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General Atomics présente le drone léger aéroporté Eaglet destiné à la haute intensité

Depuis l’entrée en service du premier drone MALE MQ-1 Predator au sein de l’US Air Force en 1995, le rôle de ces aéronefs pilotés du sol et dotés d’une autonomie de plus de 24 heures n’a cessé de croitre au sein des armées mondiales. Désormais, la plupart des grandes armées mondiales mettent en oeuvre ce type de drone, ou son successeur le MQ-9 Reaper pour assurer des missions de renseignement et parfois de frappe sur des théâtres de basse intensité, comme ce fut le cas lors des campagnes irakiennes et afghanes pour les Etats-Unis, ou pour l’opération Barkhane dans le Sahel pour les armées françaises. En revanche, comme l’avaient déjà montré les pertes de Predator et de Reaper en Libye et au Yemen, dès que l’adversaire dispose de systèmes anti-aériens évolués, ces drones se révèlent être très vulnérables, bien au delà de ce que leur cout d’acquisition et de mise en oeuvre ne permettent de supporter.

Pour continuer à disposer de ce type de renseignements et de capacités de frappe en environnement contesté, deux solutions s’offrent aux forces armées. La première est d’employer des drones plus légers et plus économiques, et d’en accepter la perte probable si celui-ci devait s’approcher d’un système anti-aérien ou antidrone adverse. C’est notamment l’approche retenue par le turc Baykar avec son désormais célèbre TB2 Bayraktar, qui fit ses preuves lors du conflit du Haut-Karabakh, et qui s’est élevé au rang de symbole nationale pour les ukrainiens depuis le début de l’agression russe. Plus petit et plus economique que le MQ-9, avec un prix unitaire de l’ordre de 4 à 5 m$, le TB2 a permis aux forces ukrainiennes de suivre l’avancée des offensives russes pour coordonner les frappes et contre-attaques sur les lignes logistiques de l’adversaire, mais également de mener des frappes contre les systèmes anti-aériens TOR, Pantsir et Buk sensés protéger les convois russes. Toutefois, si les ukrainiens utilisèrent très efficacement leurs Bayraktar, ceux-ci connurent une importante attrition dès lors qu’ils se confrontaient à des systèmes anti-aériens modernes TOR-M2 ou Buk-M2/3 correctement employés par les forces russes.

General atomics Eaglet Maquette Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
L’Eaglet est un drone compact à propulsion par hélice tractive, mais dont les formes laissent supposer une certaine dimension de furtivité

Les résultats enregistrés par les TB2 ukrainiens amenèrent de nombreux commentateurs et analystes des questions de défense en Europe, et notamment en France, à recommander l’acquisition ou de développement de ce type de drones low cost. Mais que faire, dans ces conditions, des flottes de drones MALE Reaper déjà acquises qui doivent rester en service jusqu’au milieu de la prochaine décennie, alors qu’ils restent toujours très efficaces sur les théâtres de faible intensité ? Le concepteur du Predator et du Reaper, l’américain General Atomics, propose désormais une solution à ce dilemme avec le drone léger aéroporté Eaglet. Conçu pour être transporté et mis en oeuvre par les drones MALE Grey Eagle, Reaper et Gardian, l’Eaglet est un petit drone de 3 mètres d’envergure ailes déployées et de 90 kg, pouvant transporter une charge utile de 15 kg pendant 8 heures ou 800 km à une vitesse de 200 km/h. Il permet ainsi au porteur de se maintenir à distance de sécurité des défenses anti-aériennes adverses, tout en déployant des capacités de renseignement et de localisation électronique et electroptique au dessus du champs de bataille.

Comme les drones légers employés communément en Ukraine, ces derniers seront difficiles à détecter et à éliminer à l’aide d’une DCA traditionelle, conçue pour éliminer des appareils plus rapides et plus volumineux que des équipements. Pour autant, même s’ils ont un aspect laissant supposer une certaine forme de furtivité, ils ont été conçus pour proposer une cout d’acquisition « compatible » avec une importante attrition, même si le système est en soit réutilisable. En outre, il permettra d’intégrer rapidement et simplement de nouvelles capacités de détection, de surveillance, de communication ou de frappe, au fil des évolutions technologiques et des besoins. Enfin, et c’est une capacité des plus interessantes en particulier dans le domaine naval, l’Eaglet profitera de l’allonge et de l’autonomie du drone MALE porteur pour potentiellement être déployé à des distances inaccessibles aux drones légers, ou même aux TB2 Bayraktar, profitant en outre de la connexion satellite de son drone porteur pour évoluer bien au delà de la ligne de visée vis-à-vis de la station de controle.

FCAS remote carriers mock up at Paris Air Show 2019 Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
MBDA développe la version légère du programme Remote Carrier dans le cadre du programme SCAF

On le voit, l’Eaglet de General Atomics n’est en fait qu’une application du concept de Remote Carrier développé dans le cadre des programmes d’avions de combat de 6ème génération, comme le SCAF rassemblant la France, l’Allemagne et l’Espagne, le Tempest Italiano-britannaique, et les NGAD et F/A-XX de l’US Air Force et de l’US Navy, tout en l’adaptant astucieusement aux besoins, technologies et moyens de deploiement immédiatement disponibles. Il permet ainsi de transposer à relativement court terme l’efficacité des flottes de drones MALE aux Etats-Unis ainsi que parmi ses alliés, en une capacité adaptée aux enseignements de la guerre en Ukraine dans le domaine de la haute intensité. Reste que pour transformer cet essai en réussite, il sera nécessaire pour General Atomics d’effectivement satisfaire à ses engagements en terme de capacités et de performances, mais surtout en terme de couts et de calendrier, ces derniers points étant pour l’heure encore obscures dans le discours de l’avionneur américain.

D’un autre point de vue, l’approche proposée par General Atomics, pourrait également inspirer les Européens et notamment le groupe MBDA en charge de la version « légère » du Remote Carrier des programmes SCAF et Tempest. On peut en effet imaginer que les solutions développées dans le cadre de ces programmes pourraient être, à court terme, transposées pour concevoir un Remote Carrier destiné à armer les drones MALE en service en Europe, comme le Reaper, le Gardian et surtout bientôt, on l’espère, l’Eurodrone, de sorte à permettre à ces appareils de répondre eux-aussi aux enjeux de la haute intensité. En outre, l’Eurodrone disposant de capacités d’emport supérieures à celles du MQ-9, il devrait permettre de mettre en oeuvre des drones aéroportés plus lourds, eux même pouvant, dans cette hypothèse, transporter si besoin des munitions vagabondes, de sorte à créer une capacité de renseignement et de frappe à la fois résidente et parfaitement adaptés aux enseignements de la guerre en Ukraine. Ceci constituerait alors une capacité opérationnelle différenciée susceptible de promouvoir le drone européen sur la scène internationale, voire d’en accroitre l’attractivité pour les clients initiaux, en particulier pour les missions de surveillance et d’engagement navales…

La République Tchèque négocie l’acquisition de 50 chars lourds Leopard 2A7+

Depuis le début du conflit en Ukraine, la République Tchèque a été l’un des pays les plus impliqués dans le soutien militaire apporté aux combattants ukrainiens. En dépit d’une force armée réduite forte de seulement 25.000 militaires et réservistes, et d’un budget défense plafonnant à 4 Md€ par an, Prague n’a pas hésité à transférer vers Kyiv une partie de son stock de chars T-72M1 de reserve, mais également des systèmes d’artillerie, de défense anti-aérienne et des munitions, et entend poursuivre cet effort jusqu’à la fin du conflit. Le pays a obtenu, dans cette optique, le soutien de Berlin, qui a annoncé le transfert de 15 chars lourds Leopard 2A4 prélevés sur les stocks de reserve allemand, afin de compenser les livraisons tchèques à l’Ukraine et, ainsi, préserver la posture défensive du pays dans le cadre de l’OTAN.

Mais Prague n’entend pas s’arrêter là. En effet, par la voix de son ministre de la Défense Jana Cernochova, le pays a annoncé avoir entamé des discussions avec Berlin en vue d’acquérir une cinquantaine de nouveaux chars lourds Leopard 2, cette fois au dernier standard A7+, de sorte à poursuivre l’effort de modernisation entamé il y a plusieurs années. De fait, avec 65 Leopard 2 et 30 T72 modernisés au performant standard M4CZ, les armées tchèques aligneront une force de rupture lourde parfaitement complétée par 127 véhicules de combat d’infanterie 8×8 Pandur II co-produits avec l’Autriche et un nouvel appel d’offres pour une centaine de VCI modernes supplémentaires à venir, les 100 canons automoteurs Dana et CAESAR 8×8, et quelques 400 véhicules blindés de transport de troupe, dont 62 Titus co-produits avec le français Nexter.

nexter caesar 8X8 Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Prague a confirmé son intention de commander 52 canons CAESAR en version 8×8 pour moderniser son artillerie

Aprés un marché atone pendant plus de 20 ans, la demande concernant la livraison de chars lourds modernes a considérablement augmenté ces dernières années, y compris en Europe. Ces derniers mois, la Hongrie a confirmé la commande de 44 chars Leopard 2A7+, la Pologne de 250 chars américains Abrams M1A2 SEPv3, la Norvège devant, quant à elle, arbitrer cette année entre le Leopard 2A7+ et le K2 Black Panther sud-coréen pour remplacer ses Leopard 2A4NO acquis d’occasion aux Pays-bas en 2001. Plusieurs autres pays européens, dont récemment la Grèce, mais aussi la Grande-Bretagne et la France, ont entrepris de moderniser leur parc de chars lourds vers le dernier standard de leurs modèles respectifs. Au delà des frontières européennes, le marché du char lourd a également retrouvé de l’attrait, avec la commande de 500 T-90MS en production locale par l’Egypte, de plus de 460 exemplaires du Bishma (dérivé du T90) en Inde, et de 108 Abrams M1A2 pour Taïwan, de 75 pour l’Australie et d’une cinquantaine en discussion avec Bogota.

Malheureusement, si le marché redémarre rapidement y compris en Europe, les capacités de production et l’offre sont, quant à elles, des plus limitées. En effet, la plupart des constructeurs traditionnels de chars lourds en occident ont stoppé leurs lignes de production il y a de plusieurs années, comme ce fut le cas pour le Leclerc français, le Challenger 2 britannique et l’Ariete italien. Même le très réputé Leopard 2 produit par l’allemand KMW, ne dispose plus aujourd’hui de ligne de production propre, et les nouveaux chars commandés par la Hongrie et la République Tchèque sont produits désormais par la chaine de maintenance, d’une manière moins efficace et plus lente qu’une ligne de production dédiée. Aux Etats-Unis, la ligne de production General Dynamics Land Systems (GDLS) de Lima dans l’Ohio a connu en 2016 le même destin que celle du Leopard 2 allemand, et les capacités de production actuelles sont réduites du fait de l’utilisation d’une ligne de maintenance, et non de production.

mgcs illustration rheinmetall Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Le programme de char lourd de nouvelle génération MGCS risque fort d’évoluer vers un successeur du Leopard 2 plutôt que sur un char mobile et plus léger comme pouvait l’être le Leclerc français

Cette nouvelle dynamique en faveur de chars lourds dans leurs versions modernisés représente évidement une opportunité concernant le programme franco-allemand Main Ground Combat System, et explique les nombreuses demandes de pays européens pour rejoindre le programme (Italie, Grande-Bretagne, Pologne, Norvège). Pour autant, celles-ci représentent également un facteur de déstabilisation au sujet de la coopération entre Paris et Berlin dans ce programme, déjà mise à mal par l’arrivée de Rheinmetall imposée par le Bundestag en 2019. En effet, si dans un modèle paritaire, la France pouvait espérer amener la Bundeswehr à plus de souplesse pour concevoir un char moins lourd et plus mobile répondant mieux aux besoins de la doctrine française, l’arrivée de ces poids lourds européens, pour la plupart biberonnés au Leopard 2 ou à son équivalent britannique le Challenger 2, des chars de prés de 70 tonnes, risque fort de conforter Berlin dans ses exigences, et de pousser la France soit vers une posture minoritaire, soit vers la sortie. Notons, cependant, que le succès du Rafale sur la scène internationale ces dernières années, engendre quant à eux une situation similaire au sujet du programme de chasseur de nouvelle génération SCAF, cette fois en faveur de la France.

La DARPA lance son programme d’Ekranoplan Liberty Lifter pour le transport stratégique

Parmi les plus importantes réussites américaines de la seconde guerre mondiale dans le domaine industriel, il est commun de faire référence aux avions de combat comme le P-51 Mustang ou le F-6F Hellcat, au char Sherman ou encore aux porte-avions de la classe Wasp. Pourtant, le matériel qui aura incontestablement joué le rôle le plus déterminant pour vaincre l’Allemagne Nazi et le Japon impérial aura été le Liberty Ship, un modèle de cargo de 135 mètres de long et de 10.000 tonnes de deplacement, produit à 2,710 exemplaires, et qui transporta l’ensemble de l’effort de guerre américain et alliés en Afrique, en Europe et en Asie. Pour y parvenir, le très ingénieux Henry J. Kaiser, qui s’était déjà illustré en construisant l’ambitieux barrage Hoover sur le fleuve Colorado, transforma l’industrie navale américaine pour y intégrer des principes de conception modulaire et de lignes de production empruntés aux usines Ford. Par cette approche, il ne fallait plus que 3 jours pour construire un Liberty Ship, de la pose de la quille à son lancement.

Aujourd’hui, le transport stratégique américain repose sur des moyens relativement proches de ceux qui existaient en 1945, avec une une flotte de cargo navals certes plus imposants que les Liberty Ships, rassemblés au sein du Military Sealift Command de l’US Navy. Comme leurs illustres aïeuls, les cargo modernes, s’ils peuvent transporter une importante quantité de materiels, souffrent de deux faiblesses majeures : une importante vulnérabilité lors des transits, notamment face à des moyens sous-marins et aériens performants comme ceux dont disposent la Chine ou la Russie, et une vitesse relativement lente, nécessitant des délais de transfert importants. En outre, ils nécessitent des infrastructures lourdes pour décharger leurs cargaisons, infrastructures par nature vulnérables pour un adversaire déterminé. A l’autre bout du spectre, le transport aérien stratégique, assigné au Military Airliift Command de l’US Air Force, s’il est rapide, n’a que des capacités de transport limitées, et nécessite lui aussi des infrastructures d’accueil, et notamment des pistes d’atterrissage longues et en bon état, tout aussi vulnérables que les ports marchands.

Video publiée par la DARPA pour presenter le programme Liberty Lifter

Le programme d’Ekranoplan Liberty Lifter lancé par la DARPA, vise précisément à ouvrir une troisième voie, de sorte à compléter les moyens dont disposeront les forces armées américaines, mais également pour ne plus dépendre de ces infrastructures d’accueil indispensables aux navires et avions cargo. Rappelons qu’un Ekranoplan est un hybride entre en avion et un navire, employant l’effet de sol, c’est à dire la surpression qui apparait entre les ailes et le sol lorsque celui évolue à une altitude inférieure à son envergure, et qui a pour effet d’en augmenter la portance. Le programme le plus représentatif de cette technologie était le Lun soviétique, un prototype de 74 mètres de long propulsé par 8 turboréacteurs, et capable d’atteindre les 500 km/h malgré une masse de 400 tonnes. Pour autant, les connaissances technologies ayant donné naissance naissance au Lun en 1987, ne permettaient d’employer l’appareil que par mer calme y compris pour les vols de transit, ce qui constitua une contrainte majeure signant son arrêt de mort précoce, même si des informations semblent indiquer que Moscou aurait exhumer le programme en 2017.

Les objectifs annoncés par la DARPA pour son Liberty Lifter sont ambitieux, en premier lieu desquels celui de précisément pouvoir être mis en oeuvre par une météo défavorable, et de pouvoir effectuer ses transitions (décollages et amerrissages) par une mer formée comme celle que l’on peut trouver sur les sites protégés. En outre, l’Ekranoplan devra permettre des transferts sans infrastructure dédiée, en plageant à l’instar des navires d’assaut transport de chars. Surtout, le Liberty Lifter devra permettre de transporter des quantités importantes de materiels. Long de 140 mètres, soit la taille d’un Liberty Ship de la seconde guerre mondiale, il n’en aura pas le contenant, mais surclassera très nettement les capacités des C-17 et autre C-5, tout en évoluant à 20 fois la vitesse d’un navire de transport. Si sa fonction sera d’employer au maximum l’effet de sol, y compris au dessus d’une mer formée, il se devra également d’évoluer comme un avion jusqu’à 10.000 pieds, pour par exemple franchir des obstacles ou pour atteindre des étendues d’eau intérieures, même si ce régime de vol en augmentera sensiblement la consommation. Enfin, l’appareil sera rustique, et pourra être mis en oeuvre pendant plusieurs semaines sans devoir passer par une phase de maintenance à terre.

Liberty Lifter Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
une esquisse du Liberty Lifter publiée sur le site de la DARPA. Remarquez l’utilisation d’hélices et non de turboréacteurs.

Surtout, et comme son nom l’indique, le Liberty Lifter se veut être l’héritier des Liberty Ship de la seconde guerre mondiale. Pour cela, la DARPA prévoit d’axer ses efforts pour en faire un appareil rapide à concevoir, facile à construire, et peu onéreux à produire. En d’autres termes, l’ekranoplan devra bien davantage s’inspirer de la construction navale que de la construction aéronautique, et vise clairement à se tenir à distance des excès d’ambition technologique qui ont handicapé tant de programmes américains ces dernières années. Pour autant, le programme n’est pas dénué d’enjeux technologiques majeurs, en particulier pour ce qui concerne la conception des systèmes de controle pour un appareil évoluant sur 3+1 éléments (air, terre, mer + effet de sol), et ce à des vitesses très différentes, mais également pour le doter de capacités permettant d’évoluer dans des espaces aériens et navals réduits, de sorte à éviter les collisions et à optimiser les transferts.

Une chose est certaine, le programme initié par la DARPA est ambitieux, et pourra jouer un rôle plus que déterminant pour transformer les capacités de projection de puissance américaine sur la planète, dans un contexte où les distances entre les théâtres ne cessent de s’étendre, alors que les délais de réponse, quant à eux, ne cessent de se réduire. Si l’agence d’innovation du Pentagone arrive à ses fins, il est probable que cela résoudra en partie les impasses dans lesquelles se trouvent aujourd’hui les armées US, en réduisant les besoins de déploiement en amont des crises, tout en préservant les capacités de réponse à court terme, y compris pour des besoins nécessitant un train logistique surdimensionné. En d’autres termes, une foi doté de ces appareils, les Etats-Unis pourront réduire leur présence permanente sur les différents théâtres, tout en conservant la capacité de réagir à court terme, avec des moyens dimensionnés pour répondre à la menace, et ainsi de retrouver la capacité de contrôler simultanément plusieurs théâtres sans devoir surdimensionner leurs forces armées.

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L’ekranoplan russe Lun en 2021.

En ce sens, le programme Liberty Lift pourrait bien, dans les années à venir, avoir un impact opérationnel mais également stratégique et politique aussi important, voire davantage, que celui que jouèrent les Liberty Ship pendant la seconde guerre mondiale. Loin de s’appuyer sur une symbolique galvaudée, le programme de la DARPA, s’il atteint ses objectifs, pourrait bien être l’un de ceux qui façonnera le plus la géopolitique des décennies à venir.

L’US Navy finance un programme de drone d’une autonomie supérieure à une semaine

Parmi les enseignements issus de la guerre Ukraine, le rôle prépondérant des drones de reconnaissance dans la conduite des opérations militaires représente probablement, si pas la plus grande surprise, en tout cas la confirmation la plus évidente des transformations qui s’opèrent désormais dans le domaine de l’action militaire de haute intensité. Le succès des armées ukrainiennes face à des forces russes plus nombreuses et puissamment armées repose en effet en grande partie sur la parfaite intégration d’un dispositif associant un système de communication innovant pour coordonner les unités déployées aux renseignements remontés par différents types de drones allant du MALE (Moyen Altitude Longue Endurance) léger TB2 Bayraktar à des quadcoptères légers du commerce modifiés par les opérateurs ukrainiens. Dans ce contexte, et considérant les besoins de surveillance de plus en plus étendus auxquels devront faire face les forces américaines dans un avenir, l’intérêt pour des drones à très longue autonomie n’a fait que croitre outre Atlantique ces dernières années.

Il s »agit précisément du domaine de prédilection de la petite Start-up américaine Platform Aerospace basée en Californie, qui n’est autre que la détentrice du record du monde de durée de vol pour un drone avec son Vanilla Unmanned, un drone qui a tenu l’air pendant 8 jours et 50 minutes en ayant parcouru prés de 20.000 km (soit une vitesse moyenne de 100 km/h) en octobre dernier. Et ce record n’est pas passé inaperçu au Pentagone, et en particulier de l’US Navy, qui a contracté avec la PME californienne pour developper un système à très longue autonomie susceptible d’apporter des capacités de surveillance inédites à ce jour, en particulier pour prendre à sa charge les missions de surveillance de longue durée particulièrement nécessaires dans le domaine naval, en lieu et place des MQ-9 Reaper plus performants pour des missions de frappes et de mission de combat, et qui doivent être remplacés d’ici la fin de la décennie par des systèmes furtifs.

MQ 9B Sky Guardian General Atomics Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat

Il est vrai que le Vanilla Unmanned n’offre pas des capacités d’emport comparables à celle d’un Reaper. Dans son format actuel, qui s’appuie sur une architecture qui n’est pas sans rappeler celle d’un moto planeur, y compris avec des ailes souples à grande envergure, le drone ne peut emporter que 80 kilos de charge utile pour une autonomie de 3 jours, et de moins de 20 kg pour une autonomie de 7 à 8 jours, ce qui reserve l’appareil à des missions de surveillance et de renseignement, et le disqualifie pour les missions de frappe, un simple missile Hellfire dépassant les 50 kg. Pour autant, lorsqu’il s’agit de surveiller des détroits sur de longue période, ou pour traquer une flotte sur de grande distance, le Vanilla Unmanned semble répondre aux besoins manière efficace, d’autant que dans sa version actuelle, il ne couterait que 2 m$ par exemplaire, là ou un Reaper dépasse les 50 m$, et nécessite, pour la même période de temps de surveillance, des besoins de maintenance et de mise en oeuvre bien plus importants pour un résultat opérationnel identique.

On peut noter, au passage, que l’US Navy n’a nullement hésité à se tourner vers une PME pour engager, à l’aide de ses crédits d’innovation rapide discrétionnaires, des développements ayant une portée potentielle plus que significative. Un tel exemple est malheureusement trop peu suivi en Europe et en France, les armées et les ministères privilégiant le plus souvent les grands groupes industriels aux agiles et économiques PME, même dans les domaines les plus innovants comme celui des drones et des munitions vagabondes. Ceci explique, en partie, le retard pris par les européens dans ces domaines ces dernières années, et l’on ne peut qu’espérer l’émergence de structures comme l’Agence Innovation de Défense en France permette d’induire une évolution salutaire dans ces comportements fortement ancrés dans le fonctionnement des armées.

stratobus thales Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
le stratobus de Thales évoluera à 20 km d’altitude pour proposer des services comparables à ceux des satellites

Reste que si la solution de Platform Aerospace est interessante pour ce type de mission, elle n’est pas la seule à pouvoir apporter une très longue endurance à des systèmes de surveillance aéroportés. Ainsi, de nombreux programmes basés sur des ballons captifs mais également sur des ballons dirigeables ont vu le jour ces dernières années y compris en Europe. Les Armées françaises ont ainsi confié à la société Thales et Thales Aliens Space la conception du « Stratobus », un système dirigeable de 140 mètres de long capable d’évoluer à 20 km d’altitude pour effectuer des missions de type HAPS pour High Altitude Platform System, parfois désigné sous le terme de pseudo-satellite, comme de la reconnaissance et du renseignement, mais également du relais de communication. A l’autre bout du spectre, la PME basée à la Ciotat A-NSE a été choisie par la Bundeswehr pour mettre en oeuvre son système de ballon captif T-C350L pour déployer des systèmes de surveillance optiques et électroniques en Afrique sud-saharienne.

Quoiqu’il en soit, qu’il s’agisse de drones à très longue endurance, de dirigeables ou de ballons captifs, voire des progrès très rapides réalisés dans le domaine des micro et nanosatellites, les évolutions dans le domaine de la permanence des systèmes de surveillance et de communication constituent un enjeu technologique majeur dans l’évolution de la conduite des opérations militaires à venir.

En visite au Capitole, le Premier Ministre grec veut acquérir le F-35 et met en garde contre la Turquie

Depuis le début des années 70, soit avant même son adhésion à l’Union européenne (1981), Athènes a toujours mené une stratégie d’équipement de ses forces aériennes équilibrée, s’appuyant simultanément sur des appareils américains et français. Dans les années 70 et 80, les Mirage F1 évoluaient sous cocarde bleu et blanche aux cotés des F4 Phantom 2, F5 Tiger II et A7 Corsair 2, alors que dans les années 90, les Mirage 2000 helléniques complétaient sa flotte de F-16. Aujourd’hui, les autorités grecques entendent prolonger ce modèle qui donna des résultats probants pour contenir les tensions avec le voisin turc, en acquérant des Rafale français, et en faisant évoluer ses F-16 au dernier standard Block 70 Viper. Pour autant, Athènes n’entend pas en rester là. A l’occasion de sa visite officielle aux Etats-Unis, le premier ministre Kyriakos Mitsotakis a en effet annoncé qu’il entendait acquérir un escadron de F-35 Lighting II américains pour remplacer une partie de ses F-16.

Selon le chef d’état grec, la commande sera passée en 2028, avec l’espoir que les premiers appareils seront livrés avant l’entame de la prochaine décennie. En outre, Athènes discuterait déjà avec Lockheed Martin pour rejoindre le programme Lighting II en tant que partenaire industriel, de sorte à mettre à profit son industrie aéronautique déjà engagée de manière importante dans la production et la maintenance des F-16 exportés. Cette annonce n’a en soit rien de surprenante, d’autant qu’Athènes avait de longue date indiqué qu’elle entendait se doter du nouveau chasseur américain aux cotés des Rafale français, dans le cadre de la modernisation de ses forces aériennes, en particulier pour contenir la menace que représente les forces armées turques, et les tensions ayant opposées Athènes et Nicosie, épaulés par Paris, face à Ankara ces dernières années.

F35A Australia Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Athènes entend commander un escadron (18 à 24 appareils) de F-35A en 2028 dans le cadre de la modernisation de ses forces aériennes

Toutefois, cette annonce officielle n’est pas dénuée de contexte. En effet, elle intervient alors que le Congrès américain semblait avoir adouci ses positions au sujet des sanctions portées contre la Turquie suite à l’acquisition de systèmes anti-aériens S-400 par Ankara, et l’embargo sévère sur les technologies de défense américaines qui en a suivi. Ainsi, jusqu’icil y a peu, le Congrès américain était particulièrement hostile à la plupart des demandes turques portant sur l’exportation de technologies de défense US, et ce au delà de l’exclusion d’Ankara du programme F-35. Ainsi, les parlementaires US avaient annoncé vouloir s’opposer à la demande formulée par les autorités turques concernant l’acquisition de 40 nouveaux avions de combat F-16 au standard Block 70, ainsi que 80 kits pour porter autant d’appareils déjà en service au sein des forces aériennes turques vers ce standard, le tout pour plus de 6 Md$. Toutefois, du fait de l’engagement turc aux cotés de l’Ukraine depuis le début du conflit, et de l’attitude jusqu’ici satisfaisante d’Ankara dans le cadre de l’OTAN autour de cette crise, les parlementaires américains avaient laisser entendre qu’ils pouvaient envisager d’autoriser la reprise des exportations de défense US vers la Turquie. Et c’est précisément ce contre quoi Kyriakos Mitsotakis entend alerter les sénateurs et représentants à l’occasion de sa visite au Capitole.

Pour le premier ministre grec, l’experience récente des provocations turques en Méditerranée orientale et en Mer Egée montre qu’en dépit du soutien effectif turc à l’Ukraine, les ambitions territoriales et régionales du president Erdogan restent identiques, et peuvent représenter une menace stratégique contre l’unité de l’OTAN sur son flanc sud alors même que le besoin d’unité est indispensable face à la situation de tension avec la Russie. Or, pour le dirigeant hellénique, il ne fait aucun doute qu’un assouplissement des sanctions contre Ankara alimenterait les ambitions turques, tout du moins tant que le président Erdogan et le Parti de la Justice et du Developpement restent au pouvoir. Pour autant, les arguments grecs avaient peu de chances d’être entendus par le Capitol, jusqu’à ce que le président turc annonce qu’il entendait s’opposer à l’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN.

F16 turkey Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Ankara veut commander 80 kits de modernisation pour porter autant de ses F-16 Block 52 au standard Block 70

Il est évident que que l’annonce a été très mal perçue par les autorités américaines, et a ravivé les questionnements des parlementaires US quant à la fiabilité de l’allié turc. La question est notamment de savoir si le président Erdogan entend par cette manoeuvre peser sur les sanctions US et européennes, notamment en ce qui concerne les questions de technologies de défense, ou s’il s’agit d’une posture plus nocive dans le cadre de l’alliance. Dans tous les cas, beaucoup de parlementaires américains semblent estimer qu’il s’agit là d’une attitude problématique, au mieux un marchandage indigne dans un contexte international plus que tendu et dangereux. En revanche, pour le premier ministre grec, il s’agit de l’assurance de disposer d’une audience plus réceptive quant à ses demandes.

Reste que les difficultés posées par la Turquie continuent de menacer l’efficacité et le caractère dissuasif de l’OTAN. Dans le cas du refus de l’adhésion Suède et Finlandaise, justifié par Ankara par le fait que les deux pays ont mis la Turquie sous sanction (comme tous les membres de l’UE) et donnent asile à des membres du PKK et de l’YPG kurdes, cela ne constitue qu’un nouvel épisode dans les tensions opposant le pays et ses supposés alliés européens. Déjà, en 2019, c’était l’absence de réponse de l’OTAN aux provocations turques en Méditerranée, en Syrie et en Libye, qui avaient amené le président Macron à juger que l’Alliance était en état de mort cérébrale. Si la guerre russo-ukrainienne a considérablement re-dynamisé celle-ci, et si la Turquie a effectivement montré une propension à soutenir Kyiv et à tenter la médiation avec Moscou, cette dernière n’en a pour autant pas cesser ses incursions répétées en zone de controle aérien grecque, et a même annoncé qu’elle entendait bien recevoir la deuxième batterie S-400 commandée à Moscou, ce malgré le durcissement historique des tensions entre l’OTAN et Moscou.

Defense Comittee US Congres Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Le Congrès US aura fort à faire pour arbitrer les demandes turques de modernisation de ses forces aériennes alors qu’Ankara s’oppose à l’évasion de la Finlande et la Suède à l’OTAN

Reste à voir, désormais, comment les revendications des uns et des autres évolueront au fil des négociations. Si Ankara entend effectivement marchander l’adhésion finlandaise et suédoise à l’Alliance Atlantique, il est probable que la solution sera rapidement résolue, au grand damn d’Athènes qui verra son adversaire historique moderniser ses forces aériennes, et grignoter en partie l’avantage technologique dont dispose les forces aériennes helléniques dans cette posture de confrontation. Si, en revanche, Ankara entend obtenir plus que ne peuvent en offrir américains et occidentaux, notamment concernant l’asile des kurdes, il est probable que la situation tendra à se durcir entre le camps occidental et la Turquie, sachant qu’un refu de l’adhésion des deux pays scandinaves à l’alliance sous veto turc affaiblirait considérablement l’OTAN et son image dans toute l’Europe, même si les prochaines élections législatives et présidentielles en Turquie n’auront lieu que dans 12 mois (juin 2023). La meilleure solution serait peut-être d’appliquer les mêmes méthodes que celles employées par les dirigeants autoritaires comme Erdogan ou Poutine, à savoir accepter les revendications turques jusqu’à l’adhésion des 2 pays, puis revenir sur les engagements pris ….

Après la Belgique, la Colombie s’apprête à commander le canon porté CAESAR du français Nexter

Depuis son entrée en service en 2008, le Canon Équipe d’un Système d’ARtillerie de Nexter, ou CAESAR, a rencontré un important succès opérationnel comme commercial. Employé avec succès par les artilleurs français en Afghanistan, en Irak, au Liban et au Mali, et par ses utilisateurs internationaux au Cambodge (Thaïlande) et au Yémen (Arabie saoudite), le système français a démontré d’excellentes qualités opérationnelles, alliant une grande mobilité à une allonge importante (jusqu’à 40 km avec des obus ERFB, plus de 50 km avec obus à propulsion additionnée), ainsi qu’une grande précision même avec des obus non guidés. Ces qualités furent mises à profit par l’artillerie française en Irak pour mener des raids d’artillerie, associant un déplacement rapide en zone hostile, le feu et un retrait tout aussi rapide.

A ce jour, le CAESAR a été choisi par 7 clients internationaux pour plus de 260 unités, dont trois membres de l’OTAN (République Tchèque, Danemark, Belgique), deux en Asie (Thaïlande et Indonésie) et deux en Afrique/Moyen-Orient (Arabie saoudite et Maroc), faisant du système d’artillerie le fer de lance des exportations du groupe Nexter ces dernières années. À noter que la France a également annoncé la livraison d’une douzaine de systèmes prélevés sur son propre inventaire pour soutenir l’effort de défense ukrainien. Le carnet de commande du groupe industriel français spécialisé dans les armements terrestres va bientôt s’étoffer avec une prochaine commande de la Colombie portant sur « au moins quatre pièces » de sorte à constituer une batterie complète, après que le Général Carlos Moreno, commandant en second des forces armées colombiennes, se soit rendu en France la semaine dernière pour négocier les questions budgétaires et contractuelles.

caesar Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Sur le CAESAR, tout est conçu pour la vitesse et la précision, de sorte à compenser l’absence de blindage par une mobilité et une portée efficace hors norme

Même si la commande peut sembler modeste, elle constitue une importante victoire pour Nexter, le CAESAR s’étant imposé après une compétition féroce l’ayant opposé au système Atmos Israélien et au Yavus turc, deux systèmes apparus ces dernières années et reposant sur les mêmes paradigmes innovants ouverts par le CAESAR. Il faut dire que Nexter avait de longue date soutenu son offre devant les autorités Colombiennes, ayant même mené dans le pays une campagne d’essai et de démonstration déjà en 2011, là où les systèmes turcs et israéliens se sont contentés de promesses contractuelles. En outre, à l’occasion de la visite du général Moreno en France, celui-ci a pu observer une campagne d’entrainement des artilleurs français pour se rendre parfaitement compte du potentiel de son futur système.

Il faut dire que le CAESAR a apporté une réelle rupture dans le concept d’artillerie moderne, raison pour laquelle il a depuis été à ce point copié. Avant lui, l’artillerie lourde était décomposée en deux systèmes, les systèmes tractés d’une part, économiques mais vulnérables aux tirs de contrebatterie du fait de leur faible mobilité, et l’artillerie automotrice blindée, comme les AUF1 français, les Paladin américains et les Msta-s russes, associant blindage et mobilité, mais très onéreuse et exposée à des contraintes opérationnelles plus importantes. Le CAESAR, pour sa part, a voulu prendre les avantages des deux systèmes, en posant un canon d’artillerie lourd et précis de 155 mm sur un camion 6×6, et en remplaçant les contraintes du blindage par une plus grande mobilité et une excellente autonomie. Le pari était osé, mais fut rapidement payant, y compris sur les champs de bataille, allant jusqu’à forcer l’admiration des alliés américains en Irak, raison pour laquelle il a depuis été repris par de nombreux pays, allant de la Chine à la Russie, en passant par Israel, l’Inde, le Japon et même les Etats-unis.

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Le Pzh2000 de Krauss Maffei Wegman, partenaire de Nexter au sein du groupe KNDS, est l’antithèse opérationnelle et conceptuelle du CAESAR, étant 3 fois plus lourd que le système français

Au final, le CAESAR est 2,5 mois onéreux à l’achat que le Pzh2000 allemand ou le M109A7 Paladin américain, mais également bien plus mobile avec une vitesse sur route de 100 km/h et de plus de 50 km/h en tout terrain grâce à une masse au combat inférieure à 18 tonnes, soit moins de 6 tonnes par essieu, offrant des capacités tout terrain très performantes. En outre, l’ensemble du système est basé sur la vitesse, y compris pour la mise en batterie, le tir et le retrait, un CAESAR pouvant réaliser ces 3 manoeuvres avec 3 tirs en moins de 3 minutes, soit moins de temps qu’il n’en faut pour un système de contre-batterie pour réagir. Sa faible masse et son encombrement réduit participent également à son succès international, offrant notamment des capacités plus qu’interessantes en terrain difficile comme dans les jungles indonésiennes, thaïlandaises et colombiennes, mais également pour permettre son transport par voie navale ou aérienne.

Même pour sa version lourde sur châssis 8×8, choisie notamment par le Danemark et la République tchèque, et qui propose un blindage renforcé et une capacité de tir sous blindage à l’instar des canons automoteurs blindés traditionnels, le CAESAR se démarque, avec une masse au combat de 32 tonnes identique à celle de l’Archer suédois, mais sur un châssis disposant d’un essieu supplémentaire, de sorte à disposer d’un rapport poids/essieu plus faible et donc de disposer d’une meilleure mobilité. On notera toutefois que la France a préféré commander une nouvelle version 6X6 du CAESAR en 2021, désignée CAESAR NG, comme c’est le cas de la Belgique (9 unités), plutôt que la version 8×8 plus lourde, pour remplacer ses canons automoteurs blindés AUF1 arrivés à obsolescence, ce qui en dit long sur les qualités opérationnelles du système comme de la doctrine attenante.

nexter caesar 8X8 Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Même dans sa version 8×8, le CAESAR conserve une masse relative de 6 tonnes par essieux pour en garantir une excellente mobilité

Au final, le CAESAR est en soit un système d’arme parfaitement représentatif de la doctrine militaire française, privilégiant la mobilité et la manoeuvre au blindage et à la surpuissance, telle qu’appliquée par les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et surtout l’Allemagne. On comprend, dans ces conditions, les difficultés rencontrées par le programme Common Indirect Fire System, ou CIFS, l’un des programmes franco-allemands initiés par Emmanuel Macron et Angela Merkel en 2017, et depuis quasiment à l’arrêt. Même si des besoins convergeant existent, comme dans le cas de l’artillerie à très longue portée basée sur des roquettes balistiques, force est de constater que les doctrines entre la Bundeswehr et l’Armée de terre sont presque à l’opposée les unes des autres, dans le domaine de l’artillerie comme dans celui de la manoeuvre blindée. Difficile, dans ces conditions, de trouver des terrains d’entente, sans nuire lourdement à l’une ou l’autre des postures voire, au pire, aux deux simultanément. Peut-être est-il préférable, comme c’est le cas aujourd’hui, de privilégier la complémentarité de ces deux forces européennes à leur convergence forcée, pour en optimiser l’efficacité opérationnelle, technologique et même budgétaire ?

L’Inde suspend sa commande de 10 hélicoptères navals russes Ka-31

Depuis le début du conflit en Ukraine, il est commun de lire que la Russie fait l’unanimité contre elle dans le monde, à l’exception de quelques dictatures satellites, comme la Syrie ou le Vénézuela. S’il est vrai que lors des votes aux Nations Unis, une majorité de pays ont soutenu les motions contre Moscou, de nombreux pays, et non des moindres, ont préféré d’abstenir plutôt que de prendre position contre la Russie. Ce fut notamment le cas de la Chine, mais également du Brésil, de l’Afrique du Sud et de l’Inde, les 4 autres membres du format BRICS. Si New Delhi n’a ni condamné ni soutenu l’intervention militaire russe en Ukraine, estimant qu’il s’agissait d’une affaire européenne, les autorités indiennes viennent d’annoncer la suspension unilatérale et sans limite de temps des négociations portant sur l’acquisition de 10 hélicoptères navals Kamov Ka-31 auprés de Moscou.

Pour les autorités indiennes, il ne s’agit nullement de prendre position contre Moscou, bien que la décision soit en effet liée à la guerre en Ukraine, ou plutôt à ses conséquences. En effet, selon le communiqué publié, New Delhi estime que désormais, l’industrie aéronautique de défense russe ne serait plus en mesure de respecter les délais requis pour produire et livrer les appareils destinés à armer le nouveau porte-avions Indien, l’INS Vikrant, qui doit entrer en service cet été. Pour Moscou, il s’agit d’un coup dur, du fait du montant du contrat qui représente 520 m$ évidemment, mais également car cela confirme ce qui, jusqu’à présent, n’était que de l’ordre de la rumeur : les sévères sanctions occidentales sur la Russie handicapent désormais lourdement l’industrie de défense du pays.

IAC1 INS Vikrant Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
le Porte-avions INS Vikrant doit entrer en service cet été au sin de l’Indian Navy

Il est vrai que ces dernières semaines, plusieurs informations de ce type avaient circulé, selon lesquelles certaines usines clés de l’industrie de défense russe, tel l’usine de chars Uralvagonzavod de Nijni Taguil, avaient dû stopper leur activité faute de composants, ceux-ci n’étant fabriqués qu’en occident. Il a même été question d’un vaste programme visant à recycler des composants électroniques provenant de l’électroménager usagée pour être en mesure de maintenir certaines lignes de production critiques, comme dans le domaine des munitions de précision utilisées contre l’Ukraine. Pour autant, ces informations émanaient en grande majorité de sources ukrainiennes, et étaient de fait soumises à caution, d’autant que l’enthousiasme ukrainien s’était déjà montré quelque peu excessif dans ces domaines. Le fait qu’un client export de l’industrie de défense russe, en particulier l’Inde qui n’est autre que le plus important pour Moscou, en vienne à annoncer publiquement la suspension des négociations concernant un tel programme, s’avère donc des plus significatifs.

Le problème est d’autant plus pesant que l’hélicoptère naval Ka-31, dérivé du Ka-27, n’est pas, en soit, un appareil de dernière génération, étant entré en service au sein de la Marine russe en 1995. De fait, on pouvait supposer que l’appareil, même modernisé, était moins exposé que certains équipements modernes à l’importation de composants occidentaux, d’autant que Moscou avait clamé haut et fort depuis plusieurs années que son industrie de défense avait été « dé-occidentalisée » suite aux sanctions ayant suivi l’annexion de la Crimée, et qu’elle était de fait capable de produire en parfaite autonomie ces équipements. Et de douter que les équipements les plus modernes, comme les avions de combat Su-34 et Su-35, ou les blindés T-72B3M ou T-90M, puissent continuer à être produits, tout au moins de manière soutenue, dans le présent contexte. Par ailleurs, comme dit précédemment, le fait que New Delhi ait rendu publique cette décision va probablement amener d’autres clients courants ou potentiels de l’industrie de défense russe à évaluer leurs acquisitions selon cette nouvelle perspective.

H225M Caracal Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
L’hélicoptère H225M représente une alternative pour le remplacement des Ka-31 indiens

En revanche, la suspension de la commande russe va probablement ouvrir des opportunités pour l’industrie occidentale, en particulier pour Airbus Hélicoptères avec le NH-90 mais également le Caracal, ainsi que pour Sikorsky et son MH-60 Romeo, des appareils qui évoluent dans la même catégorie de masse et de capacités que le Ka-31. L’américain aura certainement un avantage important alors que la l’Indian Navy a déjà commandé 24 MH-60R pour équiper ses frégates et destroyers. En revanche, les appareils occidentaux, en particulier le Romeo, sont bien plus onéreux que les modèles russes, domaine dans lequel le H225M Caracal français peut se démarquer, avec un prix d’appel bien inférieur au NH-90, MH-60R et autre EH-101 Merlin. Reste à voir si Paris saura se saisir de l’occasion, alors que l’aéronavale indienne semble de plus en plus s’intéresser au Rafale au détriment du Super Hornet.

Taïwan développe aussi un nouveau chasseur inspiré du F-35 américain

Que l’on aime ou pas le chasseur furtif F-35 Lighting II de Lockheed Martin, force est de constater que l’appareil américain inspire de nombreux programmes dans le monde depuis son entrée en service. On connaissait déjà le programme K-FX sud-coréen avec le KF-21 Boramae présenté l’année dernière, le programme TF-X turc qui aujourd’hui rencontre d’importantes difficultés suite aux sanctions occidentales, ou encore le F-X japonais, qui aujourd’hui semble se rapprocher du Tempest britannique. Au delà de la sphère occidentale, il ne fait guère de doute que le Lighting II a inspiré le futur J-35 chinois qui équipera les porte-avions de Pékin, alors que le programme russe Su-75 checkmate à l’avenir incertain a clairement été conçu pour apporter une réponse à l’offre américaine dans ce domaine. Un nouveau programme vient de rejoindre cette liste d’appareils de chasse inspirés du F-35, cette fois sur l’ile de Taïwan, le Next Generation Main Fighter Development Project.

Taïpeï n’avait pas fait mystère de son intention de developper un nouvel appareil de combat, après le F-CK-1 Ching-Kuo dérivé du F-16. Mais jusqu’ici, on ignorait quels axes seraient suivis par les ingénieurs taïwanais. On en sait désormais plus depuis la publication de plusieurs informations par le site web Up Media, et notamment concernant la volonté des autorités de Taiwan de se doter d’un appareil offrant des capacités similaires à celle de l’avion de Lockheed, dont il s’inspirerait au moins autant que le KF-21 sud-coréen. En outre, le programme s’appuiera en grande partie sur des technologies importées (comprendre américaines), en particulier pour ce qui concerne ses turboréacteurs et son avionique. Enfin, Taipei entend que le prototype de l’appareil effectuera son premier roulage avant la fin du mandat de la présidente Tsai Ing-Wen, en mai 2024, et son premier vol l’année suivante.

KF21 presentation Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
La filiation entre le KF-21 Boramae sud-coréen et le F-35 Lighting II américain est évidente

Selon le site web, si initialement les ingénieurs taïwanais pensaient employer une solution basée sur une évolution du turboréacteur Honeywell/ITEC F125-GA-100 qui équipe le F-CK-1, il semble désormais que le General Electric F-414, qui propulse déjà le Super Hornet américain, et qui remporte un important succès international pour équiper de nombreux programmes comme le Gripen E suédois, le KF-21 Boramae sud-coréen ou encore le Tejas Mk2 et l’AMCA indien, soit privilégié. Cela laisse supposer que comme pour le KF-21 et le T-FX, le nouveau chasseur taïwanais sera lui aussi bimoteurs, tout comme l’est déjà le F-CK-1, une configuration mieux adaptée pour les missions aéronavales, et surtout imposée pour propulser un chasseur moyen alors que le surpuissant mais fragile turboréacteur F-135 du F-35 n’est pas proposé à l’export lui non plus. L’avionique serait, quant à elle, en majeure partie fournie par L3 Harris et BAE, alors que le modèle de radar AESA et de l’interface homme machine dans le cockpit seront, quant à eux, annoncés avant la fin du mois.

Pour Taïwan, il est indispensable de remplacer d’ici quelques années ses Mirage 2000-5 ainsi que ses F-16 et F-CK-1, pour continuer à tenir la ligne face à la menace croissante que font peser les forces aériennes et aéronavales chinoises. Si Washington a autorisé l’acquisition de nouveaux F-16 Block 70 Viper pour renforcer les défenses taïwanaises, ni Donald Trump, ni Joe Biden n’ont autorisé Taipei à acquérir de F-35, tant pour ne pas provoquer Pékin que pour limiter les risques de fuites technologiques. Dans le même temps, les européens, et en particulier la France, partenaire traditionnel de l’ile indépendante jusqu’au années 2000 (frégates légères furtives, Mirage 2000..), sont désormais plus que rétifs pour vendre des systèmes d’armes modernes à Taïpei et ainsi risquer de provoquer l’ire economique de Pékin, dans une posture qui n’est pas sans rappeler les hésitations européennes pour soutenir l’Ukraine jusqu’il y a peu. On a pu en apprécier le résultat ….

F CK1 C Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Taiwan aligne 128 F-CK-1 bimoteurs de facture locale, le chasseur le plus lourd de son inventaire

De fait, contrairement à la Corée du Sud ou au Japon, pour qui le developpement d’un chasseur local est avant tout une question de soutenabilité budgétaire et technologique de l’effort de défense, la volonté de Taiwan, qui n’a pas été autorisée à acquérir de F-35 ni même de Rafale/Typhoon/Gripen E, de developper son propre avion de combat de nouvelle génération répond à un besoin opérationnel impératif. On notera à ce titre que c’est également le cas pour ses programmes de frégates, corvettes et de sous-marins, qui font aussi l’objet d’un refus poli mais gêné de la part des européens, ne laissant que les Etats-Unis pour oser défier effectivement Pékin sur ces sujets. Avec l’arrivée de chasseurs de nouvelle génération chinois, comme le J-20 déjà en service, et le prometteur J-35 embarqué, il est en effet indispensable pour Taïpei de developper un programme propre susceptible de passer sous le seuil de réaction de Pékin tout en permettant à Washington d’effectuer des transferts de technologies et des livraisons de composants offrants une plus-value opérationnelle suffisante pour contenir la menace chinoise.

Reste que la multiplication de ce type de programme ces dernières années risque fort de saturer un marché déjà largement concurrentiel et relativement réduit, même en tenant compte de la croissance probable des besoins en raison de l’augmentation des tensions mondiales. A l’instar du marché des avions d’entrainement et d’attaque saturé d’offres et ne permettant à aucun constructeur de véritablement d’imposer, le segment des chasseurs moyens risque lui aussi, d’ici quelques années, de voir une profusion d’offres ne permettant pas à quiconque de pérenniser son propre marché, alors même qu’aujourd’hui déjà, le pourtant très performant Gripen E/F de Saab peine à trouver des déboucher face au F-16 Block 70 et au Rafale, que le très economique JF-17 sino-pakistanais ne s’exporte qu’au compte-gouttes, et que le Mig-35 a aligné les échecs. Dans ces conditions, s’appuyer sur des technologies importées pour ce qui concerne les technologies clés (propulseur, radar, avionique, armement ..) représente probablement l’approche la plus efficace pour un developpement rapide et peu onéreux, sans espérer un positionnement export étendu.

Un nouveau modèle de sous-marin nucléaire d’attaque identifié en Chine

Si toute l’attention médiatique est aujourd’hui focalisée sur les évolutions du conflit en Ukraine, les autres théâtres d’opération et d’affrontement potentiel continuent d’évoluer. C’est particulièrement le cas en Asie et sur le théâtre indo-pacifique, alors que les annonces se succèdent concernant le développement de nouvelles capacités à Taïwan, au Japon, en Corée du Sud et surtout en République Populaire de Chine.

Parmi ces révélations, la diffusion d’une photo satellite montrant un nouveau modèle de sous-marin nucléaire d’attaque chinois mérite une attention toute particulière, tant la dimension sous-marine constituera, dans les années à venir, un espace de confrontation majeur entre Pékin et le camp occidental.

Jusqu’il y a peu, les submersibles militaires chinois étaient considérés de moindre qualité, et avaient la réputation d’être moins performants et surtout beaucoup plus bruyants que leurs homologues occidentaux les plus modernes.

Mais avec l’arrivée des sous-marins conventionnels à propulsion anaérobie Type 039A de la classe Yuan (2006), puis des évolutions du sous-marin nucléaire d’attaque Type 093A de la classe Shang II (2015), avaient montré que Pékin avait rapidement comblé son retard dans ce domaine.

Le nouveau cliché satellite de Planet Labs (En illustration principale) montre quant à lui un nouveau modèle de SNA en cours de finition aux chantiers navals Huludao dans le nord de la Chine.

Même si la qualité de l’image n’est pas optimale, deux aspects marquent toutefois une profonde évolution concernant la Classe Shang II, avec l’ajout de systèmes de lancement verticaux ainsi que d’une hélice propulsive carénée de type pump-jet, laissant supposer des capacités opérationnelles et acoustiques encore améliorées pour la flotte sous-marine chinoise.

Sous-marin nucléaire d'attaque Type 093A classe Shang II
La Chine aligne à ce jour 6 SNA Type 093 sont 4 Type 093A. Chaque sous-marin a des caractéristiques et des modifications propres, laissant supposer que la classe Shang I/II est tout autant une classe opérationnelle que de maturation technologique

L’aspect général du nouveau sous-marin, ainsi que sa longueur évaluée à 110 mètres, laisse penser qu’il ne s’agit pas d’une nouvelle classe de SNA chinois, mais d’une évolution significative du Type 093A Shang II.

Pour autant, les deux évolutions observées dépassent de loin les évolutions itératives observées sur chacun des Shang II observés à ce jour, laissant supposer qu’il s’agit effectivement d’une évolution majeure du modèle, et donc probablement d’une nouvelle classe, identifiée temporairement comme Type 093B, et non de la nouvelle classe de SNA Type 095 en cours de conception.

On peut aisément imaginer que cette nouvelle classe constituera une nouvelle étape dans l’évolution rapide des savoir-faire et des technologies sous-marines des chantiers navals chinois.

L’ajout de ce qui semble être 18 silos de lancement verticaux offre aux nouveaux sous-marins chinois des capacités tant en termes de sous-marin nucléaire d’attaque, comme les Astute britanniques et les Suffren français, et les sous-marins nucléaires lance-missiles, comme la classe Iassen russe.

Cette solution a notamment été retenue également par les États-Unis avec les sous-marins nucléaires de la classe Virginia équipés, eux aussi, de 12 silos verticaux. Ces silos permettent d’embarquer et de mettre en œuvre des missiles de croisière offrant des capacités de frappe vers la terre, mais aussi des modèles spécialisés pour la destruction de cibles de surface, permettant au submersible de mener des frappes de saturation visant à dépasser les capacités de défense anti-missile de la cible visée.

Sous-marin nucléaire d'attaque Virginia
Les SNA classe Virginia de l’US Navy disposent de 12 VLS pour mettre en oeuvre des missiles de croisière de type Tomahawk.

Le pump-jet est également une technologie mise en œuvre sur les modèles de sous-marins modernes en occident. Il s’agit d’une hélice propulsive entièrement carénée, permettant de considérablement diminuer les bruits générés par la cavitation de l’hélice à grande vitesse. En effet, lorsqu’une hélice tourne rapidement sous l’eau, elle crée une dépression localisée sur l’extrados de l’hélice, entrainant la vaporisation immédiate de l’air dissoute.

Ces bulles, également appelées cavitation, génèrent une signature acoustique importante facilitant la localisation du submersible à l’aide de sonar passif. Pour contrer la cavitation, plusieurs techniques ont jusqu’ici été employées.

La première, et la plus évidente, consistait à tenter d’améliorer la forme de l’hélice pour obtenir un meilleur rendement avec une vitesse de rotation plus faible, permettant au sous-marin, mais également aux frégates et corvettes spécialisées dans la lutte anti-sous-marine (ASM), d’évoluer plus rapidement sans générer ce phénomène.

C’est la raison pour laquelle, par exemple, les FREMM françaises de la classe Aquitaine utilisent une hélice à pas fixe, optimisée pour la mission ASM, et non une hélice à pas variable comme les FREMM italiennes, optimisée pour la vitesse.

La seconde solution est purement physique, et consiste à faire évoluer le sous-marin à grande profondeur. En effet, plus le sous-marin évolue bas, plus la pression de l’eau est grande, et moins la dépression générée par les hélices sont susceptibles de générer des phénomènes de cavitation.

Malheureusement, si lors d’un transit, un sous-marin nucléaire peut effectivement évoluer à grande profondeur et à grande vitesse, l’essentiel de son activité opérationnelle se situe plus près de la surface, notamment pour pouvoir détecter les navires et submersibles adverses évoluant en surface ou au-dessus de la thermocline.

C’est là que le Pump-jet apporte une grande plus-value. En carénant l’hélice, ce système permet de modifier les flux d’eau et la pression dynamique en son sein comme si le sous-marin évoluait à plus grande profondeur, de sorte à ralentir l’apparition des phénomènes de cavitation, mais également de contenir la propagation sonore lorsque celle-ci intervient, offrant une signature acoustique bien plus discrète au sous-marin.

Huludao Shipyard Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Le chantier naval de Huludao dans la province de Liaoning a été modernisé et étendu ces dernières années pour accroitre et moderniser les capacités de production de sous-marins chinois

Au-delà de ce cliché déjà fort intéressant, la couverture photographique diffusée par Planet Lab permet également d’observer la nouvelle infrastructure industrielle construite à Huludao ces dernières années, précisément pour concevoir et construire les nouveaux sous-marins à propulsion nucléaire de la Marine de l’Armée Populaire de Libération.

Ces nouveaux bâtiments, aisément identifiables sur les clichés, laissent en effet supposer que Pékin dispose désormais d’une capacité de production largement accrue dans ce domaine, et comparable à celle dont disposent les États-Unis dans ce domaine.

De fait, il faut s’attendre à ce que dans les années à venir, le nombre de sous-marins à propulsion nucléaire évoluant sous drapeau chinois va rapidement croitre, comme c’est aujourd’hui le cas avec les frégates et destroyers.

Et si les performances des nouveaux SNA et SNLE chinois continuent d’évoluer, comme ce cliché le laisse supposer, il est probable que sous peu, Pékin disposera effectivement d’une flotte sous-marine à parité avec l’US Navy.

Top Gun : Maverick, le film tant attendu par les forces aériennes occidentales

Il est rare qu’un film ait eu à lui seul un impact aussi significatif sur toute une génération de jeunes pilotes. De sa sortie en 1986, et aujourd’hui encore, l’immense majorité des candidats aux sélections de pilote militaire aux Etats-Unis, en Europe et plus globalement, dans l’ensemble du monde occidental, a été plus qu’influencée par ce film. Alors que les forces aériennes occidentales font face, pour la plupart et depuis plusieurs années, à un important déficit de candidats, l’arrivée prochaine de Top Gun : Maverick représente donc un espoir important et non dissimulé, alors même que les tensions dans le monde ne cessent de croitre, et que la composante aérienne des forces devient de plus en plus technique et requiert des profils en conséquence, et que les campagnes de recrutement peinent à y répondre ces dernières années.

En 1991, lorsque je participais aux sélections du cours pilote de l’aéronautique navale française, il n’y avait pas un candidat qui ne connaissait par coeur le film, et qui ne se rêvait pas à bord d’un de ces appareils. Plus tard, après avoir passé les sélections en vol et rejoint le tronc commun avec l’Armée de l’Air à Cognac, tous les élèves pilotes arboraient des blousons bardés de patch et des lunettes de soleil à peine mettaient ils le pied hors de la base. Quelques années plus tard, une fois en unité opérationnelle, je constatais que l’influence de film dépassait largement le petit milieu des pilotes, et avait touché l’ensemble des nouveaux venus, qu’ils soient volant ou pas, dans l’aéronautique navale, comme dans l’Armée de l’Air. Le phénomène fut d’ailleurs le même partout en Europe et aux Etats-Unis, avec un afflux massif et constant de candidats pour l’ensemble des spécialités liées à l’aéronautique pendant de longues années.

skyfighter 2011 Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
Le film chinois Sky Fighter de 2011 reprend de nombreux codes issus de Top Gun (1986), y compris dans la trame scénaristique

Pour la Marine Nationale comme pour l’Armée de l’Armée de l’Air, l’US Air Force et l’US Navy, ce film avait en effet constitué la meilleur campagne de promotion et de recrutement jamais organisée, et ce d’autant que son efficacité perdura pendant plus d’une décennie, et comme dit en introduction, continue même de se faire ressentir plus de 35 ans après sa sortie dans les salles obscures. D’ailleurs, de nombreuses armées ont tenté de reproduire la méthode avec d’autres films, que ce soit la Russie avec le récent Nebo (2021), la Chine avec Sky Fighter (2011), la Corée du Sud avec Windfighter (2013) ou la France avec les Chevaliers de Ciel (2005). Au delà du seul sujet des avions de chasse, les armées ont a plusieurs reprises soutenues des projets cinématographiques précisément pour susciter des vocations, comme ce fut le cas pour l’US Navy avec le film de sous-marins Hunter-Killer de 2018, mais aussi au travers de series télévisées, comme The Last Ship (2014-2018) et JAG (1995-2005) pour l’US Navy, ou l’excellent Sea Patrol (2007-2011) de la Marine Royale Australienne, sans oublier les deux séries françaises Les Chevaliers du Ciel (1967-1970 et 1988).

Si ces films et séries ont toujours constitué un support de choix pour soutenir les recrutements, tant du point de vue quantitatif que qualitatif, l’arrivée cette année de Top Gun : Maverick est, pour sa part, plus qu’attendue par les responsables RH des grandes forces aériennes occidentales. Ainsi, l’US Air Force fait aujourd’hui face à un déficit de plus de 1.650 pilotes, alors même que son format a été sensiblement réduit ces dernières années. D’ailleurs, celle-ci a choisi de positionner un encart publicitaire de 60 secondes avant toutes les diffusions de Top Gun : Maverick aux Etats-Unis, au slogan que l’Air est son domaine exclusif (ce qu’en tant qu’ancien pilote de l’aéronavale je trouve des plus contestables, mais passons). Au delà des Etats-Unis, l’ensemble des forces aériennes occidentales se sont mises en ordre de bataille afin d’exploiter au mieux les bénéfices potentiels consécutifs de la sortie de ce film, avec l’ambition affichée de reproduire le phénomène de la fin des années 80. Il suffit d’observer les campagnes publicitaires attenantes au film sur Internet et dans les médias pour s’en convaincre.

Capture decran 2022 05 13 a 17.10.47 Actualités Défense | Conflit Russo-Ukrainien | Drones de combat
La Marine Nationale se positionne activement autour du film Top Gun : Maverick, y compris sur les sites spécialisés

Et elles pourraient bien parvenir ! En effet, non seulement le film est de toute évidence très attendu, celui-ci étant depuis près de deux ans dans le classement des films les plus attendus sur les diverses plate-formes spécialisées, mais à en croire les quelques journalistes ayant pu voir le film en avant-première, Top Gun : Maverick serait aussi parfaitement réussi, servi par un Tom Cruise très convainquant, un scénario haletant et des prises de vue de très grandes qualités. Pour autant, il faudra attendre les réactions du public après les premières semaines de projection pour se faire une idée sur le succès ou non du film au delà du box-office, et donc sur ses effets potentiels sur les recrutements des forces armées, en gardant à l’esprit l’échec que fut, par exemple, le film Hunter-Killer qui n’enregistra que 31 millions de $ de recettes en salle, dont seulement 16 m$ aux Etats-Unis/Canada, alors que le film couta 41 m$, et en dépit du soutien très appuyé de l’US Navy lors de sa sortie. En France, le film « Le Chant du Loup », lui aussi activement soutenu par la Marine Nationale, subit un sort sensiblement similaire, même s’il parvint à équilibrer son budget de 22 m$ par ses propres recettes en salle.