bien plus attractif. Cette même analyse précise d’ailleurs que le prix de possession du F-35A serait de l’ordre de 20 m$ par an (soit le double de celui d’un Rafale F4 ndlr), et que le prix à l’heure de vol, annoncé à 25.000 $ par Lockheed-Martin, serait en réalité au moins deux fois supérieurs à cela selon les autorités norvégiennes elles-mêmes.

Au final, il semble désormais plus que probable que le choix en faveur du F-35A ait été biaisé à partir de valeurs numériques « non-honnêtes » fournies par les Etats-Unis, et surtout acceptées comme telles par les autorités suisses, de toute évidence après la rencontre entre Joe Biden et son homologue suisse Guy Parmelin qui apparait comme le point tournant de cette affaire en devenir. Les annonces de ce type, qui ne manqueront pas de se multiplier dans les mois à venir, génèreront sans le moindre doute une grande défiance des suisses eux-mêmes envers ce contrat, avec le risque bien réel de voir la votation en préparation casser l’accord, comme elle le fit en 2014 au sujet des Gripen suédois, sur des bases étonnamment proches. Malheureusement pour les forces aériennes helvétiques, il semble probable que le remplacement de leurs avions de combat soit une fois encore appelé à être reporté, alors même que les besoins ne cessent de croitre. D’ailleurs, on notera que les autorités suisses semblent désormais avoir pris comme argument défensif l’absence de « Plan B » pour amener les suisses eux-mêmes à avaler la pilule.

Les forces aériennes chinoises montrent des capacités étendues autours de Taïwan

Les incursions des forces aériennes chinoises dans la zone d’identification aérienne de Taïwan sont quotidiennes depuis plusieurs mois. Mais depuis la démonstration de force du 10 avril dernier avec 52 appareils en vol simultanément, ces missions étaient jusqu’à présent limitées en volume comme en ambition. La mission du 28 novembre fut, quant à elle, notable à plus d’un titre. En effet, non seulement impliqua-t-elle 27 appareils simultanément, soit le plus grand nombre d’appareils depuis avril dernier, mais pour la première fois, un des nouveaux avions ravitailleurs Y-20U des forces aériennes chinoises accompagna les cinq bombardiers H-6 et son escorte de quatre chasseurs J-10C et de deux chasseurs lourds J-16 bien au delà du point tournant habituel pour les chasseurs chinois au sud de l’ile, le vol s’étant poursuivi sur 200 nautiques le long de la cote occidentale de l’ile avant que les appareils ne rebroussent chemin.

Par cette mission, les forces aériennes chinoises ont montré qu’elles avaient désormais la capacité d’agir au delà du premier cercle d’iles entourant la Mer de Chine, et donc qu’elles étaient en mesure non seulement de frapper Taïwan sous différents vecteurs d’approche, mais également de s’opposer au soutien qui pourrait venir des porte-avions américains ou des appareils basés au Japon, et ce bien en amont de l’ile elle-même. En d’autres termes, Pékin voulait montrer qu’il avait désormais la capacité théorique de mettre en place un blocus aérien capable d’épauler un éventuel blocus naval pour prévenir toute action des Etats-Unis pour soutenir Taïwan.

Avion J10C Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le chasseur monomoteur J-10C dispose dispose d’une perche de ravitaillement lui permettant d’étendre considérablement son autonomie de vol lorsqu’accompagné d’un avion ravitailleur

Bien évidemment, cette manoeuvre est aujourd’hui avant tout symbolique. En effet, Les forces aériennes chinoises ne disposent à ce jour que de quelques Y-20U de ravitaillement en vol, une flotte insuffisante pour soutenir un blocus aérien. En outre, sur les quelques 2000 avions de combat alignés par Pékin, seule une partie des quelques 450 J-10 B/C et la probable centaine de J-16 actuellement en service sont équipés de perche de ravitaillement. Par ailleurs, au delà des capacités des appareils eux-mêmes, il convient de qualifier les pilotes eux-mêmes à cette délicate manoeuvre, et ce d’autant que cette capacité était jusque là relativement confidentielle au sein des forces aériennes chinoises. Pour autant, elle montre non seulement l’ambition qui est la sienne à court et moyen terme, mais également le dynamisme avec lequel elle intègre ces nouvelles capacités dans sa panoplie opérationnelle.

L’objectif d’une telle manoeuvre est également politique. En effet, Pékin espère toujours que Taïpeï se rende « sans combattre », et rejoigne le giron chinois sans qu’une action militaire ne soit nécessaire. Comme il n’est plus question, aujourd’hui, de séduction potentielle comme ce fut le cas pour Hong-Kong, la seule alternative pour les autorités chinoises, repose sur l’anéantissement du moral des taïwanais eux-mêmes, celui-ci étant intimement lié, selon Pékin, aux promesses de soutien venues des Etats-Unis. En laissant supposer que l’APL peut tenir à distance l’US Air Force et l’US Navy, les autorités chinoises espèrent donc que la population taïwanaise perdra sa volonté de résister, et se soumettra docilement à l’autorité de Pékin. La tache sera toutefois bien difficile pour Pékin, puisqu’un récent sondage sur l’ile a montré que 85% des taïwanais étaient en faveur du « Status quo », c’est à dire d’une ile en autogestion démocratique et défait du controle continental.

F 16 Taiwan Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
La Chasse taïwanaise a décollé en urgence pour suivre la formation chinoise le long de son périple étendu

L’Allemagne est-elle prête à tout pour préserver le gaz russe ?

Ces dernières semaines, les tentions entre Moscou et Kiev ont à nouveau franchi non pas un, mais plusieurs paliers. Non seulement les armées russes continuent-elles de masser des troupes considérables aux frontières de l’Ukraine, face au Donbass ou en Crimée, mais la propagande intérieure russe est devenue très active pour presenter à l’opinion publique russe l’Ukraine, mais aussi l’OTAN, comme les agresseurs voire les instigateurs des tensions actuelles. En outre, Moscou a désormais instrumentalisé la Biélorussie du dictateur Lukashenko, non seulement en exploitant les vagues de migrants venus d’Irak et de Syrie contre la Pologne et les Etats Baltes, mais également en faisant croitre artificiellement les tensions entre Minsk et Kiev, et en entamant des manoeuvres militaires conjointes au plus prés de la frontière nord de l’Ukraine, laissant à ce titre supposer une présence militaire russe importante dans le pays. Enfin, les autorités russes ont déplacé le curseur de leurs propres lignes rouges concernant l’Ukraine, estimant désormais que le simple transfert d’armement à Kiev constituerait un acte d’agression intolérable contre la Russie.

Si personne ne peut à proprement parler garantir que Moscou déclenchera ou pas une offensive contre l’Ukraine dans les semaines à venir, il est désormais acquis que tout est mis en place, coté russe, pour que cette offensive puisse avoir lieu à court terme. Dans ces conditions, en dehors de se préparer militairement pour encaisser le choc de l’une des plus puissantes force armée de la planète, Kiev ne peut, désormais, guère plus que compter sur le soutien de ses partenaires occidentaux et européens pour dissuader Moscou d’entamer une telle action. Une chose est désormais certaine, ce soutien ne viendra pas de l’Allemagne ! C’est en effet dans cette situation plus que tendue et dramatique pour des millions d’européens ukrainiens, que Berlin a décidé de prendre les devants, en envoyant à Washington plusieurs émissaires afin de convaincre le Congrès Américain de ne pas intégrer le nouveau Gazoduc NordStream 2 dans la liste des sanctions américaines contre Moscou, si ces derniers venaient à lancer l’offensive contre l’Ukraine. Il semble d’ailleurs que telle soit la seule préoccupation des autorités allemandes ces derniers mois, puisque cette démarche a été entamée dès l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, précisément pour exclure NordStream 2 de toute mesure de rétorsion américaines contre la Russie.

CongresUS Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
La plus grande préoccupation dans la crise ukrainienne pour Berlin repose sur les possibles sanctions imposées par le Congrès US contre le gazoduc NordStream 2

Les émissaires allemands sont arrivés à Washington avec une liste de sanctions que Berlin prendrait en cas d’attaque russe sur l’Ukraine, celles-ci se basant en premier lieu sur une campagne publique pour dénoncer les agissements russes. Il est vrai qu’en dépit des tensions actuelles, des risques de contagion et des conséquences d’une telle crise en Europe, les médias européens sont à ce jour particulièrement discrets sur le sujet. Nul doute que pour une majorité d’européens, la crise ukrainienne, si elle venait à s’étendre, serait une surprise, tant le black-out médiatique est puissant sur ce sujet. En outre, Berlin promet au Congrès américain qu’il prendrait de possibles mesures concernant les importations énergétiques allemandes venues de Russie, mais en excluant du spectre Nord Stream 2. Enfin, Berlin promet de participer activement au processus européen visant à mettre en oeuvre de nouvelles sanctions contre la Russie le cas échéant. Nul doute qu’après de telles menaces, la determination de Moscou à agir s’en trouve absolument inchangée, voire même encouragée, puisque la plus grande économie européenne, et le pays le plus influent au sein des institutions européennes, annonce d’ores et déjà qu’il n’agira ni économiquement ni militairement contre la Russie si celle-ci venait à attaquer l’Ukraine.

Malheureusement pour Kiev, et pour les ukrainiens qui avaient lancé le soulèvement de Maidan précisément pour rejoindre l’Union européenne, et non l’Union Douanière russe, les positions allemandes sont loins d’être isolées en Europe. L’immense majorité des pays européens arborent en effet une posture très discrète sur le sujet, quant ils ne l’ignore par totalement. En dehors de pays comme la Pologne et les Pays Baltes, qui partagent avec Kiev une certaine communion de destin, le silence des chancelleries européennes est en effet assourdissant de couardise, tous attendant que le La soit donné par Washington pour prendre position. Dans les faits, seuls les britanniques ont annoncé l’envoi symbolique de troupes pour aider à sécuriser la frontière nord face à la Biélorussie en Ukraine. Quant au président français, s’il a en effet pris position pour que la France protège l’intégrité territoriale ukrainienne, cette déclaration a immédiatement été pondérée par le ministre des affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, pour prévenir Moscou de « graves conséquences » dans une telle hypothèse, visant de sa substance les déclarations du président français.

ukrainian Armed Forces Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Malgré une armée de 250.000 hommes, l’Ukraine n’a pas les capacités de s’opposer dans la durée à une offensive globale lancée par la Russie

De fait, si Berlin affiche clairement sa volonté de ne pas s’impliquer dans cette crise au delà des institutions européennes elles-mêmes, tout indique que cette posture sera suivie à l’identique par une majorité de capitales européennes, dans un esprit munichois qui n’a rien à envier à Daladier et Chamberlain. Il serait pourtant illusoire, comme le montre l’histoire récente, que de croire que si la Russie venait à s’emparer d’une partie du territoire ukrainien sans que les Européens ne réagissent avec force, cela suffira à assouvir les aspirations du chef du Kremlin. Cela n’avait pas suffit en 2008 en Georgie, pas plus que cela n’avait suffit en 2014 en Crimée. Et comme précédemment, cette reculade prévisible ne fera que conforter Vladimir Poutine, et l’ensemble des russes derrière lui, de la couardise des européens, et de leur incapacité à s’opposer à la force russe.

La seule inconnue dans cette crise, et la seule planche de salut pour Kiev, reste, pour l’heure, la posture qui sera celle des Etats-Unis, du Congrès et de Joe Biden. En effet, après l’épisode Afghan, c’est bien la crédibilité des Etats-Unis qui est en jeu ici sur la scène internationale, et ce d’autant que Joe Biden a lui même pris publiquement fait et cause pour Kiev depuis son élection. En d’autres termes, si Washington restait passif face à une intervention russe en Ukraine, comme ce fut le cas lors de l’annexion de la Crimée, une crise de confiance majeure serait à attendre de la part des alliés des Etats-Unis, notamment les plus menacés comme Taïwan, la Corée du Sud ou les Etats baltes. Et il fait peu de doute que ce point est aujourd’hui au coeur des préoccupations à la Maison Blanche comme au Congrès américain, bien davantage qu’il ne l’est dans les capitales européennes, pourtant autrement plus proches de leur voisin ukrainien.

biden Merkel Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Depuis l’élection de Joe Biden, Angela Merkel a répété les messages afin d’exclure Nord Stream 2 de tous les volets de sanction que pourraient mettre en oeuvre les Etats-Unis

Cette crise montre, enfin, la vacuité des ambitions d’Europe politique ou de défense. Par son action unilatérale pour préserver, coute que coute, le gazoduc Nordstream 2, Berlin montre clairement qu’il n’a nullement l’intention de sacrifier quoique ce soit à une vision géopolitique supérieure dépassant le cadre du bien être de ses citoyens et du bon fonctionnement de son économie. Dans ces conditions, comment peut-on espérer construire une coopération de défense efficace en Europe alors même que le plus important acteur du continent vise avant tout à préserver ses intérêts à court terme ? Non seulement l’Allemagne démontre-t-elle qu’elle n’a en aucun cas l’envergure et l’ambition requises pour diriger la géopolitique européenne, comme elle l’ambitionne tant, mais elle montre également que le pays n’a tout simplement d’autres intérêts que sa propre préservation. On comprend, dès lors, l’empressement germanique à se lover sous l’aile protectrice américaine, sans jamais assumer un rôle international qu’elle réclame pourtant au delà du rôle de donneur de leçon.

Une chose est certaine, la crise ukrainienne qui couve aujourd’hui, ainsi que sa conclusion, quelle qu’elle soit, marqueront grandement la dynamique mais également la crédibilité de la construction européenne à venir. Malheureusement, rien n’indique que les européens soient prêts, d’une manière ou d’une autre, à de quelconques sacrifices pour protéger l’Ukraine et les ukrainiens, en dehors de déclarations larmoyantes et d’indignations feintes pour tenter de donner le change à une opinion publique tout aussi passive et résignée. Là encore, cette situation n’est pas sans rappeler celle qui prévalait à la fin des années 30 en France comme en Grande-Bretagne.

SCAF, MGCS… Les nouveaux materiels militaires européens vont-ils arriver trop tard ?

Dans une interview donnée au site lesecho.fr, Franck Haun, le pdg du groupe KNDS qui rassemble l’allemand Krauss Maffei Wegman et le français Nexter, a appelé les gouvernements français et allemands à accélérer le programme Main Ground Combat System ou MGCS, qui selon lui, ne devrait au rythme actuel des choses, ne pas parvenir à une livraison avant 2040 et même 2045. Si les considérations de Franck Haun sont avant tout industrielles, appelant notamment à élargir le programme sur la scène européenne, il n’en demeure pas moins vrai qu’une analyse objective des calendriers des programmes en cours, MGCS comme SCAF, le programme d’avion de combat de nouvelle génération qui rassemble la France, l’Allemagne et l’Espagne, et qui lui aussi ne prévoit pas une entrée opérationnelle avant 2040, met en évidence qu’ils ne correspondent plus aux besoins à venir des armées, ni au rythme industriel et technologique mondial fortement boulversé depuis quelques années par la Russie et la Chine.

En effet, alors même que les tensions internationales ne cessent de croitre, avec des échéances de conflit potentiel à moyen et même court terme, Moscou comme Pékin ont profondément fait évoluer le tempo mais également la finalité même des programmes militaires en cours. Ainsi, Pour Moscou, l’avion de combat Su-57, le drone de combat lourd S70 Ohnotnik B ou encore la nouvelle génération de véhicules blindés rassemblant les blindés lourds chenillés de la famille Armata, les blindés moyens chenillés de la famille Kurganet, et les blindés moyens sur roues de la famille Bumerang, tous sont conçus pour entrer en service dans les quelques années à venir, alors même que les travaux pour une nouvelle génération d’avions de combat comme de blindés à horizon 2040 sont déjà en cours. Il en va de même en Chine, avec les avions de combat J-20 et J-35 de 5ème génération, et les blindés en cours de dotation comme le Type-99A ou le Type-15, eux-aussi devant être remplacés par une nouvelle génération d’équipements à horizon 2040.

T14 Armata inside 1 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le char de combat T-14 Armata doit entrer en service des 2023 au sein des forces armées russes, et offre des capacités au moins équivalentes, et souvent sensiblement supérieures, à celles des meilleurs chars occidentaux en service

Or, ni les avions de combat Rafale et Typhoon, ni les chars lourds Leclerc ou Leopard 2, quel que soit leur degré planifié de modernisation, ne sont ou ne seront capables de prendre l’ascendant technologique sur les Su-57, J-35 et autres Armata, ce qui laissera de manière parfaitement prévisible les armées européennes en situation de sévère infériorité opérationnelle au cours des deux décennies à venir, surclassés numériquement et sans avantage technologique notable, face aux forces russes, chinoises, mais également celles qu’ils pourraient équiper sous la forme de proxy. Dans ces conditions, la question posée en titre, à savoir si les programmes MGCS et SCAF, mais également l’ensemble des programmes de défense européens, arriveront trop tard, semble trouver une réponse évidente.

Mais les implications de ce retard risquent fort d’aller bien au delà d’une période de vulnérabilité d’une dizaine ou d’une quinzaine d’années. En effet, Pékin, Moscou mais également Washington, semblent avoir intégré le changement profond de tempo technologique des équipements de défense, dans une nouvelle forme de Guerre Froide qui n’est, de toute évidence, pas encore assimilée par les dirigeants européens. En effet, les programmes actuels dans ces pays ont tous des objectifs à relativement courts termes, tout en anticipant une nouvelle génération de materiels à moyen terme. Cela implique que la durée de vie générationelle de ces nouveaux équipements est passée, conceptuellement, des 30 à 40 années qui était la norme durant la période post-guerre froide, à une durée de 15 à 20 ans, soit la même que celle qui prévalait à la fin de guerre froide.

Rafale Alpes Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le Rafale a été conçu pour prendre l’ascendant sur les appareils de la famille des Flanker, mais il pourra au mieux faire jeu égal avec le Su-57 et les nouveaux appareils chinois

Ce nouveau tempo implique que sur une durée de 40 années, soit la durée de vie opérationnelle envisagée (à minima) pour les programmes MGCS et SCAF au delà des 20 années de conception, russes, chinois et américains auront, quant à eux, développés deux voire trois générations d’équipements, offrant une bien meilleure adaptabilité pour intégrer les nouvelles technologies mais également les nouveaux besoins opérationnels qui auront émergé des engagements et des conflits. Ces bouleversements influencent déjà le dimensionnement mais également la méthodologie industrielle en cours dans ces trois pays, alors même que les pays européens restent désespérément accrochés à une conception héritée des 30 dernières années des programmes, avec une vision basée sur le remplacement industriel des équipements, et non sur les évolutions des technologies et doctrines militaires dans le monde.

Demonstration du système de cloaking Salamandre de Nexter publié dans le cadre du FIS2021

Il ne s’agit, pour les européens, en rien d’un défaut de compétences technologiques. Les dernières journées de l’Innovation Défense organisée par le Ministère des Armées et l’Agence d’innovation Défense ont ainsi montré que les industriels français disposaient déjà de technologies très avancées, susceptibles de conférer à de nouveaux équipements nationaux des capacités opérationnelles remarquables voire décisives sur le champs de bataille, notamment pour reprendre ‘l’ascendant technologique sur leurs adversaires potentiels. C’est le cas notamment du système de cloaking (dissimulation optique et infra-rouge) SALAMANDRE présenté par Nexter, capable d’effacer un blindé du champs visuel et Electro-optique, du canon ASCALON de 140mm proposé par ce même Nexter, ou du programme de canon électrique en cours d’étude à l’ISL. En piochant plus avant, d’autres systèmes comme la technologie Shark de protection active des blindées, développées en avance de phase dès 2008 par Thales, ou le programme NEURON de Dassault Aviation, constituent autant de bases technologiques susceptibles d’apporter des réponses immédiates ou à court terme, pour developper les capacités indispensables pour amener les Armées françaises au niveau opérationnel requis en 2030.

La drone de combat Neuron lors dun vol dessais avec un Rafale Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le programme Neuron a permis a Dassault Aviation d’accumuler un important savoir-faire dans le domaine des drones de combat furtif, savoir-faire non exploité à ce jour pour répondre aux besoins des armées à court et moyen terme

De toute évidence, donc, il est désormais aussi indispensable qu’urgent de revoir les calendriers, mais également les ambitions et la philosophie industrielle et technologique sous-jacente des programmes en cours en Europe, et en particulier en France. Faute de quoi, non seulement les armées françaises et européennes seront irrémédiablement condamnées au déclassement, et ce à court terme dans un relais inférieur à 10 ans, mais l’industrie de défense du vieux continent sera elle aussi condamnée à voir ses parts de marché se réduire, et donc à moyen terme, à péricliter, creusant de fait la tombe de toutes les ambitions d’autonomie stratégique, qu’elles soient nationales ou européennes. Et de prendre conscience, et d’admettre au plus haut niveau des Etats, que le pilotage des programmes de défense aujourd’hui ne doit plus se baser sur des considérations industrielles de charge, ni sur des aspects d’optimisation de parc ou de flotte des materiels des armées, mais bel et bien sur le tempo technologique donné par les 3 super puissances mondiales, dont les Européens s’éloignent de plus en plus.

Le Super Hornet de Boeing quitte la compétition canadienne par la petite porte

Depuis une dizaine d’années, le F-35 Lighting II de Lockheed-Martin s’est imposé dans toutes les compétitions à laquelle il a participé. Si les conditions de ces victoires sont souvent soumises à discussion, il n’en demeure pas moins vrai que l’appareil américain, en dépit de ses faiblesses et de ses nombreux défauts, est toujours parvenu à convaincre les officiels en charge de choisir, pour leurs pays respectifs, l’appareil qui constituera le fer de lance de leur force aérienne pour les 50 années à venir. Le Canada ne fera probablement pas exception à la règle, puisqu’après le retrait de Dassault Aviation et de son Rafale, puis d’Airbus DS avec l’Eurofighter Typhoon, tous deux estimants que la compétition telle que présentée par Ottawa était biaisée en faveur des Etats-Unis, c’est au tour de Boeing et de son F/A 18 E/F Super Hornet de devoir quitter la compétition, cette fois sur décision canadienne.(une petite explication s’impose concernant le Super Hornet et la désignation F/A-18 E/F : F/A signifie Fighter/Attack pour avion de chasse et d’attaque, quant au E/F, ils désignent les versions monoplaces (E) et biplaces (F) de l’appareil).

En effet, selon des informations non officielles mais corroborées par plusieurs sources, Ottawa aurait jugé que l’offre de Boeing ne répondait pas aux exigences du cahier des charges et des exigences canadiennes, sans que l’on sache si le chasseur embarqué phare de l’US Navy n’avait pas répondu aux exigences technologiques ou opérationnelles, ou s’il s’agit d’un problème dans l’offre commerciale portée par Boeing. Il ne reste, dès lors, en compétition, que le super favori F-35A de Lockheed-Martin, et le super challenger JAS 39 Gripen E/F de Saab, (E pour monoplace, F pour biplace) dont bien peu estiment qu’il puisse avoir une quelconque chance face au chasseur américain, le Canada étant par nature intimement lié aux exigences opérationnelles et technologiques de son unique voisin pour la Défense aérienne de l’Amérique du Nord, et en particulier de la frontière arctique canadienne.

F35A USAF Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Une nouvelle fois, le F-35A fait office de grand favori dans la compétition pour le remplacement des CF-18 canadien

Pour autant, le fait que Boeing ait été remercié, et pas Saab, laisse supposer que le Gripen aurait satisfait aux exigences opérationnelles canadiennes, et que l’offre de Saab en aurait fait de même. Pour l’heure, aucun des constructeurs en lice n’a reçu de notification officielle venant d’Ottawa, et donc tous s’abstiennent de la moindre déclaration. Mais il s’agirait incontestablement d’un coup dur pour Boeing, et pour l’avenir de son Super Hornet, alors que l’US Navy souhaite cesser les acquisitions dès 2023, et que les contrats exports possibles, en Finlande, en Inde, en Espagne ou en Allemagne, sont tous menacés par la concurrence du F-35 ou du Rafale M dans le cas de l’Inde. Il est vrai que, d’une certaine manière, Boeing trouve ici la monnaie de sa pièce, après avoir mené des actions de lobbying intense contre les avions de transport régionaux du constructeur canadien Bombardier aux Etats-Unis, et ce même si le dossier fut clos en faveur de Bombardier en 2018.

En revanche, le décision désormais probable d’Ottawa en faveur du F-35, amenant le pays à rejoindre les quelques les 13 pays dont 8 membres de l’OTAN déjà client de l’appareil, va incontestablement peser sur les arbitrages qui pourront être menés en Finlande et en Allemagne au sujet de la possible acquisition de Super Hornet, ou de tout autre modèle d’appareils, et ce d’autant que plusieurs autres, comme l’Espagne et la Grèce, semblent eux aussi favorables à ce choix. Dès lors, une pression supplémentaire s’imposera lors d’éventuelles compétitions ultérieures, l’avion de Lockheed s’imposant comme un standard de fait du camps occidental, au coeur même de l’interopérabilité des forces, avec les armées américaines mais également entre forces alliées elles-mêmes.

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Malgré ses qualités indéniables et son prix attractif, le JAS 39 Gripen E de Saab n’a que peu de chances de s’imposer au Canada face au F-35 de Lockheed-Martin et aux pressions de Washington

Concomitamment, cette standardisation « de fait » risque fort de simplifier la tache des adversaires potentiels du camp occidental. En effet, en sachant que l’essentiel de la force aérienne adverse se composera d’un unique modèle d’appareil, il sera possible d’optimiser ses propres défenses pour y faire face. C’est d’ailleurs, au demeurant, ce qui est actuellement à l’oeuvre en Russie et en Chine, avec l’arrivée aussi rapide que massive de radars basse fréquence conçus pour détecter les appareils furtifs comme le F-35, au coeur de la défense anti-aérienne russe ou à bord des destroyers chinois. En outre, eu égard à la vulnérabilité des systèmes modernes, et en particulier du F-35, aux attaques cyber, l’uniformisation des forces, par ailleurs interconnectées au travers du système de maintenance ALIS et de son remplaçant ODIN, créé un appel d’air important pour tenter de neutraliser, sans même avoir à la combattre, une part importante de la force aérienne occidentale.

En d’autres termes, ce qui est présenté et perçu comme un atout en matière d’engagement coopératif et de maintenance, la standardisation des forces aériennes de chasse occidentale, peut s’avérer, à relativement court terme, un handicap plus que sérieux face à des adversaires déterminés et disposants d’importants moyens pour s’y adapter, comme la Russie ou la Chine. Le sujet est d’autant plus critique que d’ici 4 ans, au rythme des livraisons et des retraits de flotte planifiés actuels, le F-35 sera l’avion de combat le plus représenté au sein des forces aériennes occidentales, dépassant le F-16, et que d’ici une dizaine d’années, il pourrait représenter entre 35 et 50% de l’ensemble des avions de combat occidentaux, selon que l’US Air Force respecte ou non son ambition de 1.745 appareils. Historiquement, jamais le camp occidental n’avait à ce point confié son avenir et sa securité à un unique appareil, y compris le F-16 ou le F-4 Phantom II, et donc à un unique constructeur.

CF 18 des forces aeriennes candiennes Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les CF-18 Hornet canadiens atteindront les 50 années de service en 2032 lorsque le dernier exemplaire sera retiré du service

Il est interessant à ce titre de constater que ni la Russie, qui produit actuellement 3 types d’avions de combat différents (Su34/35/57) et bientôt un quatrième (Su75), ni la Chine qui de son coté en produit 5 (J-10/15/16/20/35) et dispose probablement de deux autres modèles en préparation, n’ont fait le choix de s’en remettre à un unique modèle d’avion de combat, ni même à ce qu’un unique appareil représente plus de 35% de leur flotte, et que les Etats-unis eux-mêmes développent aujourd’hui au moins deux nouveaux appareils, le NGAD de l’US Air Force et le F/A-XX de l’US Navy, et prévoient de mettre en oeuvre au moins 5 appareils différents lors de la décennie à venir (F35-15EX-NGAD-FAXX-F16V ou NGAD2). On comprend dès lors l’importance cruciale que peuvent avoir des programmes comme Rafale et Typhoon, mais également leurs successeurs désignés NGF et Tempest, pour offrir au camps occidental, aux cotés des futurs NGAD et F/A-XX, des alternatives opérationnelles aux menaces qui planent potentiellement sur la flotte standardisée occidentale de F-35.

Quoiqu’il en soit, concernant le Canada, l’annonce du vainqueur interviendra dans les prochains mois, et la livraison des 65 appareils destinés à remplacer les CF-18 de la Royal Canadian Air Force devra avoir lieu entre 2025 et 2032, lorsque les vénérables Hornet canadiens atteindront les 50 années de service. En outre, en tant que partenaire historique du programme F-35, Ottawa ayant déjà versé plus de 600 m$ pour maintenir cette position, l’industrie canadienne bénéficiera d’importantes retombées économiques émanant de l’ensemble du programme F-35 si ce dernier était sélectionné. Ce qui laisse bien peu de marge de manoeuvre à Saab et son Gripen, tout performant et peu onéreux qu’il puisse être, pour espérer finir en haut du podium de cette compétition.

Avec le S-550, la Russie complète la future défense anti-aérienne et balistique de son espace aérien

La Défense anti-aérienne et anti-balistique russe est aujourd’hui universellement reconnue comme l’une des meilleures au monde, si ce n’est la meilleure. Sa composition multi-couches, multi-systèmes coopérative lui permet d’ores et déjà de répondre à la presque totalité des menaces, y compris les avions furtifs de 5 ème génération, constituant de fait un rempart particulièrement dissuasif pour n’importe lequel des adversaires potentiels du pays. Si les fameux S-400, Buk, Tor, Pantsir et le futur système S-500 Prométeï étaient déjà bien connus des spécialistes du sujet, l’annonce faite le 9 novembre par le ministre de La Défense Serguei Choïgou au sujet d’un nouveau système S-550, a désarçonné nombre d’entre eux. Après plusieurs tâtonnements, allant jusqu’à imaginer qu’il pouvait s’agit de l’exhumation d’un ancien programme soviétique des années 80 portant la même désignation, la compréhension de ce que sera ce nouveau système, et de sa fonction dans l’arsenal défensif russe, est devenue plus claire désormais.

A l’instar du S-350 qui représente une version simplifiée et plus économique du S-400, le S-550 constituerait une version « Light » du très lourd, et très onéreux S-500 Prométeï, dont la livraison des premiers éléments a été entamée cette année. Là ou le S-500 sera en charge de protéger les grands centres urbains et industriels russes contre les menaces aériennes, les missiles de croisière et surtout les missiles balistiques d’une portée allant jusqu’à 3500 km, aux cotés des nouveaux A-235 Nudol en silo qui protègeront les deux capitales du pays Moscou et Saint-Petersbourg en lieux et place des vénérables A-135 contre les menaces balistiques intercontinentales, le S-550 sera, pour sa part, en charge de missions similaire, pour des sites de moindre valeur stratégique, mais nécessitant une couverture anti-aérienne et anti-balistique. Un quatrième échelon de protection, plus rapproché et destiné notamment à protéger spécifiquement des sites, et non des espaces, sera assuré par le S-350, spécifiquement conçu à cet effet. Enfin, l’ensemble de ces systèmes pourront collaborer avec la composante aérienne, en particulier avec les avions de veille avancée ainsi qu’avec le nouveau Su-57, conçu pour pouvoir intégrer et même piloter cette mission.

S350 lanceur et radar Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le S-350 Vitiaz s’appuie sur de nombreuses technologies héritées du S-400, y compris sur ses missiles 9M96 et 9M100

Rappelons que La Défense anti-aérienne russe se décompose en deux branches, l’une destinée à protéger les manoeuvres et les unités militaires, qui se compose aujourd’hui du S-400 à longue portée, du Buk-M3 à moyenne portée et du TOR à courte portée, ainsi que du Pantsir pour la protection des sites sensibles, et La Défense anti-aérienne et anti-missile du pays lui-même, qui reposait jusqu’ici sur le missile anti-balistique A-235 successeur du A-135 de la Guerre froide, du S-300PMU1/2 pour la Défense intermédiaire et du système Buk pour La Défense « rapprochée » au sens stratégique. Le trio formé du S-500 Prométeï, du S-550 et du S-350 constitue donc la nouvelle génération de cette défense nationale visant à interdire l’espace aérien russe à tous les avions, drones, missiles de croisière et missiles balistiques de l’adversaire.

A l’instar du S-500 et du S-350, le S-550 s’intégrera très probablement dans la chaine de détection radar russe, de sorte à pouvoir partager et recevoir les informations de détection de ses propres systèmes avec ceux des S-500/S-350, mais également avec les immenses radars de veille à longue portée qui couvrent l’ensemble du territoire. En outre, il est probable qu’il sera en mesure d’intégrer des radars voire des goniomètres complémentaires, de sorte à quadriller l’espace aérien de manière efficace, y compris contre les avions, drones et missiles à faible surface équivalente radar. En d’autres termes, si le S-350 a pour fonction d’agir comme dernier voler défensif sous le S-500, le S-550, quant à lui, aura principalement pour objectif de « combler les trous » laissés sur le territoire russe par les S-500 eux-mêmes, prenant en cela la suite des S300PMU/2 encore en service.

S300 PMU2 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Le S-300PMU2 assure aujourd’hui La Défense anti-aérienne et anti-balistique de nombreuses régions et grandes villes russes. C’est ce système que le S-550 est appelé à remplacer.

Cette architecture, si elle s’avère complexe et, toute proportion gardée, onéreuse, va également rendre la tache considérablement plus difficile aux stratèges des adversaires potentiels de la Russie dans le domaine stratégique, en particulier des Etats-Unis et de ses alliés de l’OTAN. En effet, chaque système possède ses propres chaines de détection, et ses propres capacités, tout en collaborant de manière native. De fait, pénétrer l’espace aérien russe va s’avérer des plus difficiles, en particulier pour les appareils et les missiles évoluant entre la moyenne altitude et la très haute altitude, domaine de prédilection des S-500, y compris pour les appareils furtifs contre lesquels les systèmes mettent en oeuvre des radar basse fréquence de plus en plus performants, et de plus en plus mobiles, ainsi que des approches multi-statiques particulièrement difficile à contrer. Il ne reste guère que la pénétration à très basse altitude et à très haute vitesse, dans des corridors préalablement reconnus par satellite, ou l’hypothèse d’un avion ou d’un missile hypersonique suffisamment rapide pour éviter l’interception, pour espérer mettre à mal la Défense anti-aérienne russe en devenir.

L’emploi d’appareils d’accompagnement de guerre électronique, tel le EA-18G Growler de l’US Navy, si il peut permettre de neutraliser les systèmes de détection au sol pour peu qu’ils disposent des brouilleurs adéquates et en nombre suffisant, se trouvera inexorablement confronté au volet complémentaire de La Défense antiaérienne intégrée russe s’appuyant sur ses avions de chasse et d’interception, un brouilleur attirant les chasseurs adverses comme une flamme les papillons de nuit. On comprend, dans ces conditions, l’empressement des Etats-Unis pour developper au plus vite de nouveaux missiles hypersoniques qui seuls seront capables de passer au travers de cette forteresse anti-aérienne, tout comme celui concernant le programme SR-72, le drone hypersonique potentiellement armé destiné à remplacer les anciens SR-71, actuellement en developpement dans les bureaux de l’équipe Skunk Work’s de Lockheed Martin, et qui devrait entamer ses essais d’ici 2025.

sr 72 top 1 Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
le drone hypersonique potentiellement armé SR-72 développé par l’équipe Skunk Work’s de Lockheed-Martin, sera probablement l’un des seuls appareils occidentaux à pouvoir défier les défenses antiaériennes dans l’espace aérien russe.

A l’inverse, et comme nous l’avions déjà abordé, on peut se poser la question quant à la pertinence opérationnelle de la dissuasion partagée de l’OTAN, qui s’appuie sur des appareils pilotés classiques pour larguer potentiellement des bombes nucléaires gravitationnelles en cas de conflit. Il semble en effet impossible qu’un quelconque appareil, fut-il aussi furtif que le F-35A, puisse pénétrer une telle défense anti-aérienne intégrée pour parvenir en position de largage pour sa munition au dessus d’une cible d’intérêt stratégique, celles-là même qui seront activement protégées par les S-550 et les S-350. Il sera donc nécessaire d’attendre le remplacement éventuel de ces bombes nucléaires B-61-M12 par des missiles hypersoniques emportant des charges nucléaires pour espérer un résultat, ce qui n’arrivera très probablement pas avant une bonne dizaine d’années dans le meilleure des cas. Même dans cette hypothèse, les chances qu’un F-35A puisse embarquer un tel missile dans sa soute à munition sont minimes, obligeant l’appareil , par ailleurs pas du tout optimisé ni pour le vol à haute vitesse, ni pour le vol à très basse altitude, à transporter sa charge en extérieur, ce qui dégradera sans le moindre doute ses performances mais également sa furtivité, et donc son seul avantage face aux radars russes.

Quoiqu’il en soit, loin d’être anecdotique, l’annonce de l’arrivée prochaine du S-550 va sans le moindre doute renforcer les capacités défensives russes dans son espace aérien national, que ce soit contre les menaces balistiques et aériennes. Elle interroge également quant aux autres programmes en developpement à Moscou, puisqu’à l’instar de l’entrée en service du missile hypersonique Kh-47M2 Kinzhal ou, dans un autre domaine, des essais concernant le système de bombardement fractionné orbital chinois il y a quelques semaines, l’arrivée du S-550, ni même sa simple existence, étaient ignorées des meilleurs spécialistes du domaine sur la place publique. Il s’agit, une nouvelle fois, d’un signe fort indiquant que le tempo technologique militaire mondial a considérablement évolué ces dernières années, principalement du fait de la Chine et de la Russie, et qu’il est, dès lors, indispensable de réviser les ambitions mais également les calendriers des programmes de défense occidentaux, et en particulier en Europe, pour y répondre, sous peine de se trouver déconnecté de la réalité opérationnelle à moyen terme.

Florence Parly confirme le remplacement des 12 Rafale d’occasion vendus à la Croatie

Voilà qui met fin à un long suspense, ainsi qu’à certaines inquiétudes. En effet, la ministre des Armées françaises Florence Parly, en deplacement à Zagreb pour la signature de la vente de 12 Rafale d’occasion à la Croatie, a confirmé par un tweet que les appareils, qui seront prélevés sur le parc de l’Armée de l’Air et de l’Espace, seront effectivement remplacés par une commande qui sera lancée dès 2023. Selon toute probabilité, les nouveaux avions de combat seront commandés concomitamment au premier lot de 30 Rafale au standard F 4.2, qui doit également avoir lieu à ce moment selon la planification de la Loi de programmation Militaire 2019.2025. Au total, donc, l’Armée de l’Air et de l’Espace devrait dès lors effectivement disposer des 159 Rafale prévus en 2028, pour un objectif final visé de 185 appareils au début de la décennie suivante.

Cette décision était loin d’être actée depuis l’annonce du choix de Zagreb en faveur de l’appareil français face au F-16V américain et au JAS 39 Gripen C suédois. En effet, après avoir initialement garanti que les 12 avions prélevés sur le parc de l’Armée de l’Air donneraient lieu à un remplacement intégral comme ce fut le cas pour les 12 Rafale d’occasion acquis par Athènes quelques mois plus tôt, les autorités françaises, et notamment le Ministère des Armées, semblaient se diriger vers un fléchage des crédits liés à cette vente pour financer la modernisation des 14 Rafale F3 qui, aujourd’hui, servaient de stock de pièces pour l’Armée de l’Air, en attendant de pouvoir financer leur modernisation.

RAfale grece Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
Les 12 Rafale d’occasion acquis par la Grèce aux cotés de 12 autres appareils neufs, ont donné lieu à une commande de remplacement annoncée quelques semaines après l’officialisation de l’engagement d’Athènes.

Le Rafale F4, première standard de la seconde phase d’évolution du Rafale, ne sera pas constitué d’un, mais de deux standards. Le F 4.1, disponible à priori en fin d’année prochaine, sera le nouveau standard des appareils venants d’un standard ultérieur, et notamment du standard F3R actuel. Il conférera à l’avion de combat français de nouvelles capacités avec notamment des senseurs modernisés, une nouvelle version du système d’auto protection SPECTRA, et l’intégration de nouveaux armements comme le missile air-air MICA NG. Le standard F 4.2 sera, quant à lui, disponible en 2024 et exclusivement réservé aux appareils neufs, car intégrant certaines évolutions structurelles de l’appareil. Ces évolutions lui permettront notamment d’accroitre sensiblement ses capacités de traitement et de fusion de données, lui permettant de se rapprocher au plus prêt des capacités offertes par les avions dits de 5ème génération dans ce domaine. Les deux lignées évolueront parallèlement par la suite vers les standards ultérieurs, le F 4.2 offrant naturellement des capacités d’intégration étendues vis-à-vis du F4.1.

De fait, remplacer des Rafale en parc par de nouveaux appareils qui seront directement livrés au standard F4.2 constitue naturellement une opportunité pour l’Armée de l’Air et de l’Espace, puisque ses nouveaux appareils disposeront non seulement de capacités étendues et d’un potentiel de vol intégral, mais également d’une évolutivité renforcée, avec en ligne de mire la convergence vers le SCAF européen. Il s’agit en outre d’une excellente opération budgétaire, puisque les recettes pour l’Etat générées par la vente des 12 appareils d’occasion cumulées aux recettes liées à la production des 12 appareils neufs dépasseront sans le moindre doute les investissements nécessaires pour acquérir ces appareils neufs, tout en économisant les frais de modernisation.

macron parly Chars légers et blindés de reconnaissance | Conflit dans le Donbass | Construction de véhicules blindés
L’annonce de Florence Parly faite aujourd’hui est au final à prendre au conditionnel, puisqu’elle n’engage, en réalité, qu’Emmanuel Macron lui-même, et ce uniquement s’il sort vainqueur des élections présidentielles et législatives à venir

Reste que l’annonce faite par Florence Parly n’est qu’en partie contraignante, puisqu’elle n’engage, au final, qu’Emmanuel Macron, et ce uniquement si celui-ci venait effectivement à être re-élu en 2022. Or, jusqu’à présent, les questions de défense semblent être abordées de manière superficielle, si pas totalement ignorées, par l’ensemble des candidats à la Magistrature suprême, qu’ils soient ou non effectivement déclarés, et l’on peut craindre, dès lors, que les annonces de ce type ne constituent en rien un engagement ferme de l’Etat en faveur de ses armées. On peut se demander, dans ces conditions, s’il n’eut pas été préférable de passer cette commande à court terme avant les élections présidentielles, et non de la reporter à 2023, avec des livraisons en 2026 ou 2027 comme certainement imaginé par la Ministre des Armées, de sorte à en garantir la parfaite exécution, quel que soit le résultat des élections à venir.